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02/07/2013 | FRANCE | N°12VE03187

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 1ère chambre, 02 juillet 2013, 12VE03187


Vu la requête, enregistrée le 24 août 2012, présentée pour Mme A...B..., demeurant..., par Me Bettache, avocat ;

Mme B...demande à la Cour :

1° d'annuler le jugement n° 1106651 du 25 juillet 2012 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 24 mars 2011 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de lui délivrer un certificat de résidence, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai d'un mois et a fixé le pays de destination ;

2° d'annuler, pour excès de

pouvoir, cet arrêté ;

3° d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de lui délivre...

Vu la requête, enregistrée le 24 août 2012, présentée pour Mme A...B..., demeurant..., par Me Bettache, avocat ;

Mme B...demande à la Cour :

1° d'annuler le jugement n° 1106651 du 25 juillet 2012 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 24 mars 2011 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de lui délivrer un certificat de résidence, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai d'un mois et a fixé le pays de destination ;

2° d'annuler, pour excès de pouvoir, cet arrêté ;

3° d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de lui délivrer un certificat de résidence dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, et, à titre subsidiaire d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de réexaminer sa situation dans le même délai et sous la même astreinte ;

4° de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à Me Bettache, avocat de la requérante, sur le fondement des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

Mme B...soutient, en premier lieu, que la décision de refus de séjour est insuffisamment motivée au regard des exigences de la loi du 11 juillet 1979 et de la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil dans son article 12 ; qu'elle ne fait aucune appréciation pertinente des pièces communiquées par la requérante et que cette liste n'est pas reproduite dans la décision ; en deuxième lieu, que le préfet n'a pas justifié de la compétence de l'auteur de l'acte et qu'il doit être regardé comme adopté par une autorité incompétente ; en troisième lieu, que le préfet a entaché sa décision d'erreur de fait puisque son enfant est scolarisé à l'école maternelle et sera scolarisé à l'école primaire ; que cette erreur a eu une influence sur le sens de la décision du préfet ; en quatrième lieu que les stipulations du § 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ont été méconnues ; que la présence des deux parents auprès de l'enfant est essentielle et que le père voit son fils de manière quasi quotidienne ; que par l'effet du mariage de leur frère et soeur respectifs, les époux restent liés ainsi que l'enfant avec les deux familles ; que l'enfant ne connaît pas l'Algérie ; que cette décision méconnaît les dispositions du 5° de l'article 6 de l'accord franco-algérien et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'elle vit depuis près de neuf ans en France chez sa belle-soeur avec son fils et apprend le français ; qu'en l'espèce, l'atteinte à son droit issu de l'article 8 est disproportionnée au regard des buts poursuivis, puisque la maîtrise des flux migratoires ne devrait pas obliger Mme B...à vivre dans la clandestinité ; que le préfet de la Seine-Saint-Denis a entaché son arrêté d'une erreur manifeste d'appréciation des conséquences de cette mesure sur sa situation personnelle et sur celle de son fils ; qu'elle souhaite travailler et rester en France, ce qui permettrait à son fils d'être élevé par ses deux parents et de maintenir ses liens avec son père, qui est résident algérien en France ; que la décision d'éloignement est entachée d'incompétence car le préfet n'a pas pris de nouvel arrêté habilitant ses subordonnés à prendre cette décision à la suite de la réforme de décembre 2006 ; que cette décision n'est pas motivée alors que de la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil dans son article 12 prévoit que ces décisions doivent être motivées en droit et en fait ; que le I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qui précise que les obligations de quitter le territoire français n'ont pas à être motivées est contraire aux objectifs de la directive ; que l'obligation de quitter le territoire se devait d'autant plus d'être motivée qu'elle ne prolonge pas le délai de départ volontaire d'un mois au regard de la situation personnelle de la requérante, présente en France depuis 8 ans, dont l'enfant est né et scolarisé en France ; que la décision de refus de séjour étant illégale, la décision d'éloignement est dépourvue de base légale ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la convention internationale relative aux droits de l'enfant, signée à New York le 26 janvier 1990 ;

Vu l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique et notamment son article 37 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 18 juin 2013 :

- le rapport de Mme Belle, premier conseiller,

- les conclusions de Mme Dioux-Moebs, rapporteur public,

- et les observations de Me Bettache ;

1. Considérant que MmeB..., ressortissante algérienne née le 6 mai 1975, relève appel du jugement du 25 juillet 2012 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 24 mars 2011 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de lui délivrer un certificat de résidence et l'a obligée à quitter le territoire français en fixant le pays de renvoi ;

Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens :

2. Considérant qu'aux termes du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention relative aux droits de l'enfant susvisée : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale " ; qu'il résulte de ces stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant ;

3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le père également algérien de l'enfant de MmeB..., né en France en 2006 et scolarisé en Seine Saint Denis, dispose d'une carte de résident de 10 ans et réside également en Seine-Saint-Denis dans la même commune que la mère de l'enfant ; qu'il a obtenu, à l'issue du jugement de divorce, l'autorité conjointe avec son épouse sur l'enfant et qu'il atteste s'occuper de celui-ci et vouloir maintenir le lien de parenté avec celui-ci, alors que l'enfant a, par ailleurs en France ses grands-parents paternels, son oncle paternel et son oncle et sa tante maternels ; qu'ainsi, dans les circonstances particulières de l'espèce, alors que l'enfant a toujours résidé en France et qu'il y a la majorité de membres de sa famille dont son père, Mme B...est fondée à soutenir qu'en refusant de lui délivrer un titre de séjour, le préfet de la Seine-Saint-Denis n'a pas porté l'attention requise à l'intérêt supérieur de son enfant ; que, par suite, la décision en litige est entachée d'illégalité et doit être annulée ;

4. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme B...est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions aux fins d'injonction sous astreinte :

5. Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution " ;

6. Considérant qu'eu égard aux motifs d'annulation de l'arrêté attaqué, et en l'absence de changement des circonstances de fait, le présent arrêt implique nécessairement que le titre de séjour sollicité soit délivré à Mme B...; que, dès lors, il y a lieu d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de délivrer à MmeB..., dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt, une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'assortir cette injonction d'une astreinte ;

Sur les conclusions de Mme B...tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :

7. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me Bettache, avocat de MmeB..., renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de condamner l'Etat à payer à Me Bettache une somme de 1 500 euros ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1106651 rendu par le Tribunal administratif de Montreuil le 25 juillet 2012 et l'arrêté du 24 mars 2011 du préfet de la Seine-Saint-Denis sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet de la Seine-Saint-Denis de délivrer à MmeB..., dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt, une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale ".

Article 3 : L'Etat versera à Me Bettache une somme de mille cinq cents euros en application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve qu'il renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme B...est rejeté.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 12VE03187
Date de la décision : 02/07/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. SOUMET
Rapporteur ?: Mme Laurence BELLE VANDERCRUYSSEN
Rapporteur public ?: Mme DIOUX-MOEBS
Avocat(s) : BETTACHE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2013-07-02;12ve03187 ?
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