Vu la requête, enregistrée le 30 juillet 2012, présentée pour M. A...B..., demeurant..., par Me Tourné, avocat ; M. B... demande à la Cour :
1° d'annuler le jugement n° 1111435 en date du 31 mai 2012 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 26 octobre 2011 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a décidé son expulsion du territoire français ;
2° d'annuler pour excès de pouvoir ledit arrêté ;
3° d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de lui restituer sa carte de séjour, sous astreinte de 500 euros par jour de retard, à compter d'un délai d'un mois suivant la notification de l'arrêt à intervenir ;
4° de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Il soutient que :
- le jugement attaqué est insuffisamment motivé ;
- l'arrêté attaqué a été pris par une autorité incompétente dès lors que, relevant des cas visés aux 1° et 2° de l'article L. 521-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le ministre de l'intérieur avait seul qualité pour ordonner son expulsion du territoire français ;
- le bulletin de notification d'une procédure d'expulsion en date du 28 septembre 2011, le convoquant devant la commission prévue par l'article L. 522-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, a été signé par une autorité incompétente ;
- cet arrêté est insuffisamment motivé ;
- le préfet a entaché son arrêté d'une erreur d'appréciation et d'une erreur de droit en considérant qu'il constituait une menace grave pour l'ordre public ;
- cet arrêté méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu la loi du 11 juillet 1979 modifiée ;
Vu le code de justice administrative ;
Vu la décision du président de formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 11 juin 2013, le rapport de Mme Boret, premier conseiller ;
1. Considérant que M.B..., ressortissant tunisien, né le 1er mai 1978, a fait l'objet d'un arrêté d'expulsion en date du 26 octobre 2011 du préfet de la Seine-Saint-Denis ; que l'intéressé relève appel du jugement en date du 31 mai 2012 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Considérant que le jugement attaqué en date du 31 mai 2012 du Tribunal administratif de Montreuil s'est expressément prononcé sur la menace à l'ordre public que représentait la présence en France de M. B...; que par suite, le moyen tiré de l'omission à statuer soulevé par M. B...doit être rejeté ;
Sur la légalité de l'arrêté attaqué :
3. Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des termes mêmes de l'arrêté attaqué que le préfet de la Seine-Saint-Denis, après avoir visé notamment les articles L. 521-1 et R. 522-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, a indiqué que M. B...s'est rendu coupable au cours de l'année 2005, sur le territoire national, de détention en bande organisée d'un dépôt d'armes et de munitions de 1ère et 4ème catégories, de financement d'une entreprise terroriste, de détention de produits et d'engins explosifs, de recel de documents officiels provenant d'un vol à main armée et de participation à une association de malfaiteurs en vue de la préparation d'actes de terrorisme ; qu'il mentionne en outre que l'ensemble de ces faits ont été commis intentionnellement en relation avec une entreprise collective ayant pour but de troubler gravement l'ordre public par l'intimidation ou la terreur et qu'en raison de l'ensemble de son comportement, sa présence en France constituait une menace grave pour l'ordre public ; qu'ainsi, cet arrêté comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement et répond aux exigences de motivation prévues par la loi susvisée du 11 juillet 1979 ;
4. Considérant, en deuxième lieu, que M. Arnaud Cochet, secrétaire général de la préfecture de la Seine-Saint-Denis et signataire du bulletin de notification de la procédure d'expulsion en date du 28 septembre 2011, bénéficiait d'une délégation de signature du préfet de la Seine-Saint-Denis en date du 7 mars 2011, régulièrement publiée au bulletin d'informations administratives du même jour, à l'effet de signer tous arrêtés, décisions, circulaires, rapports, correspondances et documents à l'exception des actes de réquisition du comptable et des arrêtés de conflit ; que, dès lors, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur du bulletin de notification de la procédure d'expulsion, qui manque en fait, doit être écarté ;
5. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article L. 521-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sous réserve des dispositions des articles L. 521-2, L. 521-3 et L. 521-4, l'expulsion peut être prononcée si la présence en France d'un étranger constitue une menace grave pour l'ordre public " ; qu'aux termes de l'article L. 521-2 du même code : " Ne peuvent faire l'objet d'une mesure d'expulsion que si cette mesure constitue une nécessité impérieuse pour la sûreté de l'Etat ou la sécurité publique et sous réserve que les dispositions de l'article L. 521-3 n'y fassent pas obstacle : 1° L'étranger, ne vivant pas en état de polygamie, qui est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France, à condition qu'il établisse contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins un an ; / 2° L'étranger marié depuis au moins trois ans avec un conjoint de nationalité française, à condition que la communauté de vie n'ait pas cessé depuis le mariage et que le conjoint ait conservé la nationalité française ; (...) Par dérogation aux dispositions du présent article, l'étranger visé aux 1° à 5° peut faire l'objet d'un arrêté d'expulsion en application de l'article L. 521-1 s'il a été condamné définitivement à une peine d'emprisonnement ferme au moins égale à cinq ans " ; qu'aux termes de l'article R. 522-1 dudit code : " L'autorité administrative compétente pour prononcer l'expulsion d'un étranger en application de l'article L. 521-1, après accomplissement des formalités prévues à l'article L. 522-1, est le préfet de département et, à Paris, le préfet de police " ; qu'aux termes de l'article R. 522-2 du même code : " L'autorité administrative compétente pour prononcer l'expulsion d'un étranger en application des articles L. 521-2 ou L. 521-3, ainsi qu'en cas d'urgence absolue, est le ministre de l'intérieur " ;
6. Considérant, d'une part, qu'il résulte de ces dispositions qu'un étranger qui a été condamné définitivement à une peine d'emprisonnement ferme au moins égale à cinq ans peut être expulsé selon la procédure prévue à l'article L. 521-1 précité ; que, dès lors, la compétence pour prendre l'arrêté d'expulsion appartient, en application de l'article R. 522-1 précité, au préfet de département ; qu'il ressort des pièces du dossier, notamment de l'arrêt de la Cour d'assises de Paris en date du 28 janvier 2011, que M. B... a été condamné à une peine de cinq années d'emprisonnement ; qu'ainsi, et à supposer même qu'il entrerait dans l'un des cas visés par l'article L. 521-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le requérant n'est pas fondé à soutenir que le préfet de la Seine-Saint-Denis n'avait pas compétence pour ordonner son expulsion du territoire français ; que par suite, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de la décision attaquée doit être écarté ;
7. Considérant, d'autre part, que si les infractions pénales commises par un étranger ne sauraient, à elles-seules, justifier légalement une mesure d'expulsion, il ressort des pièces du dossier, notamment du " rapport social " établi le 2 septembre 2011 par le service pénitentiaire d'insertion et de probation de la Seine-Saint-Denis sur la situation personnelle et familiale de l'intéressé et son comportement en détention ainsi que du procès-verbal en date du 19 octobre 2011 de la commission relative aux expulsions, que le préfet a examiné l'ensemble des éléments relatifs au comportement de M. B... et aux différents aspects de sa situation pour déterminer si, après sa condamnation à cinq années d'emprisonnement, sa présence sur le territoire français constituait une menace grave pour l'ordre public ; qu'ainsi le moyen tiré d'une erreur de droit manque en fait ;
8. Considérant, enfin, que si M. B... soutient d'une part que le comportement qui lui est reproché est relatif à des faits anciens, d'autre part que, marié à une ressortissante française depuis 2008 et père de deux enfants, il présente des garanties de réinsertion et enfin que sa condamnation pénale n'a pas été assortie d'une mesure d'interdiction définitive du territoire français, il ressort toutefois des pièces du dossier que l'intéressé a été condamné à cinq années d'emprisonnement pour avoir détenu en bande organisée un dépôt d'armes et de munitions, financé une entreprise terroriste, détenu sans autorisation des produits ou des engins explosifs et, enfin, participé à une association de malfaiteurs en vue de la préparation d'actes de terrorisme ; qu'ainsi, eu égard à la gravité particulière des faits commis et au comportement d'ensemble de l'intéressé, le préfet de la Seine-Saint-Denis n'a commis d'erreur d'appréciation en estimant que la présence de M. B... sur le territoire français constituait une menace grave pour l'ordre public ;
9. Considérant, en dernier lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales: " 1°) Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2°) Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;
10. Considérant que si M. B... soutient qu'il est marié depuis trois ans à une ressortissante française, qu'il participe à l'éducation de ses deux enfants de nationalité française et qu'il a entrepris les démarches en vue d'obtenir un emploi, il ressort des pièces du dossier que l'intéressé a été condamné, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, à cinq ans d'emprisonnement du chef, notamment, de sa participation à une association de malfaiteurs en vue de la préparation d'actes de terrorisme ; que le préfet de la Seine-Saint-Denis n'a pas porté, dans les circonstances de l'espèce, et compte tenu de la particulière gravité des faits commis, au droit au respect de la vie privée et familiale de l'intéressé une atteinte disproportionnée à ce qui était nécessaire à la défense de l'ordre public ; que par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté ;
11. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte et celles fondées sur l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
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N° 12VE02848 2