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04/04/2013 | FRANCE | N°12VE00753

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 5ème chambre, 04 avril 2013, 12VE00753


Vu la requête, enregistrée le 24 février 2012, présentée pour M. A... C..., demeurant..., par Me Sebag, avocat ;

M. C... demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1104281 en date du 26 janvier 2012 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 27 avril 2011 du préfet de la Seine-Saint-Denis refusant de renouveler son titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français et fixant le pays de destination ;

2°) d'annuler cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Sein

e-Saint-Denis de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour sous astreinte de 100 eu...

Vu la requête, enregistrée le 24 février 2012, présentée pour M. A... C..., demeurant..., par Me Sebag, avocat ;

M. C... demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1104281 en date du 26 janvier 2012 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 27 avril 2011 du préfet de la Seine-Saint-Denis refusant de renouveler son titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français et fixant le pays de destination ;

2°) d'annuler cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour sous astreinte de 100 euros par jour de retard, à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que :

- le signataire était incompétent ;

- l'arrêté est insuffisamment motivé ;

- l'avis du médecin inspecteur de santé publique est incomplet en l'absence d'indication sur son aptitude à voyager ;

- l'arrêté méconnaît les dispositions de l'article L. 313-11, 7° du code d'entrée et de séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme ;

- l'arrêté méconnaît les dispositions de l'article L. 313-14 du code d'entrée et de séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- l'arrêté méconnaît les dispositions de l'article L. 313-11, 11° du code d'entrée et de séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme ;

- l'arrêté méconnaît l'article L. 313-11, 9° du code d'entrée et de séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le préfet de la Seine-Saint-Denis et le Tribunal administratif de Montreuil ont commis une erreur manifeste d'appréciation de sa situation ;

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 21 mars 2013 :

- le rapport de Mme Mégret, rapporteur ;

- les conclusions de Mme Courault, rapporteur public

- les observations de Me B...substituant Me Sebag, pour M C...;

1. Considérant que M.C..., ressortissant marocain né en 1973, relève régulièrement appel du jugement n°1104281 en date du 26 janvier 2012 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 27 avril 2011 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de renouveler son titre de séjour temporaire en qualité d'étranger malade, l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination ;

2. Considérant que M. C...a été victime d'un accident du travail en 2005 qui a entraîné des brûlures au 2ème et 3ème degré et à l'issue duquel il a gardé des séquelles fonctionnelles et des troubles psychiques ; qu'à ce titre, il s'est vu attribué un taux d'incapacité de 62% et a bénéficié d'une part, d'une rente d'accident du travail, et, d'autre part, de plusieurs titres de séjour en qualité d'étranger malade ;

Sur la légalité du refus de titre de séjour :

3. Considérant, en premier lieu, qu'il y a lieu d'écarter, par adoption des motifs retenus par les premiers juges, qui ne sont pas utilement critiqués en appel, les moyens tirés de l'incompétence de l'auteur de l'acte et de l'insuffisance de motivation de l'arrêté contesté, du défaut d'examen de la situation personnelle de M.C..., de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

4. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors applicable : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : / (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin inspecteur de santé publique compétent au regard du lieu de résidence de l'intéressé ou, à Paris, du médecin, chef du service médical de la préfecture de police. (...) ", qu'aux termes de l'article R. 313-22 du même code : " Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour temporaire au vu d'un avis émis par le médecin inspecteur départemental de santé publique compétent au regard du lieu de résidence de l'intéressé et, à Paris, par le médecin, chef du service médical de la préfecture de police. / L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin agréé ou un médecin praticien hospitalier et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de traitement dans le pays d'origine de l'intéressé " ;

5. Considérant, d'une part, que l'arrêté interministériel du 8 juillet 1999, pris pour l'application de ces dispositions, impose au médecin inspecteur de santé publique d'émettre un avis précisant si l'état de santé de l'étranger nécessite ou non une prise en charge médicale, si le défaut de cette prise en charge peut ou non entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, si l'intéressé peut ou non bénéficier effectivement d'un traitement médical approprié dans son pays, quelle est la durée prévisible du traitement, et si son état de santé de lui permet de voyager sans risque vers le pays de renvoi ;

6. Considérant, d'autre part, qu'il appartient à l'autorité administrative, lorsqu'elle envisage de refuser la délivrance d 'un titre de séjour à un étranger qui en fait la demande au titre des dispositions du 11° de l'article L. 313-11, de vérifier, au vu de l'avis émis par le médecin mentionné à l' article R. 313-22 précité, que cette décision ne peut avoir de conséquences d'une exceptionnelle gravité sur l'état de santé de l'intéressé et, en particulier, d'apprécier, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, la nature et la gravité des risques qu'entraînerait un défaut de prise en charge médicale dans le pays dont l'étranger est originaire ; que lorsque le défaut de prise en charge risque d'avoir des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur la santé de l'intéressé, l'autorité administrative ne peut légalement refuser le titre de séjour sollicité que s'il existe des possibilités de traitement approprié de l'affection en cause dans son pays d'origine ; que si de telles possibilités existent mais que l'étranger fait valoir qu'il ne peut en bénéficier, soit parce qu'elles ne sont pas accessibles à la généralité de la population, eu égard notamment aux coûts du traitement ou à l'absence de modes de prise en charge adaptés, soit parce qu'en dépit de leur accessibilité, des circonstances exceptionnelles tirées des particularités de sa situation personnelle l'empêcheraient d'y accéder effectivement, il appartient à cette même autorité, au vu de l'ensemble des informations dont elle dispose, d'apprécier si l'intéressé peut ou non bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans son pays d'origine ;

7. Considérant que si l'avis médical du 20 juillet 2010 du médecin inspecteur de santé publique n'indique pas si l'état de santé de M. C...lui permet de voyager sans risque vers le pays de renvoi, il ne ressort pas des pièces du dossier ni des certificats produits par le requérant que celui-ci serait dans l'incapacité de supporter ce voyage ; que, par suite, l'absence de cette mention n'entache pas d'illégalité l'arrêté contesté ;

8. Considérant que M.C..., qui souffre des conséquences physiques et psychologiques provenant de l'accident du travail dont il a été victime, soutient que son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut aurait pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et dont il ne peut bénéficier au Maroc en raison des insuffisances du système de santé marocain et du coût des consultations ; que toutefois il ne fait valoir aucune circonstance empêchant son accès aux soins dans son pays d'origine, et les certificats médicaux qu'il produit, s'il attestent d'une nécessité de prise en charge, ne se prononcent pas sur l'accessibilité au Maroc des soins qu'il requiert ; qu'ainsi, ces certificats et les documents relatifs au système de santé au Maroc ne sont pas de nature à contredire l'avis du médecin inspecteur ; que, par suite, M. C...n'est fondé à soutenir, ni que le préfet de la Seine-Saint-Denis a méconnu les dispositions de l'article L. 313-11 11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d 'asile, ni qu'il aurait commis une erreur manifeste d'appréciation de sa situation personnelle ;

9. Considérant, en troisième lieu, qu'il résulte de ce qui vient d'être dit que le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en raison des risques que M. C... encourt au regard de son état de santé doit être écarté ;

10. Considérant, en quatrième lieu, qu'il résulte de ce qui vient d'être dit que ni le préfet de la Seine-Saint-Denis ni le tribunal administratif n'ont commis d'erreur manifeste d'appréciation de la situation de M. C... ;

Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire :

11. Considérant qu'aux termes de l'article 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : " (...) 9° A l'étranger titulaire d'une rente d'accident du travail ou de maladie professionnelle servie par un organisme français et dont le taux d'incapacité permanente est égale ou supérieure à 20% sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée " ; qu'il ressort des pièces du dossier que M. C... est titulaire d'une rente d'accident du travail servie par la sécurité sociale et que son taux d'incapacité permanente est égal à 62% ; qu'ainsi, il peut prétendre de plein droit à un titre de séjour sur le fondement des dispositions précitées ; que cette circonstance fait, dès lors, obstacle à ce qu'il puisse légalement faire l'objet d'une mesure d'éloignement ; que, par suite, il est fondé à demander l'annulation de la décision l'obligeant à quitter le territoire et à ce qu'il soit enjoint au préfet de réexaminer sa situation ;

12. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède M. C... est seulement fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision l'obligeant à quitter le territoire français ;

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

13. Considérant que le présent arrêt implique nécessairement que l'administration statue à nouveau sur la demande de l'intéressé ; que, dès lors, il y a lieu d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis en application de l'article L. 911-2 du code de justice administrative, de réexaminer la situation de M C...dans un délai de 2 mois à compter de la notification du présent arrêt ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

14. Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1500 euros au titre des frais exposés par M. C...et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : La décision du 27 avril 2011 obligeant M. C...à quitter le territoire français est annulée.

Article 2 : Le jugement n° 1104281 du 26 janvier 2012 du Tribunal administratif de Montreuil est réformé en ce qu'il a de contraire à l'article 1er du présent arrêt.

Article 3 : Il est enjoint au préfet de la Seine-Saint-Denis de procéder au réexamen de la situation de M. C...dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 4 : L'Etat versera à M. C...la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête de M. C...est rejeté.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 12VE00753
Date de la décision : 04/04/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : Mme COËNT-BOCHARD
Rapporteur ?: Mme Sylvie MEGRET
Rapporteur public ?: Mme COURAULT
Avocat(s) : SEBAG

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2013-04-04;12ve00753 ?
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