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22/01/2013 | FRANCE | N°12VE02526

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 1ère chambre, 22 janvier 2013, 12VE02526


Vu la requête, enregistrée le 7 juillet 2012 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, présentée pour Mlle A...B..., demeurant à..., par Me Aucher-Fagbemi, avocat à la Cour ; Mlle B...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1108810 du 4 juin 2012 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 19 septembre 2011 en tant que, par cet arrêté, le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ", lui a fait obligati

on de quitter le territoire français et a fixé le pays de destination ;

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Vu la requête, enregistrée le 7 juillet 2012 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, présentée pour Mlle A...B..., demeurant à..., par Me Aucher-Fagbemi, avocat à la Cour ; Mlle B...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1108810 du 4 juin 2012 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 19 septembre 2011 en tant que, par cet arrêté, le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ", lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de destination ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir les dispositions de cet arrêté qui n'ont pas été annulées ;

3°) de confirmer le jugement en tant qu'il a annulé l'interdiction du territoire français prononcée à son encontre ;

4°) d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale ", dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 50 euros par jour de retard, et, subsidiairement, d'enjoindre au préfet de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans un délai de quinze jours à compter de l'arrêt à intervenir, afin de réexaminer sa situation sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Mlle B...soutient que les décisions de refus de séjour et d'obligation de quitter le territoire français sont insuffisamment motivées ; qu'elles ne contiennent pas d'éléments sur son arrivée en France à l'âge de 16 ans, ni sur la circonstance qu'elle-même et son premier fils, Joyce, aient été placés auprès de l'aide sociale à l'enfance ; que le délai de trente jours de départ volontaire qui lui a été assigné n'est pas motivé ; qu'il est très nettement insuffisant, compte tenu de la situation spécifique de la requérante et de la présence en France de ses deux enfants mineurs dont l'un est placé à l'aide sociale à l'enfance, tous deux étant également scolarisés ainsi qu'il en est justifié par les pièces versées aux débats ; que ces décisions violent les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, celles de l'article 3-1 de la convention de New York relative aux droits de l'enfant et celles de l'article 7 de la directive retour ; qu'elles violent également les dispositions de l'article L. 511-1-II 3° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'elle est entrée en France âgée de 17 ans et a été placée chez un tiers digne de confiance, ce placement ayant été renouvelé jusqu'à sa majorité ; qu'elle se trouvait en situation de faiblesse, ayant accouché d'un enfant à son arrivée en France dans des conditions difficiles ; qu'elle a suivi des formations mais que son fils Joyce a été confié par une ordonnance du 26 février 2004 à l'aide sociale à l'enfance et placé dans une famille d'accueil ; qu'il a trouvé un équilibre grâce à l'ASE, la famille d'accueil et le rôle de sa mère ; que le départ de la France romprait l'équilibre de la mère et de ses deux enfants mineurs eu égard au placement de l'enfant Joyce et au travail en cours dans ce cadre, ainsi qu'à la scolarisation des deux enfants en France ; que le père du second enfant l'a chassée de son domicile ; que, dans ces conditions, la décision est également entachée d'erreur manifeste d'appréciation ; que s'agissant des dispositions des articles 2 et 7 de la directive, force est de constater que le délai de trente jours prévu par l'arrêté attaqué ne prend pas en compte la situation spécifique de la requérante et la présence en France de ses deux enfants mineurs, dont l'un est placé dans une famille dans le cadre de l'aide sociale à l'enfance ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la convention internationale relative aux droits de l'enfant, signée à New York le 26 janvier 1990 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu, au cours de l'audience publique du 8 janvier 2013 :

- le rapport de Mme Belle, premier conseiller,

- et les conclusions de Mme Dioux-Moebs, rapporteur public ;

1. Considérant que MlleB..., ressortissante congolaise de République démocratique du Congo, née le 28 novembre 1986 à Kinshasa, relève appel du jugement du 4 juin 2012 en tant que, par ce jugement, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 19 septembre 2011 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de lui délivrer une carte de séjour temporaire et l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours en fixant le pays de renvoi ;

2. Considérant qu'aux termes du 1 de l'article 3 de la convention relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale " ; qu'il résulte de ces stipulations que l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant ;

3. Considérant que Mlle B...est entrée en France en 2003 et a accouché, alors qu'elle était encore mineure, en France, le 27 janvier 2004, d'un enfant qu'elle a continué de suivre et de rencontrer, mais qui est placé dans une famille d'accueil depuis sa naissance, dans le cadre de l'aide sociale à l'enfance, et qui était âgé de plus de sept ans à la date de la décision attaquée ; qu'elle a, elle-même, été placée en famille d'accueil compte tenu de sa minorité, famille avec laquelle elle a gardé des liens au-delà de sa majorité ; que, le 28 mars 2008, elle a donné naissance à un second enfant qu'elle a eu de ses relations avec un ressortissant congolais, dont elle affirme, sans toutefois l'établir, qu'il est titulaire d'un titre de réfugié politique ; que, dans ces conditions, compte tenu de la situation particulière de ses deux enfants et de l'intérêt qui s'attache à leur présence en France, compte tenu des liens existant avec la famille d'accueil pour le premier, et de la présence en France de son père pour le second, dont il n'est pas contesté qu'il demeure en France, en refusant le séjour à Mlle B...et en l'obligeant à quitter le territoire français avec ses deux enfants mineurs, le préfet, dans les circonstances de l'espèce, a méconnu l'intérêt supérieur de ses enfants ; que, par suite, Mlle B... est fondée à soutenir que ledit arrêté a méconnu les stipulations du 1 de l'article 3 de la convention relative aux droits de l'enfant susvisée ;

4. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mlle B...est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal a rejeté le surplus des conclusions de sa requête tendant à l'annulation des dispositions restées en litige de l'arrêté attaqué ;

Sur les conclusions aux fins d'injonction sous astreinte :

5. Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution " ;

6. Considérant qu'eu égard aux motifs d'annulation ci-dessus exposés, et en l'absence de changement des circonstances de fait, le présent arrêt implique nécessairement que le titre de séjour sollicité soit délivré à Mlle B...; que, dès lors, il y a lieu d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de délivrer à MlleB..., dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt, une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'assortir cette injonction d'une astreinte ;

Sur les conclusions de Mlle B...tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

7. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par Mlle B...et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1108810 du 4 juin 2012 en tant qu'il rejette le surplus des conclusions de la demande et l'arrêté du 19 septembre 2011, en tant que le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de délivrer une carte de séjour temporaire à MlleB..., lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai d'un mois, en fixant le pays de destination, sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet de la Seine-Saint-Denis de délivrer à MlleB..., dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt, une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale ".

Article 3 : L'Etat versera à Mlle B...une somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de Mlle B...est rejeté.

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N° 12VE02526 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 12VE02526
Date de la décision : 22/01/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. FORMERY
Rapporteur ?: Mme Laurence BELLE VANDERCRUYSSEN
Rapporteur public ?: Mme DIOUX-MOEBS
Avocat(s) : AUCHER-FAGBEMI

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2013-01-22;12ve02526 ?
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