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11/12/2012 | FRANCE | N°12VE00910

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 1ère chambre, 11 décembre 2012, 12VE00910


Vu la requête, enregistrée le 9 mars 2012 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, présentée pour M. D...C..., demeurant au..., par Me Benabida, avocat à la Cour ; M. C...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1107123 du 9 février 2012 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Seine-Saint-Denis du 11 juillet 2011 refusant de lui délivrer un titre de séjour et lui faisant obligation de quitter le territoire français à destination de son pays d'origine ;

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) d'annuler pour excès de pouvoir cet arrêté ;

3°) de juger recevable l'inte...

Vu la requête, enregistrée le 9 mars 2012 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, présentée pour M. D...C..., demeurant au..., par Me Benabida, avocat à la Cour ; M. C...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1107123 du 9 février 2012 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Seine-Saint-Denis du 11 juillet 2011 refusant de lui délivrer un titre de séjour et lui faisant obligation de quitter le territoire français à destination de son pays d'origine ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir cet arrêté ;

3°) de juger recevable l'intervention volontaire de Mme B...Benabida épouseC... ;

4°) d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de réexaminer sa situation dans le délai de trois mois suivant la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 80 euros par jour de retard ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient, en premier lieu, que le jugement attaqué est irrégulier pour n'avoir pas été précédé de la communication aux parties de la délégation de signature consentie à l'auteur de l'arrêté du 11 juillet 2011 ; en deuxième lieu, que la décision portant refus de titre de séjour a été prise par une autorité incompétente et qu'elle est entachée d'un défaut de motivation quant au droit au respect de la vie privée de l'exposant ; en troisième lieu, que la décision attaquée méconnait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ; qu'entré en France en 2002, il vit avec une ressortissante française depuis 2008, qu'il a épousé le 4 septembre 2010, et est inséré à la société française dans laquelle vit également sa soeur, son frère et ses enfants ; en quatrième lieu, que le préfet de la Seine-Saint-Denis a commis une erreur de droit en ne faisant pas usage de son pouvoir discrétionnaire de régularisation ; enfin, que la décision portant obligation de quitter le territoire français a été prise par une autorité incompétente, qu'elle méconnait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de l'exposant ;

Vu le jugement et l'arrêté attaqués ;

Vu le mémoire en intervention volontaire, enregistré le 9 mars 2012, présenté par Me Benabida, avocat, pour Mme B...Benabida, devenue épouseC..., demeurant au...; Mme Benabida épouse C...demande à la Cour d'annuler le jugement n° 1107123 en litige et d'annuler pour excès de pouvoir les trois décisions attaquées susvisées ;

Mme Benabida épouse C...soutient qu'elle a constitué une famille avec l'appelant qu'elle a désormais épousé et qu'elle ne peut être contrainte, en qualité de ressortissante française, de toute abandonner en France pour suivre son époux au Maroc sans que soit méconnu l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu les pièces du dossier desquelles il ressort que la requête a été communiquée au préfet de la Seine-Saint-Denis qui n'a pas produit d'observations ;

Vu les avis d'audience adressés aux parties le 7 novembre 2012 et portant clôture d'instruction à cette même date ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu, au cours de l'audience publique du 27 novembre 2012 :

- le rapport de M. Formery, président assesseur,

- et les conclusions de Mme Dioux-Moebs, rapporteur public ;

1. Considérant que M.C..., ressortissant marocain né en 1977, fait appel du jugement du 9 février 2012 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Seine-Saint-Denis du 11 juillet 2011 refusant de lui délivrer un titre de séjour et lui faisant obligation de quitter le territoire français à destination de son pays d'origine ;

Sur l'intervention de Mme Benabida :

2. Considérant que Mme Benabida a intérêt à demander l'annulation des décisions en litige par lesquelles le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de délivrer à M. C..., son époux, un titre de séjour et l'a obligé à quitter le territoire national ; qu'ainsi, son intervention est recevable ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

3. Considérant que la décision par laquelle le préfet consent une délégation de signature à un agent de l'administration fait l'objet d'une publication au bulletin d'informations administratives de la préfecture ; que, par suite, c'est sans commettre d'irrégularité que le tribunal a écarté le moyen tiré du défaut d'habilitation de l'auteur de l'arrêté portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire du 11 juillet 2011 sans avoir soumis au débat contradictoire la décision de délégation dont l'existence a été constatée ;

Sur la légalité de la décision portant refus de titre de séjour :

4. Considérant, en premier lieu, que M. E...A..., qui a signé l'arrêté contesté, bénéficiait d'une délégation de signature du préfet de la Seine-Saint-Denis en date du 30 août 2010, régulièrement publiée au bulletin d'informations administratives paru le même jour, à l'effet notamment de signer les décisions de refus de séjour, les obligations de quitter le territoire français et les décisions fixant le pays vers lequel sera éloigné un étranger faisant l'objet d'une mesure d'éloignement ; que dès lors, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de la décision attaquée manque en fait ;

5. Considérant, en deuxième lieu, qu'en vertu des articles 1er et 3 de la loi du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs, les décisions individuelles défavorables doivent comporter l'énoncé des considérations de fait et de droit qui en constituent le fondement ; qu'il ressort de l'examen de la décision portant refus de délivrer à M. C...une carte de séjour temporaire, que le préfet a rappelé les considérations de droit, tant au regard des dispositions internes que des stipulations de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, qui en constitue le fondement ; que la décision mentionne également les éléments concernant sa vie privée et familiale pour considérer qu'il ne peut bénéficier ni des dispositions du 4° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ni obtenir une carte de séjour sur le fondement du 7° du même article L. 313-11 ; que, par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de la décision portant refus de délivrer un titre de séjour doit être rejeté ;

6. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ; qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République " ;

7. Considérant que M. C...fait valoir qu'il vit depuis le mois de septembre 2008 avec une ressortissante française, avec laquelle il s'est marié le 4 septembre 2010, qu'il est parfaitement intégré sur le territoire français où résident sa soeur, ainsi que son frère et ses enfants et qu'il n'est jamais retourné dans son pays d'origine ; que, toutefois, il ressort des pièces du dossier que M. C...ne produit des pièces justifiant de sa communauté de vie avec sa future épouse que pour les années 2010 et 2011 ; qu'ainsi, eu égard au caractère récent de la communauté de vie de l'intéressé et à la possibilité dont il dispose de retourner temporairement dans son pays pour y solliciter une procédure de regroupement familial, la décision en litige n'a pas porté au droit du requérant au respect de la vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise ; que, par suite, le moyen tiré d'une méconnaissance des dispositions et stipulations précitées ne peut qu'être rejeté ; que, pour les mêmes motifs, la décision du préfet de la Seine-Saint-Denis n'est pas entaché d'erreur manifeste quant à l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressé ;

8. Considérant, en quatrième lieu, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de la Seine-Saint-Denis aurait commis une erreur de droit en refusant d'admettre au séjour M. C... et en refusant ainsi d'exercer son pouvoir de régularisation ; que ce moyen doit, dès lors, être écarté ;

Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire :

9. Considérant, en premier lieu, que, pour les motifs que ceux précédemment exposés, la décision portant obligation de quitter le territoire français n'est pas entachée d'incompétence et n'a pas été prise en méconnaissance des stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

10. Considérant, en second lieu, que la mesure d'éloignement contestée ne peut être regardée, dans les circonstances de l'espèce, comme entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de M.C... ;

11. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. C...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions aux fin d'injonction et celles tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées ;

DECIDE

Article 1er : L'intervention de Mme B...Benabida épouse C...est admise.

Article 2 : La requête de M. C...est rejetée.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. D...C...et au ministre de l'intérieur. Copie en sera transmise au préfet de la Seine-Saint-Denis.

Délibéré après l'audience du 27 novembre 2012, où siégeaient :

M. SOUMET, président ;

M. FORMERY, président assesseur ;

M. HUON, premier conseiller ;

Lu en audience publique, le 11 décembre 2012.

Le rapporteur,

S. FORMERYLe président,

M. SOUMETLe greffier,

N. NAÏT-SEGHIR

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme

Le greffier,

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N° 12VE00910


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 12VE00910
Date de la décision : 11/12/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. SOUMET
Rapporteur ?: M. Simon FORMERY
Rapporteur public ?: Mme DIOUX-MOEBS
Avocat(s) : BENABIDA

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2012-12-11;12ve00910 ?
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