La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

06/11/2012 | FRANCE | N°11VE00480

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 3ème chambre, 06 novembre 2012, 11VE00480


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles le 10 février 2011, présentée pour M. et Mme Murat A, demeurant ..., par Me Hoin, avocat à la Cour ; M. et Mme A demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement nos 0710176, 0711171 du 30 novembre 2010 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté leur demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2003 à 2005, ainsi que des pénalités correspondante

s ;

2°) de prononcer la décharge demandée ;

3°) de mettre à la charg...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles le 10 février 2011, présentée pour M. et Mme Murat A, demeurant ..., par Me Hoin, avocat à la Cour ; M. et Mme A demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement nos 0710176, 0711171 du 30 novembre 2010 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté leur demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2003 à 2005, ainsi que des pénalités correspondantes ;

2°) de prononcer la décharge demandée ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Ils soutiennent :

- que la procédure de redressement est irrégulière dès lors que le principe du contradictoire n'a pas été respecté, l'acceptation des redressements par Mme A ayant été viciée par les pressions dont elle a été l'objet ; que, d'une part, elle n'a pu prendre connaissance des redressements comme cela résulte des attestations de son avocat, de sa soeur et de son frère alors que l'administration n'a, pour sa part, pas établi l'avantage qu'aurait eu la requérante à accepter les redressements ; que, d'autre part, la circonstance que Mme A aurait pu revenir sur son consentement dans les trente jours de son acceptation est sans incidence sur le fait que son consentement a été vicié ; qu'enfin, l'échange proposé par l'administration de l'abandon de la pénalité de l'article 1759 du code général des impôts contre l'acceptation des redressements notifiés aux bénéficiaires des revenus réputés distribués est illégal ; que le tribunal a insuffisamment motivé son jugement en s'abstenant de souligner le défaut d'intérêt fiscal de l'exposante à accepter la remise de la pénalité ;

- que la proposition de rectification du 20 décembre 2006 est insuffisamment motivée dès lors qu'elle ne mentionne ni la base, ni le montant des contributions sociales supplémentaires auxquelles ils ont été assujettis ;

- que le principe d'indépendance des procédures ne faisait pas obstacle à la décharge des impositions en litige en conséquence du dégrèvement accordé à la société Zoco dès lors que l'article 110 du code général des impôts prévoit que les bénéfices réputés distribués en application du 1° de l'article 109-1 sont ceux qui ont été retenus pour l'assiette de l'impôt sur les sociétés ; qu'en outre, le redressement du bénéfice social est issu d'une reconstitution du chiffre d'affaires au moyen d'une méthode statistique de sorte que l'existence des recettes dissimulées n'est que supposée ; que le principe d'indépendance des procédures doit en l'espèce être écarté, dès lors que, en raison de la reconstitution du chiffre d'affaires de la société Zoco, ce principe fait obstacle à ce qu'ils puissent apporter la preuve tant de l'absence des distributions que de leur appréhension ; que ce principe ne peut être invoqué lorsqu'un dégrèvement est prononcé pour un motif de fond ; que l'administration a violé leur droit à un procès équitable en ne leur communiquant pas le motif du dégrèvement des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés mises à la charge de la SARL Zoco ; que le tribunal a insuffisamment motivé son jugement en passant sous silence cette omission de réponse ;

......................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 16 octobre 2012 :

- le rapport de M. Guiard, premier conseiller,

- les conclusions de M. Locatelli, rapporteur public,

- et les observations de Me Amadori, substituant Me Hoin, pour M. et Mme A ;

1. Considérant que la société Zoco, dont Mme A était gérante et associée, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur ses exercices clos de 2003 à 2005, à l'issue de laquelle l'administration fiscale, après avoir écarté sa comptabilité comme non probante et reconstitué son chiffre d'affaires, a mis en évidence des dissimulations de recettes à raison desquelles elle lui a notifié des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés ; que, par une proposition de rectification en date du 20 décembre 2006, l'administration a notifié à Mme A, désignée par la société Zoco comme l'un des bénéficiaires des revenus réputés distribués par cette société, des rectifications de ses revenus imposables dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers au titre des années 2003 à 2005 ; que M. et Mme A font appel du jugement du 30 novembre 2010 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté leur demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales ainsi mises à leur charge ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Considérant qu'il résulte de l'examen du jugement attaqué que le tribunal administratif, qui n'était pas tenu de répondre à tous les arguments développés par M. et Mme A au soutien de leurs moyens, a, d'une part, répondu de manière suffisante au moyen tiré de ce que l'acceptation donnée par Mme A aux redressements en litige aurait été viciée et, d'autre part, a écarté comme inopérant le moyen tiré de ce que la société Zoco n'aurait pas été informée du motif du dégrèvement prononcé en sa faveur le 22 octobre 2007 ; que la circonstance qu'il n'a pas répondu à leur argumentation, soulevée à l'appui de la contestation de l'acceptation des redressements, tirée de ce que l'accord qu'aurait passé Mme A avec l'administration était pour elle dépourvu d'intérêt, n'est pas de nature à entacher le jugement attaqué d'irrégularité ; qu'il suit que M. et Mme A ne sont pas fondés à soutenir que le jugement attaqué serait insuffisamment motivé ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales dans sa version alors applicable : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation. (...) " ; que selon l'article R. 57-1 du même livre : " La proposition de rectification prévue par l'article L. 57 fait connaître au contribuable la nature et les motifs de la rectification envisagée. L'administration invite, en même temps, le contribuable à faire parvenir son acceptation ou ses observations dans un délai de trente jours à compter de la réception de la proposition. " ;

4. Considérant, en premier lieu, que la proposition de rectification remise en main propre à Mme A le 20 décembre 2006 mentionnait l'ensemble des impôts concernés, la nature, le montant et les motifs des redressements envisagés, ainsi que les années d'imposition ; que, si M. et Mme A soutiennent que les contributions sociales supplémentaires mises à leur charge auraient dû faire l'objet d'une motivation autonome par rapport aux cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2003 à 2005, la proposition de rectification du 20 décembre 2006 mentionnait, s'agissant de ces contributions, les textes applicables, ainsi que le montant des redressements envisagés en matière de prélèvement social, de contribution sociale généralisée et de contribution pour le remboursement de la dette sociale ; que, contrairement à ce soutiennent les requérants, les indications portant sur ces prélèvements complémentaires pouvaient se limiter à la mention de leur montant sans reprendre les éléments de base déjà indiqués pour l'impôt sur le revenu, dès lors que l'ensemble de ces contributions étaient fondées sur ces mêmes éléments ; que la proposition de rectification du 20 décembre 2006 était ainsi suffisamment motivée au regard des prescriptions de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales ;

5. Considérant, en second lieu, que Mme A, qui se prévaut d'attestations de son ancien conseil, de son frère et de sa soeur, soutient, d'une part, qu'elle n'a pas été mise à même de prendre connaissance du contenu de la proposition de rectification avant de la signer le jour même de sa notification et que, d'autre part, son acceptation a été viciée par la pression qu'auraient exercée sur elle le vérificateur et son supérieur hiérarchique en la menaçant d'infliger à la société Zoco l'amende prévue à l'article 1759 du code général des impôts ; que, toutefois, les dispositions des articles L. 57 et R. 57-1 du livre des procédures fiscales ne font pas obstacle à ce que le contribuable formule son acceptation le jour même où il reçoit la proposition de rectification ; que, par ailleurs, il résulte de l'instruction que le jour où Mme A a accepté les redressements litigieux, elle était accompagnée de son conseil ; qu'il ressort également d'un courrier de l'administration fiscale adressé à la société Zoco dès le 29 novembre 2006, que si cette société s'est d'abord vu infliger la pénalité prévue par l'article 1759 du code général des impôts en l'absence de désignation précise des bénéficiaires des distributions dans le délai de trente jours, l'administration a ensuite accepté, dans le cadre d'une négociation et par mesure de bienveillance, d'abandonner cette pénalité pour autant que les bénéficiaires des distributions soient précisément désignés et qu'ils acceptent les redressements ; qu'un tel arrangement, dont l'acceptation n'a nullement été obtenue sous la menace de redressements plus élevés, ne saurait, dès lors, être regardé comme une manoeuvre d'intimidation susceptible d'avoir vicié le consentement de Mme A ; que l'absence de formalisation écrite d'un tel accord est sans incidence sur la régularité de la procédure d'imposition ; que ledit accord présentait, en tout état de cause, pour Mme A un intérêt personnel puisqu'elle était à la fois gérante et associée de la société Zoco ; qu'enfin, il ne résulte pas de l'instruction que des menaces auraient empêché Mme A de revenir sur son acceptation dans le délai de trente jours mentionné à l'article R. 57-1 du livre des procédures fiscales ; qu'il résulte de l'ensemble de ces éléments que les requérants ne sont pas fondés à soutenir que l'acceptation de Mme A serait sans portée et que le caractère contradictoire de la procédure d'imposition n'aurait pas été respecté ;

Sur le bien-fondé de l'imposition :

6. Considérant qu'aux termes de l'article 109 du code général des impôts : " 1. Sont considérés comme revenus distribués : 1° Tous les bénéfices ou produits qui ne sont pas mis en réserve ou incorporés au capital (...) " ; que selon l'article 110 du même code : " Pour l'application du 1° du 1 de l'article 109 les bénéfices s'entendent de ceux qui ont été retenus pour l'assiette de l'impôt sur les sociétés. (...) " ;

7. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de la combinaison de ces dispositions que toute somme qu'une société, qui entre dans le champ d'application de l'impôt sur les sociétés, met à la disposition de l'un de ses associés et qui n'est la rémunération ni d'une prestation que celui-ci lui a faite, ni d'un service qu'il lui a rendu, ni d'un prêt qu'il lui a consenti, a le caractère d'un revenu distribué, sans qu'il y ait lieu de rechercher si la société a été, ou non, effectivement soumise à l'impôt à raison de la somme dont s'agit ; qu'il suit de là que la circonstance que l'administration a, le 22 octobre 2007, accordé à la société Zoco le dégrèvement des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés mises à sa charge est, quelle que soit la raison de ce dégrèvement, sans influence sur le bien-fondé des impositions supplémentaires réclamées à M. et Mme A ; qu'à cet égard, les requérants ne peuvent utilement se prévaloir de la circonstance que l'administration ne les aurait pas informés que le dégrèvement des impositions supplémentaires mises à la charge de la société reposait sur un emport irrégulier de documents comptables ;

8. Considérant, en second lieu, que contrairement à ce qu'allèguent les requérants, ni le principe d'indépendance des procédures, ni la circonstance que l'administration a procédé à la reconstitution du chiffre d'affaires de la société Zoco, au demeurant à partir des données résultant de son exploitation, ne font obstacle à ce qu'ils puissent contester le bien-fondé des redressements portant sur leurs revenus de capitaux mobiliers, soit en établissant, comme cela leur incombe en application de l'article R. 194-1 du code général des impôts, l'inexistence des bénéfices regardés comme distribués, en particulier par une critique de la méthode de reconstitution employée par l'administration, soit en démontrant que Mme A n'a pas appréhendé ces sommes contrairement à ce qu'elle a déclaré ; qu'à cet égard, les requérants n'apportent aucun élément de nature à établir le caractère mal fondé des impositions en litige ;

9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme A ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté leur demande ; que par voie de conséquence, leurs conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. et Mme A est rejetée.

''

''

''

''

N° 11VE00480 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 11VE00480
Date de la décision : 06/11/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Contributions et taxes - Généralités - Règles générales d'établissement de l'impôt - Redressement - Généralités.

Contributions et taxes - Impôts sur les revenus et bénéfices - Revenus et bénéfices imposables - règles particulières - Revenus des capitaux mobiliers et assimilables - Revenus distribués.


Composition du Tribunal
Président : Mme SIGNERIN-ICRE
Rapporteur ?: M. Olivier GUIARD
Rapporteur public ?: M. LOCATELLI
Avocat(s) : CABINET ANDRÉ HOIN et PARTENAIRES

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2012-11-06;11ve00480 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award