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19/06/2012 | FRANCE | N°11VE03429

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 1ère chambre, 19 juin 2012, 11VE03429


Vu la requête, enregistrée le 30 septembre 2011 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, présentée par le PREFET DU VAL-D'OISE ; le PREFET DU VAL-D'OISE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0906763 en date du 19 juillet 2011 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé son arrêté du 27 mai 2009 refusant de délivrer un titre de séjour à M. A, obligeant l'intéressé à quitter le territoire français et fixant le pays de destination ;

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Vu la requête, enregistrée le 30 septembre 2011 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, présentée par le PREFET DU VAL-D'OISE ; le PREFET DU VAL-D'OISE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0906763 en date du 19 juillet 2011 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé son arrêté du 27 mai 2009 refusant de délivrer un titre de séjour à M. A, obligeant l'intéressé à quitter le territoire français et fixant le pays de destination ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. A devant le tribunal administratif ;

Il soutient que que c'est à tort que le tribunal administratif a estimé que l'arrêté litigieux avait porté une atteinte disproportionnée au droit de M. A au respect de sa vie privée et familiale au sens de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dans la mesure où son épouse devait être regardée comme résidant régulièrement en France ; qu'en effet, à la date de cet arrêté, l'épouse de l'intéressé se trouvait en situation irrégulière ; qu'elle n'a sollicité son admission au séjour que le 23 décembre 2009 laquelle a été refusée par décision du 19 octobre 2010 ; que, si le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé cette dernière décision par un jugement du 14 avril 2011, il ne pouvait se fonder sur ce jugement pour censurer le refus de séjour opposé à M. A ; qu'au demeurant, ledit jugement a été frappé d'appel ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la convention internationale relative aux droits de l'enfant, signée à New York le 26 janvier 1990 ;

Vu l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 5 juin 2012 :

- le rapport de M. Huon, premier conseiller,

- et les observations de Me Parastatis substituant Me Lachenaud, pour M. A ;

Considérant que le PREFET DU VAL-D'OISE relève appel du jugement en date du 19 juillet 2011 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé son arrêté du 27 mai 2009 refusant de délivrer un titre de séjour à M. A, ressortissant marocain, obligeant l'intéressé à quitter le territoire français et fixant le pays de destination ;

Considérant que, par un jugement du 14 avril 2011, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé l'arrêté préfectoral du 19 octobre 2010 refusant la délivrance d'un titre de séjour à l'épouse de M. A et a enjoint à l'autorité administrative de délivrer à cette dernière un titre de séjour ; que toutefois, ainsi que le fait valoir le préfet, ce jugement, contrairement à ce qu'ont retenu les premiers juges, n'a pu avoir pour effet de régulariser le séjour de Mme A à compter du 27 mai 2009, date à laquelle le PREFET DU VAL-D'OISE a statué sur la demande de M. A ; qu'à cette date, l'épouse de l'intimé qui n'a d'ailleurs elle-même sollicité son admission au séjour que le 23 décembre 2009, se trouvait donc également en situation irrégulière sur le territoire national ; qu'en l'absence de circonstances faisant obstacle à ce que le couple, présent en France depuis seulement deux ans, poursuive sa vie à l'étranger et, en particulier, dans leur pays d'origine, accompagné de leurs deux enfants en bas âge, le refus de séjour opposé à M. A n'a pas porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale ; que, par suite, le PREFET DU VAL-D'OISE est ainsi fondé à soutenir que c'est à tort que le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise s'est fondé sur le motif tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales pour annuler son arrêté du 27 mai 2009 ;

Considérant, toutefois, qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. A devant le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise ;

Considérant, en premier lieu, que l'arrêté litigieux a été signé par Mme Thory, directeur des libertés publiques et de la citoyenneté de la préfecture du Val-d'Oise en vertu d'une délégation qui lui a été consentie à cette fin par arrêté du préfet du 12 février 2009 régulièrement publié le 16 février suivant au recueil des actes administratifs de l'Etat dans le département ; qu'ainsi, le moyen tiré de ce que ledit arrêté aurait été édicté par une autorité incompétente manque en fait ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 3 de l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 : " Les ressortissants marocains désireux d'exercer une activité professionnelle salariée en France, pour une durée d'un an au minimum, et qui ne relèvent pas des dispositions de l'article 1er du présent Accord, reçoivent, après le contrôle médical d'usage et sur présentation d'un contrat de travail visé par les autorités compétentes, un titre de séjour valable un an renouvelable et portant la mention " salarié " éventuellement assortie de restrictions géographiques ou professionnelles. " ; qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 sur le fondement du troisième alinéa de cet article peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7 (...) " ;

Considérant que les stipulations précitées de l'article 3 de l'accord prévoient les conditions dans lesquelles il est délivré aux ressortissants marocains un titre de séjour en qualité de salarié et font dès lors obstacle à l'application à ces mêmes ressortissants des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qui portent sur le même objet ; que, par suite, M. A ne peut faire utilement valoir que les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile concernant l'attribution, à titre exceptionnel, d'une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " auraient été méconnues en l'espèce par le PREFET DU VAL-D'OISE ; qu'en outre, dès lors que le motif tiré de ce que M. A est dépourvu d'un visa de long séjour permettait au préfet de rejeter sa demande de titre de séjour en qualité de salarié en application de l'article 3 de l'accord franco-marocain susvisé, il y a lieu de substituer cette stipulation à l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, cette substitution de base légale n'ayant pas eu pour effet de priver l'intéressé de garanties de procédure et que l'administration dispose, pour l'application de ces textes, du même pouvoir d'appréciation ;

Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;

Considérant que M. A fait valoir que, depuis novembre 2007, il réside en France chez sa belle-mère, aux côtés de son épouse et de ses deux enfants, nés en 2004 et 2008, et qu'il a été embauché depuis décembre 2008 en qualité d'agent d'entretien ; que, toutefois, ainsi qu'il a été dit, il ressort des pièces du dossier qu'à la date de l'arrêté attaqué, son épouse se trouvait également dépourvue de titre de séjour ; qu'au surplus, par un arrêt de ce jour, la Cour de céans a annulé le jugement susmentionné du 14 avril 2011 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise avait annulé l'arrêté préfectoral du 19 octobre 2010 refusant la délivrance d'un titre de séjour à l'épouse de M. A ; que l'intéressé ne se prévaut d'aucune circonstance particulière qui ferait sérieusement obstacle à ce qu'il poursuive sa vie de couple à l'étranger et, en particulier au Maroc, où les époux, âgés tous deux de quarante ans, se sont mariés en 2002 ; qu'ainsi, l'arrêté attaqué ne peut être regardé comme ayant porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale au sens des stipulations précitées ; que, pour les mêmes motifs, ledit arrêté n'est pas entaché d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant signée à New York le 26 janvier 1990 : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale " ; qu'il résulte de ces stipulations que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur de l'enfant dans toutes les décisions le concernant ;

Considérant qu'il n'est pas établi que, compte tenu de leur jeune âge, les enfants de M. A, nés en 2004 et 2008, ne pourraient accompagner leurs parents dans leur pays d'origine et y poursuivre une scolarité normale ; que, par suite, le moyen tiré de ce qu'en édictant l'arrêté litigieux, le préfet n'aurait pas accordé une attention primordiale à l'intérêt supérieur de ces enfants et aurait, ainsi, méconnu les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant doit être écarté ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le PREFET DU VAL-D'OISE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé l'arrêté litigieux ; que, par voie de conséquence, les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative présentées par M. A devant la Cour ne peuvent qu'être rejetées ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 0906763 du 19 juillet 2011 du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. A devant le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise et ses conclusions présentées devant la Cour sont rejetées.

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N° 11VE03429


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 11VE03429
Date de la décision : 19/06/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. SOUMET
Rapporteur ?: M. Christophe HUON
Rapporteur public ?: Mme DIOUX-MOEBS
Avocat(s) : LACHENAUD

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2012-06-19;11ve03429 ?
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