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19/06/2012 | FRANCE | N°11VE03059

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 1ère chambre, 19 juin 2012, 11VE03059


Vu l'ordonnance en date du 10 août 2011, enregistrée le 12 août 2011 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, par laquelle le président de la 3ème chambre de la Cour administrative d'appel de Paris a transmis à la Cour administrative d'appel de Versailles, en application de l'article R. 351-3 du code de justice administrative, la requête présentée pour Mme A ;

Vu la requête, enregistrée le 1er août 2011 au greffe de la Cour administrative d'appel de Paris, et le mémoire complémentaire, enregistré le 3 février 2012 au greffe de la Cour administrative d'a

ppel de Versailles, présentés pour Mme Fatoumata A, demeurant, ..., p...

Vu l'ordonnance en date du 10 août 2011, enregistrée le 12 août 2011 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, par laquelle le président de la 3ème chambre de la Cour administrative d'appel de Paris a transmis à la Cour administrative d'appel de Versailles, en application de l'article R. 351-3 du code de justice administrative, la requête présentée pour Mme A ;

Vu la requête, enregistrée le 1er août 2011 au greffe de la Cour administrative d'appel de Paris, et le mémoire complémentaire, enregistré le 3 février 2012 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, présentés pour Mme Fatoumata A, demeurant, ..., par Me Mongo, avocat à la Cour ; Mme A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1007670 du 19 juillet 2011 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Seine-Saint-Denis du 21 juin 2010 refusant de lui délivrer un titre de séjour et lui faisant obligation de quitter le territoire français à destination de son pays d'origine ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de lui délivrer une carte de séjour temporaire mention " vie privée et familiale ", sous astreinte de 150 euros par jour de retard à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

Elle soutient, en premier lieu, que la décision fixant le pays de sa destination n'est pas motivée et a été prise en méconnaissance de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 faute pour le préfet de la Seine-Saint-Denis de l'avoir mise en mesure de présenter ses observations ; en deuxième lieu, que le préfet aurait dû saisir le médecin inspecteur de la santé publique et examiner la demande de l'exposante sur le fondement des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors qu'elle souffre d'une valvulopathie mitrale post-rhumatismale, alors même qu'il n'aurait pas été saisi sur ce fondement ; que le préfet ne pouvait ignorer son état de santé dès lors qu'elle avait bénéficié, par le passé, d'autorisations provisoires de séjour en qualité d'étranger malade en raison d'une grave pathologie cardiaque après avoir, au demeurant, rempli le même formulaire ; qu'elle conteste ne pas établir la gravité de sa pathologie et qu'il ne lui appartient pas d'établir qu'elle peut recevoir les soins appropriés dans son pays ; qu'en outre, le Mali ne disposant pas d'un système d'assurance maladie, elle ne pourra, en raison de ses très faibles moyens financiers, prendre en charge le coût du traitement requis ; qu'il en résulte que les dispositions de l'article L. 511-4-10° ont également été méconnues ; en troisième lieu, que l'arrêté attaqué méconnait les dispositions de l'article L. 313-11-7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'il est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ; qu'entrée en France en 2001, elle vit avec son conjoint qui réside régulièrement sur le territoire français et avec lequel, elle a eu une fille en 2002 ; que ses autres enfants, restés au Mali avec leurs grands-parents, sont en âge de vivre sans leurs parents tandis que sa dernière fille née en France y est scolarisée ; qu'elle est mariée depuis 1988 avec son conjoint, lequel est en situation régulière en France ; que, contrairement à ce qu'a estimé le préfet, elle ne peut bénéficier d'un regroupement familial dès lors qu'elle réside en France ; enfin, que l'arrêté méconnait l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant dès lors qu'il aura pour effet de séparer sa fille de l'un de ses parents ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la convention internationale des droits de l'enfant signée à New York le 26 janvier 1990 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 5 juin 2012, le rapport de Mme Signerin-Icre, président assesseur ;

Considérant que Mme A, ressortissante malienne née en 1970, fait appel du jugement du 19 juillet 2011 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Seine-Saint-Denis du 21 juin 2010 refusant de lui délivrer un titre de séjour et lui faisant obligation de quitter le territoire français à destination de son pays d'origine ;

Sur la légalité des décisions portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction applicable à la date de la décision attaquée : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général de l'agence, ou, à Paris, du médecin, chef du service médical de la préfecture de police (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 511-4 du même code, dans sa rédaction alors en vigueur : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français ou d'une mesure de reconduite à la frontière en application du présent chapitre : (...) 10° L'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans le pays de renvoi " ;

Considérant que Mme A n'établit ni avoir formé une demande de carte de séjour sur le fondement des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ni avoir porté les éléments médicaux, dont elle se prévaut devant le juge de l'excès de pouvoir, à la connaissance du préfet à l'occasion de sa demande de titre de séjour ; que, dans ces conditions et à supposer même qu'elle aurait été autorisée, au cours des années 2002 et 2003, à séjourner provisoirement en France en qualité de ressortissant étranger malade, la requérante ne peut utilement se prévaloir de la circonstance que le préfet de la Seine-Saint-Denis n'a pas consulté le médecin inspecteur de santé publique pour contester la légalité des décisions attaquées ; que, par ailleurs, si Mme A soutient qu'elle remplit les conditions prévues pour la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de ces dispositions, alors que le préfet de la Seine-Saint-Denis a considéré qu'elle ne pouvait obtenir une carte de séjour à aucun titre, les pièces qu'elle verse au dossier consistent seulement, d'une part, en des certificats médicaux, anciens, en date des 23 juillet 2001 et 28 février 2006, d'autre part, en un certificat établi le 12 juillet 2010 mais qui se borne à mentionner que son état de santé " justifie un séjour prolongé en France " dès lors qu'elle " présente une valvulopathie mitrale post rhumatismale, qui a fait l'objet d'une procédure de dilatation percutanée en 2001 ", sans décrire la gravité de cette pathologie, l'état actuel de la requérante et la nature du traitement le cas échéant requis, et enfin, en un certificat établi le 18 septembre 2011 par un médecin cardiologue de Bamako qui affirme, au vu du certificat du 12 juillet 2010, que l'état de santé de Mme A nécessite " un suivi dans un centre ou pays à plateau technique évolué " et qu'il n'existe pas de plateau technique adéquat au Mali ; que, compte tenu de leurs mentions insuffisamment précises, ces documents ne sont pas de nature à établir que Mme A pouvait prétendre à la délivrance de plein droit d'une carte de séjour en application des dispositions précitées du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ou que le préfet de la Seine-Saint-Denis aurait méconnu les dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du même code en prenant à son encontre une mesure d'éloignement ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 411-1 du même code : " Le ressortissant étranger qui séjourne régulièrement en France depuis au moins dix-huit mois, sous couvert d'un des titres d'une durée de validité d'au moins un an prévus par le présent code ou par des conventions internationales, peut demander à bénéficier de son droit à être rejoint, au titre du regroupement familial, par son conjoint (...) " ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que l'époux de Mme A séjourne régulièrement en France depuis au moins dix-huit mois, sous couvert d'un des titres d'une durée de validité d'au moins un an ; que, par suite, la requérante, qui entre dans les catégories qui ouvrent droit au regroupement familial, n'entre pas dans le champ d'application des dispositions précitées du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que le moyen tiré de ce que le préfet de la Seine-Saint-Denis aurait méconnu les dispositions de ce texte en refusant de lui délivrer une carte de séjour doit donc être écarté ;

Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " ;

Considérant que Mme A soutient qu'elle réside en France, avec son époux, depuis 2001 et qu'ils ont eu ensemble une fille, née dans ce pays le 28 novembre 2002 et qui y est scolarisée ; qu'il ressort, toutefois, des pièces du dossier qu'alors même que l'époux de la requérante est établi de longue date en France, le couple a quatre autres enfants au Mali, dont trois étaient mineurs à la date des décisions en litige ; que, dans ces conditions, il ne ressort pas des pièces du dossier que ces décisions auraient porté au droit de l'intéressée au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elles ont été prises ; qu'elles n'ont donc pas méconnu les stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant, en quatrième lieu, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de la Seine-Saint-Denis aurait commis une erreur manifeste d'appréciation des conséquences de ses décisions sur la situation personnelle de Mme A ;

Considérant enfin, qu'aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale " ; qu'il résulte de ces stipulations que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant ; que, toutefois en l'espèce, il ne ressort pas des pièces du dossier, dès lors notamment qu'il n'est pas établi que la fille de la requérante ne pourrait poursuivre sa scolarité au Mali, que le préfet de la Seine-Saint-Denis n'aurait pas accordé une importance primordiale à l'intérêt supérieur de cet enfant ; que le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations précitées de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant doit dès lors être écarté ;

Sur la légalité de la décision fixant le pays de destination :

Considérant, d'une part, que la décision en litige est suffisamment motivée ;

Considérant, d'autre part, qu'il ressort des dispositions de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que le législateur a entendu déterminer l'ensemble des règles de procédure administrative et contentieuse auxquelles sont soumises l'intervention et l'exécution des décisions par lesquelles l'autorité administrative signifie à l'étranger l'obligation dans laquelle il se trouve de quitter le territoire français et désigne le pays à destination duquel il sera reconduit à l'expiration de ce délai, à défaut pour lui d'obtempérer à l'obligation de quitter le territoire français qui lui est faite ; que, dès lors, l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec l'administration, qui fixe les règles générales de procédure applicables aux décisions devant être motivées en vertu de la loi du 11 juillet 1979, ne saurait être utilement invoqué par Mme A pour contester la légalité de la décision fixant le pays à destination duquel elle pourra être reconduite ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme A n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction doivent également être rejetées ;

DECIDE

Article 1er : La requête de Mme A est rejetée.

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N° 11VE03059


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 11VE03059
Date de la décision : 19/06/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. SOUMET
Rapporteur ?: Mme Corinne SIGNERIN-ICRE
Rapporteur public ?: Mme DIOUX-MOEBS
Avocat(s) : MONGO

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2012-06-19;11ve03059 ?
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