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14/06/2012 | FRANCE | N°10VE00274

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 5ème chambre, 14 juin 2012, 10VE00274


Vu la requête, enregistrée le 28 janvier 2010 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, présentée pour la société ATERMES, dont le siège est 4, avenue des Trois Peuples à Montigny-le-Bretonneux (78180), par Me Barbier ; la société ATERMES demande à la Cour :

1°) d'annuler l'article 3 du jugement nos 0708116-0708120 en date du 11 décembre 2009 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté ses conclusions à fin d'annulation de la décision notifiée le 9 mars 2006, annulant la convention d'avance signée le 6 janvier 1999 dans le cadre du proj

et " Actisub 2000 " ;

2°) d'annuler ladite décision ;

3°) d'enjoindr...

Vu la requête, enregistrée le 28 janvier 2010 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, présentée pour la société ATERMES, dont le siège est 4, avenue des Trois Peuples à Montigny-le-Bretonneux (78180), par Me Barbier ; la société ATERMES demande à la Cour :

1°) d'annuler l'article 3 du jugement nos 0708116-0708120 en date du 11 décembre 2009 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté ses conclusions à fin d'annulation de la décision notifiée le 9 mars 2006, annulant la convention d'avance signée le 6 janvier 1999 dans le cadre du projet " Actisub 2000 " ;

2°) d'annuler ladite décision ;

3°) d'enjoindre à l'administration de statuer à nouveau sur le constat d'échec du projet " Actisub 2000 " en faisant application de la procédure prévue à l'article 8 de la convention d'avance, sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la notification du présent arrêt ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 8 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

La société ATERMES soutient que, le litige portant sur le retrait d'une aide de l'Etat pour lequel un recours en annulation est admis, la requête est recevable ; que la société ATERMES a réalisé des investissements importants en matière de recherche et de développement pour le projet " Actisub 2000 " ; que la décision portant retrait de l'aide consentie par l'Etat a été prise par une autorité ne disposant pas d'une délégation de compétence ; que ladite décision ne comporte pas les nom, prénom et signature de son auteur et n'est pas motivée, en méconnaissance de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979 ; qu'il n'est pas établi que la commission dite de " l'article 90 " ait rendu un avis avant ladite décision d'annulation ; que l'administration n'apporte pas la preuve que la commission dite de " l'article 90 " était composée, lors de sa réunion, conformément aux stipulations de l'article 7 du décret du 12 novembre 1964 ; que la société ATERMES n'a pas été invitée à présenter ses observations en méconnaissance des dispositions de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 ; que l'administration ne pouvait faire usage des stipulations de l'article 12 de la convention mais devait mettre fin aux relations contractuelles et délier la société ATERMES de son obligation de remboursement de l'avance en application de l'article 8 du contrat dès lors que les prévisions de vente de 676 coffrets " Actisub 2000 " ne se sont pas réalisées en dépit des efforts de la société ATERMES pour commercialiser ce produit auprès d'autres acheteurs ; qu'en effet la Marine nationale ne s'est portée acquéreur que de deux appareils alors qu'elle avait prévu d'acheter la moitié de la totalité des 676 coffrets initialement prévus ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 63-1293 du 21 décembre 1963 de finances rectificatives pour 1963 modifiée ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;

Vu le décret n° 62-1587 du 29 décembre 1962 portant règlement général sur la comptabilité publique ;

Vu le décret n° 64-1123 du 12 novembre 1964 fixant les conditions d'application de l'article 5 de la loi de finances rectificative pour 1963 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 22 mai 2012 :

- le rapport de M. Pilven, premier conseiller,

- et les conclusions de Mme Courault, rapporteur public ;

Considérant que, par contrat en date du 6 janvier 1999, la société anonyme Natexis Banque a accordé, au nom de l'Etat et sur le fondement des dispositions de la loi du 21 décembre 1963 et du décret du 12 novembre 1964 susvisés, une avance à la société ATERMES d'un montant de 820 000 francs, soit 125 008 euros, destinée à financer la conception et la réalisation d'un matériel aéronautique dénommé " Actisub 2000 " prévu notamment pour équiper les bâtiments de la Marine nationale ; que la société ATERMES, après avoir saisi la société Natexis Banque par courrier du 30 août 2002 puis la direction générale de l'armement du ministère de la Défense par courrier du 3 décembre 2002, afin de faire constater l'échec commercial du projet " Actisub 2000 " conformément à l'article 8 du contrat d'avance du 6 janvier 1999, a suspendu le remboursement des intérêts prévus aux échéances des 30 avril 2003 et 30 avril 2004 ; que la société Natexis Banque lui a alors notifié, par lettre en date du 9 mars 2006, une décision d'annulation du contrat d'avance, prise sur le fondement de l'article 12 dudit contrat, ayant pour effet d'entraîner le remboursement intégral de l'avance consentie, assortie des intérêts ; que, par ailleurs, le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, a émis deux titres de perception en date du 7 avril 2006 à l'encontre de la société ATERMES d'un montant respectif de 123 326,22 euros et de 20 668,88 euros pour avoir paiement de ce remboursement ; que la société ATERMES a contesté ces décisions devant le Tribunal administratif de Versailles qui, par jugement en date du 11 décembre 2009, a rejeté la demande d'annulation de la décision notifiée par lettre du 9 mars 2006 et a déchargé la société ATERMES des sommes réclamées par les titres de perception susmentionnés ; que la société ATERMES fait appel de ce jugement en tant qu'il a rejeté sa demande d'annulation de la décision notifiée par lettre du 9 mars 2006 ; que le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie fait appel du jugement en tant qu'il a déchargé la société ATERMES du paiement des sommes mises à sa charge par les deux titres de perception ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant que la décision par laquelle l'Etat consent une aide économique sur fonds publics par une convention type qui détermine les engagements du bénéficiaire en échange de l'aide consentie crée des droits au profit du bénéficiaire de l'aide dans la mesure où celui-ci respecte les conditions mises à son octroi ; que, par suite, la décision portant retrait de l'aide présente le caractère d'un acte détachable du contrat type et est susceptible de recours pour excès de pouvoir ;

Considérant qu'en déclarant irrecevable la demande de la société ATERMES tendant à l'annulation de la décision ministérielle du 9 mars 2006 informant ladite société de l'annulation et du remboursement d'une avance de 125 008 euros qui lui avait été précédemment consentie au motif que " le juge des contestations relatives aux marchés publics n'a pas le pouvoir de prononcer l'annulation de la décision administrative prononçant la résiliation d'un tel marché ", alors que les conventions type d'octroi d'une aide ne présentent pas le caractère de " marchés publics " et que la décision retirant l'aide ne constitue pas une décision de " résiliation ", le Tribunal administratif de Versailles a commis une double erreur de droit ; que, par suite, le jugement attaqué ne peut qu'être annulé ;

Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par la société ATERMES devant le tribunal administratif ;

Sur légalité de la décision d'annulation du contrat du 6 janvier 1999 :

Considérant qu'aux termes de l'article 12 du contrat du 6 janvier 1999 : " (...) sauf disposition législative ou réglementaire contraire, le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, après avis de la Commission spécialisée instituée par le décret du douze novembre mil neuf cent soixante quatre, pourrait également annuler l'avance consentie à la société et, en conséquence, ordonner le reversement à l'Etat des sommes versées, augmentées des intérêts correspondants dans les cas suivants : défaut de paiement, à bonne date, des sommes dues au titre des articles 4, 5 et 6, et un mois après une simple mise en demeure, malgré tout paiement partiel effectué même postérieurement à celle-ci. (...) " et qu'aux termes de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979 susvisée : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : (...) retirent ou abrogent une décision créatrice de droits (...) " ;

Considérant que le ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi, après avoir constaté que la société ATERMES, en s'abstenant de rembourser les intérêts de l'avance de 125 008 euros (820 000 francs), ne remplissait plus les conditions fixées par le contrat du 6 janvier 1999, a, par décision du 9 mars 2006, décidé d'en ordonner le remboursement ; que, par application de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979, cette décision, qui retire une décision créatrice de droit, doit être motivée ; que la décision attaquée, présentée par le ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi comme constituant la décision d'annulation et de remboursement de l'avance consentie à la société ATERMES, est une télécopie émise par la direction générale du Trésor et de la politique économique comprenant en annexe un extrait du procès-verbal de compte-rendu du 31 janvier 2005 de la commission dite de " l'article 90 ", laquelle arrête le principe d'un recouvrement de l'avance consentie à la société ATERMES ; que cette décision ne comprend aucun motif de fait ou de droit permettant de justifier la décision prise par le ministre ou les raisons pour lesquelles la société ATERMES n'aurait pas respecté les stipulations du contrat du 6 janvier 1999 ; qu'ainsi cette décision méconnaît les dispositions de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979 et doit être annulée ;

Considérant que l'annulation de la décision du 9 mars 2006 implique nécessairement, par voie de conséquence, l'annulation des titres de perception émis le 7 avril 2006 pris sur son fondement ;

Considérant, enfin, que la présente annulation n'implique aucune mesure d'exécution ; qu'ainsi, les conclusions présentées par la société ATERMES tendant à enjoindre à l'administration de statuer à nouveau sur sa demande d'annulation du contrat d'avance sur le fondement de l'article 8 dudit contrat ne peuvent qu'être rejetées ;

Sur les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros à verser à la société ATERMES au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement en date du 11 décembre 2009 du Tribunal administratif de Versailles est annulé.

Article 2 : La décision du ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi, notifiée par lettre en date du 9 mars 2006, exigeant le remboursement de l'avance consentie à la société ATERMES par le contrat du 6 janvier 1999, ensemble les titres de perception émis le 7 avril 2006 pour des montants de 123 326,22 euros et de 20 668,88 euros sont annulés.

Article 3 : L'Etat versera à la société ATERMES la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la société ATERMES et les conclusions du ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi sont rejetés.

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N° 10VE00274


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 10VE00274
Date de la décision : 14/06/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

01-03-01-02-01-01 Actes législatifs et administratifs. Validité des actes administratifs - Forme et procédure. Questions générales. Motivation. Motivation obligatoire. Motivation obligatoire en vertu des articles 1 et 2 de la loi du 11 juillet 1979.


Composition du Tribunal
Président : Mme de BOISDEFFRE
Rapporteur ?: M. Jean-Edmond PILVEN
Rapporteur public ?: Mme COURAULT
Avocat(s) : BARBIER

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2012-06-14;10ve00274 ?
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