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05/06/2012 | FRANCE | N°10VE01684

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 5ème chambre, 05 juin 2012, 10VE01684


Vu la requête, enregistrée le 28 mai 2010 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, présentée pour M. Niagui A demeurant ..., par Me Guillon ; M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler l'ordonnance n° 0805332 du 30 mars 2010 par laquelle le président de la 9ème chambre du Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions ministérielles portant retrait de points suite aux infractions constatées les 10 février 2004 (2 points), 14 août 2004 (2 points), 15 décembre 2005 (4 points), 16 septembre 2006 (2 points) et 27

février 2007 (2 points), ensemble la décision " 48 SI " invalidant so...

Vu la requête, enregistrée le 28 mai 2010 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, présentée pour M. Niagui A demeurant ..., par Me Guillon ; M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler l'ordonnance n° 0805332 du 30 mars 2010 par laquelle le président de la 9ème chambre du Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions ministérielles portant retrait de points suite aux infractions constatées les 10 février 2004 (2 points), 14 août 2004 (2 points), 15 décembre 2005 (4 points), 16 septembre 2006 (2 points) et 27 février 2007 (2 points), ensemble la décision " 48 SI " invalidant son permis de conduire pour solde de points nul ;

2°) d'annuler lesdites décisions ;

Il soutient que sa demande est recevable ; que les décisions attaquées n'ont pas été valablement notifiées ; que le pli contenant la décision " 48 SI " a été présenté à une adresse où il n'habite pas ; qu'il n'avait pas l'obligation d'informer les services préfectoraux d'une modification de son adresse ; qu'il n'a pas été avisé de la mise en instance dudit pli au bureau de poste ; que l'administration n'apporte pas la preuve du dépôt d'un avis de passage par le préposé postal ; qu'aucun élément ne permet de tenir pour établi que la copie du pli produit par le ministre contenait une décision " 48 SI " ; que l'administration est débitrice de la charge de la preuve et qu'il lui appartient d'établir l'existence et le contenu de l'acte dont elle se prévaut ; qu'il appartient à l'administration d'établir que les voies et délais de recours figuraient dans le document envoyé au requérant avant de pouvoir lui opposer l'expiration du délai de recours contentieux ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de procédure pénale ;

Vu le code de la route ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 3 mai 2012 le rapport de M. Diémert, président ;

Considérant que M. A relève appel de l'ordonnance du 30 mars 2010 par laquelle le président de la 9ème chambre du Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions ministérielles portant retrait de points suite aux infractions constatées les 10 février 2004 (2 points), 14 août 2004 (2 points), 15 décembre 2005 (4 points), 16 septembre 2006 (2 points) et 27 février 2007 (2 points), ensemble la décision " 48 SI " invalidant son permis de conduire pour solde de points nul ;

Considérant qu'aux termes de l'article R. 421-1 du code de justice administrative : " Sauf en matière de travaux publics, la juridiction ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision, et ce, dans les deux mois à partir de la notification ou de la publication de la décision attaquée (...) " ;

Considérant qu'il incombe à l'administration, lorsqu'elle oppose une fin de non-recevoir tirée de la tardiveté d'une action introduite devant une juridiction administrative, d'établir la date à laquelle la décision attaquée a été régulièrement notifiée à l'intéressé ; qu'en cas de retour à l'administration, au terme du délai de mise en instance, du pli recommandé contenant la décision, la notification est réputée avoir été régulièrement accomplie à la date à laquelle ce pli a été présenté à l'adresse de l'intéressé, dès lors du moins qu'il résulte soit de mentions précises, claires et concordantes portées sur l'enveloppe, soit, à défaut, d'une attestation du service postal ou d'autres éléments de preuve, que le préposé a, conformément à la réglementation en vigueur, déposé un avis d'instance informant le destinataire que le pli était à sa disposition au bureau de poste ;

Considérant qu'il résulte de la réglementation postale, et notamment de l'instruction postale du 6 septembre 1990, qu'en cas d'absence du destinataire d'une lettre remise contre signature, le facteur doit, en premier lieu, porter la date de vaine présentation sur le volet " preuve de distribution " de la liasse postale, cette date se dupliquant sur les autres volets, en deuxième lieu, détacher de la liasse l'avis de passage et y mentionner le motif de non distribution, la date et l'heure à partir desquelles le pli peut être retiré au bureau d'instance et le nom et l' adresse de ce bureau, cette dernière indication pouvant résulter de l'apposition d'une étiquette adhésive, en troisième lieu, déposer l'avis ainsi complété dans la boîte aux lettres du destinataire et, enfin, reporter sur le pli le motif de non distribution et le nom du bureau d'instance ;

Considérant que, compte tenu de ces modalités, doit être regardé comme portant des mentions précises, claires et concordantes suffisant à constituer la preuve d'une notification régulière le pli recommandé retourné à l'administration auquel est rattaché un volet " avis de réception " sur lequel a été apposée par voie de duplication la date de vaine présentation du courrier, et qui porte, sur l'enveloppe ou sur l'avis de réception, l'indication du motif pour lequel il n'a pu être remis ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que le pli contenant la décision référencée " 48 SI " portant invalidation du permis de conduire de M. A a été présenté, le 12 janvier 2008, à l'adresse de l'intéressé puis a été retourné à l'administration avec la mention " non réclamé, retour à l'envoyeur " ; que, si l'avis de réception et l'enveloppe du pli recommandé produits par le ministre de l'intérieur comportent la date de présentation du pli au domicile de M. A ainsi que le tampon de réexpédition du pli à partir du bureau de poste " Les Mureaux, guichet annexe ", la mention " avisé " n'y figure pas, non plus qu'aucune autre mention portant indication du motif pour lequel le pli n'a pu être remis ; que, dans ces conditions, les mentions portées sur ledit pli ne suffisent pas à établir que M. A a été avisé du passage du préposé postal à son domicile et de la mise en instance du pli ; qu'ainsi, la décision référencée " 48 SI " ne peut être regardée comme ayant été régulièrement notifiée le 12 janvier 2008 à M. A et la présentation de la lettre recommandée à son domicile n'a donc pu faire courir à son encontre le délai de recours contentieux ; que, dès lors, la demande de M. A n'étant pas tardive, c'est à tort que le président de la 9ème chambre du Tribunal administratif de Versailles l'a rejetée comme irrecevable ; qu'il y a lieu d'en prononcer l'annulation et de statuer, par la voie de l'évocation, sur la demande présentée par M. A devant le tribunal ;

Sur la légalité des décisions de retrait de points :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 223-1 du code de la route : " (...) La réalité d'une infraction entraînant retrait de points est établie par le paiement d'une amende forfaitaire ou l'émission du titre exécutoire de l'amende forfaitaire majorée (...) " ;

Considérant qu'il ressort des mentions du relevé d'information intégral de M. A que l'infraction constatée le 15 décembre 2005 a donné lieu au paiement de l'amende forfaitaire par l'intéressé et que les infractions constatées les 10 février 2004, 14 août 2004, 16 septembre 2006 et 27 février 2007 ont donné lieu à l'émission du titre exécutoire de l'amende forfaitaire majorée ; qu'eu égard à ces mentions et en l'absence de tout élément avancé par l'intéressé permettant de mettre en doute leur exactitude, ce document suffit à établir la réalité des infractions en cause ;

Considérant, en second lieu, qu'il résulte des dispositions combinées des articles L. 223-3 et R. 223-3 du code de la route que l'administration ne peut légalement prendre une décision retirant des points affectés à un permis de conduire, à la suite d'une infraction dont la réalité a été établie, que si l'auteur de l'infraction s'est vu préalablement délivrer par elle un document contenant les informations prévues aux articles L. 223-3 et R. 223-3 du code de la route, lesquelles constituent une garantie essentielle lui permettant de contester la réalité de l'infraction et d'en mesurer les conséquences sur la validité de son permis ; qu'il appartient à l'administration d'apporter la preuve, par tout moyen, qu'elle a satisfait à cette obligation d'information ;

Sur l'infraction du 16 septembre 2006 (2 points) :

Considérant qu'il résulte de l'instruction que, sur le procès-verbal de l'infraction en cause, conforme aux dispositions des articles A. 37 à A. 37-4 du code de procédure pénale, il est expressément indiqué que M. A a refusé de contresigner la mention : " Le contrevenant reconnaît avoir reçu la carte de paiement et l'avis de contravention. ", sans qu'il y ait fait figurer de réserve sur les modalités de délivrance de l'information ; que dans ces conditions, il doit être regardé comme établi que M. A a pris connaissance, sans élever d'objection, du contenu de l'avis de contravention et que cet avis comportant les informations requises par les articles L. 223-3 et R. 223-3 du code de la route précités lui a été remis ;

Sur l'infraction du 27 février 2007 (2 points) :

Considérant que le ministre produit le procès-verbal relatif à l'infraction en cause, établi selon un formulaire conforme aux dispositions des articles A. 37 à A. 37-4 du code de procédure pénale et revêtu de la signature du requérant ; que si M. A s'est nécessairement vu remettre, lors de la constatation de cette infraction, un avis de contravention dont le modèle comporte les informations requises par les dispositions des articles L. 223-3 et R. 223-3 du code de la route, la case " retrait de point(s) du permis de conduire " n'a pas été renseignée par l'agent verbalisateur ; que, dès lors, M. A est fondé à soutenir que l'administration n'a pas rempli son obligation d'information préalable prévue par les dispositions susrappellées du code de la route ; qu'il en résulte que la décision par laquelle le ministre a retiré deux points du capital de points du permis de conduire de M. A, à la suite de l'infraction en cause, est intervenue à l'issue d'une procédure irrégulière ;

Sur l'infraction du 10 février 2004 (2 points) :

Considérant qu'il ressort du procès-verbal relatif à l'infraction en cause que la mention selon laquelle le contrevenant a reçu l'avis de contravention n'est pas contresignée par M. A ; que, si cette infraction a été constatée au moyen d'un formulaire conforme aux dispositions des articles A. 37 à A. 37-4 du code de procédure pénale comportant les informations requises, il résulte de l'instruction qu'elle a donné lieu, en application des dispositions de l'article 529-2 du code de procédure pénale, à défaut du paiement de l'amende forfaitaire ou du dépôt régulier d'une requête tendant à son exonération, à l'émission d'un titre exécutoire d'amende forfaitaire majorée devenu définitif le 30 août 2004 ; que, dans ces conditions, il ne peut être tenu pour établi que M. A, qui ne s'est pas acquitté du paiement de l'amende forfaitaire, s'est vu remettre, lors de la constatation de cette infraction, l'avis de contravention normalement revêtu des informations requises ; qu'il en résulte que la décision par laquelle le ministre a retiré deux points du capital de points du permis de conduire de M. A, à la suite de l'infraction en cause, est intervenue à l'issue d'une procédure irrégulière ;

Sur les infractions des 14 août 2004 (2 points) et 15 décembre 2005 (4 points) :

Considérant que M. A soutient ne pas avoir reçu les informations prévues par les dispositions sus rappelées du code de la route lors de la constatation des infractions en cause, qui, au surplus, ont fait l'objet, pour chacune d'entre elles, de l'émission d'un titre exécutoire de l'amende forfaitaire majorée ; que le ministre, en ne produisant pas les procès-verbaux relatifs à ces infractions, n'apporte pas d'élément probant tendant à établir que l'administration aurait satisfait aux obligations prévues aux articles L. 223-3 et R. 223-3 du code de la route ; que, par conséquent, les décisions de retrait de deux et quatre points consécutives aux infractions en cause sont intervenues à la suite d'une procédure irrégulière ;

Sur la légalité de la décision " 48 SI " :

Considérant qu'eu égard à l'annulation des retraits de deux, deux, quatre et deux points intervenus à la suite des infractions constatées les 10 février 2004, 14 août 2004, 15 décembre 2005 et 27 février 2007, le solde du capital de points du titre de conduite de M. A n'était pas nul lors de l'édiction de la décision " 48 SI " constatant la perte de validité du permis de conduire de l'intéressé ; qu'il y a lieu d'en prononcer l'annulation ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A est seulement fondé à demander l'annulation des décisions portant retrait de deux, deux, quatre et deux points de son permis de conduire consécutivement aux infractions commises les 10 février 2004, 14 août 2004, 15 décembre 2005 et 27 février 2007 et, par voie de conséquence, de la décision " 48 SI " portant invalidation de son permis de conduire ;

Considérant que le présent arrêt implique nécessairement que le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration réaffecte au capital de points du permis de conduire de M. A les deux, deux, quatre et deux points qui en ont été retirés consécutivement aux infractions des 10 février 2004, 14 août 2004, 15 décembre 2005 et 27 février 2007 dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt ;

DECIDE :

Article 1er : L'ordonnance n° 0805332 du 30 mars 2010 du président de la 9ème chambre du Tribunal administratif de Versailles est annulée.

Article 2 : La décision ministérielle " 48 SI ", en tant qu'elle emporte retrait de deux, deux, quatre et deux points du permis de conduire de M. A suite aux infractions constatées les 10 février 2004, 14 août 2004, 15 décembre 2005 et 27 février 2007 et l'informe de la perte de validité de son permis de conduire, est annulée.

Article 3 : Il est enjoint au ministre de l'intérieur de réaffecter au capital de points du permis de conduire de M. A les points mentionnés à l'article 2 du présent arrêt dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 4 : Le surplus des conclusions présentées par M. A est rejeté.

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N° 10VE01684


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 10VE01684
Date de la décision : 05/06/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

49-04-01-04-025 Police administrative. Police générale. Circulation et stationnement. Permis de conduire.


Composition du Tribunal
Président : M. DIÉMERT
Rapporteur ?: M. Stéphane DIÉMERT
Rapporteur public ?: Mme COURAULT
Avocat(s) : GUILLON

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2012-06-05;10ve01684 ?
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