La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

10/05/2012 | FRANCE | N°11VE01905

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 1ère chambre, 10 mai 2012, 11VE01905


Vu la requête, enregistrée le 18 mai 2011 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, présentée pour M. Chithi Bounou A, demeurant ..., par Me Harroch, avocat à la Cour ; M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1007736 en date du 14 avril 2011 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 17 juin 2010 du préfet de la Seine-Saint-Denis refusant de lui délivrer un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français et fixant le pays de destination ;

2°) d'annuler

pour excès de pouvoir ledit arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Seine-...

Vu la requête, enregistrée le 18 mai 2011 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, présentée pour M. Chithi Bounou A, demeurant ..., par Me Harroch, avocat à la Cour ; M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1007736 en date du 14 avril 2011 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 17 juin 2010 du préfet de la Seine-Saint-Denis refusant de lui délivrer un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français et fixant le pays de destination ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir ledit arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de lui délivrer un titre de séjour " vie privée et familiale " dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard, ou, à défaut, de réexaminer sa situation sous les mêmes conditions et de lui délivrer, durant cet examen, une autorisation provisoire de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que la décision de refus de séjour attaquée est insuffisamment motivée dès lors qu'elle ne fait pas précisément état de sa situation personnelle et familiale ; qu'il en est de même de la mesure portant obligation de quitter le territoire en ce qu'elle ne vise pas l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que l'arrêté litigieux a été rendu au terme d'une procédure irrégulière faute d'avoir été précédé de la saisine de la commission du titre de séjour ; que la décision portant refus de séjour méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 3-1 de la convention relative aux droits de l'enfant ainsi que les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code précité et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de sa situation personnelle ; qu'en effet, présent en France depuis treize ans, il vit en concubinage depuis janvier 2008 avec Mme Mbae, titulaire d'une carte de résident, avec laquelle il a eu deux enfants dont il contribue à l'entretien et à l'éducation ; que la mesure d'éloignement contestée est illégale en raison de l'illégalité de la décision de refus de séjour ; que cette mesure méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 3-1 de la convention relative aux droits de l'enfant ainsi que les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code précité ;

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la convention internationale relative aux droits de l'enfant, signée à New York le 26 janvier 1990 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu, au cours de l'audience publique du 10 avril 2012, le rapport de M. Huon, premier conseiller ;

Considérant que M. A, de nationalité comorienne, relève appel du jugement du 14 avril 2011 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 17 juin 2010 du préfet de la Seine-Saint-Denis refusant de lui délivrer un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français et fixant le pays de destination ;

Sur la légalité de la décision portant refus de séjour :

Considérant, en premier lieu, que, pour refuser le titre de séjour sollicité par M. A sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-11-7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet de la Seine-Saint-Denis, après avoir notamment visé cet article, a relevé que l'intéressé, vivant en concubinage depuis janvier 2008 avec une ressortissante étrangère en situation régulière ne justifiait pas d'une durée de communauté de vie suffisante et pouvait poursuivre une vie familiale normale dans son pays d'origine où résidaient toujours ses trois premiers enfants ; que la décision contestée, qui n'avait pas à faire état de tous les éléments caractérisant la situation personnelle et familiale du requérant, comporte ainsi les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement et est, par suite, suffisamment motivée ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ; qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa rédaction applicable au jour de la décision attaquée : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République. " ; qu'aux termes de l'article R. 313-21 dudit code : " Pour l'application du 7º de l'article L. 313-11, l'étranger qui invoque la protection due à son droit au respect de la vie privée et familiale en France doit apporter toute justification permettant d'apprécier la réalité et la stabilité de ses liens personnels et familiaux effectifs en France au regard de ceux qu'il a conservés dans son pays d'origine " ;

Considérant que M. A soutient qu'entré en France en 1998, il vit depuis janvier 2008 avec Mme Mbae, une compatriote titulaire d'une carte de résident avec laquelle il a eu deux enfants nés en 2007 et 2009 ; que, toutefois, en se bornant à produire une copie d'une seule page de son passeport indiquant une date d'entrée le 16 décembre 1998, l'intéressé ne justifie pas de sa présence ininterrompue sur le territoire national depuis cette date ; qu'il n'établit pas non plus, par la production d'attestations de proches, la continuité de sa communauté de vie avec Mme Mbae depuis janvier 2008 et ce, alors qu'il ressort des pièces du dossier qu'il n'a reconnu leur premier enfant, né le 3 juin 2007, que le 13 octobre 2009 ; que, de surcroît, M. A n'apporte aucune précision sur les conditions dans lesquelles il contribuerait à l'entretien et à l'éducation des deux enfants issus de sa liaison avec sa prétendue compagne ; qu'enfin, il est constant que l'intéressé, âgé de 55 ans, dispose de fortes attaches dans son pays d'origine où résident ses trois autres enfants, dont l'un est mineur ; que, dans ces conditions, la décision de refus de séjour attaquée ne peut être regardée comme ayant porté une atteinte disproportionnée aux droits de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale ; qu'elle n'a donc pas méconnu les stipulations et dispositions précitées ; que, pour les mêmes motifs et alors, au surplus, que M. A ne justifie pas d'une quelconque insertion professionnelle ou sociale, cette décision n'est pas entachée d'une erreur manifeste quant à l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle du requérant ;

Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant du 26 janvier 1990 : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale " ; qu'il résulte de ces stipulations que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant ;

Considérant que, si M. A fait valoir qu'il est indispensable qu'il reste aux côtés de ses enfants en bas âge, il n'est pas établi, ainsi qu'il vient d'être dit, qu'il participerait à leur entretien et leur éducation ; que, par conséquent, la décision attaquée n'a pas méconnu les stipulations précitées de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, relatif à la commission du titre de séjour : " La commission est saisie par l'autorité administrative lorsque celle-ci envisage de refuser de délivrer ou de renouveler une carte de séjour temporaire à un étranger mentionné à l'article L. 313-11 ou de délivrer une carte de résident à un étranger mentionné aux articles L. 314-11 et L. 314-12, ainsi que dans le cas prévu à l'article L. 431-3 (...) " ; qu'il résulte de ces dispositions que le préfet n'est tenu de saisir la commission du titre de séjour que du seul cas des étrangers qui remplissent effectivement les conditions prévues aux articles L. 313-11, L. 314-11, L. 314-12 et L. 431-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile auxquels il envisage de refuser le titre de séjour sollicité et non de celui de tous les étrangers qui se prévalent de ces dispositions ; que M. A n'établissant pas, ainsi qu'il vient d'être dit, qu'il remplissait les conditions pour obtenir de plein droit la carte de séjour temporaire qu'il sollicitait sur le fondement de l'article L. 313-11-7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet n'était pas tenu de soumettre son cas à la commission du titre de séjour avant de rejeter sa demande ;

Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire :

Considérant, en premier lieu, que M. A n'établit pas que la décision de refus de séjour qui lui a été opposée serait entachée d'illégalité ; que, dès lors, l'exception d'illégalité de cette décision, soulevée à l'appui des conclusions dirigées contre la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français, ne peut qu'être rejetée ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'il ressort des termes mêmes du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que les décisions portant obligation de quitter le territoire français n'ont pas à être motivées ; que, par suite, le moyen tiré de ce que la mesure d'éloignement litigieuse serait dépourvue de motivation est inopérant ;

Considérant, en troisième lieu, que, pour les motifs précédemment indiqués, ladite mesure n'est contraire ni aux stipulations des articles 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et 3-1 de la convention relative aux droits de l'enfant ni aux dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, les conclusions du requérant aux fins d'injonction et d'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. A est rejetée.

''

''

''

''

N° 11VE01905 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 11VE01905
Date de la décision : 10/05/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. SOUMET
Rapporteur ?: M. Christophe HUON
Rapporteur public ?: Mme DIOUX-MOEBS
Avocat(s) : HARROCH

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2012-05-10;11ve01905 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award