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10/05/2012 | FRANCE | N°11VE00025

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 1ère chambre, 10 mai 2012, 11VE00025


Vu la requête, enregistrée le 5 janvier 2011 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, présentée pour M. et Mme Zivoslav A, demeurant ..., par Me Harroch, avocat à la Cour ; M. et Mme A demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement nos 0711169-0802656 en date du 7 décembre 2010 du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise, en tant que ce jugement, après avoir prononcé un non-lieu à statuer à hauteur des dégrèvements accordés en cours d'instance par l'administration, a rejeté le surplus de leur demande tendant à la décharge des cotisations supplémenta

ires à l'impôt sur le revenu et aux cotisations sociales auxquelles ils ...

Vu la requête, enregistrée le 5 janvier 2011 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, présentée pour M. et Mme Zivoslav A, demeurant ..., par Me Harroch, avocat à la Cour ; M. et Mme A demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement nos 0711169-0802656 en date du 7 décembre 2010 du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise, en tant que ce jugement, après avoir prononcé un non-lieu à statuer à hauteur des dégrèvements accordés en cours d'instance par l'administration, a rejeté le surplus de leur demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu et aux cotisations sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2002 et 2003 ainsi que des pénalités correspondantes ;

2°) de prononcer la décharge sollicitée ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Ils soutiennent que la procédure d'imposition est irrégulière eu égard au retard mis par l'administration fiscale pour leur communiquer les pièces justifiant des rectifications envisagées ; que, s'agissant des crédits bancaires de l'année 2003, ils ont justifié de la nature des sommes correspondant aux remises de chèques des 7 janvier, 7 février, 25 février, 8 mars, 29 avril 2003, 13 mai, 27 mai, 12 juin 25 août et 5 novembre sur le compte Crédit Lyonnais n° 42603 B, qui, outre un crédit de faible montant (29 avril), sont relatives à des salaires de M. A et des remboursements de frais professionnels ; que la somme de 130 000 euros déposée le 28 janvier 2003 sur le compte Crédit Lyonnais provient de la vente de deux logements à Belgrade (Serbie) et Igalo (Monténégro) et non, comme le soutient l'administration, d'une propriété à Sfedmjevo (Serbie), ce qui explique que, saisies dans le cadre de la procédure d'assistance administrative, les autorités serbes ont confirmé qu'ils étaient toujours propriétaires de ce bien ; que, s'agissant du déséquilibre des balances des espèces de l'année 2002, ils ne pouvaient être taxés aux termes de la proposition de rectification sur un montant de 83 817 euros alors que, dans le cadre de la demande d'éclaircissements, ils n'ont été interrogés que sur une somme de 32 688 euros, ce qui justifie le dégrèvement de la différence, soit 51 129 euros ; qu'en outre, le service ne peut les imposer sur la somme de 51 129 euros déclarée aux douanes en 2002, dès lors qu'ils n'ont effectué aucun versement de ce montant ; qu'en outre, ils émettent les plus vives réserves quant à l'évaluation de leurs dépenses de train de vie ; que la somme de 139 100 euros incluse dans la balance des espèces de l'année 2003 et qui correspond à la vente d'un bien immobilier en Serbie figurant déjà parmi les crédits bancaires considérés comme non justifiés, il conviendra de diminuer les rectifications litigieuses à due concurrence de ce montant pour éviter une double taxation ; que le service n'établit pas l'intention délibérée d'éluder l'impôt dès lors, d'une part, qu'il a été justifié des crédits bancaires et du caractère erroné de la balance des espèces ainsi que des conditions d'acquisition du bien immobilier sis à Livry-Gargan, d'autre part, qu'ils ont pleinement coopéré aux opérations de contrôle et, en particulier, n'ont jamais dissimulé l'existence d'un compte bancaire en Serbie et ont spontanément déclaré aux services des douanes les transferts d'argent en provenance de l'étranger ;

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 10 avril 2012 :

- le rapport de M. Huon, premier conseiller,

- et les conclusions de Mme Dioux-Moebs, rapporteur public ;

Considérant que M. et Mme A ont fait l'objet d'un examen contradictoire de leur situation fiscale personnelle portant sur les années 2002 et 2003 ; qu'à l'issue de ce contrôle et aux termes d'une proposition de rectification du 5 octobre 2005, le service a, selon la procédure de taxation d'office résultant de l'application des articles L. 16 et L. 69 du livre des procédures fiscales, réintégré au revenu imposable des intéressés des sommes correspondant, d'une part, au solde inexpliqué de la balance des espèces établie pour les deux années en cause et, d'autre part, à plusieurs crédits bancaires injustifiés au titre de l'année 2003 ; que M. et Mme A relèvent appel du jugement du 7 décembre 2010 du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise, en tant que ce jugement, après avoir prononcé un non-lieu à statuer à hauteur des dégrèvements accordés en cours d'instance par l'administration, a rejeté le surplus de leur demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu et aux contribution sociales auxquelles ils ont ainsi été assujettis au titre des années 2002 et 2003 ainsi que des pénalités correspondantes ;

Sur l'étendue du litige :

Considérant que, dans son mémoire en défense du 3 août 2011, l'administration a admis qu'il convenait de retrancher du solde des balances des espèces les sommes de 51 129 euros au titre de l'année 2002 et 100 000 euros au titre de l'année 2003 ; que, par une décision en date du 21 mars 2012, elle a prononcé le dégrèvement des droits et pénalités correspondants tant en matière d'impôt sur le revenu que de contributions sociales ; que, par suite et dans cette mesure, les conclusions à fin de décharge présentées par M. et Mme A se trouvent désormais dépourvues d'objet ;

Sur les impositions restant en litige :

En ce qui concerne la régularité de la procédure d'imposition :

Considérant que, si M. et Mme A demandent à la Cour de " constater le retard apporté par l'administration fiscale à la communication des pièces fondant les poursuites " et de " déclarer la procédure irrégulière ", les intéressés qui ne contestent pas avoir été régulièrement rendus destinataires de l'ensemble des actes de la procédure de rectification, ainsi que l'a d'ailleurs expressément jugé le Tribunal administratif, n'apportent aucune précision à l'appui de ce moyen et, ainsi, ne mettent pas la Cour à même d'en apprécier le bien-fondé ;

En ce qui concerne le bien-fondé des impositions :

Considérant qu'en application des dispositions des articles L. 193 et R. 193-1 du livre des procédures fiscales, il appartient aux contribuables de prouver l'exagération des bases d'imposition taxées d'office en application de l'article L. 69 du même livre ;

S'agissant des crédits bancaires injustifiés :

Sur les sommes portées au crédit du compte Crédit Lyonnais n° 42603B :

Considérant, en premier lieu, qu'il résulte du jugement attaqué que l'administration a abandonné, en première instance, la taxation d'une somme totale de 20 014,09 euros laquelle, conformément aux justifications apportées par les requérants, a été regardée comme représentative de salaires perçus par M. A pour les mois de décembre 2002, janvier 2003, février 2003, avril 2003, mai 2003, juillet 2003 et septembre 2003 ; que, par suite, dès lors que ladite somme a déjà fait l'objet d'un dégrèvement, l'argumentation présentée à ce titre par les requérants se trouve dénuée de toute portée utile ;

Considérant, en deuxième lieu, que M. et Mme A, qui ne contestent qu'une partie des autres crédits injustifiés figurant au crédit de leur compte Crédit Lyonnais n° 42603B, n'apportent pas de justificatifs de nature à établir, ainsi qu'ils l'allèguent, que ces crédits correspondraient, à des avances sur salaire (remises de chèque des 25 février et 27 mai 2003 pour des montants respectifs de 964,10 euros et 1 544,80 euros) et, pour le surplus, à des remboursements de frais professionnels à hauteur de 844,66 euros ; qu'enfin, en se bornant à invoquer la modicité de la somme en cause, les intéressés n'apportent aucune explication sur le chèque du 29 avril 2003 d'un montant de 48,16 euros ; que, par suite, les requérants n'établissent ni la nature ni l'origine des crédits litigieux ;

Sur la remise d'espèces de 130 000 euros du 28 janvier 2003 sur le compte Crédit Lyonnais n° 48290 K :

Considérant que M. et Mme A soutiennent que ces espèces proviennent de la vente de biens immobiliers leur appartenant dans l'ex République fédérale de Yougoslavie, notamment, de deux logements situés à Belgrade et Igalo ; que, toutefois, s'ils produisent des attestations de vente de ces biens, ces documents, qui notamment ne mentionnent ni le prix de cession ni les conditions dans lesquelles il aurait été versé, ne permettent d'établir de corrélation entre les transactions invoquées, qui sont intervenues à l'étranger en 2001, et la remise d'espèces de 130 000 euros opérée en France le 28 janvier 2003 ; qu'à cet égard, les requérants ne sauraient utilement faire valoir que lors de son entrée sur le territoire français, le 25 janvier 2003, M. A a déclaré aux autorités douanières être en possession de la somme de 100 000 euros provenant d'une partie de la vente de ces biens, dès lors d'une part, que ladite somme ne correspond pas au crédit litigieux et, d'autre part, que l'intéressé avait indiqué, lors de son audition par les services douaniers le 25 avril 2003, qu'elle avait été déposée sur son compte Crédit Lyonnais n° 42603 B ; que, dans ces conditions, eu égard au caractère sommaire et invérifiable de leurs affirmations, les requérants n'apportent pas la preuve de la nature et de l'origine du versement en cause ;

S'agissant du solde inexpliqué des balances des espèces :

Considérant, d'une part, ainsi qu'il a été dit, qu'en cause d'appel, le service a admis, comme le faisaient valoir les requérants, qu'il convenait de retrancher les sommes de 51 129 euros et 100 000 euros du montant des liquidités employées retenu pour établir les balances des espèces des années 2002 et 2003 et a prononcé le dégrèvement correspondant ;

Considérant, d'autre part, que M. et Mme A soutiennent qu'au titre de l'année 2003, l'administration a doublement taxé une somme de 139 100 euros en l'incluant à la fois dans les liquidités employées servant à établir la balance des espèces et dans les crédits bancaires injustifiés ; que, cependant, il ressort clairement de la proposition de rectification du 5 octobre 2005 qu'après retraitement du montant total des revenus demeurés inexpliqués, ladite somme n'a été imposée qu'une seule fois ; que, par suite, le moyen susanalysé manque en fait ;

En ce qui concerne les pénalités :

Considérant qu'aux termes de l'article 1729 du code général des impôts, dans sa rédaction alors applicable : " 1. Lorsque la déclaration ou l'acte mentionné à l'article 1728 font apparaître une base d'imposition ou des éléments servant à la liquidation de l'impôt insuffisants, inexacts ou incomplets, le montant des droits mis à la charge du contribuable est assorti de l'intérêt de retard visé à l'article 1727 et d'une majoration de 40 % si la mauvaise foi de l'intéressé est établie (...) " ;

Considérant qu'aux termes de la proposition de rectification du 5 octobre 2005, le vérificateur a relevé l'importance des crédits bancaires injustifiés et du déséquilibre des balances des espèces pour lesquels M. et Mme A n'ont fourni, lors des divers entretiens, que des explications évasives et des justificatifs parcellaires ; qu'il a souligné que les contribuables, qui ont procédé à l'achat et à l'entretien de véhicules haut de gamme ainsi que de biens immobiliers, ont effectivement disposé de sommes importantes et ne pouvaient dès lors ignorer qu'ils ne soumettaient pas à l'impôt une part prépondérante de leurs ressources ; qu'il a noté, au surplus, que les intéressés n'avaient pas porté à la connaissance de l'administration l'existence de comptes ouverts en Serbie en méconnaissance des dispositions des articles 1649 A du code général des impôts et n'avaient déclaré un transfert de 100 000 Deutschemarks que plusieurs mois après leur entrée sur le territoire français ; que, si M. et Mme A font valoir qu'au cours de la procédure contentieuse, ils ont justifié du mal-fondé d'une fraction de l'imposition litigieuse, les sommes qui demeurent taxées entre leurs mains en tant que revenus d'origine indéterminée demeurent sensiblement supérieures aux revenus spontanément déclarés qui s'établissent à 20 272 euros pour 2002 et 19 966 euros pour 2003 ; qu'eu égard à l'ensemble de ces circonstances, l'administration établit la volonté délibérée des contribuables d'éluder l'impôt ; que, par suite c'est à bon droit qu'elle a assorti les rappels litigieux de la majoration de 40 % prévue par les dispositions précitées de l'article 1729 du code général des impôts ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. " ;

Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme que demandent M. et Mme A au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions à fin de décharge présentées par M. et Mme A à hauteur des droits et pénalités dégrevés en cours d'instance en matière d'impôt sur le revenu et de contributions sociales, soit 43 130 euros au titre de l'année 2002 et 105 397 euros au titre de l'année 2003.

Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de M. et Mme A est rejeté.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 11VE00025
Date de la décision : 10/05/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-01-02-05-02-02 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Règles générales. Impôt sur le revenu. Établissement de l'impôt. Taxation d'office. Pour défaut de réponse à une demande de justifications (art. L. 16 et L. 69 du livre des procédures fiscales).


Composition du Tribunal
Président : M. SOUMET
Rapporteur ?: M. Christophe HUON
Rapporteur public ?: Mme DIOUX-MOEBS
Avocat(s) : HARROCH

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2012-05-10;11ve00025 ?
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