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14/02/2012 | FRANCE | N°10VE02265

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 3ème chambre, 14 février 2012, 10VE02265


Vu la requête, enregistrée le 13 juillet 2010 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, présentée pour Mme Hakife B, domiciliée chez Mlle C, ..., par Me Arapian, avocat à la Cour ; Mme B demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1000489 en date du 31 mai 2010 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 14 décembre 2009 par lequel le préfet des Hauts-de-Seine a refusé de lui délivrer un titre de séjour, a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français et a

fixé le pays de renvoi ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, cet arrê...

Vu la requête, enregistrée le 13 juillet 2010 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, présentée pour Mme Hakife B, domiciliée chez Mlle C, ..., par Me Arapian, avocat à la Cour ; Mme B demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1000489 en date du 31 mai 2010 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 14 décembre 2009 par lequel le préfet des Hauts-de-Seine a refusé de lui délivrer un titre de séjour, a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de renvoi ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet des Hauts-de-Seine de lui délivrer une carte de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que le jugement attaqué est insuffisamment motivé ; que l'arrêté préfectoral méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors que la majorité des membres de sa famille vivent en France ; que les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ont été également méconnues dès lors qu'elle est atteinte d'un lupus erythémateux disséminé associé à un syndrome de Gougerot-Sjögren, maladies ayant entraîné de nombreuses hospitalisations depuis son arrivée en France et qui ne pourront être prises en charge en Turquie dès lors notamment qu'elle appartient à la communauté kurde ; que l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales a été également méconnu en ce qu'elle appartient à une famille persécutée en raison de son engagement politique en faveur des droits des kurdes ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 31 janvier 2012 :

- le rapport de M. Bresse, président assesseur,

- et les conclusions de M. Brunelli, rapporteur public ;

Considérant que Mme B, ressortissante turque, née le 18 mai 1958, relève régulièrement appel du jugement en date du 31 mai 2010 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 14 décembre 2009 par lequel le préfet des Hauts-de-Seine a refusé de lui délivrer un titre de séjour, a assorti cette décision d'une obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de renvoi ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire (...) ; qu'il résulte de ces dispositions, éclairées par les travaux parlementaires qui ont précédé l'adoption de la loi du 24 avril 1997 dont elles sont issues, qu'il appartient à l'autorité administrative, lorsqu'elle envisage l'éloignement d'un étranger du territoire national, de vérifier, au vu de l'avis émis par le médecin inspecteur de santé publique, que cette décision ne peut avoir de conséquences d'une exceptionnelle gravité sur l'état de santé de l'intéressé et, en particulier, d'apprécier, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, la nature et la gravité des risques qu'entraînerait un défaut de prise en charge médicale dans le pays de renvoi ; que lorsque le défaut de prise en charge risque d'avoir des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur la santé de l'intéressé, l'autorité administrative ne peut légalement décider l'éloignement de l'étranger que s'il existe des possibilités de traitement approprié de l'affection en cause dans le pays de renvoi ; que si de telles possibilités existent mais que l'étranger fait valoir qu'il ne peut en bénéficier, soit parce qu'elles ne sont pas accessibles à la généralité de la population, eu égard notamment aux coûts du traitement ou à l'absence de modes de prise en charge adaptés, soit parce qu'en dépit de leur accessibilité, des circonstances exceptionnelles tirées des particularités de sa situation personnelle l'empêcheraient d'y accéder effectivement, il appartient à cette même autorité, au vu de l'ensemble des informations dont elle dispose, d'apprécier si l'intéressé peut ou non bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays de renvoi ;

Considérant que pour fonder le rejet de la demande de délivrance de titre de séjour temporaire de Mme B, le préfet des Hauts-de-Seine s'est fondé sur un avis du 28 octobre 2009 du médecin inspecteur de santé publique indiquant que si l'état de santé de Mme B nécessitait une prise en charge médicale dont le défaut pouvait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, l'intéressée pouvait en bénéficier dans son pays d'origine ; que cependant, Mme B fournit plusieurs certificats médicaux circonstanciés récents émanant de praticiens hospitaliers attestant qu'elle souffre d'un lupus érythémateux disséminé, pathologie auto-immune d'allure évolutive associée à un syndrome de Gougerot-Sjören, une hypertension artérielle sévère, et une ostéonécrose des hanches, pathologies pour lesquelles l'intéressée s'est vue reconnaître un taux d'incapacité égal à 80 % ; que ces certificats attestent également que ces pathologies nécessitent une prise en charge régulière, spécialisée et continue, qui ne peut être effectuée en Turquie ; que la requérante fait, en outre, valoir qu'elle est d'origine kurde, ce qui est de nature à rendre plus difficile son accès aux soins ; que le préfet n'a, pour sa part, produit aucun élément sur la disponibilité des soins en Turquie, autre que l'avis du médecin inspecteur de la santé publique ; que, par conséquent, il n'est pas établi qu'eu égard à la gravité et à la multiplicité des pathologies dont la requérante est atteinte, celle-ci pourrait effectivement bénéficier d'une prise en charge suffisante en cas de retour dans son pays d'origine ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'en refusant le titre de séjour demandé, le préfet des Hauts-de-Seine a méconnu les dispositions précitées du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par suite, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, Mme B est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté préfectoral du 14 décembre 2009 ; qu'il y a lieu, par voie de conséquence, de prescrire au préfet des Hauts-de-Seine de délivrer à Mme B un titre de séjour temporaire en qualité de malade dans le délai d'un mois comme elle le demande ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par Mme B et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1000489 en date du 31 mai 2010 du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise et l'arrêté du 14 décembre 2009 du préfet des Hauts-de-Seine sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet des Hauts-de-Seine de délivrer à Mme B un titre de séjour vie privée et familiale dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : L'Etat versera à Mme B la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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N° 10VE02265 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 10VE02265
Date de la décision : 14/02/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : Mme COËNT-BOCHARD
Rapporteur ?: M. Patrick BRESSE
Rapporteur public ?: M. BRUNELLI
Avocat(s) : ARAPIAN

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2012-02-14;10ve02265 ?
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