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09/02/2012 | FRANCE | N°10VE02977

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 2ème chambre, 09 février 2012, 10VE02977


Vu la requête, enregistrée le 6 septembre 2010, au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, présentée pour M. Olivier A, demeurant au ..., par Me Journault ; M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0810416 du 9 juillet 2010 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté ses demandes ;

2°) de déclarer l'autorisation de licenciement référencée SP/GG/n° 479 prononcée le 15 septembre 2006 par l'inspecteur du travail de Clichy inexistante juridiquement et la juger nulle et non avenue ;

3°) en tout état de cause, de cons

tater l'illégalité de cette autorisation de licenciement et en conséquence d'annul...

Vu la requête, enregistrée le 6 septembre 2010, au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, présentée pour M. Olivier A, demeurant au ..., par Me Journault ; M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0810416 du 9 juillet 2010 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté ses demandes ;

2°) de déclarer l'autorisation de licenciement référencée SP/GG/n° 479 prononcée le 15 septembre 2006 par l'inspecteur du travail de Clichy inexistante juridiquement et la juger nulle et non avenue ;

3°) en tout état de cause, de constater l'illégalité de cette autorisation de licenciement et en conséquence d'annuler la décision implicite de rejet de la demande préalable d'indemnisation du 30 juillet 2008 et de condamner l'Etat à lui verser la somme de 20 000 euros ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Le requérant soutient que :

- l'autorisation de licenciement référencée SP/GG/n° 479 du 15 septembre 2006 est un acte juridiquement inexistant pouvant être déféré sans condition de délai ; que justifier ou non d'un préjudice est sans incidence sur cette demande de déclaration de nullité sur laquelle le tribunal a omis de statuer ; que l'auteur de l'acte est incompétent dès lors qu'aux termes de l'article L. 2421-3 du code du travail il n'appartenait pas à l'inspecteur du travail de Clichy de statuer pour un établissement de Marseille ; que la procédure préalable à cette autorisation n'a pas été respectée dès lors que la société a, pour obtenir l'autorisation de licenciement litigieuse, énoncé à l'inspecteur du travail un entretien matériellement inexistant et auquel il n'avait pas été convoqué ; que l'enquête contradictoire prévue par l'article R. 2421-11 du code du travail n'a pas eu lieu alors qu'elle est mentionnée par la décision et qu'un simple et supposé entretien téléphonique ne peut pas remplacer l'enquête et que le ministre n'explicite pas quels seraient en l'espèce les motifs légitimes susceptibles de couvrir les irrégularités soulevées ; que la consultation du comité d'entreprise, lequel a émis un avis défavorable au licenciement le 6 juillet 2006, est irrégulière par l'absence du respect du délai de trois jours imparti par l'article L. 434-3 de l'ancien code du travail pour transmettre l'ordre du jour aux membres et du délai de quinze jours imparti pour transmettre l'avis à l'inspecteur ; que les motifs énoncés pour fonder l'autorisation de licenciement sont matériellement inexacts dès lors qu'il a contesté la position de l'entreprise à son égard, qu'il n'a pas refusé les objectifs de l'entreprise et que le fait reproché de ne pas atteindre ses objectifs n'a pas été porté à sa connaissance ; qu'il n'a pas été licencié pour insuffisance professionnelle mais en raison de son investissement syndical, son éviction revenant à évincer le syndicat FO au niveau central et l'inspecteur du travail a commis une erreur d'appréciation ; que ce cumul de graves irrégularités de procédure s'agissant de formalités dont l'objet est de permettre au salarié protégé de se défendre et de fond rend la décision inexistante, nulle et non avenue ;

- à titre principal une décision nulle et non avenue est nécessairement fautive et subsidiairement une simple illégalité de la décision est de nature à engager la responsabilité de son auteur ; que l'existence d'un préjudice moral conséquent résultant d'un sentiment d'injustice et de dénigrement ne saurait être niée du fait d'accords financiers, d'une part, contestés, d'autre part, venant compenser un préjudice matériel qui ne se confond pas avec le préjudice moral ;

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Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu le code du travail ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 12 janvier 2012 :

- le rapport de Mme Geffroy, premier conseiller,

- et les conclusions de Mme Kermorgant, rapporteur public ;

Considérant que M. A fait appel du jugement en date du 9 juillet 2010 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Etat à réparer le préjudice résultant de l'autorisation de licenciement accordée le 15 septembre 2006 par l'inspecteur du travail de Clichy à son employeur la société ADP GSI France ;

Sur la régularité du jugement :

Considérant qu'il ressort du jugement attaqué que le tribunal administratif a omis de se prononcer sur les conclusions présentées par M. A tendant à déclarer l'autorisation de licenciement prononcée à son encontre le 15 septembre 2006 par l'inspecteur du travail de la 8ème section des Hauts-de-Seine inexistante juridiquement et à la juger nulle et non avenue ; qu'ainsi, le jugement du Tribunal administratif de Versailles doit être annulé en tant qu'il a omis de se prononcer sur ces conclusions ;

Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée à ce titre par M. A devant le Tribunal administratif de Versailles et de statuer par l'effet dévolutif de l'appel sur les conclusions indemnitaires dirigées contre l'Etat ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. A, recruté le 19 juillet 1999 par la société par actions simplifiées ADP GSI France et qui exerçait les fonctions d'ingénieur d'affaires catégorie cadre, a été désigné délégué du personnel le 4 novembre 2004, délégué syndical FO le 20 avril 2004, représentant syndical au comité d'entreprise de la division moyennes et grandes entreprises le 20 avril 2004 et au comité central d'entreprise le 17 janvier 2005 et responsable syndical au comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail le 17 janvier 2005 ; que, par une décision du 15 septembre 2006, l'inspecteur du travail de la 8ème section de la direction départementale du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle des Hauts-de-Seine a autorisé son licenciement pour insuffisance professionnelle ; que cette autorisation qui a abouti au licenciement de M. A le 11 octobre 2006 n'a pas été contestée par l'intéressé ; que, par ailleurs, en vertu d'une transaction du 15 novembre 2006, la société ADP GSI France a versé à M. A une indemnité de 155 181,48 euros ;

Sur l'inexistence de l'autorisation de licenciement :

Considérant que, par la décision attaquée du 15 septembre 2006, l'inspecteur du travail, a indiqué les motifs de la demande présentée le 18 juillet 2006 par la société à savoir : insuffisance professionnelle de M. Olivier A se traduisant par un refus d'accepter les objectifs commerciaux, des résultats insatisfaisants et une démotivation à l'égard de l'entreprise et de ses objectifs et a visé, outre les articles L. 436-1, R. 436-1, L. 425-1, R. 425-1, L. 236-11 et L. 412-8 du code du travail, la prolongation du délai d'enquête notifiée aux parties le 3 août 2006 et l'avis du comité d'entreprise ; que l'inspecteur a autorisé le licenciement pour insuffisance professionnelle de M. A aux motifs de l'absence de lien avec les mandats détenus par l'intéressé et de ce qu'il ressortait de l'enquête contradictoire du 7 septembre 2006 que le salarié reconnaissait des faits qui lui sont reprochés notamment sa démotivation, son souhait de quitter l'entreprise qu'il attribue au conflit qui l'a opposé à son ancien responsable et qu'un projet d'accord transactionnel était intervenu entre la direction de l'entreprise et le salarié ; qu'en outre cette décision mentionnait les voies et délais de recours ;

Considérant que M. A soutient que cette décision devenue définitive serait dépourvue de toute existence juridique en invoquant l'incompétence territoriale de l'inspecteur du travail, l'absence de tout entretien préalable au licenciement, l'irrégularité ou l'inexistence de l'enquête contradictoire conduite par l'inspecteur, l'absence de respect du délai de 3 jours pour convoquer le comité d'entreprise et du délai de 15 jours pour transmettre la délibération du comité d'entreprise à l'inspecteur et enfin en invoquant les motifs erronés en fait d'une décision qui serait en lien avec les mandats qu'il exerçait ; que cependant aucune de ces circonstances ne peut avoir pour effet de faire regarder cette décision comme un acte inexistant dont le juge administratif pourrait constater la nullité sans condition de délai ;

Considérant que si le requérant a entendu invoquer les tromperies commises, d'une part, par la société notamment au sujet de l'entretien préalable au licenciement qui n'aurait pas eu lieu et du projet de transaction adressé à l'inspecteur, d'autre part, par l'inspecteur du travail qui ne l'aurait pas entendu lors d'une enquête contradictoire, il ressort des termes du protocole transactionnel conclu le 15 novembre 2006 avec la société ADP GSI France par M. A qui l'a signé et a apposé à chacune des pages dudit protocole ses initiales, qu'un entretien préalable pour lequel il a été convoqué le 20 juin s'est tenu le 30 juin 2006, que le comité d'entreprise dûment convoqué a rendu un avis défavorable à son licenciement le 6 juillet 2006, que les parties ont été convoquées à l'enquête contradictoire devant l'inspecteur du travail et que l'insuffisance professionnelle portait sur le refus des objectifs, le désaccord avec la stratégie de l'entreprise et sur ce qu'en fin d'exercice, la société a constaté que M. A n'avait pas réalisé la performance attendue ; qu'à ce jour aucune des multiples procédures entamées devant le juge judiciaire par M. A ne remet en cause la nature du consentement de l'intéressé lors de la signature dudit protocole transactionnel ; qu'ainsi M. A ne peut sérieusement soutenir qu'il n'aurait été informé d'agissements de la société et de l'inspecteur que lors de l'introduction d'une première procédure devant la juridiction prud'homale plus d'un an après les faits fin 2007 alors que lesdits agissements, à les supposer établis, étaient portés à sa connaissance dès novembre 2006 ; que, par suite, M. A n'établit pas la fraude dont il se prévaut ;

Sur la responsabilité de l'Etat :

Considérant qu'il résulte de l'instruction, notamment des nombreux courriels envoyés par le requérant à la société entre le 30 novembre et le 19 décembre 2007, qu'à la suite du licenciement intervenu sur autorisation de l'inspecteur du travail et de la transaction conclue le 15 novembre 2006 avec la société ADP GSI France, M. A a maintenu pendant plus d'un an des rapports d'ordre professionnel avec la société ; que si la perception à son profit des commissions sur des affaires conclues par d'autres collègues après son licenciement était envisagée par la transaction, la circonstance que M. A insatisfait des sommes versées ait alors engagé des procédures contentieuses contre la société ne peut être regardée comme établissant un lien de causalité direct et certain entre l'autorisation de licenciement et un préjudice moral survenu plus d'une année après cette décision dans un contexte d'exécution conflictuelle d'une transaction dépourvue de tout lien avec l'action administrative ; qu'il y a lieu, en conséquence, de rejeter la demande indemnitaire présentée par M. A ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à payer à M. A la somme qu'il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ; qu'en revanche, il y a lieu de mettre à la charge de M. A la somme de 2 000 euros au titre des mêmes frais exposés par la société ADP GSI France ;

DECIDE :

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Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Versailles du 9 juillet 2010 est annulé en tant qu'il a omis de statuer sur les conclusions présentées par M. A tendant à déclarer l'autorisation de licenciement prononcée à son encontre le 15 septembre 2006 par l'inspecteur du travail de la 8ème section des Hauts-de-Seine inexistante juridiquement et à la juger nulle et non avenue.

Article 2 : La requête de M. A et sa demande dirigée contre l'Etat sont rejetées.

Article 3 : M. A versera à la société ADP GSI France une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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N° 10VE02977


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 10VE02977
Date de la décision : 09/02/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

01-01-07 Actes législatifs et administratifs. Différentes catégories d'actes. Actes inexistants.


Composition du Tribunal
Président : M. BOULEAU
Rapporteur ?: Mme Brigitte GEFFROY
Rapporteur public ?: Mme KERMORGANT
Avocat(s) : JOURNAULT

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2012-02-09;10ve02977 ?
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