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19/06/2008 | FRANCE | N°06VE01063

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 1ère chambre, 19 juin 2008, 06VE01063


Vu la requête, enregistrée le 17 mai 2006 au greffe de la Cour, présentée pour la société MIT CHARTERING, dont le siège social est 6 bis rue Georges Chapelier au Chesnay (78150), par Me Delpeyroux ; elle demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0405565 en date du 14 mars 2006 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés et aux contributions sur l'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos les 30 juin 1997, 1998

et 1999 ;

2°) de prononcer la décharge des impositions litigieuses ;

3°) ...

Vu la requête, enregistrée le 17 mai 2006 au greffe de la Cour, présentée pour la société MIT CHARTERING, dont le siège social est 6 bis rue Georges Chapelier au Chesnay (78150), par Me Delpeyroux ; elle demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0405565 en date du 14 mars 2006 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés et aux contributions sur l'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos les 30 juin 1997, 1998 et 1999 ;

2°) de prononcer la décharge des impositions litigieuses ;

3°) de condamner l'Etat à lui verser 3 000 euros au titre des frais irrépétibles en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que les sept parts du navire coulé, cédées à la compagnie Viking, sa société mère, le 25 juin 1998 l'ont été à une valeur inférieure à celle arrêtée par l'assureur, compte tenu de l'importance du coût financier des opérations liées à l'enlèvement de l'épave ; que l'étendue de l'assurance était inconnue le jour du sinistre survenu en mai 1998 ; que le prix de vente de ses parts est supérieur à celui de leur acquisition ; que la vente était effectuée afin d'éviter que la société requérante ne soit indéfiniment et solidairement responsable avec les autres quirataires ; qu'elle n'a donc pas commis d'acte anormal de gestion ; que la commission départementale des Yvelines a émis l'avis d'abandonner ce redressement ; que les frais non admis en charge n'ont pas été déduits de manière globale et forfaitaire ; que des justificatifs ont été présentés pour chaque dépense ; que l'engagement de ces frais généraux ne se comprend qu'au regard de son activité qui est internationale par nature ; que le dirigeant de la société, qui exerce l'activité de courtier maritime, est dans l'obligation de se déplacer à l'étranger le week-end et la semaine ; qu'il est le seul membre de l'entreprise à se déplacer pour assurer la promotion de la société, la recherche de clientèle et la signature de contrats ; que les déplacements peuvent s'effectuer le week-end, compte tenu des dates d'arrivée des bateaux dans les ports ; que les dépenses non accompagnées de factures sont justifiées par le relevé « carte bleue » ou « american express » de la société ; que les cadeaux sont achetés à l'occasion des déplacements à l'étranger ; que les dépenses de réception engagées sont nécessaires à la bonne marche de l'entreprise ; que les repas pris avec les salariés sont aussi une dépense engagée dans l'intérêt de l'entreprise ; que le montant des factures déduites est compatible avec le chiffre d'affaires de la société ; que les justificatifs ne sont pas toujours aisés à obtenir à l'étranger ; que, conformément à la doctrine, la nature de l'activité de la société et la nature des frais en cause doivent conduire à une appréciation réaliste et compréhensive des justificatifs produits ; que pour rejeter certaines dépenses, les premiers juges n'ont pas pris en compte les déplacements et les contrats qui les justifiaient ; que la liste des bénéficiaires a été précisée pour les achats de vin ; qu'en ce qui concerne les opérations de régularisation de l'exercice clos au 30 juin 1999, l'administration ne pouvait pas notifier un redressement, la situation de la société ayant été régularisée aussi bien au niveau de l'assiette que du recouvrement ; que si l'administration était en droit de mettre en recouvrement la somme en cause, la régularisation aurait dû apparaître en tant qu'acompte payé ; que les intérêts de retard grevant les sommes de 100 000 francs et 73 841 francs, dont le paiement est intervenu avant la notification de redressements, n'ont pas fait l'objet de dégrèvements ; que l'intérêt de retard doit être arrêté à la date du paiement de ces sommes et non à la date de la notification du redressement ; que l'administration n'établit pas le bien-fondé de l'application de la majoration de mauvaise foi, notamment en ce qui concerne la réintégration correspondant à la déduction intégralement pratiquée au titre d'un investissement outre-mer ; qu'en effet, c'est la société mère qui a prévu l'investissement et qui a donné pour instruction d'inscrire en comptabilité la somme de 1 400 000 francs qui a été déduite puis réintégrée ; que ce n'est que le 18 septembre 2000 que la société a appris que l'investissement n'avait pas été réalisé ; qu'elle a régularisé la situation dès que possible ;

........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 5 juin 2008 :

- le rapport de M. Brumeaux, premier conseiller ;

- les observations de Me Delpeyroux, avocat ;

- et les conclusions de Mme Le Montagner, commissaire du gouvernement ;

Sur le bien-fondé des impositions :

En ce qui concerne les dépenses non admises en charges déductibles :

Considérant qu'il ressort des dispositions du 5 de l'article 39 du code général des impôts que les frais de voyage et de déplacement des personnes les mieux rémunérées d'une entreprise, les cadeaux de toute nature et les frais de réception peuvent être réintégrés dans les bénéfices imposables dans la mesure où ils sont excessifs et où la preuve n'a pas été apportée qu'ils ont été engagés dans l'intérêt direct de l'entreprise ;

Considérant qu'à l'appui de ses affirmations selon lesquelles les charges litigieuses afférentes aux frais de voyages, de réception et de cadeaux ont été engagées dans l'intérêt de l'entreprise, la société MIT CHARTERING se borne à faire valoir que son activité d'affrètement de navires et de courtage maritime implique de nombreux déplacements à l'étranger, notamment le week-end ; qu'elle n'assortit pas ses allégations des éléments qui permettraient de rattacher les dépenses concernées à son activité ; qu'au surplus, l'ensemble des factures rejetées par le service et correspondant à ces différentes catégories de dépenses, engagées dans leur grande majorité par le dirigeant de la société requérante, ne comportaient pas les mentions nécessaires qui auraient permis d'établir leur caractère professionnel ;

Considérant, dès lors, que la société MIT CHARTERING ne rapporte pas la preuve qui lui incombe, en vertu de l'article 39 précité du code général des impôts, de l'intérêt direct pour l'entreprise des dépenses assumées pour le compte de son dirigeant et des autres frais de réception, de cadeaux, de restaurant et d'hôtel pour les exercices clos les 30 juin 1997, 1998 et 1999 ; que, par suite, c'est à bon droit que l'administration a refusé la déduction de ces frais ; que si le requérant se prévaut, par ailleurs, de la mesure de tolérance qui serait contenue dans la réponse Lyautey du 8 juillet 1954, publiée au journal des débats de l'Assemblée nationale n° 12029, p 3295, les recommandations contenues dans cette réponse ne constituent pas une interprétation formelle de la loi fiscale opposable à l'administration en vertu des dispositions de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales ;

En ce qui concerne les frais de repas du personnel :

Considérant qu'aux termes de l'article 54 bis du code général des impôts : Les contribuables visés à l'article 53 A (...) doivent obligatoirement inscrire en comptabilité, sous une forme explicite, la nature et la valeur des avantages en nature accordés à leur personnel ; qu'aux termes de l'article 111 du même code : Sont notamment considérés comme revenus distribués (...) c) les rémunérations et avantages occultes ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que les avantages accordés au personnel salarié de la société requérante sous forme de prise en charge des repas n'ont pas été explicitement constatés en comptabilité ainsi que l'exigent les dispositions précitées de l'article 54 bis du code général des impôts ; qu'ils présentent ainsi le caractère de rémunération occulte au sens du c) de l'article 111 du même code et ne pouvaient dès lors donner lieu à déduction ;

En ce qui concerne la cession des parts de navire :

Considérant que la société requérante a acquis, en mai 1998, 7 parts sur 90 d'un navire, le « Clipper Carthage », pour la somme de 840 000 francs, soit 120 000 francs la part, et les a revendues un mois plus tard à sa société-mère, la SA « Compagnie Viking », pour la somme de 907 200 francs, soit 129 000 francs la part ; que, toutefois, le navire avait entre-temps subi une grave avarie au port de Tunis ; que ce navire avait été assuré en avril 1998 pour la somme de 17 206 000 francs, correspondant ainsi à une valorisation de chaque part à hauteur de 191 177 francs ; que si la société requérante soutient que la cession était conforme à son intérêt, puisqu'elle était motivée par sa volonté de dégager sa responsabilité de quirataire, et que la décote se justifiait par les frais élevés que risquait d'entraîner le sinistre, elle ne produit pas le moindre élément de nature à l'établir ; qu'ainsi l'administration apporte la preuve qui lui incombe que la société MIT CHARTERING a cédé un élément d'actif à un prix inférieur à sa valeur réelle, s'écartant ainsi d'une gestion commerciale normale ; qu'elle était donc fondée à rapporter aux résultats imposables de l'exercice clos au 30 juin 1998 la somme de 431 044 francs correspondant au manque à gagner subi ;

En ce qui concerne le redressement relatif à la déduction fiscale au titre de 1999 :

Considérant que la société requérante a opéré une déduction d'un montant de 1 400 000 francs pour l'exercice clos le 30 juin 1999, correspondant à un investissement réalisé dans un département d'outre-mer par souscription au capital de la société « Compagnie des pêches de Guyane » ; qu'après avoir reçu l'avis de vérification du 8 septembre 2000 et avoir été informée le 18 septembre 2000 par la direction de la SA « Compagnie Viking » que les conditions de l'exonération n'étaient pas réunies, elle a déposé le 28 septembre 2000 une liasse rectificative sur laquelle cette déduction était supprimée et a transmis aux services fiscaux un chèque de 56 440 francs ; que cette circonstance ne saurait toutefois faire obstacle à ce que l'administration notifie le redressement correspondant à la remise en cause de cette déduction ;

Sur les intérêts :

Considérant qu'aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : « 1. Lorsque la déclaration ou l'acte mentionnés à l'article 1728 font apparaître une base d'imposition ou des éléments servant à la liquidation de l'impôt insuffisants, inexacts ou incomplets, le montant des droits mis à la charge du contribuable est assorti de l'intérêt de retard visé à l'article 1727 et d'une majoration de 40 p. 100 si la mauvaise foi de l'intéressé est établie ou de 80 p. 100 s'il s'est rendu coupable de manoeuvres frauduleuses (...) » ;

Considérant, en premier lieu, que si la société requérante conteste les modalités de calcul de l'intérêt de retard en reprochant à l'administration de ne pas avoir tenu compte du paiement d'une somme de 173 400 francs, il ressort cependant de l'instruction que cette somme correspond à un acompte d'impôt sur les sociétés de l'exercice 1999-2000 pour 73 400 francs et à un montant d'imposition forfaitaire annuelle pour 100 000 francs, versée antérieurement au début des opérations de contrôle ; qu'elle ne saurait dès lors correspondre à un paiement, même partiel, d'impositions supplémentaires et que, par suite, cette somme n'a pas donné lieu à la liquidation d'intérêts de retard ;

Considérant, en second lieu, que la société requérante reconnaît avoir procédé, pour un montant de 1 400 000 francs, à l'inscription comptable de la déduction fiscale susmentionnée sans avoir été en possession du justificatif de l'investissement outre-mer concerné, dont elle ne s'est inquiétée auprès de la société « Compagnie Viking » qu'après notification de l'avis de vérification ; que, dès lors, et sans qu'elle puisse utilement se retrancher derrière les directives de la société-mère, elle doit ainsi être regardée comme ayant cherché délibérément à se soustraire à l'impôt ; que, dans ces conditions, l'administration établit le bien-fondé de l'application de la majoration prévue en cas d'absence de bonne foi par l'article 1729 du code général des impôts précité ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société MIT CHARTERING n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés et aux contributions sur l'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos les 30 juin 1997, 1998 et 1999 ; que, par suite, ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de la société MIT CHARTERING est rejetée.

06VE01063 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 06VE01063
Date de la décision : 19/06/2008
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme ROBERT
Rapporteur ?: M. Michel BRUMEAUX
Rapporteur public ?: Mme LE MONTAGNER
Avocat(s) : HENRY-STASSE

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2008-06-19;06ve01063 ?
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