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15/05/2008 | FRANCE | N°06VE02588

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 2ème chambre, 15 mai 2008, 06VE02588


Vu, la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles le 29 novembre 2006, présentée pour la SARL VENIEL INVESTISSEMENTS, dont le siège est sis 71-73 avenue des Ternes à Paris (75017), représentée par son gérant, par Me Jorion ; la SARL VENIEL INVESTISSEMENTS demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0601031 du 17 octobre 2006 en tant que le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision, en date du 25 juin 2004, du conseil d'administration de l'OPHLM Asnières Habitat de préem

pter un immeuble sis 30 rue Diderot à Asnières-sur-Seine ;

2°...

Vu, la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles le 29 novembre 2006, présentée pour la SARL VENIEL INVESTISSEMENTS, dont le siège est sis 71-73 avenue des Ternes à Paris (75017), représentée par son gérant, par Me Jorion ; la SARL VENIEL INVESTISSEMENTS demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0601031 du 17 octobre 2006 en tant que le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision, en date du 25 juin 2004, du conseil d'administration de l'OPHLM Asnières Habitat de préempter un immeuble sis 30 rue Diderot à Asnières-sur-Seine ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 25 juin 2004 ;

3°) d'enjoindre à l'OPHLM des Hauts-de-Seine, venant aux droits de l'OPHLM Asnières Habitat, de prendre toute mesure afin de mettre fin aux effets de la décision annulée, en particulier, de lui proposer d'acquérir le bien à un prix visant à rétablir autant que possible, et sans enrichissement sans cause de l'une des parties, les conditions de la transaction à laquelle l'exercice du droit de préemption a fait obstacle, sous une astreinte de 500 euros par jour de retard à compter de l'expiration d'un délai d'un mois après la notification de l'arrêt ;

4°) de condamner l'OPHLM des Hauts-de-Seine à lui verser la somme de 8 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient, en premier lieu, que sa demande était bien recevable dès lors qu'elle a été enregistrée dans le délai de recours et que l'exposante avait intérêt à agir ; en deuxième lieu, que la décision attaquée est entachée d'illégalités externes ; que, d'une part, l'OPHLM Asnières Habitat était incompétent ; qu'en effet, la décision du maire de déléguer le droit de préemption n'a pas été notifiée au vendeur de l'immeuble avant la décision attaquée et n'était donc pas exécutoire à la date de cette décision conformément aux dispositions de l'article L. 2131-1 du code général des collectivités territoriales ; que, d'autre part, cette décision, qui se réfère seulement à la volonté d'augmenter le nombre de logements sociaux sans faire référence à un projet antérieur suffisamment précis, ou préciser le projet lui-même, n'est pas suffisamment motivée en méconnaissance de l'article L. 210-1 du code de l'urbanisme ; qu'enfin, la délibération du conseil municipal du 6 janvier 2004 par laquelle le conseil municipal a délégué le droit de préemption au maire a été adoptée au terme d'une procédure irrégulière dès lors, en particulier, qu'elle n'a pas expressément autorisé le maire à sudéléguer ce droit ; que le maire ne pouvait en conséquence subdéléguer ce droit ; que, par ailleurs, le conseil d'administration de l'OPHLM n'a pas régulièrement délibéré le 25 juin 2004 dès lors que cet office n'a pas établi que l'ordre du jour de la séance a été reçu par tous les membres du conseil au plus tard le 15 juin 2004 conformément à l'article R. 426-61-1 du code de la construction et de l'habitation ; que le tribunal a renversé sur ce point la charge de la preuve ; en troisième lieu, que la décision est illégale en l'absence d'un projet prédéfini de la part de l'OPHLM Asnières Habitat ; qu'aucune étude préalable n'a été invoquée ; que le projet de réaliser des logements sociaux n'existait pas ; qu'aucun document antérieur à la décision de préemption, de nature à établir la réalité du projet, n'a été produit ; qu'enfin, les injonctions sollicitées sont impliquées par l'annulation de la décision attaquée ;

.....................................................................................................
Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu le code de la construction et de l'habitation ;

Vu la loi n° 2000-1208 du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbains ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 17 avril 2008 :

- le rapport de Mme Signerin-Icre, président assesseur ;
- les observations de Me Jorion, pour la SARL VENIEL INVESTISSEMENTS ;
- les observations de Me Claoué, substituant Me Delcros, pour la commune d'Asnières-sur-Seine ;
- les observations de Me Pierard-Valery pour l'OPHLM des Hauts-de-Seine ;
- et les conclusions de Mme Grand d'Esnon, commissaire du gouvernement ;


Vu la note en délibéré, enregistrée le 17 avril 2008, présentée pour la SARL VENIEL INVESTISSEMENTS ;

Considérant que la SARL VENIEL INVESTISSEMENTS fait appel du jugement du 17 octobre 2006 en tant que le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision, en date du 25 juin 2004, du conseil d'administration de l'OPHLM Asnières Habitat de préempter un immeuble situé 30 rue Diderot à Asnières-sur-Seine, que le propriétaire s'était engagé à lui vendre ; que, par le mémoire susvisé, la commune d'Asnières-sur-Seine demande à la Cour d'annuler ce jugement en tant qu'il a déclaré la demande de la SARL VENIEL INVESTISSEMENTS recevable et de rejeter cette demande comme tardive ;

Sur les conclusions de la commune d'Asnières-sur-Seine :

Considérant que la SARL VENIEL INVESTISSEMENTS a attaqué devant le tribunal administratif la décision de préemption prise le 25 juin 2004 par le conseil d'administration de l'OPHLM Asnières Habitat ; qu'ainsi, le litige, alors même que l'OPHLM a exercé le droit de préemption par délégation de la commune d'Asnières-sur-Seine, concernait une décision prise par cet établissement public ; que la commune d'Asnières-sur-Seine, bien qu'appelée à produire des observations sur la demande, n'avait pas la qualité de partie à l'instance ; que, dès lors, ses conclusions d'appel dirigées contre le jugement du tribunal administratif, qui reposent au surplus sur une contestation des motifs du jugement et non de son dispositif, ne sont pas recevables ; qu'elles doivent, en conséquence, être rejetées ;

Sur la requête de la SARL VENIEL INVESTISSEMENTS :

Sans qu'il soit besoin de statuer sur la recevabilité de la demande de première instance :

En ce qui concerne la légalité externe de la décision de préemption :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 213-3 du code de l'urbanisme : « Le titulaire du droit de préemption peut déléguer son droit (...) à un établissement public y ayant vocation (...) Cette délégation peut porter sur une ou plusieurs parties des zones concernées ou être accordée à l'occasion de l'aliénation d'un bien (...) » ; qu'aux termes de l'article L. 2122-22 du code général des collectivités territoriales : « Le maire peut, en outre, par délégation du conseil municipal, être chargé, en tout ou partie, et pour la durée de son mandat : (...) 15° D'exercer, au nom de la commune, les droits de préemption définis par le code de l'urbanisme, que la commune en soit titulaire ou délégataire, et, lorsque la commune en est titulaire, de déléguer l'exercice de ces droits à l'occasion de l'aliénation d'un bien selon les dispositions prévues au premier alinéa de l'article L. 213-3 de ce même code dans les conditions que fixe le conseil municipal » ;

Considérant qu'en application de ces dispositions, le conseil municipal d'Asnières-sur-Seine a, par délibération du 6 janvier 2004, donné délégation à son maire pour : « (...) 15°) exercer, au nom de la commune, les droits de préemption définis par le code de l'urbanisme » et « déléguer l'exercice de ces droits à l'occasion de l'aliénation d'un bien selon les dispositions prévues au premier alinéa de l'article L.213-3 de ce même code » ; qu'il suit de là que le moyen tiré de ce que le conseil municipal aurait seulement délégué au maire l'exercice du droit de préemption dont la commune est titulaire mais non le pouvoir de déléguer cet exercice pour une opération donnée à l'un des mandataires mentionnés à l'article L. 213-3 du code de l'urbanisme, manque en fait ; qu'ainsi, le maire d'Asnières-sur-Seine a pu légalement, par arrêté du 8 juin 2004, déléguer le droit de préemption de la commune à l'OPHLM Asnières Habitat pour acquérir l'immeuble situé 30 rue Diderot ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L.2131-1 du code général des collectivités territoriales dans sa rédaction applicable au litige : « Les actes pris par les autorités communales sont exécutoires de plein droit dès qu'il a été procédé à leur publication ou affichage ou à leur notification aux intéressés ainsi qu'à leur transmission au représentant de l'Etat dans le département ou à son délégué dans l'arrondissement. Le maire certifie, sous sa responsabilité, le caractère exécutoire de ces actes » ; qu'aux termes de l'article L.2131-2 du même code : « Sont soumis aux dispositions de l'article L. 2131-1 les actes suivants : 1° Les délibérations du conseil municipal ou les décisions prises par délégation du conseil municipal en application de l'article L. 2122-22 (...) » ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que l'arrêté du 8 juin 2004 du maire d'Asnières-sur-Seine délégant à l'OPHLM Asnières Habitat le droit de préemption à l'occasion de l'aliénation de l'immeuble situé 30 rue Diderot, qui présente un caractère réglementaire, a été publié le 21 juin 2004 et transmis au préfet des Hauts-de-Seine à la même date ; qu'il suit de là que cet arrêté était exécutoire le 25 juin 2004, date de la décision de préemption attaquée ; que, dans ces conditions, le moyen tiré de l'incompétence de l'OPHLM Asnières Habitat pour prendre cette décision doit être écarté ;

Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article R. 421-61-1 du code de la construction et de l'habitation, relatif aux réunions des conseils d'administration des offices publics d'habitations à loyer modéré : « ... L'ordre du jour des délibérations est porté à la connaissance des membres des conseils au moins dix jours à l'avance, sauf urgence dûment motivée » ; que la requérante se borne à faire valoir qu'il n'est pas établi que tous les membres du conseil d'administration de l'OPHLM Asnières Habitat auraient eu connaissance de l'ordre du jour de la séance du 25 juin 2004 dans le délai fixé par les dispositions précitées ; qu'elle n'apporte toutefois aucun élément de nature à justifier le caractère irrégulier de la procédure suivie par l'OPHLM Asnières Habitat, alors que la circonstance que l'arrêté municipal de délégation du 8 juin 2004 n'ait été reçu en préfecture que le 21 juin 2004 n'est pas constitutive d'un tel élément et qu'il ressort au demeurant des pièces du dossier que la convocation adressée au directeur général des services de la commune a été établie le 14 juin 2004 ; que le moyen ainsi soulevé doit, en conséquence, être écarté ;

Considérant, enfin, que l'article L. 210-1 du code de l'urbanisme dispose que « toute décision de préemption doit mentionner l'objet pour lequel ce droit est exercé » ; que la décision de préemption litigieuse mentionne la politique municipale d'augmentation du nombre de logements sociaux et le rôle de l'OPHLM Asnières Habitat en la matière ; que cette motivation fait ainsi apparaître avec une précision suffisante l'objet de la décision contestée ; qu'elle répond, dès lors, aux exigences de l'article L. 210-1 du code de l'urbanisme ;

En ce qui concerne la légalité interne de la décision de préemption :

Considérant qu'il résulte des dispositions de l'article L. 210-1 du code de l'urbanisme que les collectivités titulaires du droit de préemption urbain ne peuvent décider d'exercer ce droit que si elles justifient de l'existence, à la date à laquelle ce droit est exercé, d'un projet d'action ou d'opération d'aménagement suffisamment précis et certain ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, et notamment du rapport de présentation soumis au conseil d'administration de l'OPHLM Asnières Habitat préalablement à l'adoption de la décision attaquée, qu'afin d'atteindre les objectifs de la loi du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbains, la commune d'Asnières-sur-Seine poursuit une politique visant à accroître le nombre de logements sociaux, notamment par l'acquisition d'immeubles bâtis compte tenu de la rareté des terrains libres susceptibles de recevoir des opérations de constructions neuves ; qu'il résulte également des mentions de ce rapport que les caractéristiques de l'immeuble situé 30 rue Diderot à Asnières-sur-Seine ont été précisément étudiées par l'OPHLM avant que la décision de préemption litigieuse soit prise ; que, dans ces conditions, et compte tenu du caractère limité de ce projet, qui consiste à affecter un immeuble de logements à des logements sociaux, la requérante n'est pas fondée à soutenir que l'OPHLM Asnières Habitat ne disposait pas d'un projet suffisamment précis et certain pour justifier l'exercice du droit de préemption urbain ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SARL VENIEL INVESTISSEMENTS n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonctions et celles tendant à l'application de l'article L.761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la SARL VENIEL INVESTISSEMENTS le paiement à l'OPHLM des Hauts-de-Seine d'une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par celui-ci et non compris dans les dépens ; que les dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit mis à la charge de la SARL VENIEL INVESTISSEMENTS la somme que la commune d'Asnières-sur-Seine, qui n'est pas partie à la procédure et n'a été appelée en la cause que pour produire des observations, demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;




D E C I D E :



Article 1er : La requête de la SARL VENIEL INVESTISSEMENTS est rejetée.

Article 2 : La SARL VENIEL INVESTISSEMENTS versera à l'OPHLM des Hauts-de-Seine la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le surplus des conclusions de l'OPHLM des Hauts-de-Seine tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative est rejeté.

Article 4 : Les conclusions de la commune d'Asnières-sur-Seine sont rejetées.

2
N° 06VE02588


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 06VE02588
Date de la décision : 15/05/2008
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme VETTRAINO
Rapporteur ?: Mme Corinne SIGNERIN-ICRE
Rapporteur public ?: Mme GRAND d'ESNON
Avocat(s) : JORION

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2008-05-15;06ve02588 ?
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