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17/04/2008 | FRANCE | N°07VE00606

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 2ème chambre, 17 avril 2008, 07VE00606


Vu la requête, enregistrée le 14 mars 2007, présentée pour M. Claude X, demeurant ..., par Me Lacamp ;

M. X demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0400475 du 11 janvier 2007 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 8 juillet 2002 prononçant sa révocation ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir cet arrêté ;

Il soutient qu'il a été exclu définitivement de ses fonctions aux motifs qu'il a adressé une lettre à l'une de ses anciennes él

ves mineure dans laquelle, d'une part, il lui proposait ainsi qu'à une de ses amies, de poser ...

Vu la requête, enregistrée le 14 mars 2007, présentée pour M. Claude X, demeurant ..., par Me Lacamp ;

M. X demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0400475 du 11 janvier 2007 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 8 juillet 2002 prononçant sa révocation ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir cet arrêté ;

Il soutient qu'il a été exclu définitivement de ses fonctions aux motifs qu'il a adressé une lettre à l'une de ses anciennes élèves mineure dans laquelle, d'une part, il lui proposait ainsi qu'à une de ses amies, de poser nue pour des photographies moyennant une rétribution de 200 francs par heure et une participation à ses frais d'épilation et, d'autre part, il aurait exprimé de vives critiques sur le fonctionnement de l'établissement où il enseignait ; que le jugement du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise est irrégulier puisqu'il omet de répondre sur le moyen tiré de ce que cette élève avait plus de 17 ans et qu'il ignorait qu'elle était mineure ; qu'il a été privé de la possibilité de se défendre puisqu'il n'a pu avoir communication du rapport de saisine de la commission administrative paritaire siégeant en formation de conseil de discipline ; qu'à ce titre, c'est à tort que le tribunal administratif a estimé qu'il ne pouvait ignorer la nature des griefs retenus contre lui dès lors que ce rapport comportait des appréciations sur ces faits ; qu'il n'a pu vérifier si l'auteur de ce rapport avait compétence pour l'établir puisqu'il n'est pas signé ; que le président du conseil de discipline a fait preuve de partialité à son égard puisqu'il a indiqué que les élèves en question étaient de « très jeunes filles » alors qu'elles avaient dix sept ans et demi, et que, en refusant de montrer aux membres du conseil son album de photos au motif que les photos avaient été choisies, il l'a empêché de démontrer le but artistique de sa démarche auprès de ces jeunes filles ; que l'arrêté attaqué est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation et la sanction disproportionnée puisqu'il enseigne dans un autre lycée éloigné de celui fréquenté par les jeunes filles, que celles-ci ne sont pas vulnérables puisqu'âgées de plus de 17 ans, qu'il n'a pas agi de façon occulte, qu'il ne leur a pas fait de proposition indécente ni exercé de contrainte dès lors qu'elles avaient quatre mois pour se décider, que les parents n'ont pas porté plainte en l'absence de préjudice et qu'il n'a auparavant jamais fait l'objet de reproche sur le plan professionnel ; que les faits de nature à laisser penser à de la pédophilie, dès lors que médiatisés, ont un impact irrationnel qui élimine tout esprit critique et conduit à une sévérité démesurée surtout lorsqu'un enseignant est concerné ; que la Cour d'appel de Versailles l'a relaxé en estimant qu'il n'avait pas commis d'infraction pénale et que la lettre adressée à son ancienne élève n'avait pas le caractère d'une correspondance érotique même si elle était déplacée ; qu'il a été jugé par une décision de la Cour de cassation de 1952 que le fait de proposer à une femme de poser nue ne porte pas atteinte à la décence et n'est pas susceptible de corrompre l'esprit et la vertu ; qu'en outre, n'a fait l'objet que d'une mutation, un magistrat du TGI de Grenoble qui photographiait dans les salles d'audience des greffières et des stagiaires âgées de 14 à 17 ans dévêtues ;

……………………………………………………………………………………………………

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

Vu la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

Vu le décret n° 84-961 du 25 octobre 1984 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 31 mars 2008 :

- le rapport de Mme Kermorgant, premier conseiller ;
- et les conclusions de M. Pellissier, commissaire du gouvernement ;


Considérant qu'en novembre 1999, M. X, professeur de lettres-histoire-géographie au lycée professionnel de Cormeilles-en-Parisis, a adressé à l'une de ses anciennes élèves mineure du lycée Fragonard de l'Isle-Adam, où il avait effectué un remplacement d'octobre 1997 à juin 1998, une lettre dans laquelle il lui proposait, ainsi qu'à une de ses amies, de poser nue pour des photographies moyennant rétribution ; qu'à la suite de l'arrêt de la Cour d'appel de Versailles du 11 juin 2001 le relaxant des poursuites engagées pour corruption de mineures, une procédure disciplinaire a été diligentée à l'encontre de M. X en mai 2002 et l'intéressé a été révoqué par arrêté du 8 juillet 2002 ; que le requérant fait appel du jugement par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision ;


Sur la recevabilité du mémoire du ministre de l'éducation nationale :

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. Girardot, directeur des affaires juridiques au ministère de l'éducation nationale, justifiait, à la date de la production de mémoire en cause, d'une délégation de signature du ministre ; que, par suite, le moyen tiré de ce que le mémoire en défense aurait été signé par une personne dépourvue de délégation de signature doit, en tout état de cause, être écarté ;

Sur la régularité du jugement :

Considérant, en premier lieu, qu'en mentionnant dans son jugement que la jeune fille contactée par M. X était mineure, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise, qui n'était pas tenu de préciser son âge, a suffisamment répondu au moyen du requérant tiré de ce qu'il ignorait que cette adolescente, âgée de plus de 17 ans, était mineure ;

Considérant, en deuxième lieu, que l'exposé des faits tel que repris par le jugement attaqué suffit à caractériser la nature des manquements qui sont reprochés au requérant ; que, par suite, M. X n'est pas fondé à soutenir que le jugement serait irrégulier en ce qu'il n'expliciterait pas en quoi les faits litigieux sont de nature à compromettre la dignité de la fonction d'enseignant et à porter le discrédit sur le corps auquel il appartient ;

Au fond :
Sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir relative à la demande de première instance soulevée par le ministre de l'éducation nationale ;

Sur la légalité externe :
Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 19 de la loi du 13 juillet 1983 : Le fonctionnaire à l'encontre duquel une procédure disciplinaire est engagée a droit à la communication de l'intégralité de son dossier individuel et de tous les documents annexes (…). ; qu'aux termes de l'article 2 du décret n° 84-961 du 25 octobre 1984 relatif à la procédure disciplinaire concernant les fonctionnaires de l'Etat : « L'organisme siégeant en Conseil de discipline lorsque sa consultation est nécessaire, en application du second alinéa de l'article 19 de la loi susvisée du 13 juillet 1983, est saisi par un rapport émanant de l'autorité ayant pouvoir disciplinaire ou d'un chef de service déconcentré ayant reçu délégation de compétence à cet effet. Ce rapport doit indiquer clairement les faits reprochés au fonctionnaire et préciser les circonstances dans lesquelles ils se sont produits. » ;

Considérant, d'une part, que la citation à comparaître de M. X devant le conseil de discipline et les pièces figurant au dossier qui lui a été communiqué exposaient les faits qui lui étaient reprochés et leur qualification de façon suffisamment claire pour lui permettre d'assurer utilement sa défense ; que s'il n'a eu connaissance qu'à l'occasion de sa lecture en séance du rapport qui, d'après l'article 2 précité du décret du 25 octobre 1984, saisit le conseil de discipline, ce document ne contenait aucun élément nouveau par rapport aux pièces figurant au dossier et dont il avait pu, comme il vient d'être indiqué, prendre connaissance ; que le requérant ne saurait ainsi soutenir qu'il ignorait la nature des manquements aux obligations professionnelles qui lui étaient reprochés ainsi que leur qualification de faute justifiant une sanction disciplinaire ; qu'ainsi, l'absence de communication dudit rapport n'a pu vicier la procédure ;
Considérant, d'autre part, qu'il est constant que le directeur des personnels enseignants du ministère de l'éducation nationale, lequel disposait d'une délégation de compétence du ministre en matière disciplinaire, a informé M. X, par une lettre du 29 mai 2002, qu'il avait saisi de son cas la commission administrative paritaire siégeant en conseil de discipline ; qu'il s'ensuit que si le rapport de saisine de cet organisme, établi à l'en-tête de la direction des personnels enseignants, n'est pas signé, il ne saurait être sérieusement contesté qu'il émane du directeur, lequel a saisi le conseil de discipline en lui transmettant ce document ; que dès lors que ce rapport a été repris à son compte et lu comme tel en séance par le président du conseil de discipline, sous-directeur des personnels enseignants du second degré, son origine et son authenticité ne sauraient être mises en doute ; que, par suite, le requérant n'est pas fondé à soutenir que le conseil de discipline aurait été irrégulièrement saisi d'un rapport anonyme ;
Considérant, en second lieu, qu'il ressort du procès-verbal du conseil de discipline que tous les membres de cet organisme ont refusé de consulter l'album de photographies préparé pour la circonstance par M. X, avant même que le président ne précise que les clichés choisis par l'intéressé ne pouvaient démontrer le but artistique de sa démarche ; que s'il y est mentionné que le président a indiqué que la proposition de poser nues s'adressait à de « très jeunes filles », il est également précisé que les lycéennes étaient âgées de 15 à 16 ans lorsque M. X les a eues comme élèves en 1997 ; qu'en outre, ledit procès-verbal, relatant les dires de l'avocat, précise qu'à l'issue du délai de réflexion de 4 mois imparti pour accepter ou refuser cette proposition, l'une de ces jeunes filles aurait eu 17 ans et 10 mois ; que, dès lors, le moyen tiré de ce que l'avis du conseil de discipline, au demeurant rendu à l'unanimité, serait vicié du fait de la partialité de son président, qui aurait refusé de consulter l'album de photographies apporté par M. X en séance et n'aurait pas précisé l'âge de ses anciennes élèves, manque en fait ;

Sur la légalité interne :
Considérant que le fait non contesté d'avoir proposé à des anciennes élèves âgées de moins de 18 ans de poser nues pour des photographies est de nature, à lui seul, à conférer au comportement de M. X le caractère d'une faute grave justifiant une sanction, alors même que le requérant invoque l'objet artistique de telles photographies et l'absence de toute contrainte de ces élèves dans la mesure où il enseignait dans un autre établissement éloigné et où il leur avait laissé un délai de réflexion de quatre mois ; que l'intéressé ne pouvait, comme l'a estimé d'ailleurs la Cour d'appel de Versailles, ignorer que les jeunes filles étaient mineures ; que la sanction de la révocation prononcée à raison de ces faits, qui doivent s'apprécier compte tenu de la qualité d'enseignant de l'intéressé et des obligations déontologiques de dignité qui s'imposent à lui, ainsi que de la nécessité d'assurer le bon fonctionnement du service public de l'éducation nationale et de préserver sa réputation, n'est pas manifestement disproportionnée, alors même que le comportement de ce dernier avait été auparavant irréprochable ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande ;


D E C I D E :


Article 1er : La requête de M. X est rejetée.
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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 07VE00606
Date de la décision : 17/04/2008
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme VETTRAINO
Rapporteur ?: Mme Martine KERMORGANT
Rapporteur public ?: M. PELLISSIER
Avocat(s) : LACAMP

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2008-04-17;07ve00606 ?
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