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20/03/2008 | FRANCE | N°07VE01763

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 2ème chambre, 20 mars 2008, 07VE01763


Vu I) la requête, enregistrée sous le n° 07VE01763 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, le 24 juillet 2007, présentée pour la Société civile immobilière (SCI) NORMANDE, représentée par son gérant, dont le siège social est sis 193, rue du Faubourg Saint-Martin à Paris (75010), par Me Mrejen ; la SCI NORMANDE demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0704043 du 9 juillet 2007 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision en date du 26 février 2007 par laquelle le maire de la

commune de Clichy-la-Garenne a exercé le droit de préemption urbain sur ...

Vu I) la requête, enregistrée sous le n° 07VE01763 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, le 24 juillet 2007, présentée pour la Société civile immobilière (SCI) NORMANDE, représentée par son gérant, dont le siège social est sis 193, rue du Faubourg Saint-Martin à Paris (75010), par Me Mrejen ; la SCI NORMANDE demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0704043 du 9 juillet 2007 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision en date du 26 février 2007 par laquelle le maire de la commune de Clichy-la-Garenne a exercé le droit de préemption urbain sur un bien immobilier cadastré section C n° 8 situé 147 Bd Jean Jaurès ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir cette décision ;

3°) d'ordonner, sur le fondement de l'article L. 911-4 du code de justice administrative, la publication aux Hypothèques de l'arrêt en précisant que l'immeuble, d'une contenance de 222 m², se compose d'un bar restaurant et d'un hôtel meublé et d'ordonner, sous une astreinte de 500 euros par jour de retard, à la commune de Clichy-la-Garenne de restituer au greffe des saisies immobilières de Nanterre, la grosse du jugement d'adjudication ;

4°) de condamner la commune de Clichy-la-Garenne à lui verser la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient, en premier lieu, que le jugement est en contradiction avec l'ordonnance de suspension prononcée par le juge des référés alors que le Conseil d'Etat a rejeté le pourvoi dirigé contre cette ordonnance ; en deuxième lieu, que c'est à tort que le tribunal a considéré que la motivation de la décision de préemption était suffisante ; que cette décision ne vise aucune disposition précise du code de l'urbanisme et se réfère seulement à une délibération du conseil municipal du 29 novembre 2005 décidant d'instituer le droit de préemption urbain renforcé sur l'ensemble du territoire de la commune ; que l'exercice du droit de préemption est seulement justifié par la « réalisation d'un hôtel social conformément aux objectifs de la commune en matière d'habitat » sans que, notamment, les caractéristiques de l'immeuble soient précisées ; que la référence à la convention du 26 mai 2003 conclue entre la commune et l'Etat ne peut constituer une motivation dès lors que cette convention n'est pas annexée, ni son contenu précisé et que l'hôtel en cause n'est pas insalubre ; en troisième lieu, que c'est à tort que le tribunal a considéré que la commune disposait d'un projet suffisamment précis et certain alors que le courrier, de circonstance, du 26 mars 2007 du directeur régional de l'Adoma est dénué de toute précision ; que l'existence d'un projet précis entrant dans le cadre de la convention avec l'Etat du 26 mars 2003 n'est pas établie ; que, comme l'a retenu à bon droit le juge des référés, la seule référence à un hôtel meublé, à transformer en hôtel social, n'est pas suffisante ; qu'il n'est ni établi ni allégué que l'hôtel en question est un habitat indigne alors qu'il s'agit d'un immeuble de très bonne qualité qui n'entre pas, dès lors, dans le champ d'action de la convention du 26 mars 2003 ; que si la commune a fait valoir sa politique foncière favorisant la construction de logements sociaux neufs et, s'agissant des hôtels meublés, sa volonté d'engager des procédures pour lutter contre les marchands de sommeil, elle n'a fait état d'aucun fait objectif s'agissant de l'immeuble préempté ; que la lettre d'Adoma, qui marque seulement son intérêt, ne révèle aucun projet précis ; que la note de la société d'économie mixte d'équipement et de rénovation de Clichy-la-Garenne (Semercli), postérieure à la décision, ne peut concerner cet immeuble qui n'est pas insalubre ; en quatrième lieu, que la décision a été prise sur une procédure irrégulière ; qu'en effet, la décision d'aliéner ayant été déposée en mairie le 25 septembre 2006, la décision de préemption devait, en application du code de l'urbanisme, être prise avant le 25 novembre 2006 ; que le maire, qui avait connaissance de la vente depuis le 25 septembre 2006, aurait pu concourir à la vente ; que la commune aurait dû attendre que la décision soit définitive avant de la publier afin d'éviter à l'adjudicataire la confusion qu'il subit actuellement ; qu'enfin, la décision attaquée est entachée de détournement de pouvoir, la commune, qui n'avait jamais manifesté le moindre intérêt pour l'immeuble, n'ayant décidé de préempter que postérieurement au deuxième jugement d'adjudication sur surenchère ; que l'exposante avait pour objectif de réaliser un hôtel social ; que l'existence des baux commerciaux rend l'objectif de la commune difficilement réalisable à court terme ;
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Vu II) la requête, enregistrée sous le n° 07VE01765 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, le 24 juillet 2007, présentée pour la Société civile immobilière (SCI) NORMANDE, représentée par son gérant, dont le siège social est sis 193, rue du Faubourg Saint-Martin à Paris (75010), par Me Mrejen ; la SCI NORMANDE demande à la cour :

1°) de prononcer le sursis à l'exécution du jugement n° 0704043 du 9 juillet 2007 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision en date du 26 février 2007 par laquelle le maire de la commune de Clichy-la-Garenne a exercé le droit de préemption urbain sur un bien immobilier cadastré section C n° 8 situé 147 Bd Jean Jaurès ;

2°) de juger que la décision de suspension prononcée par le juge des référés le 4 mai 2007 reste en vigueur jusqu'à une décision définitive du Conseil d'Etat ;

Elle soutient qu'il y a urgence dès lors que le non respect du délai prévu dans le cahier des charges pour le paiement du prix d'adjudication peut entrainer une procédure de folle enchère et l'expose en tout état de cause au paiement d'intérêts majorés ; que la commune se comporte en propriétaire définitif, ce qui engendre des conséquences graves et irréversibles ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 28 février 2008 :

- le rapport de Mme Signerin-Icre, président assesseur ;
- les observations de Me Metidji, substituant Me Mrejen pour la SCI NORMANDE et celles de Me Garot substituant Me Drago pour la commune de Clichy-la-Garenne ;
- et les conclusions de M. Pellissier, commissaire du gouvernement ;

Considérant que les requêtes susvisées n° 07VE01763 et n° 07VE01765 présentées pour la SCI NORMANDE tendent à l'annulation et au sursis à l'exécution du même jugement, en date du 9 juillet 2007, par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté la demande de cette société tendant à l'annulation de la décision du maire de la commune de Clichy-la-Garenne du 26 février 2007 d'exercer le droit de préemption urbain sur un bien immobilier situé 147 Bd Jean Jaurès ; qu'il y a lieu de les joindre pour qu'elles fassent l'objet d'un seul arrêt ;

Sur la requête n° 07VE01763 :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article R. 213-15 du code de l'urbanisme, qui est applicable aux ventes par adjudication d'un bien soumis au droit de préemption : « Les ventes soumises aux dispositions de la présente sous-section doivent être précédées d'une déclaration du greffier de la juridiction ou du notaire chargé de procéder à la vente faisant connaître la date et les modalités de la vente. Cette déclaration ... est adressée au maire trente jours au moins avant la date fixée pour la vente par lettre recommandée avec demande d'avis de réception. … Le titulaire dispose d'un délai de trente jours à compter de l'adjudication pour informer le greffier ou le notaire de sa décision de se substituer à l'adjudicataire. La substitution ne peut intervenir qu'au prix de la dernière enchère ou de la surenchère. La décision de se substituer à l'adjudicataire est notifiée au greffier ou au notaire par lettre recommandée avec demande d'avis de réception … » ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la décision attaquée a été notifiée au greffier du Tribunal de grande instance de Nanterre le 2 mars 2007, soit dans le délai de trente jours ayant couru à compter du 8 février 2007, date du jugement d'adjudication sur surenchère de l'immeuble litigieux ; que la requérante ne peut utilement se prévaloir de ce que le maire, informé de la date et des modalités de la vente, aurait pu y participer ; qu'il suit de là que le moyen tiré de ce que la décision est intervenue après le délai imparti par le code de l'urbanisme doit être écarté ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 210-1 du code de l'urbanisme : « Les droits de préemption institués par le présent titre sont exercés en vue de la réalisation, dans l'intérêt général, des actions ou opérations répondant aux objets définis à l'article L. 300-1 (…) / Toute décision de préemption doit mentionner l'objet pour lequel ce droit est exercé. (…) » ; qu'il résulte de ces dispositions, d'une part, que les communes ne peuvent décider d'exercer leur droit de préemption urbain que si elles justifient de l'existence, à la date à laquelle elles exercent ce droit, d'un projet d'action ou d'opération d'aménagement suffisamment précis et certain et, d'autre part, qu'elles doivent définir ce projet de manière suffisamment précise dans la décision de préemption ;

Considérant, d'une part, que la décision attaquée, qui vise le code de l'urbanisme, mentionne que « le droit de préemption est exercé pour la réalisation d'un hôtel social, conformément aux objectifs de la politique de la commune en matière d'habitat et de traitement des hôtels meublés (convention du 26 mai 2003 entre la ville de Clichy-la-Garenne et l'Etat relative à l'éradication de l'habitat indigne) » ; que, contrairement à ce que soutient la société requérante, cette motivation, qui se réfère à l'opération en vue de laquelle le droit de préemption est exercé, fait apparaître avec une précision suffisante l'objet de la décision contestée ; qu'elle répond dès lors aux exigences de l'article L. 210-1 précité ;

Considérant, d'autre part, qu'il ressort des pièces du dossier que la convention conclue le 26 mai 2003 avec l'Etat en vue de l'éradication de l'habitat indigne fixe, au nombre des objectifs généraux du plan d'action défini à l'article 1er, l'objectif « d'améliorer la capacité de logements de la commune par la réalisation d'opérations neuves et d'acquisitions améliorations pour assurer le relogement temporaire ou définitif » et de « mettre en oeuvre tous les moyens pour organiser le relogement provisoire ou durable des occupants, prioritairement sur la commune ... » ; que l'article 2 prévoit que le dispositif vise à « se doter des moyens nécessaires, vis-à-vis des familles, à la mise en oeuvre effective du projet » notamment en mettant en oeuvre des actions d'accompagnement « de façon à assurer les besoins en relogement créés par l'opération et ne pas bloquer le déroulement de celle-ci (...) Parmi les moyens de l'hébergement provisoire : l'Etat et la ville devront estimer les besoins en hébergement provisoire nécessaires et prévoir des solutions d'hébergement provisoire en conséquence » ; que l'article 4 stipule enfin que la commune s'engage à « contribuer à la mise en oeuvre des moyens pour organiser le relogement provisoire ou durable des occupants en relation avec les bailleurs sociaux et privés » ; qu'il ressort par ailleurs des termes du courrier en date du 26 mars 2007 adressé par le directeur régional de l'Adoma - ex Sonacotra - au maire de Clichy-la-Garenne, qu'aucun élément du dossier ne permet de considérer comme étant « de circonstance », que la reprise de l'hôtel meublé ayant fait l'objet de la préemption a été envisagée lors d'une réunion avec les services municipaux le 18 octobre 2006, que la commune a demandé à la direction départementale de l'Adoma d'étudier la possibilité de cette reprise, et qu'après l'avoir visité, l'Adoma a déclaré être vivement intéressée par cette opération ; que, dans ces conditions et compte tenu du caractère limité de ce projet, la requérante n'est pas fondée à soutenir que la commune ne disposait pas d'un projet suffisamment précis et certain pour justifier l'exercice du droit de préemption urbain ;

Considérant, en troisième lieu, qu'une ordonnance de référé n'ayant pas l'autorité de la chose jugée, l'appréciation portée par le juge des référés ayant décidé la suspension de l'exécution de la décision attaquée n'est, en tout état de cause, pas de nature à s'imposer au juge administratif saisi du fond du litige ;

Considérant, enfin, que le détournement de pouvoir allégué n'est pas établi ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SCI NORMANDE n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonctions et celles tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la SCI NORMANDE le paiement à la commune de Clichy-la-Garenne d'une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

Sur la requête n° 07VE01765 :

Considérant que la cour statuant par le présent arrêt sur les conclusions de la requête de la SCI NORMANDE tendant à l'annulation du jugement attaqué, les conclusions de la requête tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution de ce jugement sont privées d'objet ; qu'il n'y a pas lieu, par suite, pour la cour d'y statuer ;

D É C I D E :

Article 1er : Il n'a pas lieu de statuer sur la requête n° 06VE01765.

Article 2 : La requête n° 07VE01763 de la SCI NORMANDE est rejetée.

Article 3 : La SCI NORMANDE versera à la commune de Clichy-la-Garenne la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la commune de Clichy-la-Garenne tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative est rejeté.

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N° 07VE01763 et 07VE01765


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 07VE01763
Date de la décision : 20/03/2008
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme VETTRAINO
Rapporteur ?: Mme Corinne SIGNERIN-ICRE
Rapporteur public ?: M. PELLISSIER
Avocat(s) : DRAGO

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2008-03-20;07ve01763 ?
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