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20/09/2007 | FRANCE | N°06VE01436

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 2ème chambre, 20 septembre 2007, 06VE01436


Vu la requête, enregistrée en télécopie le 3 juillet 2006 et en original le 6 juillet 2006, présentée pour le DEPARTEMENT DES HAUTS-DE-SEINE, représenté par le président du conseil général, par Me Vieilleville ; le DEPARTEMENT DES HAUTS-DE-SEINE demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0500231 du 24 avril 2006 en tant que le Tribunal administratif de Versailles a annulé la décision du 9 septembre 2002 du président du conseil général des Hauts-de-Seine licenciant Mme X et a renvoyé celle-ci devant l'administration pour qu'il soit procédé à la liquidation de

l'indemnité à laquelle elle a droit au titre du préjudice résultant de cett...

Vu la requête, enregistrée en télécopie le 3 juillet 2006 et en original le 6 juillet 2006, présentée pour le DEPARTEMENT DES HAUTS-DE-SEINE, représenté par le président du conseil général, par Me Vieilleville ; le DEPARTEMENT DES HAUTS-DE-SEINE demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0500231 du 24 avril 2006 en tant que le Tribunal administratif de Versailles a annulé la décision du 9 septembre 2002 du président du conseil général des Hauts-de-Seine licenciant Mme X et a renvoyé celle-ci devant l'administration pour qu'il soit procédé à la liquidation de l'indemnité à laquelle elle a droit au titre du préjudice résultant de cette décision illégale dans la limite de la somme de 30 000 euros ;

2°) à titre principal, de rejeter la demande de Mme X présentée devant le Tribunal administratif de Versailles, et à titre subsidiaire, de réduire le montant maximal de la somme à allouer à titre d'indemnité ;

Il soutient que le jugement, qui ne justifie pas l'applicabilité à Mme X du principe général du droit au reclassement et condamne l'exposant à verser une indemnité sans indiquer en quoi l'intéressée a subi un préjudice financier, n'est pas suffisamment motivé ; que la demande tendant à l'annulation de la mesure de licenciement, présentée le 19 janvier 2005, était tardive, cette décision ayant été notifiée le 9 septembre 2002 ; que le principe général du droit au reclassement n'est pas applicable à Mme X dès lors que celle-ci est un agent non titulaire et compte tenu de la spécificité de ses fonctions d'assistante maternelle consacrée par l'article L. 422-6 du code du travail et l'article 8 du décret du 14 octobre 1994 ; que l'exposant s'est conformé aux règles existant à la date de la décision attaquée, rappelées par une décision du Conseil d'Etat du 23 juin 1995 et ne peut, compte tenu du principe de sécurité juridique, se voir opposer un principe général du droit consacré postérieurement ; qu'en tout état de cause, le défaut de reclassement ne pouvait justifier l'annulation dès lors que, conformément à ce principe, le département, qui a cherché à reclasser Mme X, n'a pu trouver de poste disponible correspondant à ses compétences, ses diplômes et son aptitude ; que l'intéressée n'a jamais sollicité une telle mesure ; que le reclassement n'étant pas possible, Mme X ne pouvait prétendre au bénéfice d'une indemnité autre que l'indemnité de licenciement qui lui a été allouée ; que la somme de 30 000 euros demandée incluait le préjudice financier, le préjudice moral et le remboursement de frais de déplacement ; que, dès lors, le tribunal, qui a rejeté les conclusions tendant à la réparation d'un préjudice moral et au remboursement des frais de déplacement, ne pouvait accorder la réparation d'un préjudice financier dans la limite de cette somme ; qu'en l'absence de service fait, Mme X ne peut prétendre à des rappels de salaires ; que dès lors qu'elle n'établit pas avoir recherché un emploi, la situation dont elle demande réparation lui est au moins en partie imputable ;

…………………………………………………………………………………………….

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la famille et de l'aide sociale ;

Vu le code du travail ;

Vu le décret n° 94-909 du 14 octobre 1994 relatif aux assistants maternels et assistantes maternelles employés par les collectivités territoriales et leurs établissements publics ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 6 septembre 2007 :

- le rapport de Mme Kermorgant, premier conseiller ;

- les observations de Me Pedelucq substituant Me Vieilleville, pour le DEPARTEMENT DES HAUTS-DE-SEINE ;

- et les conclusions de M. Pellissier, commissaire du gouvernement ;

Considérant que le DEPARTEMENT DES HAUTS-DE-SEINE fait appel du jugement du 24 avril 2006 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a annulé la décision du 9 septembre 2002 du président du conseil général licenciant Mme X, assistante maternelle agréée employée au service de l'aide sociale à l'enfance depuis le 19 novembre 1993, et a renvoyé celle-ci devant l'administration pour qu'il soit procédé à la liquidation de l'indemnité due au titre du préjudice résultant de cette décision illégale ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant, en premier lieu, qu'en relevant que ni la qualité d'agent non titulaire des assistantes maternelles, ni les conditions particulières d'exercice de cette profession ne faisaient obstacle à l'application du principe général du droit au reclassement du salarié atteint d'une inaptitude physique à occuper son emploi, et que la méconnaissance de ce principe général entachait d'illégalité la décision attaquée par laquelle le président du conseil général des Hauts-de-Seine a licencié Mme X, le Tribunal administratif de Versailles a suffisamment motivé sa décision d'annuler la mesure litigieuse ; que le moyen tiré de ce que le jugement serait insuffisamment motivé, faute d'indiquer en quoi Mme X aurait subi un préjudice financier, manque en fait ;

Considérant, en second lieu, que dans sa demande, Mme X a chiffré l'ensemble des préjudices dont elle demandait réparation à la somme globale de 30 000 euros ; que dès lors, alors même qu'il avait rejeté les conclusions de l'intéressée tendant à la réparation d'un préjudice moral qu'il a considéré comme non établi, le tribunal administratif n'a pas statué ultra petita en renvoyant Mme X devant l'administration pour qu'il soit procédé à la liquidation de l'indemnité due au titre du préjudice matériel dans la limite de la somme de 30 000 euros ;

Sur la recevabilité de la demande de première instance :

Considérant qu'aux termes de l'article R. 421-1 du code de justice administrative : « Sauf en matière de travaux publics, la juridiction ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision, et ce, dans les deux mois à partir de la notification ou de la publication de la décision attaquée (…) » ; qu'aux termes de l'article R. 421-5 du code de justice administrative : « Les délais de recours contre une décision administrative ne sont opposables qu'à condition d'avoir été mentionnés, ainsi que les voies de recours, dans la notification de la décision. » ;

Considérant que le DEPARTEMENT DES HAUTS-DE-SEINE n'établit ni la date à laquelle la décision du 9 septembre 2002 du président du conseil général licenciant Mme X a été notifiée à l'intéressée, ni que cette décision ait été notifiée avec mention des voies et délais de recours ; que, dans ces conditions, la fin de non recevoir tirée de la tardiveté de la demande présentée par Mme X devant le Tribunal administratif de Versailles doit être rejetée ;

Sur la légalité de la mesure de licenciement :

Considérant qu'aux termes de l'article 8 du décret du 14 octobre 1994 susvisé : « (…) L'assistante ou l'assistant maternel définitivement inapte pour raison de santé à reprendre son service à l'issue d'un congé de maladie, de maternité ou d'adoption est licencié. Le licenciement ne peut toutefois intervenir avant l'expiration d'une période de quatre semaines sans rémunération suivant la fin du congé de maternité ou d'adoption …» ;

Considérant, d'une part, qu'il résulte du principe général du droit dont s'inspirent tant les dispositions du code du travail relatives à la situation des salariés qui, pour des raisons médicales, ne peuvent plus occuper leur emploi que les règles statutaires applicables dans ce cas aux fonctionnaires, que, lorsqu'il a été médicalement constaté qu'un salarié se trouve de manière définitive atteint d'une inaptitude physique à occuper son emploi, il appartient à l'employeur de le reclasser dans un autre emploi et, en cas d'impossibilité, de prononcer, dans les conditions prévues pour l'intéressé, son licenciement ; que ce principe est applicable en particulier aux agents contractuels de droit public, catégorie à laquelle appartient Mme X, sans qu'y fasse obstacle la spécificité de l'exercice des fonctions d'assistante maternelle et alors même que l'obligation de reclassement n'est pas prescrite par son statut ; que le requérant ne peut à cet égard se prévaloir d'un principe de sécurité juridique pour soutenir que la légalité du licenciement n'aurait dû être appréciée qu'au regard de la jurisprudence établie à la date à laquelle il a été prononcé ;

Considérant, d'autre part, qu'il ressort des pièces du dossier que Mme X a, le 26 août 2002, été déclarée par un médecin agréé définitivement inapte à l'exercice de son emploi à la suite d'un accident du travail survenu en 1999 ; que le DEPARTEMENT DES HAUTS-DE-SEINE était, dès lors, tenu de rechercher un emploi pour le reclassement de l'intéressée ; que s'il soutient, en appel, s'être livré en vain à cette recherche, il ne l'établit par aucune pièce ; que, par suite, la décision de licenciement du 9 septembre 2002 n'a pas été régulièrement prise ;

Sur le préjudice causé à Mme X par la mesure de licenciement :

Considérant que, compte tenu de l'illégalité fautive commise par le DEPARTEMENT DES HAUTS-DE-SEINE en licenciant irrégulièrement Mme X, celle-ci est en droit d'obtenir réparation du préjudice matériel qu'elle a subi en conséquence de ce licenciement ; que si le département soutient, d'une part, que le reclassement de Mme X n'était pas possible, il ne l'établit pas ; qu'il ne saurait, d'autre part, pour s'exonérer en tout ou partie de sa responsabilité, invoquer la circonstance que l'intéressée n'aurait pas recherché un emploi alors que, âgée de 56 ans et handicapée suite à son accident de travail, elle a demandé à être reclassée ; qu'il suit de là que si l'absence de service fait ne permet pas à Mme X de prétendre au rappel de ses traitements, l'intéressée a droit, dans la limite précitée de 30 000 euros, à une indemnité correspondant à la différence entre les rémunérations dont elle a été illégalement privée pendant la période d'éviction, et les revenus perçus durant la même période et, notamment, les sommes reçues au titre de l'indemnité de licenciement et de l'allocation pour perte d'emploi ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le DEPARTEMENT DES HAUTS-DE-SEINE n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles a annulé la décision du 9 septembre 2002 licenciant Mme X, l'a condamnée à verser une indemnité en réparation du préjudice matériel subi par l'intéressée et a renvoyé celle-ci devant l'administration pour qu'il soit procédé à la liquidation de l'indemnité à laquelle elle a droit, dans la limite de la somme de 30 000 euros ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête du DEPARTEMENT DES HAUTS-DE-SEINE est rejetée.

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N°06VE01436


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 06VE01436
Date de la décision : 20/09/2007
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme SIGNERIN-ICRE
Rapporteur ?: Mme Martine KERMORGANT
Rapporteur public ?: M. PELLISSIER
Avocat(s) : VIEILLEVILLE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2007-09-20;06ve01436 ?
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