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22/03/2007 | FRANCE | N°04VE03565

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 1ère chambre, 22 mars 2007, 04VE03565


Vu la requête, enregistrée le 21 décembre 2004 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, présentée pour la SOCIETE LABORATOIRE GLAXOSMITHKLINE, dont le siège est situé 100 route de Versailles à Marly-le-Roi Cedex (78163), par le Bureau Francis Lefebvre ; la SOCIETE LABORATOIRE GLAXOSMITHKLINE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0301708 en date du 18 octobre 2004 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 11 février 2003 par laquelle le directeur de l'Agence française de sé

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Vu la requête, enregistrée le 21 décembre 2004 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, présentée pour la SOCIETE LABORATOIRE GLAXOSMITHKLINE, dont le siège est situé 100 route de Versailles à Marly-le-Roi Cedex (78163), par le Bureau Francis Lefebvre ; la SOCIETE LABORATOIRE GLAXOSMITHKLINE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0301708 en date du 18 octobre 2004 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 11 février 2003 par laquelle le directeur de l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé a interdit trois publicités pour la spécialité pharmaceutique Epivir ;

2°) d'annuler la décision du 11 février 2003 du directeur de l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé ;

3°) de condamner l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé à lui verser la somme de 10 000 € au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que le tribunal a omis de statuer sur le moyen tiré de ce qu'elle n'avait pas disposé d'un délai suffisant pour adresser à l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé ses observations écrites alors que la faculté de présenter de telles observations est expressément prévue par l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 ; que le tribunal a entaché son jugement d'une erreur de droit en rejetant l'argumentation selon laquelle l'appréciation du respect du caractère suffisant du délai imparti au laboratoire pour faire valoir ses observations devait être effectuée en tenant compte de l'application des dispositions de l'article 11 du décret du 28 novembre 1983 ; que si les mesures d'interdiction de publicité sont soumises aux dispositions particulières de l'article R. 5047-5 du code de la santé publique, ces décisions n'en sont pas moins soumises aux règles législatives gouvernant l'adoption des décisions individuelles défavorables et, s'agissant des organismes collégiaux, des règles posées par le décret du 28 novembre 1983 ; que la décision d'interdiction des publicités prise par l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé est une décision individuelle défavorable au sens de la loi du 11 juillet 1979 et qu'elle est donc soumise au principe établi par l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 ; qu'en application de l'article 11 du décret du 28 novembre 1983, les organismes collégiaux doivent recevoir les documents nécessaires à l'examen de l'affaire qui leur est soumise cinq jours au moins avant la date de leur réunion ; que, compte tenu de ce délai, le laboratoire ne disposait que de cinq jours utiles pour présenter ses observations écrites ; que ce délai est insuffisant ; que les droits de la défense n'ont ainsi pas été respectés ; que, contrairement à ce qu'a estimé le directeur de l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé, aucun des documents incriminés n'a jamais prétendu qu'Epivir restait intrinsèquement efficace face à la mutation M184V ; qu'en effet, ces documents précisent clairement que l'utilisation d'Epivir en monothérapie n'est pas recommandée ; que les documents indiquent seulement que c'est l'efficacité globale d'une trithérapie associant plusieurs antirétroviraux qui est maintenue en présence de la mutation M184V et non la seule efficacité d'Epivir ; que, dès lors, l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé a commis une erreur manifeste d'appréciation en estimant que les allégations contenues dans les documents concernés méconnaissaient les dispositions de l'article L. 5122-2 du code de la santé publique ; que, s'agissant du document léger d'information, l'agence a estimé par erreur que le logo Epivir et l'en-tête de la page 10 intitulé « efficacité en présence de la mutation M184V » ne formaient qu'une seule et même phrase ; qu'aucun des documents diffusés ne contient une phrase prétendant que la mutation M184V serait un atout ou qu'elle ne serait pas résistante à Epivir ; qu'au contraire, les documents concernés précisent que la mutation M184V est une mutation de résistance à la lamivudine c'est-à-dire au principe actif d'Epivir ; que le seul message clair de ces documents est qu'en dépit de la résistance à Epivir induite par la mutation M184V, une trithérapie contenant de l'AZT, de l'Abacavir et de l'Epivir reste efficace ; que les professionnels spécialisés à qui s'adressaient ces messages ne pouvaient se méprendre sur le sens de ces documents ; que, dans leur analyse du document léger d'information, le directeur de l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé ainsi que le tribunal administratif ont commis une erreur de fait ; qu'en effet, l'étude Rozenbaum n'a pas eu pour but d'évaluer l'efficacité d'Epivir en présence de la mutation M184V ;

……………………………………………………………………………………………

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la santé publique ;

Vu la loi n° 2000-231 du 12 avril 2000 ;

Vu le décret n° 83-1025 du 28 novembre 1983 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 8 mars 2007 :

- le rapport de M. Blin, président-assesseur ;

- les observations de Me Vannini pour la SOCIÉTÉ LABORATOIRE GLAXOSMITHKLINE ;

- et les conclusions de Mme Le Montagner, commissaire du gouvernement ;

Sur la recevabilité de la requête :

Considérant que la requête introductive d'instance de la SOCIETE LABORATOIRE GLAXOSMITHKLINE ne constitue pas la reproduction littérale de ses mémoires de première instance et énonce de nouveau de manière précise les critiques adressées à la décision dont l'annulation a été demandée au tribunal administratif ; qu'elle répond ainsi aux exigences de motivation des requêtes d'appel prévues par l'article R. 411-1 du code de justice administrative ; que, dès lors, la fin de non-recevoir soulevée par l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé et tirée du défaut de motivation de la requête doit être rejetée ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant que, par décision du 11 février 2003, le directeur de l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé a interdit trois publicités pour la spécialité pharmaceutique Epivir ; qu'il résulte des pièces du dossier que, dans sa demande introductive d'instance devant le Tribunal administratif de Versailles, complétée par son mémoire du 3 mars 2004, la SOCIETE LABORATOIRE GLAXOSMITHKLINE a fait valoir que, contrairement aux prescriptions de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000, l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé ne l'a pas mise à même de présenter ses observations « écrites » avant la décision du 11 février 2003 du directeur de l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé ; que, si le tribunal a relevé que la société requérante avait disposé d'un délai suffisant pour « préparer sa défense devant la commission de contrôle de la publicité » et qu'elle avait « effectivement été entendue par celle-ci le 14 novembre 2002 », il ne s'est pas prononcé sur ce moyen, qui n'était pas inopérant ; que, dès lors, le jugement du 18 octobre 2004 est irrégulier et doit être annulé ;

Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par la SOCIETE LABORATOIRE GLAXOSMITHKLINE devant le Tribunal administratif de Versailles ;

Sur la régularité de la procédure :

Considérant qu'aux termes l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 relatif aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations : « Exception faite des cas où il est statué sur une demande, les décisions individuelles qui doivent être motivées en application des articles 1er et 2 de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public n'interviennent qu'après que la personne intéressée a été mise à même de présenter des observations écrites et, le cas échéant, sur sa demande, des observations orales. Cette personne peut se faire assister par un conseil ou représenter par un mandataire de son choix. (…) / Les dispositions de l'alinéa précédent ne sont pas applicables : 1° En cas d'urgence ou de circonstances exceptionnelles ; / (…) / 3° Aux décisions pour lesquelles des dispositions législatives ont instauré une procédure contradictoire particulière. (…) » ; qu'aux termes de l'article L. 5122-2 du code de la santé publique : « La publicité définie à l'article L. 5122-1 ne doit pas être trompeuse ni porter atteinte à la protection de la santé publique. Elle doit présenter le médicament ou produit de façon objective et favoriser son bon usage. Elle doit respecter les dispositions de l'autorisation de mise sur le marché. » ; qu'aux termes de l'article L. 5122-9 du même code : « La publicité pour un médicament auprès des membres des professions de santé habilités à prescrire ou à dispenser des médicaments ou à les utiliser dans l'exercice de leur art doit faire l'objet, dans les huit jours suivant sa diffusion, d'un dépôt auprès de l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé. / En cas de méconnaissance des dispositions des articles L. 5122-2 et L. 5122-3, l'agence peut : / 1º Ordonner la suspension de la publicité ; / 2º Exiger qu'elle soit modifiée ; / 3º L'interdire et éventuellement exiger la diffusion d'un rectificatif. » ; qu'aux termes de l'article R. 5047-5 du code de la santé publique : « I. -Le directeur général de l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé peut mettre en demeure l'entreprise exploitant le médicament de modifier le contenu de la publicité dans un délai déterminé. / En cas de non-respect de cette mise en demeure à l'issue de ce délai, et après avis de la commission mentionnée à l'article R. 5054, le directeur général peut interdire la poursuite et la diffusion ultérieure de cette publicité. / II.-Le directeur général de l'agence peut, après avis de la commission prévue à l'article R. 5054 : / a) interdire la publicité, sous quelque forme que ce soit, ou la poursuite de la campagne publicitaire ; / b) interdire la publicité, ou la poursuite de la campagne publicitaire et exiger soit la diffusion, par les mêmes moyens ou des moyens équivalents, d'un rectificatif approuvé par la commission, soit l'envoi de lettres rectificatives au destinataire de la publicité et ce aux frais de l'entreprise. / ces mesures d'interdiction ne peuvent être prises qu'après que l'intéressé a été avisé et, s'il le désire, entendu par la commission. (...) » ;

Considérant que la décision par laquelle le directeur général de l'Agence française de sécurité sanitaire des médicaments interdit le contenu d'une publicité pour un médicament ou un produit de santé en application de l'article R. 5047-5 précité du code de la santé publique constitue une mesure de police qui doit être motivée en application de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979 ; que, par ailleurs, il résulte des dispositions précitées de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 que, lorsqu'une procédure contradictoire particulière a été instaurée, les dispositions de l'article 24 précité ne sont pas applicables si cette procédure particulière a été instaurée par des dispositions législatives ; que, toutefois, la procédure contradictoire prévue au code de la santé publique en cas d'interdiction d'une publicité pour un médicament a été instaurée, non pas par des dispositions législatives, mais par des dispositions réglementaires ; que, dès lors, en application de l'article 24 précité de la loi du 2 avril 2000, l'Agence française de sécurité sanitaire des médicaments devait mettre la SOCIÉTÉ LABORATOIRE GLAXOSMITHKLINE à même de présenter des observations écrites devant la commission chargée du contrôle de la publicité ; que, par lettre du 31 octobre 2002 adressée par télécopie le même jour à la SOCIETE LABORATOIRE GLAXOSMITHKLINE, l'agence française de sécurité sanitaire des produits de santé a informé la SOCIETE LABORATOIRE GLAXOSMITHKLINE que la commission chargée du contrôle de la publicité et de la diffusion de recommandations sur le bon usage des médicaments avait proposé l'interdiction de certaines des publicités de la SOCIETE LABORATOIRE GLAXOSMITHKLINE relatives à la spécialité Epivir, et qu'elle l'a invitée à lui faire connaître dans les plus brefs délais si elle souhaitait « être entendue » par la commission qui se réunirait le 14 novembre 2002 afin de statuer définitivement sur son dossier ; qu'elle n'était pas tenue, en application de l'article 24 précité de la loi du 2 avril 2000 d'informer la SOCIÉTÉ LABORATOIRE GLAXOSMITHKLINE que cette société pouvait présenter des observations écrites ; que, par ailleurs, la SOCIÉTÉ LABORATOIRE GLAXOSMITHKLINE n'a pas présenté d'observations écrites et l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé ne lui a pas opposé le délai de cinq jours préalable à la réunion des organismes consultatifs, prévu à l'article 11 du décret du 28 novembre 1983 ; qu'elle ne peut, dès lors, utilement faire valoir que ses observations écrites auraient dû être présentées cinq jours au moins avant la date de la réunion de la commission chargée du contrôle de la publicité et que le délai dont elle a disposé pour présenter les observations écrites avant la réunion de cette commission devrait prendre en compte ce délai de cinq jours ; qu'il ressort des pièces du dossier qu'elle a disposé d'au moins dix jours avant la réunion de ladite commission pour présenter des observations écrites ; que, dans les circonstances de l'espèce, ce délai doit être regardé comme suffisant pour présenter des observations écrites et préparer des observations orales devant la commission chargée du contrôle de la publicité ; que, par suite, la SOCIETE LABORATOIRE GLAXOSMITHKLINE n'est pas fondée à soutenir que la décision attaquée a été prise à l'issue d'une procédure irrégulière ;

Sur la légalité interne de la décision attaquée :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 5122-1 du code de la santé publique : « On entend par publicité pour les médicaments à usage humain toute forme d'information, y compris le démarchage, de prospection ou d'incitation qui vise à promouvoir la prescription, la délivrance, la vente ou la consommation de ces médicaments, à l'exception de l'information dispensée, dans le cadre de leurs fonctions, par les pharmaciens gérant une pharmacie à usage intérieur. (...) » ; qu'aux termes de l'article L. 5122-2 du même code : «La publicité définie à l'article L. 5122-1 ne doit pas être trompeuse ni porter atteinte à la protection de la santé publique. Elle doit présenter le médicament ou produit de façon objective et favoriser son bon usage. / Elle doit respecter les dispositions de l'autorisation de mise sur le marché. » ; qu'aux termes de l'article R. 5047-5 dudit code : « (...) II. - Le directeur général de l'Agence peut, après avis de la commission prévue à l'article R. 5054 : / a) Interdire la publicité, sous quelque forme que ce soit, ou la poursuite de la campagne publicitaire ; / b) Interdire la publicité, ou la poursuite de la campagne publicitaire. (...) » ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que, par une décision du 11 février 2003, le directeur de l'agence française de sécurité sanitaire des produits de santé a décidé d'interdire les publicités, sous quelque forme que ce soit, pour la spécialité pharmaceutique Epivir, reprenant des allégations mentionnées dans deux « documents légers d'information » et une fiche posologique diffusés par la SOCIÉTÉ LABORATOIRE GLAXOSMITHKLINE, et relatives à l'efficacité virologique de la spécialité Epivir en présence de la mutation M184V du virus de l'immunodéficience humaine ( VIH) au motif que ces allégations sont « contraires aux dispositions de l'article L. 5122-2 du code de la santé publique qui précise notamment que la publicité doit présenter le médicament de façon objective et favoriser son bon usage. » ;

Considérant que la page 2 de la fiche posologique présente un titre souligné ainsi rédigé : « Efficacité virologique maintenue en présence de la mutation M184V » ; que, contrairement à ce que soutient la requérante, le directeur de l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé n'a pas commis d'erreur matérielle ni d'erreur de fait en rappelant que l'adjectif « maintenue » était présent dans le document en litige ; que, par ailleurs, le premier « document léger d'information » comprend le titre suivant : « Epivir efficacité en présence de la mutation M184V » ; que, toutefois, il est constant que la résistance du VIH-1 à la lamivudine, qui est le nom commun de la substance active commercialisée sous le nom d'Epivir, résulte de l'apparition de la mutation M184V ; que les mentions précitées des documents publicitaires diffusés par la requérante peuvent laisser penser que la spécialité Epivir serait efficace, même employée seule, en présence de la mutation M184V ; que, dès lors, en estimant que les mentions précitées ne présentaient pas le document de façon objective et ne favorisaient pas son bon usage, contrairement aux dispositions de l'article L. 5122-2 du code de la santé publique, le directeur général de l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé n'a commis ni erreur de fait ni erreur manifeste d'appréciation des publicités en litige ;

Considérant que le second « document léger d'information » présente le sous-titre suivant : « La mutation M184V (...) - Ne compromet pas l'activité antirétrovirale d'une trithérapie contenant 3TC, ZDV et Abacavir (CNA 3009) » ; qu'en premier lieu, il ressort de la lettre du 31 octobre 2002 par laquelle le directeur général de l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé a informé la SOCIÉTÉ LABORATOIRE GLAXOSMITHKLINE que la commission chargée du contrôle de la publicité et de la diffusion de recommandations sur le bon usage des médicaments avait proposé l'interdiction de la spécialité Epivir, que le directeur de cette agence précisait qu'il existait une forte probabilité d'échappement thérapeutique des patients porteurs de la mutation M184V à un traitement par Epivir en citant le rapport dit « Delfraissy », relatif à la prise en charge thérapeutique des personnes infectées par le VIH, et rassemblant des recommandations d'un groupe d'experts sous la direction du professeur Jean-François Delfraissy ; qu'ainsi, contrairement à ce que soutient la société requérante, en critiquant la pertinence de l'étude dite « Rozenbaum » et en énonçant qu'il ne pouvait être mis en exergue de conclusions sur l'efficacité d'Epivir en présence de la mutation M184V, le directeur général de l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé doit être regardé comme ayant, dans la décision attaquée, émis un avis réservé quant à l'efficacité d'Epivir dans le cas d'une mutation M184V et dans le cadre d'une trithérapie ; que, dès lors, la société requérante n'est pas fondée à soutenir que le risque d'échec thérapeutique en cas de trithérapie n'était pas au nombre des motifs invoqués par le directeur général de l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé à l'appui de la décision attaquée ; qu'elle n'est pas davantage fondée à soutenir que, en cours d'instance, l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé soulèverait un nouveau motif et demanderait à la Cour de procéder à une substitution de motifs ; qu'en second lieu, il résulte de la décision de la commission des communautés européennes du 21 août 2002, modifiant la décision relative à l'autorisation de mise sur le marché du médicament Epivir que : « Les traitements associant plusieurs médicaments antirétroviraux dont la lamivudine se sont montrés efficaces chez les patients non préalablement traités par antirétroviral ainsi que chez les patients porteurs de virus avec une mutation M184V » ; qu'en supposant que cette analyse puisse être regardée comme équivalente à la mention publicitaire précitée, le directeur général de l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé pouvait, sans commettre d'erreur de droit, prescrire l'interdiction d'une telle mention dès lors qu'il résultait d'autres études que cette analyse devait être nuancée ; qu'en outre, le bien-fondé de la décision du directeur général de l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé peut légalement être apprécié au regard d'études ultérieures ; qu'en troisième lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que le directeur général de l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé aurait commis une erreur manifeste d'appréciation en énonçant que les conclusions de l'étude dite « Rozenbaum » ne pouvaient être mises en exergue de conclusions sur l'efficacité d'Epivir en présence de la mutation M184V dès lors qu'il s'agissait « d'une étude menée en ouvert sans comparateur sur 52 patients dont seulement 19 patients présentaient la mutation M184V » ; qu'enfin, il ressort du rapport 2004 du groupe d'experts dirigés par le professeur Delfraissy que : « la mutation M184V confère un haut niveau de résistance à la 3TC [lamivudine] et est le plus souvent la seule détectée en cas d'échec d'une combinaison puissante d'antirétroviraux contenant cette molécule. » ; que, dès lors, le directeur général de l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé a pu, sans commettre d'erreur manifeste d'appréciation, estimer que la mention selon laquelle « la mutation M184V ne compromet pas l'activité antirétrovirale d'une trithérapie contenant 3TC, ZDV et Abacavir » sur la base de l'étude dite « Rozenbaum », ne présentait pas le médicament de façon objective, ne favorisait pas son bon usage et était contraire aux dispositions de l'article L. 5122-2 du code de la santé publique ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SOCIÉTÉ LABORATOIRE GLAXOSMITHKLINE n'est pas fondée à demander l'annulation de la décision du 11 février 2003 par laquelle le directeur général de l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé a interdit les publicités reprenant les mentions précitées ;

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamnée à payer à la SOCIÉTÉ LABORATOIRE GLAXOSMITHKLINE la somme qu'elle demande au titre des frais exposés en première instance et en appel et non compris dans les dépens ; que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de condamner la SOCIÉTÉ LABORATOIRE GLAXOSMITHKLINE à verser à l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé la somme que celle-ci demande au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du 18 octobre 2004 du Tribunal administratif de Versailles est annulé.

Article 2 : Le surplus des conclusions de la SOCIÉTÉ LABORATOIRE GLAXOSMITHKLINE est rejeté.

Article 3 : Les conclusions de l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

04VE03565 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 04VE03565
Date de la décision : 22/03/2007
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme ROBERT
Rapporteur ?: M. Jean-Pierre BLIN
Rapporteur public ?: Mme LE MONTAGNER
Avocat(s) : CLEMENT

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2007-03-22;04ve03565 ?
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