La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

13/02/2007 | FRANCE | N°05VE00189

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 3ème chambre, 13 février 2007, 05VE00189


Vu la requête, enregistrée le 4 février 2005 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, présentée pour Mme Noromihanta X, demeurant ..., par Me Huber ; Mme X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0203341 en date du 18 novembre 2004 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxquelles elle demeure assujettie pour la période allant du 1er janvier 1995 au 31 décembre 1997 ;

2°) de prononcer la décharge demandée ;

3°) de mettre à la charge

de l'Etat une somme de 4 000 € sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de ju...

Vu la requête, enregistrée le 4 février 2005 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, présentée pour Mme Noromihanta X, demeurant ..., par Me Huber ; Mme X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0203341 en date du 18 novembre 2004 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxquelles elle demeure assujettie pour la période allant du 1er janvier 1995 au 31 décembre 1997 ;

2°) de prononcer la décharge demandée ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 4 000 € sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient qu'en l'absence de toute indication du fondement textuel des rehaussements envisagés par le service, la lettre portant à la connaissance de la contribuable vérifiée les rehaussements envisagés par l'administration méconnaît, compte tenu de la complexité des règles en matière de taxe sur la valeur ajoutée et de l'existence de deux chefs de redressements, les dispositions de l'article L. 76 du livre des procédures fiscales; que cette irrégularité doit être qualifiée de substantielle au regard des dispositions de l'article L. 80 CA du même livre ; qu'elle facturait à ses clients en exonération de taxe sur la valeur ajoutée les seules opérations de transports de marchandises effectuées à destination d'un port ou d'un aéroport, en application de l'article 262-21 du code général des impôts, ou de transport de marchandises destinées à être expédiées directement vers un pays tiers ; que la justification de la facturation en exonération de taxe résulte des ordres donnés par le client et des bons de transports dont l'administration a pu avoir connaissance lors de leur présentation à la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires ; que l'administration refuse de tenir compte des dispositions des articles 73 A et 73 H de l'annexe III au code général des impôts ; qu'à cet égard le jugement rejette les arguments de la société sans réellement justifier sa position ; que la doctrine prévoit un assouplissement des conditions de preuve de l'exonération ; que les justifications en possession de l'administration sont suffisantes pour prouver que la société se trouve dans le champ de l'exonération ; que le tribunal n'a pas tenu compte des justificatifs relatifs aux semaines 47 et 48 ; que les intérêts de retard constituent compte tenu de leur taux une sanction qui doit être limitée au strict minimum correspondant à la réalité du préjudice subi par le Trésor ; que l'avis de mise en recouvrement en date du 13 avril 2000 ne satisfait pas aux prescriptions de l'article R. 256-1 du livre des procédures fiscales dès lors que les opérations imposées d'office ne relèvent pas toutes du même taux d'imposition ; que c'est à tort que le jugement attaqué considère que l'article R. 256-1 du livre des procédures fiscales dans sa rédaction issue du décret du 20 avril 2000 s'applique à un avis en date du 13 du même mois et fait suite à une notification antérieure au 1er janvier 2000 date d'application du nouveau texte ; que la validation législative résultant de l'article 25 II-B de la loi n° 99-1173 du 30 décembre 1999 n'est pas applicable dans la présente affaire où la régularité de l'avis n'était pas contestée du chef du motif validé par le législateur ; que l'avis de mise en recouvrement ne précise pas suffisamment la nature des droits réclamés en violation des dispositions de l'article 256-1 du livre des procédures fiscales ;

………………………………………………………………………………………………..

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 30 janvier 2007 :

- le rapport de M. Bonhomme, premier conseiller ;

- et les conclusions de M.Brunelli, commissaire du gouvernement ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 76 du livre des procédures fiscales, « Les bases ou les éléments servant au calcul des impositions d'office sont portés à la connaissance du contribuable, trente jours au moins avant la mise en recouvrement des impositions, au moyen d'une notification qui précise les modalités de leur détermination … » ;

Considérant qu'il ressort l'instruction qu'eu égard à la situation de taxation d'office de l'entreprise de Mme X pour défaut de souscription ou pour souscription tardive de ses déclarations de chiffres d'affaires des années 1995, 1997 et 1998, la notification de redressement que lui a adressée le service le 15 novembre 1998 ne pouvait avoir pour objet d'ouvrir un débat contradictoire avec le vérificateur au sens des dispositions de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales ; que ce document, s'agissant du redressement concernant la part du chiffre d'affaires que la redevable n'avait pas soumise à la taxe sur la valeur ajoutée, précisait les bases d'impositions et les années concernées, rappelait de manière claire et précise les conditions d'exonération, et en particulier les formalités exigées par l'article 73 de l'annexe III au code général des impôts pour en bénéficier, ainsi que le taux applicable pour chacune des années en litige ; que s'agissant de la taxe sur la valeur ajoutée non déductible, la notification précisait les opérations pour lesquelles la taxe les grevant n'était pas déductible ainsi que les bases d'imposition et le montant du redressement ; qu'il n'était pas nécessaire de citer d'autres articles du code général des impôts que ceux visés par l'administration ; que dans ces conditions c'est à bon droit que le tribunal administratif a considéré que nonobstant la circonstance que la notification ne mentionnait pas les fondements légaux justifiant chacun des deux chefs de redressements, elle devait être regardée comme suffisamment motivée au regard des dispositions précitées de l'article L. 76 du livre des procédures fiscales ; que, par suite, la requérante n'est pas fondée à soutenir que la notification serait entachée d'une erreur substantielle au sens des dispositions de l'article L. 80 CA du livre des procédures fiscales ;

Sur la régularité de l'avis de mise en recouvrement du 13 avril 2000 :

Considérant qu'aux termes du B du II de l'article 25 de la loi de finances rectificative pour 1999 : Sont réputés réguliers, sous réserve des décisions de justice passées en force de chose jugée, les avis de mise en recouvrement émis à la suite de notifications de redressement effectuées avant le 1er janvier 2000 en tant qu'ils seraient contestés par le moyen tiré de ce qu'ils se réfèreraient, pour ce qui concerne les informations mentionnées à l'article R. 256 ;1 du livre des procédures fiscales, à la seule notification de redressement ; qu'aux termes de l'article R. 256-1 du livre des procédures fiscales dans sa rédaction applicable au présent litige : L'avis de mise en recouvrement individuel prévu à l'article L. 256 comporte : 1° Les indications nécessaires à la connaissance des droits, taxes, redevances, impositions ou autres sommes qui font l'objet de cet avis ; 2° Les éléments du calcul et le montant des droits et des pénalités, indemnités ou intérêts de retard qui constituent la créance. Toutefois, les éléments du calcul peuvent être remplacés par le renvoi au document sur lequel ils figurent, lorsque ce document a été établi ou signé par le contribuable ou son mandataire ou lui a été notifié antérieurement… ; que ces dispositions ne font pas obstacle à ce qu'un contribuable conteste un avis de mise en recouvrement émis le 13 avril 2000 à la suite d'une notification de redressement effectuée avant le 1er janvier 2000 à raison d'une insuffisance concernant les indications prévues par l'article R. 256-1 du livre des procédures fiscales ;

Considérant que Mme X, pour soutenir que l'avis de mise en recouvrement du 13 avril 2000 émis à la suite de la notification de redressement du 15 novembre 1998 ne contient pas les informations nécessaires à la connaissance des sommes recouvrées exigées par le 1° de l'article R. 256-1 précité du livre des procédures fiscales, fait valoir que cet avis ne mentionne pas les articles spécifiques visant les redressements notifiés, qu'au surcroît il ne précise pas la répartition entre les différents taux de taxe sur la valeur ajoutée et qu'enfin il ne fait référence à aucune notification des modalités de calcul en ce qui concerne l'intérêt de retard ;

Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction que la requérante n'avait qu'une seule activité ; que par suite, la seule mention « nature : TVA - article 256 et suivants du code général des impôts » était suffisante pour indiquer à la redevable la nature des impositions mises en recouvrement, alors même que ces impositions résultaient d'un rappel de la taxe sur la valeur ajoutée provenant d'une part de recettes que la requérante avait considérées comme exonérées de taxe sur la valeur ajoutée et d'autre part de charges exclues du droit à déduction ;

Considérant, en deuxième lieu, que les indications relatives aux taux de taxe sur la valeur ajoutée applicable font partie des éléments de calcul prévus au 2° de l'article R. 256-1 précité du livre des procédures fiscales pouvant être remplacés par le renvoi aux documents qui mentionnent ces éléments; qu'il résulte de l'instruction que l'avis de mise en recouvrement du 13 avril 2000 renvoie à la notification de redressement du 15 novembre 1998 qui précise les taux applicables selon l'année concernée ;

Considérant, en troisième lieu, que si l'avis litigieux mentionne un montant de pénalités au titre de l'intérêt de retard, la notification de redressement datée du 15 novembre 1998 à laquelle il se réfère conformément aux dispositions du 2° de l'article R. 256-1 du livre des procédures fiscales donne au titre des conséquences financières des redressements toute les précisions utiles permettant d'identifier la période de liquidation des intérêts de retard, leur taux et leur montant ; qu'ainsi Mme X n'est pas fondée à soutenir que les intérêts de retard ont été mis en recouvrement à l'issue d'une procédure irrégulière ;

Sur le bien-fondé de la taxe :

Considérant qu'aux termes du I de l'article 256 du code général des impôts : Sont soumises à la taxe sur la valeur ajoutée les livraisons de biens meubles et les prestations de services effectuées à titre onéreux par un assujetti agissant en tant que tel ; qu'aux termes du I de l'article 262 du code général des impôts : Sont exonérées de la taxe sur la valeur ajoutée les exportations de biens meubles corporels ainsi que les prestations de services qui leur sont directement liées ; qu'en vertu des dispositions de l'article 73 A de l'annexe III au code général des impôts, pour pouvoir bénéficier de l'exonération prévue au 1 de l'article 262 en ce qui concerne les transports de marchandises vers un port ou un aéroport en vue de leur transbordement à destination d'un Etat qui n'appartient pas à la communauté économique européenne ou des territoires et départements d'outre-mer, le transporteur doit présenter une attestation délivrée par le propriétaire des marchandises, par l'expéditeur ou par le commissionnaire de transports visée par le service des impôts dont ils dépendent et certifiant la destination des produits ;

Considérant que Mme X n'établit ni par les attestations de la Société Emery Worldwide, qui ne sauraient constituer les documents justificatifs prévus par l'article 73 de l'annexe III au code général des impôts, ni par les photocopies des bons de transport insuffisamment renseignés qu'elle produit, la réalité de la destination finale des marchandises qu'elles a acheminées jusqu'à la zone de fret de Roissy ;

Considérant que si la requérante a entendu se prévaloir, sur le fondement des garanties accordées par l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, des assouplissements apportés aux règles de preuve légale par l'instruction du 20 octobre 1999, elle ne justifie pas par tout moyen, ainsi que l'admet ladite instruction, de la destination finale des marchandises ;

Sur les intérêts de retard :

Considérant qu'aux termes de l'article 1727 du code général des impôts dans sa rédaction alors applicable : Le défaut ou l'insuffisance dans le paiement ou le versement tardif de l'un des impôts, droits, taxes, redevances ou sommes établis ou recouvrés par la direction générale des impôts donnent lieu au versement d'un intérêt de retard qui est dû indépendamment de toutes sanctions. Cet intérêt n'est pas dû lorsque sont applicables les dispositions de l'article 1732 ou les sanctions prévues aux articles 1791 à 1825 F. Le taux de l'intérêt de retard est fixé à 0,75 % par mois. Il s'applique sur le montant des sommes mises à la charge du contribuable ou dont le versement a été différé. ;

Considérant que l'intérêt de retard institué par ces dispositions vise essentiellement à réparer les préjudices de toute nature subis par l'Etat à raison du non-respect par les contribuables de leurs obligations de déclarer et payer l'impôt aux dates légales ; que, si l'évolution des taux du marché a conduit à une hausse relative de cet intérêt depuis son institution, cette circonstance ne lui confère pas pour autant la nature d'une sanction, dès lors que son niveau n'est pas devenu manifestement excessif au regard du taux moyen pratiqué par les prêteurs privés pour un découvert non négocié ; qu'est à cet égard sans influence la jurisprudence civile selon laquelle à défaut d'écrit préalable dans un contrat liant la banque à son client et fixant clairement le taux d'intérêt conventionnel applicable en cas de découvert non négocié, la sanction n'est pas la nullité de la stipulation d'intérêt mais l'application du taux d'intérêt légal ; que cette référence au taux des découverts non négociés, contrairement à ce que soutient la requérante, est pertinente, alors même qu'elle concerne les rapports entre personnes privées, dès lors que ni les agents de la direction générale des impôts, ni les banques, dans le cas de découverts non négociés, ne sont maîtres des délais qui leur sont imposés par les contribuables retardataires et qu'ils ne disposent pas nécessairement d'une garantie de solvabilité de ces derniers ; que la référence au taux de l'intérêt légal, qui ne reflète qu'imparfaitement le taux du marché monétaire, ne constitue pas une référence plus pertinente pour établir le caractère manifestement excessif du taux de l'intérêt appliqué à Mme X ; que, par suite, contrairement à ce que soutient la contribuable, l'intérêt de retard constitue la réparation du préjudice pécuniaire subi par le Trésor public privé d'une ressource et non une sanction ; qu'en tout état de cause, le moyen tiré de l'enrichissement sans cause de l'Etat ne saurait être invoqué à l'appui d'une contestation des intérêts de retard; que la possibilité offerte à l'administration par l'article L. 247 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction applicable à compter de l'année 2004, de procéder à des remises à titre gracieux des intérêts de retard est sans influence sur le taux de l'intérêt légalement applicable ; qu'en conséquence, doivent être écartés les moyens tirés du défaut de motivation au sens des dispositions de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales et de l'absence de modulation au sens des dispositions de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme X n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, qui est suffisamment motivé, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande ; que par voie de conséquence, ses conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme X est rejetée.

05VE00189 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 05VE00189
Date de la décision : 13/02/2007
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme VETTRAINO
Rapporteur ?: M. Bernard BONHOMME
Rapporteur public ?: M. BRUNELLI
Avocat(s) : HUBER

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2007-02-13;05ve00189 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award