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09/01/2007 | FRANCE | N°04VE01008

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 3ème chambre, 09 janvier 2007, 04VE01008


Vu l'ordonnance en date du 16 août 2004, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles le 1er septembre 2004, par laquelle le président de la Cour administrative d'appel de Paris a, en application du décret n°2004-585 du 22 juin 2004 portant création d'une cour administrative d'appel à Versailles et modifiant les articles R. 221-3, R. 221-4, R. 221-7 et R. 221-8 du code de justice administrative, transmis à la Cour administrative d'appel de Versailles la requête présentée pour le CENTRE HOSPITALIER INTERCOMMUNAL ROBERT BALLANGER, dont le siège est boulevard

Robert Ballanger à Aulnay-sous-Bois (93602), par Me Robert ...

Vu l'ordonnance en date du 16 août 2004, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles le 1er septembre 2004, par laquelle le président de la Cour administrative d'appel de Paris a, en application du décret n°2004-585 du 22 juin 2004 portant création d'une cour administrative d'appel à Versailles et modifiant les articles R. 221-3, R. 221-4, R. 221-7 et R. 221-8 du code de justice administrative, transmis à la Cour administrative d'appel de Versailles la requête présentée pour le CENTRE HOSPITALIER INTERCOMMUNAL ROBERT BALLANGER, dont le siège est boulevard Robert Ballanger à Aulnay-sous-Bois (93602), par Me Robert Pignot, avocat au barreau de Paris ;

Vu la requête, enregistrée le 18 mars 2004 au greffe de la Cour administrative d'appel de Paris, par laquelle le CENTRE HOSPITALIER INTERCOMMUNAL ROBERT BALLANGER demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0009785, en date du 22 janvier 2004, par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise l'a condamné à verser à M. Hamidou YX une indemnité de 255 000 euros, à M. et Mme Oumar YX une indemnité de 18 000 euros chacun, ces sommes portant intérêt au taux légal à compter du 30 décembre 1999, et à la caisse régionale des artisans d'Ile-de-France une indemnité de 685 250 euros ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. Hamidou YX, M. et Mme Oumar YX et la caisse régionale des artisans d'Ile-de-France ;

Il soutient qu'aucune faute médicale ne saurait lui être reprochée en ce qui concerne la prise en charge de M. YX par le service des urgences le 16 juin 1995 qui a été adaptée à son état de santé ; qu'en effet, si M. YX a été victime, le 19 juin 1995, d'une encéphalopathie anoxique secondaire à une fausse route alimentaire, il n'est pas établi que, comme l'ont estimé à tort les premiers juges, il souffrait antérieurement d'une encéphalite du tronc cérébral (rhombencéphalite) qui aurait pu être diagnostiquée s'il avait été gardé en observation à l'hôpital ; que la fausse route alimentaire dont a été victime M. YX n'est pas la conséquence directe de la prise en charge de ce dernier trois jours plus tôt ; que, d'ailleurs, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a estimé que l'absence d'hospitalisation entre le 16 et le 19 juin 1995 a constitué une perte de chance, non pas d'éviter la survenance d'une fausse route alimentaire, mais de bénéficier d'une prise en charge médicale qui en aurait limité les conséquences dommageables ; que, toutefois, en l'absence de troubles antérieurs de la déglutition, il n'est pas établi que l'intéressé aurait dû bénéficier d'une surveillance particulière ; que le jugement contesté est contradictoire en ce qu'il retient une perte de chance et condamne le centre hospitalier à réparer l'intégralité des préjudices ; qu'à titre subsidiaire, la part de responsabilité du CENTRE HOSPITALIER INTERCOMMUNAL ROBERT BALLANGER ne saurait excéder un tiers ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la sécurité sociale ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 19 décembre 2006 :

- le rapport de M. Davesne, premier conseiller ;

- les observations de Me Amathieu-Ruckert, substituant Me Pignot, avocat du CENTRE HOSPITALIER INTERCOMMUNAL ROBERT BALLANGER ;

- et les conclusions de M. Brunelli, commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'à la suite de troubles d'élocution et de vertiges, M. Hamidou YX, alors âgé de 15 ans, a consulté, le 16 juin 1995, un médecin généraliste qui l'a immédiatement renvoyé vers le service des urgences du CENTRE HOSPITALIER INTERCOMMUNAL ROBERT BALLANGER en faisant état, notamment, d'un « état neurologique altéré » ; que les examens pratiqués au centre hospitalier ont permis de constater une altération générale de l'état de santé de l'intéressé qui est apparu asthénique, adynamique, anorexique et d'observer une diminution globale de la force musculaire, un signe de Romberg positif avec rétropulsion et un nystagmus ; qu'à l'issue de ces examens, M. Hamidou YX a été renvoyé à son domicile avec un traitement antibiotique et une éviction scolaire jusqu'au 21 juin 1995 ; que les 17 et 18 juin 1995, M. Hamidou YX a connu de longues périodes de sommeil et, en dépit d'une faible alimentation, des vomissements, ainsi qu'une persistance de troubles de l'équilibre ; que le 19 juin 1995, alors que l'état de santé de l'intéressé semblait s'améliorer, M. Hamidou YX a été victime d'une fausse route alimentaire, qui a provoqué un arrêt cardiaque et son asphyxie, malgré l'intervention rapide des secours qui l'ont transporté au centre hospitalier de Meaux ; que M. Hamidou YX se trouve depuis lors dans un état végétatif irréversible ; que, par le jugement contesté, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a condamné le CENTRE HOSPITALIER INTERCOMMUNAL ROBERT BALLANGER à verser à M. Hamidou YX, une somme de 255 000 euros en réparation de l'ensemble de ses préjudices, à M. et Mme Oumar YX, ses parents, une somme de 18 000 euros chacun au titre de leur préjudice moral et à la caisse régionale des artisans d'Ile-de-France, la somme de 685 250 euros en remboursement des prestations qu'elle a servies à la victime ;

Sur l'appel principal :

Considérant qu'il résulte de l'instruction, et notamment du rapport de l'expert désigné par le Tribunal administratif de Paris, que l'état de santé ci-dessus décrit de M. Hamidou YX, tel qu'il a pu être constaté à l'issue des examens pratiqués par le service des urgences du CENTRE HOSPITALIER INTERCOMMUNAL ROBERT BALLANGER, aurait du conduire les médecins à garder l'intéressé en observation et à effectuer des examens neurologiques complémentaires, notamment un examen du fond de l'oeil, un scanner et une ponction lombaire qui auraient pu permettre de diagnostiquer une encéphalite du tronc cérébral (rhombencéphalite) ; qu'ainsi, en laissant repartir le patient chez lui avec un traitement antibiotique, sans le garder en observation afin d'effectuer tous les examens médicaux que son état de santé rendait nécessaire, le service des urgences a commis une faute dans la prise en charge médicale de M. Hamidou YX, qui l'a conduit à ne pas diagnostiquer l'affection dont il souffrait ; que cette faute médicale est de nature à engager la responsabilité du CENTRE HOSPITALIER INTERCOMMUNAL ROBERT BALLANGER ;

Considérant qu'il n'y a pas lieu, ainsi que le demande le CENTRE HOSPITALIER INTERCOMMUNAL ROBERT BALLANGER, d'ordonner une contre-expertise, alors que le diagnostic d'une rhombencéphalite préexistante à la fausse route alimentaire est évoqué non seulement par le rapport d'expertise remis aux premiers juges, mais également par les conclusions du compte-rendu d'hospitalisation du centre hospitalier de Meaux, rédigé le 29 août 1995 ;

Considérant qu'il résulte également du rapport d'expertise que les rhombencéphalites s'accompagnent dans la moitié des cas de troubles de la déglutition du fait d'une paralysie pharyngée ; que, si cette affection avait été diagnostiquée par le service des urgences, M. Hamidou YX aurait pu bénéficier d'une surveillance médicale adéquate, qui aurait permis une intervention très rapide en cas de fausse route alimentaire ; qu'ainsi, la faute médicale qui a conduit le service des urgences à ne pas diagnostiquer la rhombencéphalite dont souffrait M. Hamidou YX a entraîné une perte de chance pour ce dernier de recevoir les soins rapides et efficaces qui lui auraient permis sinon d'éviter, tout au moins, de limiter les conséquences de la fausse route alimentaire ; qu'en conséquence, le CENTRE HOSPITALIER INTERCOMMUNAL ROBERT BALLANGER doit être condamné à réparer l'intégralité des conséquences dommageables résultant de cette faute ; que le centre hospitalier ne saurait s'exonérer de sa responsabilité en faisant valoir qu'en tout état de cause l'état végétatif dans lequel se trouve M. YX ne serait que partiellement le résultat de la fausse route alimentaire ;

Sur l'appel incident :

Considérant que M. et Mme Oumar YX demandent à ce que le montant de la condamnation du CENTRE HOSPITALIER INTERCOMMUNAL ROBERT BALLANGER soit porté de 255 000 euros à 1 078 000 euros, en ce qui concerne les préjudices subis par leur fils, et de 36 000 euros à 38 167 euros, en ce qui concerne leur préjudice moral ; que, toutefois, en se bornant ainsi à réitérer leur demande de première instance, sans apporter de justifications complémentaires, M. et Mme YX n'établissent pas que les premiers juges auraient inexactement évalué ces préjudices ; que, par suite, leur appel incident ne peut qu'être rejeté ;

Sur l'indemnité forfaitaire prévue par l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale :

Considérant qu'aux termes du dernier alinéa de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale, issu de l'article 9-1 de l'ordonnance n° 96-51 du 24 janvier 1996, en contrepartie des frais qu'elle engage pour obtenir le remboursement de ses débours, « la caisse d'assurance maladie à laquelle est affilié l'assuré social victime de l'accident recouvre une indemnité forfaitaire à la charge du tiers responsable et au profit de l'organisme national d'assurance maladie. Le montant de cette indemnité est égal au tiers des sommes dont le remboursement a été obtenu, dans les limites d'un montant maximum de 5 000 francs et d'un montant minimum de 500 francs. (…) » ;

Considérant qu'en application de ces dispositions, il y a lieu de condamner le CENTRE HOSIPITALIER INTERCOMMUNAL ROBERT BALLANGER à verser au Régime social des indépendants une indemnité forfaitaire de 760 euros ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner le CENTRE HOSPITALIER INTERCOMMUNAL ROBERT BALLANGER à verser respectivement la somme de 800 euros au Régime social des indépendants, qui vient aux droits de la caisse régionale des artisans d'Ile-de-France, et la somme de 1 500 euros à M. et Mme YX, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : La requête du CENTRE HOSPITALIER INTERCOMMUNAL ROBERT BALLANGER est rejetée.

Article 2 : Le CENTRE HOSPITALIER INTERCOMMUNAL ROBERT BALLANGER est condamné à verser au Régime social des indépendants venant aux droits de la caisse régionale des artisans d'Ile-de-France une indemnité forfaitaire de 760 euros destinée à la caisse nationale d'assurance maladie.

Article 3 : Le CENTRE HOSPITALIER INTERCOMMUNAL ROBERT BALLANGER versera respectivement au Régime social des indépendants la somme de 800 euros et à M. et Mme YX la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : L'appel incident, le surplus des conclusions du Régime social des indépendants et le surplus des conclusions de M. et Mme YX présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetés.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 04VE01008
Date de la décision : 09/01/2007
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme VETTRAINO
Rapporteur ?: M. Sébastien DAVESNE
Rapporteur public ?: M. BRUNELLI
Avocat(s) : CORBIN-DESCHANEL

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2007-01-09;04ve01008 ?
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