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17/01/2006 | FRANCE | N°03VE04073

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 3eme chambre, 17 janvier 2006, 03VE04073


Vu l'ordonnance en date du 16 août 2004, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles le 1er septembre 2004, par laquelle le président de la Cour administrative d'appel de Paris a, en application du décret n°2004-585 du 22 juin 2004 portant création d'une cour administrative d'appel à Versailles, et modifiant les articles R.221-3, R.221-4, R.221-7 et R.221-8 du code de justice administrative, transmis à la Cour administrative d'appel de Versailles la requête présentée pour M. Claude X, demeurant ..., par Me Dubault et Me Nerrant ;

Vu la requête, enre

gistrée le 27 octobre 2003 au greffe de la Cour administrative d'...

Vu l'ordonnance en date du 16 août 2004, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles le 1er septembre 2004, par laquelle le président de la Cour administrative d'appel de Paris a, en application du décret n°2004-585 du 22 juin 2004 portant création d'une cour administrative d'appel à Versailles, et modifiant les articles R.221-3, R.221-4, R.221-7 et R.221-8 du code de justice administrative, transmis à la Cour administrative d'appel de Versailles la requête présentée pour M. Claude X, demeurant ..., par Me Dubault et Me Nerrant ;

Vu la requête, enregistrée le 27 octobre 2003 au greffe de la Cour administrative d'appel de Paris, par laquelle M. Claude X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 9904534, en date du 24 juin 2003, par lequel le Tribunal administratif de Versailles, après avoir prononcé un non-lieu à statuer à concurrence des dégrèvements accordés, a rejeté le surplus de sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 1992, 1993 et 1994 mises en recouvrement le 31 mai 1996 et des droits complémentaires de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période correspondant aux années 1992, 1993 et 1994 ainsi que des pénalités y afférentes ;

2°) de prononcer la décharge demandée ;

3°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient qu'il appartient à l'administration d'établir qu'elle lui a adressé un avis de vérification ; que, de même, il lui appartient de prouver qu'elle l'a mis en demeure de souscrire ses déclarations dans un délai de trente jours avant de le taxer d'office sur le fondement de l'article L. 73 du livre des procédures fiscales ; que la notification de redressement n'est pas suffisamment motivée au regard des dispositions de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales en ce qui concerne la taxe sur la valeur ajoutée, de sorte qu'il n'a pas été en mesure de formuler utilement des observations ; que la notification de redressement du 6 décembre 1995 a été établie au nom des deux époux alors qu'elle aurait dû l'être à son seul nom dès lors qu'il est le seul titulaire du revenu catégoriel en cause et que son épouse est désignée sous son nom de femme mariée et non sous son nom de naissance ; qu'en conséquence, il a été privé de la possibilité de répondre à la notification de redressement et de demander, le cas échéant, la saisine de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires ; que la notification de redressement ne précise pas les conséquences financières des redressements envisagés pour chaque année et chaque impôt conformément à ce que prévoit l'article L. 48 du livre des procédures fiscales ; qu'en lui adressant une notification de redressement non motivée, non précédée d'un avis de vérification et sous un nom incorrect, l'administration a méconnu les droits de la défense ; que, s'agissant du redressement de taxe sur la valeur ajoutée au titre de l'année 1992, il y a lieu d'effectuer une compensation dès lors que du fait de l'achat et de la revente d'un bien, la taxe normalement collectée à l'acquisition devient déductible à la revente sur le nouveau montant de taxe collectée à cette occasion ; que, s'agissant du redressement relatif aux bénéfices industriels et commerciaux des années 1992, 1993 et 1994, l'administration a omis de retenir au titre du stock initial le prix d'acquisition du terrain à bâtir sis au 3, rue du Maréchal Joffre à Sainte-Geneviève-des-Bois ; que le prix d'acquisition de 700 000 F hors taxes doit venir s'ajouter aux charges de l'exercice 1992 et se déduire des produits réalisés cette année ; que l'avis de mise en recouvrement est irrégulier en ce qu'il se borne à faire référence aux articles 256 et suivants du code général des impôts et à renvoyer à la notification de redressement du 6 décembre 1995, laquelle fonde les redressements sur plusieurs articles du code, de sorte qu'aucun rapprochement n'est possible entre ces deux documents ; que cette irrégularité n'est pas couverte par l'article 25 de la loi n° 99-1173 du 30 décembre 1999 ; que l'intérêt de retard constitue une réelle sanction, et non pas simplement la réparation du préjudice financier subi par le Trésor, pour la part excédant le taux de l'intérêt légal ; que l'administration avait, dès lors, l'obligation de le motiver dans sa notification de redressement ; que l'administration n'est pas fondée à appliquer la majoration de 40 % prévue par l'article 1728 du code général des impôts dès lors qu'elle ne lui a pas adressé une mise en demeure de déposer sa déclaration ; qu'elle n'établit pas sa mauvaise foi ;

………………………………………………………………………………………………….

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu la loi du 6 fructidor an II ;

Vu la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978 modifiée portant diverses mesures d'amélioration des relations entre l'administration et le public et diverses dispositions d'ordre administratif, social et fiscal ;

Vu le décret n° 83-1025 du 28 novembre 1983 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 3 janvier 2006 :

- le rapport de M. Davesne, premier conseiller ;

- et les conclusions de M. Bresse, commissaire du gouvernement ;

Sur la recevabilité des conclusions tendant à la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu relative à l'année 1992 :

Considérant qu'en l'absence de cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu mise en recouvrement au titre de l'année 1992, lesdites conclusions sont irrecevables ; qu'il n'y a, dès lors, pas lieu de se prononcer sur l'ensemble des moyens relatifs à la régularité de la procédure d'imposition suivie au titre de l'année 1992 ; qu'en revanche, M. X est recevable à invoquer, à l'encontre de l'imposition mise en recouvrement au titre des années suivantes, des moyens relatifs au montant du déficit de l'année 1992, dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux, dès lors qu'un tel déficit, reportable sur l'exercice suivant, est susceptible d'avoir une influence sur ces impositions ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

En ce qui concerne la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu de l'année 1993 :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 73 du livre des procédures fiscales : « Peuvent être évalués d'office : 1° Le bénéfice imposable des contribuables qui perçoivent des revenus provenant d'entreprises industrielles, commerciales (…) imposables selon un régime de bénéfice réel, lorsque la déclaration annuelle prévue à l'article 53 A du code général des impôts n'a pas été déposée dans le délai légal ; (…) Les dispositions de l'article L. 68 sont applicables dans les cas d'évaluation d'office prévus aux 1° et 2° » ; qu'aux termes de l'article L. 68 de ce livre : «La procédure de taxation d'office prévue aux 2° et 5° de l'article L 66 n'est applicable que si le contribuable n'a pas régularisé sa situation dans les trente jours de la notification d'une première mise en demeure.(…) » ;

Considérant que l'administration soutient qu'elle a adressé à M. et Mme X, le 25 avril 1995, une mise en demeure de souscrire leur déclaration de résultats de l'année 1993 ; que, dès lors que le requérant conteste l'envoi de cette mise en demeure, il appartient à l'administration d'établir qu'elle a accompli cette formalité prévue par l'article L. 68 précité du livre des procédures fiscales, en produisant la preuve de son envoi ; qu'elle ne peut se dispenser d'apporter cette preuve en arguant que le requérant ne pourrait demander, pour la première fois en appel, la communication des pièces en cause, compte tenu des dispositions de la loi du 17 juillet 1978 ; que le ministre n'a produit aucun élément de preuve de l'envoi de cette mise en demeure, malgré une demande en ce sens de la Cour ; que, dès lors, l'accomplissement de cette formalité n'étant pas établie, l'administration doit être regardée comme ayant procédé irrégulièrement à l'évaluation d'office des bénéfices de l'année 1993 ; que M. X est, par suite, fondé à demander la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle il a été assujetti au titre de l'année 1993 sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête sur ce point ;

En ce qui concerne les rappels de taxe sur la valeur ajoutée pour la période correspondant aux années 1992, 1993 et 1994 et la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu de l'année 1994 :

Considérant, en premier lieu, que, lorsque l'administration fiscale est en mesure d'établir, par d'autres moyens que les constatations qu'elle a effectuées au cours de la vérification de la comptabilité d'un contribuable, que celui-ci encourait une imposition par voie de taxation d'office ou d'évaluation d'office, en particulier pour ne pas avoir souscrit dans les délais impartis les déclarations auxquelles il était astreint, les irrégularités qui ont pu entacher la vérification de comptabilité demeurent sans incidence sur la régularité de la procédure d'imposition, alors même que l'administration, pour déterminer les bases d'imposition, aurait utilisé des éléments recueillis au cours de la vérification ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. et Mme X, qui exerçaient une activité de marchand de biens, ont fait l'objet d'une vérification de comptabilité à la suite de laquelle des redressements leur ont été notifiés le 6 décembre 1995, selon la procédure de taxation d'office en ce qui concerne la taxe sur la valeur ajoutée ; que le défaut de souscription dans les délais légaux de leurs déclarations n'ayant pas été mise en évidence par la vérification de comptabilité, qui a débuté le 17 juillet 1995, l'irrégularité dont serait entachée cette vérification est, en tout état de cause, sans influence sur la régularité de la procédure d'imposition ; que, s'agissant des bénéfices industriels et commerciaux de l'année 1994, pour lesquels la procédure contradictoire de redressement a été suivie, le moyen est inopérant dès lors qu'à l'issue de la vérification de comptabilité, l'administration fiscale n'a fait que constater un déficit ;

Considérant, en deuxième lieu, que M. X soutient que l'administration aurait dû lui adresser une mise en demeure de souscrire les déclarations de taxes sur le chiffre d'affaires avant de le taxer d'office pour défaut de déclaration en application du 3° de l'article L. 66 du livre des procédures fiscales, ainsi que le prévoient les instructions 13 L-1-78 du 17 janvier 1978, 13 L-5-86 du 10 octobre 1986, 13 L-7-88 du 6 mai 1988 et la documentation administrative de base référencée sous les n°s 5 B-8211 et 13 L-1451 qu'il invoque sur le fondement de l'article 1er du décret du 28 novembre 1983 ;

Considérant qu'aux termes de l'article 1er du décret du 28 novembre 1983 : « Tout intéressé est fondé à se prévaloir à l'encontre de l'administration, des instructions... publiées… lorsqu'elles ne sont pas contraires aux lois et règlements » ; qu'aucune disposition législative ou réglementaire ne prescrit à l'administration d'adresser une mise en demeure préalablement à la taxation d'office effectuée en application du 3° de l'article L. 66 du livre des procédures fiscales ; qu'ainsi, en préconisant l'envoi d'une telle mise en demeure avant la taxation d'office, les instructions et la documentation administrative de base précitées ont illégalement ajouté une prescription à la réglementation en vigueur ; que, dès lors, M. X ne peut utilement s'en prévaloir pour soutenir que la procédure d'imposition serait irrégulière ;

Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article L. 76 du livre des procédures fiscales : « Les bases ou les éléments servant au calcul des impositions d'office sont portés à la connaissance du contribuable, trente jours au moins avant la mise en recouvrement des impositions, au moyen d'une notification qui précise les modalités de leur détermination . Cette notification est interruptive de prescription . » ;

Considérant que la notification de redressements du 6 décembre 1995 adressée à M. et Mme X précise le montant de la taxe sur la valeur ajoutée à payer au titre de chacune des années 1992, 1993 et 1994 qui est déterminé, pour chaque opération immobilière, à partir des montants respectifs de la taxe collectée et de la taxe déductible ; que ces modalités de détermination de la taxe sur la valeur ajoutée à payer, alors même que le montant de la taxe déductible est évalué forfaitairement, sont suffisantes et satisfont aux exigences de l'article L. 76 précité ;

Considérant, en quatrième lieu, que si M. X soutient que la notification de redressement aurait du être établie à son seul nom, il résulte de l'instruction que les opérations commerciales dont résultent les redressements litigieux ont été effectués conjointement par le requérant et son épouse ; que, si selon l'article 1er de la loi du 6 fructidor an II : « Aucun citoyen ne pourra porter de nom ni de prénom autres que ceux exprimés dans son acte de naissance ; (…) » et selon l'article 4 de cette même loi « Il est expressément défendu à tout fonctionnaire public de désigner les citoyens dans les actes autrement que par le nom de famille, (…) ni d'en exprimer d'autres dans les expéditions et extraits qu'ils délivreront à l'avenir. », ces dispositions ne sauraient avoir pour effet de rendre irrégulière la procédure d'imposition au motif que la notification de redressement porte le nom de femme mariée de l'épouse du requérant et non celui porté sur son acte de naissance ;

Considérant, en cinquième lieu, qu'aux termes de l'article L. 48 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction applicable aux impositions litigieuses : « A l'issue (…) d'une vérification de comptabilité, lorsque des redressements sont envisagés, l'administration doit indiquer, avant que le contribuable présente ses observations ou accepte les rehaussements proposés, dans la notification prévue à l'article L. 57 le montant des droits, taxes et pénalités résultant de ces redressements. (… ) ; » ; que M. X, pour contester les rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été notifiés selon la procédure d'imposition d'office, ne peut utilement invoquer la méconnaissance de ces dispositions qui ne s'appliquent que lorsque la procédure contradictoire a été suivie ; qu'il ne saurait davantage invoquer la méconnaissance de ces dispositions en ce qui concerne les bénéfices industriels et commerciaux de l'année 1994 pour lesquels l'administration n'a pas notifié de redressements mais s'est bornée à constater un déficit ;

Considérant, en sixième lieu, que M. X soutient que, compte tenu de l'absence de motivation des redressements, du défaut d'envoi d'un avis de vérification et de l'erreur commise dans le nom du destinataire de la notification de redressements, les droits de la défense ont été méconnus ; qu'il résulte, toutefois, de ce qui précède, qu'aucun des moyens invoqués par le requérant n'étant fondé, M. X ne peut utilement invoquer la méconnaissance des droits de la défense ;

Sur la régularité de l'avis de mise en recouvrement :

Considérant qu'aux termes de l'article R 256-1 du livre des procédures fiscales : «L'avis de mise en recouvrement individuel prévu à l'article L 256 comporte :1° Les indications nécessaires à la connaissance des droits, taxes, redevances, impositions ou autres sommes qui font l'objet de cet avis ; 2° Les éléments du calcul et le montant des droits et des pénalités, indemnités ou intérêts de retard, qui constituent la créance. Toutefois, les éléments du calcul peuvent être remplacés par le renvoi au document sur lequel ils figurent lorsque ce document a été établi ou signé par le contribuable ou son mandataire ou lui a été notifié antérieurement. De même, ils n'ont pas à être portés lorsque le contribuable n'a pas fait la déclaration nécessaire au calcul des droits » ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que l'avis de mise en recouvrement du 23 mai 1996 adressé à M. X comporte, dans la rubrique « désignation des taxes et pénalités », la mention de l'origine et de la nature des sommes réclamées sous les termes «notification de taxation d'office du 6 décembre 1995 » et « taxe sur la valeur ajoutée - articles 256 et suivants du code général des impôts » ; que, dès lors que la somme, en droits, qui lui est réclamée correspond au montant total du redressement de taxe sur la valeur ajoutée qui lui a été notifié le 6 décembre 1995, sur le fondement du 7° de l'article 257 du code général des impôts à raison de son activité de vente de terrain à bâtir et de maisons d'habitation achevées depuis moins de cinq ans, l'avis de mise en recouvrement doit être regardé comme ayant, conformément à ce que prévoit l'article R. 256-1 du livre des procédures fiscales, donné à M. X les indications nécessaires à la connaissance des droits en cause auxquels il se rapporte ;

Sur le bien-fondé des impositions restant en litige :

En ce qui concerne la taxe sur la valeur ajoutée :

Considérant que, s'agissant de l'année 1992, M. X a été assujetti à des droits de taxe sur la valeur ajoutée d'un montant de 24 576 francs correspondant à la différence entre, d'une part, la taxe collectée à l'occasion de l'acquisition, le 3 juillet 1992, d'un terrain à bâtir situé à Sainte-Geneviève-des-Bois et la vente, le 6 décembre 1992, d'une maison d'habitation située à Morsang-sur-Orge et, d'autre part, la taxe déductible afférente à ces opérations ; que, dès lors, M. X n'est pas fondé à demander, par la voie de la compensation, à ce que la taxe sur la valeur ajoutée collectée lors de l'acquisition soit déduite de la taxe collectée lors de la vente du terrain ;

En ce qui concerne les bénéfices industriels et commerciaux :

Considérant que si M. X soutient que l'administration fiscale n'a pas pris en compte, au titre des bénéfices industriels et commerciaux de l'année 1992, une charge d'un montant de 700 000 F hors taxe correspondant au prix d'acquisition du terrain à bâtir situé 3, rue du Maréchal Joffre à Sainte-Geneviève-des-Bois, il ne justifie pas de la réalité de l'achat de ce terrain ; que le moyen doit, dès lors, être écarté ;

Sur les pénalités :

En ce qui concerne la majoration prévue par l'article 1728 du code général des impôts :

Considérant qu'aux termes de l'article 1728 du code général des impôts : « Lorsqu'une personne physique ou morale, ou une association tenue de souscrire une déclaration ou de présenter un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'un des impôts, droits, taxes, redevances ou sommes établis ou recouvrés par la direction générale des impôts s'abstient de souscrire cette déclaration ou de présenter un acte dans les délais, le montant des droits mis à la charge du contribuable ou résultant de la déclaration ou de l'acte déposé tardivement est assorti de l'intérêt de retard visé à l'article 1727 et d'une majoration de 10 %.

(…) 3. La majoration visée au 1 est portée à : 40 % lorsque le document n'a pas été déposé dans les trente jours suivant la réception d'une mise en demeure notifiée par pli recommandé d'avoir à la produire dans ce délai ; (…) » ;

Considérant que, si l'administration soutient qu'elle a adressé à M. X, le 25 avril 2005, deux mises en demeure de souscrire ses déclarations de taxe sur la valeur ajoutée au titre des années 1992 et 1993 relatives à son activité de marchands de biens, elle s'est abstenue de produire la preuve de leur envoi alors qu'il était expressément contesté par le requérant ; que l'accomplissement de cette formalité n'étant pas établi par le ministre, il y a lieu de décharger la majoration à laquelle M. X a été assujetti, sur le fondement de l'article 1728 du code général des impôts, en ce qui concerne les rappels de taxe sur la valeur ajoutée des années 1992 et 1993 ;

En ce qui concerne la majoration prévue par l'article 1729 du code général des impôts :

Considérant qu'aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : « Lorsque la déclaration ou l'acte mentionnés à l'article 1728 font apparaître une base d'imposition ou des éléments servant à la liquidation de l'impôt insuffisants, inexacts ou incomplets, le montant des droits mis à la charge du contribuable est assorti de l'intérêt de retard visé à l'article 1727 et d'une majoration de 40 % si la mauvaise foi de l'intéressé est établie. (…) » ; qu'il résulte de ces dispositions que les majorations qu'elles prévoient, dans le cas où la mauvaise foi du contribuable est établie, ne sont applicables qu'aux droits correspondants aux insuffisances, inexactitudes ou omissions afférentes aux déclarations mêmes souscrites tardivement ; qu'en revanche, elles ne sont applicables au contribuable qui n'a pas souscrit de déclaration ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. X n'a pas souscrit de déclaration de taxe sur le chiffre d'affaires en ce qui concerne l'année 1994 ; qu'il y a lieu, dès lors, de décharger le requérant des pénalités de mauvaise foi dont ont été assortis les droits supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de cette année sans qu'il soit besoin d'examiner les moyens de la requête sur ce point ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X doit être déchargé de l'ensemble des pénalités mises à sa charge en ce qui concerne la taxe sur la valeur ajoutée ;

Sur les intérêts de retard :

Considérant qu'aux termes de l'article 1727 du code général des impôts : Le défaut ou l'insuffisance dans le paiement ou le versement tardif de l'un des impôts, droits, taxes, redevances ou sommes établis ou recouvrés par la direction générale des impôts donnent lieu au versement d'un intérêt de retard qui est dû indépendamment de toutes sanctions. Cet intérêt n'est pas dû lorsque sont applicables les dispositions de l'article 1732 ou les sanctions prévues aux articles 1791 à 1825 F. Le taux de l'intérêt de retard est fixé à 0,75 p. 100 par mois. Il s'applique sur le montant des sommes mises à la charge du contribuable ou dont le versement a été différé. ;

Considérant que l'intérêt de retard institué par ces dispositions vise essentiellement à réparer les préjudices de toutes natures subis par l'Etat à raison du non respect par les contribuables de leurs obligations de déclarer et payer l'impôt aux dates légales ; que, si l'évolution des taux du marché a conduit à une hausse relative de cet intérêt depuis son institution, cette circonstance ne lui confère pas pour autant la nature d'une sanction, y compris au regard de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, dès lors que son niveau n'est pas devenu manifestement excessif au regard du taux moyen pratiqué par les prêteurs privés pour un découvert non négocié ; qu'est à cet égard sans influence la jurisprudence civile selon laquelle à défaut d'écrit préalable dans un contrat liant la banque à son client et fixant clairement le taux d'intérêt conventionnel applicable en cas de découvert non négocié, la sanction n'est pas la nullité de la stipulation d'intérêt mais l'application du taux d'intérêt légal ; que cette référence au taux des découverts non négociés, contrairement à ce que soutient le requérant, est pertinente, alors même qu'elle concerne les rapports entre personnes privées, dès lors que ni les agents de la direction générale des impôts, ni les banques, dans le cas de découverts non négociés, ne sont maîtres des délais qui leur sont imposés par les contribuables retardataires et qu'ils ne disposent pas nécessairement d'une garantie de solvabilité de ces derniers ; que la référence au taux de l'intérêt légal, qui ne reflète qu'imparfaitement le taux du marché monétaire, ne constitue pas une référence plus pertinente pour établir le caractère manifestement excessif du taux de l'intérêt appliqué à M. X ; qu'il en va de même du taux de rendement brut des obligations de sociétés privées ou du taux d'intérêt du marché monétaire qui concernent des situations différentes ; que, par suite, contrairement à ce que soutient le contribuable, l'intérêt de retard constitue la réparation pécuniaire d'un préjudice et non une sanction ; qu'en tout état de cause, le moyen tiré de l'enrichissement sans cause de l'Etat ne saurait être invoquée à l'appui d'une contestation des intérêts de retard ; que la circonstance que le taux des droits supplémentaires mentionnés aux articles 1840 G ter à 1840 G quinquies du code général des impôts a été réduit depuis 1999 n'établit pas que les intérêts de retard auraient le caractère de sanction ; que la possibilité offerte à l'administration par l'article L.247 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction applicable à compter de l'année 2004, de procéder à des remises à titre gracieux des intérêts de retard est sans influence sur le taux de l'intérêt légalement applicable ; qu'en conséquence, doivent être écartés les moyens tirés du défaut de motivation au sens des dispositions de l'article L.57 du livre des procédures fiscales et de l'absence de modulation au sens de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X n'est que partiellement fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner l'Etat à verser à M. X la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DECIDE :

Article 1er : M. X est déchargé de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle il a été assujetti au titre de l'année 1993 mise en recouvrement le 31 mai 1996 sous le n° 53012 à concurrence du redressement opéré dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux et des pénalités dont ont été assortis les rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période correspondant aux années 1992, 1993 et 1994.

Article 2 : Le jugement n° 9904534 du Tribunal administratif de Versailles, en date du 24 juin 2003, est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 3 : L'Etat versera à M. X la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. X est rejeté.

03VE04073 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 3eme chambre
Numéro d'arrêt : 03VE04073
Date de la décision : 17/01/2006
Sens de l'arrêt : Satisfaction partielle
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme MARTIN
Rapporteur ?: M. Sébastien DAVESNE
Rapporteur public ?: M. BRESSE
Avocat(s) : DUBAULT

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2006-01-17;03ve04073 ?
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