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20/10/2005 | FRANCE | N°05VE00366

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 1ere chambre, 20 octobre 2005, 05VE00366


Vu 1°), sous le n°05VE000366, la requête enregistrée le 3 mars 2005 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, présentée par LE PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS par laquelle il demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0202455-3 en date du 16 décembre 2004 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé son arrêté en date 24 décembre 2001 par lequel il a rejeté la demande de Mme X tendant à la délivrance d'une carte de séjour temporaire et la décision implicite par laquelle le ministre de l'intérieur a rejeté le recours hiérarch

ique de Mme X contre cet arrêté, lui a enjoint de délivrer une carte de séj...

Vu 1°), sous le n°05VE000366, la requête enregistrée le 3 mars 2005 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, présentée par LE PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS par laquelle il demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0202455-3 en date du 16 décembre 2004 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé son arrêté en date 24 décembre 2001 par lequel il a rejeté la demande de Mme X tendant à la délivrance d'une carte de séjour temporaire et la décision implicite par laquelle le ministre de l'intérieur a rejeté le recours hiérarchique de Mme X contre cet arrêté, lui a enjoint de délivrer une carte de séjour temporaire dans le délai d'un mois à compter de la notification du jugement attaqué et a condamné l'Etat à payer à Mme X une somme de 850 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

2°) de rejeter la demande de Mme X présentée devant le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise ;

Il soutient que l'arrêté par lequel il a refusé la délivrance d'une carte de séjour ne méconnaît pas les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors qu'il n'est pas porté une atteinte disproportionnée au droit de Mme X à mener une vie familiale normale car il ne ressort pas des pièces du dossier que l'intéressée ait vécu, depuis son entrée en France, avec M. Amadou X ; que Mme X a déclaré le 21 mai 2003 au tribunal d'instance d'Aulnay-sous-Bois lors du dépôt de la déclaration de nationalité française souscrite en faveur de sa fille être domiciliée chez M. Hamadi X à Saint-Denis ; que Mme X n'apporte pas la preuve qu'elle ne dispose plus d'attaches familiales dans son pays d'origine et qu'elle ne peut poursuivre sa vie privée et familiale dans celui-ci ; que sa fille a été confiée au service de l'aide sociale à l'enfance trois ans avant le dépôt de la déclaration de nationalité française souscrite le 21 mai 2003 et qu'ainsi ces circonstances s'opposent à ce que Mme X bénéficie des dispositions de l'article 12 bis 6° de l'ordonnance du 2 novembre 1945 ; que l'arrêté du 24 décembre 2001 est suffisamment motivé ; que Mme X ne justifiant pas pouvoir obtenir de plein droit un titre de séjour en application des articles 12 bis et 15 de l'ordonnance du 2 novembre 1945, il n'était tenu de saisir la commission du titre de séjour ; qu'il était fondé à opposer l'absence de visa d'une durée supérieure à trois mois exigée des étrangers qui sollicitent une première carte de séjour et qui ne peuvent justifier en bénéficier de plein droit ;

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Vu 2°), sous le N° 05VE000367, la requête enregistrée le 3 mars 2005 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, présentée par LE PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS par laquelle il demande à la Cour de prononcer le sursis à exécution du jugement n° 0202455-3 en date du 16 décembre 2004 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé la décision du PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS du 24 décembre 2004 et la décision implicite de rejet du ministre de l'intérieur du recours hiérarchique de Mme X du 31 janvier 2002 contre ledit arrêté ;

Il soutient qu'aucune atteinte disproportionnée n'est portée au droit de Mme X de mener sa vie privée et familiale par les décisions attaquées ; que, dès lors, l'existence d'un moyen sérieux et de nature à justifier l'annulation du jugement et le rejet des conclusions à fin d'annulation accueillies par les premiers juges est établie ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 6 octobre 2005 :

- le rapport de M. Martin, premier conseiller

- et les conclusions de Mme Le Montagner, commissaire du gouvernement ;

Sur la jonction :

Considérant que les requêtes susvisées du PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS tendent à l'annulation et au sursis à exécution d'un même jugement ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt ;

Sur la requête n° 05VE000366 :

Considérant qu'aux termes de l'article 12 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 susvisée : » Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention : « vie privée et familiale » est délivrée de plein droit :( . . . ) 7° A l'étranger, ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus » ;

Considérant que si Mme Fanta X, ressortissante guinéenne, née le 2 juin 1972, entrée en France le 11 mai 1996 à 23 ans, munie d'un passeport revêtu d'un visa valable dans les Etats Schengen d'une durée de validité de 60 jours, avec sa fille âgée de 6 ans fait valoir qu'elle vit en concubinage avec M. Amadou X, ressortissant français, né vers 1937, il ressort des pièces du dossier, d'une part, qu'une attestation d'hébergement a été établie le 17 décembre 1996 en faveur de Mme X par M. Y, demeurant à Cressely, qui a certifié pouvoir héberger l'intéressée et sa fille du 11 janvier 1997 au 10 avril 1997, d'autre part, que l'attestation d'hébergement du 14 février 2000 de M. Amadou X, parent éloigné de Mme X, certifie héberger « sa nièce » Mme Fanta X et la fille de celle-ci depuis le 10 mai 1996 ; que la fille de Mme Fanta X, Diariou X, a été confiée au service de l'aide sociale à l'enfance depuis mai 2000 au motif d'une mésentente avec M. Amadou X ; que, compte tenu de ce que le concubinage de Mme Fanta X avec M. Amadou X n'est pas établi, et eu égard aux conditions de séjour de Mme X en France qui, si elle justifie du décès de ses parents en Guinée, n'établit pas ne plus avoir d'attaches avec le père de sa fille, l'arrêté du PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS du 24 décembre 2001 et la décision implicite, par laquelle le ministre de l'intérieur a rejeté le recours hiérarchique de Mme X du 21 janvier 2002 contre l'arrêté préfectoral précité, n'ont pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels ils ont été pris ; que la double circonstance, d'une part, que la jeune Diariou X se soit vue reconnaître, en 2005, postérieurement à la date des décisions attaquées, la nationalité française en application des dispositions de l'article 22-12 du code civil, d'autre part, que Mme X entretienne des relations privilégiées avec sa fille les fins de semaine et les vacances scolaires, est sans incidence sur la légalité des décisions attaquées qui s'apprécient à la date de leur édiction ;

Considérant qu'il suit de là que c'est à tort que, pour annuler l'arrêté du 24 décembre 2001 et la décision implicite de rejet du ministre de l'intérieur, les premiers juges se sont fondés sur la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant, toutefois, qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés en première instance par Mme Fanta X ;

Considérant, en premier lieu, d'une part, que l'arrêté du PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS du 24 décembre 2001 comporte les éléments de droit et de fait sur lesquels il est fondé ; que, par suite, Mme X n'est pas fondée à soutenir que cet arrêté serait insuffisamment motivé, d'autre part, que, dès lors qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que Mme X ait mis en oeuvre la procédure de communication des motifs organisée à l'article 5 de la loi du 11 juillet 1979 susvisée aux termes duquel une décision implicite intervenue dans les cas où la décision explicite aurait dû être motivée n'est pas illégale du seul fait qu'elle n'est pas assortie de cette motivation, le moyen tiré du défaut de motivation de la décision implicite de rejet par le ministre de l'intérieur du recours hiérarchique exercé par Mme X le 21 janvier 2002 ne pouvait être invoqué ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 12 quater de l'ordonnance du 2 novembre 1945 susvisée : « Dans chaque département est instituée une commission du titre de séjour ( . . . ) La commission est saisie par le préfet lors que celui-ci envisage de refuser de délivrer ou de renouveler une carte de séjour temporaire à un étranger mentionné à l'article 12 bis ou de délivrer une carte de résident à un étranger mentionné à l'article 15 » ; qu'il résulte de ces dispositions que le préfet est tenu de saisir la commission du cas des seuls étrangers qui remplissent effectivement les conditions prévues aux articles 12 bis et 15 auxquels il envisage de refuser le titre de séjour sollicité et non de celui de tous les étrangers qui se prévalent de ces dispositions ;

Considérant, que dans les circonstances rappelées ci-dessus, le PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS n'a pas porté au droit de Mme X au respect de la vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus ; que, par suite, Mme X n'est pas fondée à soutenir que le PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS était tenu, sur le fondement des articles 12 bis 7° et 12 quater de l'ordonnance du 2 novembre 1945, de consulter la commission du titre de séjour préalablement à la décision préfectorale de refus de délivrance d'un titre de séjour ;

Considérant, en troisième lieu, que les circonstances ci-dessus rappelées ne sont également pas de nature à faire regarder le refus de titre de séjour comme entaché d'une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de cette mesure sur la situation personnelle de l'intéressée ;

Considérant, en quatrième lieu, que si Mme X soutient que le PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS ne pouvait légalement lui opposer l'absence de visa long séjour pour rejeter sa demande, celui-ci était toutefois en droit de relever l'absence d'un tel visa à l'occasion de l'examen de la situation personnelle de l'intéressé, afin de rechercher si elle pouvait éventuellement obtenir la délivrance d'une carte des séjour temporaire au regard des dispositions de l'ordonnance du 2 novembre 1945 ; que, dès lors, le moyen tiré de ce que le PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS ne pouvait lui opposer l'absence de visa long séjour ne peut qu'être rejeté ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a prononcé l'annulation de l'arrêté susvisé du 24 décembre 2001 et de la décision ministérielle implicite de rejet du recours hiérarchique ;

Sur les conclusions incidentes d'injonction présentées par Mme X :

Considérant que le présent arrêt n'implique aucune mesure d'exécution ; que, par suite, les conclusions de Mme X tendant à ce que la Cour ordonne au préfet de lui délivrer un titre de séjour ne peuvent qu'être rejetées ;

Sur la requête n° 05VE000367 :

Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'il ny a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête n° 05VE000367 du PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution du jugement du 16 décembre 2004 ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à payer à Mme X la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur la requête n° 05VE000367 du PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS.

Article 2 : Le jugement du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise en date du 16 décembre 2004 est annulé.

Article 3 : La demande présentée par Mme Fanta X devant le tribunal administratif de Cergy-Pontoise est rejetée.

Article 4 : Les conclusions d'injonction et les conclusions aux fins d'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative présentées par Mme X devant la Cour sont rejetées.

05VE00366-05VE00367 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 1ere chambre
Numéro d'arrêt : 05VE00366
Date de la décision : 20/10/2005
Sens de l'arrêt : Satisfaction totale
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme ROBERT
Rapporteur ?: M. Frédéric MARTIN
Rapporteur public ?: Mme LE MONTAGNER
Avocat(s) : ROCHICCIOLI

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2005-10-20;05ve00366 ?
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