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10/02/2005 | FRANCE | N°02VE04363

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 2eme chambre, 10 février 2005, 02VE04363


Vu l'ordonnance en date du 16 août 2004, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles le 1er septembre 2004, par laquelle le président de la Cour administrative d'appel de Paris a, en application du décret n°2004-585 du 22 juin 2004 portant création d'une cour administrative d'appel à Versailles, et modifiant les articles R.221-3, R.221-4, R.221-7 et R.221-8 du code de justice administrative, transmis à la Cour administrative d'appel de Versailles la requête présentée pour la SCI PATRICE ET KATY, dont le siège est ... Les Chartreux (91160), par Me Z... ;>
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Vu l'ordonnance en date du 16 août 2004, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles le 1er septembre 2004, par laquelle le président de la Cour administrative d'appel de Paris a, en application du décret n°2004-585 du 22 juin 2004 portant création d'une cour administrative d'appel à Versailles, et modifiant les articles R.221-3, R.221-4, R.221-7 et R.221-8 du code de justice administrative, transmis à la Cour administrative d'appel de Versailles la requête présentée pour la SCI PATRICE ET KATY, dont le siège est ... Les Chartreux (91160), par Me Z... ;

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 27 décembre 2002 et 5 mars 2003 au greffe de la Cour administrative d'appel de Paris, présentés pour la SCI PATRICE ET KATY ; la SCI PATRICE ET KATY demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0102654 en date du 5 novembre 2002 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision en date du 13 octobre 2000 par lequel le maire de Saulx-les-Chartreux a opposé un sursis à statuer sur sa demande de permis de construire ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, ladite décision ;

3°) de condamner la commune de Saulx-les-Chartreux à lui verser une somme de 2 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que le jugement est insuffisamment motivé ; que le tribunal n 'a pas procédé à un examen circonstancié des faits de l'espèce ; que l'arrêté du maire n'est pas motivé ; que la révision du plan d'occupation des sols a maintenu la parcelle d'assiette du projet en zone urbaine ; que le projet est parfaitement conforme aux exigences posées aux articles UC1 et UC 13 du nouveau plan ; que le classement en espace boisé classé ne saurait davantage faire obstacle à ce projet ; que le retrait du permis de construire tacite opéré par l'arrêté attaqué est entaché d'erreur manifeste d'appréciation dès lors qu'il n'était pas de nature à rendre plus onéreuse ni à compromettre l'exécution du futur plan ;

.........................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code l'urbanisme ;

Vu la loi n°2000-321 du 12 avril 2000 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 27 janvier 2005 :

- le rapport de Mme Heers, président assesseur ;

- les observations de Me A..., substituant Me Z..., pour la SCI PATRICE ET KATY, et de Me X..., substituant Me Y..., pour la commune de Saulx-les-Chartreux ;

- et les conclusions de M. Pellissier, commissaire du gouvernement ;

Considérant que la SCI PATRICE ET KATY a sollicité le 27 avril 2000, par une demande complétée le 6 juillet 2000, la délivrance d'un permis de construire trois maisons d'habitation sur le territoire de la commune de Saulx-les-Chartreux ; qu'elle a reçu du maire la lettre prévue à l'article R. 421-25 du code de l'urbanisme l'avisant qu'en cas de silence gardé pendant trois mois par l'autorité compétente, elle serait titulaire, le 6 octobre 2000, d'un permis de construire tacite ; que, le 12 octobre 2000, elle a sollicité du maire la délivrance de l'attestation prévue à l'article R. 421-31 du même code certifiant qu'aucune décision négative n'était intervenue à l'égard de la demande de permis ; qu'en réponse, le maire, par lettre du 12 octobre, lui a annoncé qu'il opposait un sursis à statuer à sa demande de permis de construire et a pris, le 13 octobre, un arrêté en ce sens ; que la société, après avoir exercé un recours gracieux resté sans réponse, a saisi le tribunal administratif de Versailles d'une demande tendant, d'une part, à l'annulation de la décision du 13 octobre et, d'autre part, à ce qu'il soit enjoint au maire de Saulx-les-Chartreux de lui délivrer l'attestation relative au permis tacite ; que, par le jugement attaqué du 5 novembre 2002, le tribunal a rejeté sa demande ;

Sur la régularité du jugement :

Considérant qu'après avoir relevé que le projet de construction ayant fait l'objet d'une décision de sursis à statuer était constitué de trois maisons d'habitation et que le terrain d'assiette était situé dans un espace boisé classé, le tribunal administratif a estimé qu'un tel changement d'affectation du sol, à supposer même qu'il n'ait entraîné aucune coupe ou abattage d'arbres, était de nature à compromettre la conservation, la protection ou la création des boisements au sens des dispositions de l'article L. 130-1 du code de l'urbanisme ; qu'il a ainsi nécessairement estimé que la construction d'une maison d'habitation était par elle-même de nature à compromettre les boisements ; que le moyen tiré d'une insuffisante motivation du jugement doit donc être écarté ;

Considérant qu'il ressort des termes mêmes du jugement attaqué, qui relève la consistance du projet de construction et son emplacement, que les premiers juges se sont livrés, contrairement à ce que soutient la SCI PATRICE ET KATY, à un examen circonstancié des faits de l'espèce ;

Sur les conclusions en annulation :

En ce qui concerne la recevabilité de la demande de première instance :

Considérant que la SCI a formé le 11 décembre 2000 un recours gracieux contre la décision du 13 octobre précédent, laquelle précisait qu'un recours gracieux pouvait être formé dans un délai de deux mois et qu'à défaut de réponse dans un délai de quatre mois, naissait un rejet implicite de ce recours ; que si ces mentions n'étaient pas conformes aux dispositions de l'article 21 de la loi du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec l'administration, entrées en vigueur le 1er novembre 2000, elles sont seules opposables au destinataire de la décision ; que, par suite, la demande dont la société a saisi le tribunal administratif le 12 juin 2001 n'était pas tardive ;

Au fond :

Considérant que la commune de Saulx-les-Chartreux ne conteste plus en appel que la SCI PATRICE ET KATY était titulaire d'un permis de construire tacite à la date du 7 octobre 2000 en application des dispositions combinées des articles R. 421-12 et R. 421-19 du code de l'urbanisme ; que la décision du 13 octobre 2000, portant sursis à statuer sur la demande de permis, doit, dès lors, être regardée comme ayant procédé au retrait de cette autorisation tacite ;

Considérant que la décision attaquée se fonde sur les dispositions de l'article L. 123-5 alors applicables du code de l'urbanisme aux termes desquelles : Lorsque l'établissement d'un plan d'occupation des sols est prescrit ou lorsque la révision d'un plan approuvé a été ordonnée, l'autorité compétente peut surseoir à statuer, dans les conditions et délais prévus à l'article L. 111-8, sur les demandes d'autorisation concernant des constructions ... qui seraient de nature à compromettre ou à rendre plus onéreuse l'exécution du futur plan. ; que le maire invoquait, sans autre précision, la circonstance que le projet de révision du plan d'occupation des sols avait été arrêté par délibération du conseil municipal en date du 19 mai 2000 ;

Considérant que la décision du 13 octobre 2000, devant être analysée, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, comme comportant retrait du permis tacitement accordé, sa légalité doit s'apprécier, non pas en fonction de la conformité du projet de construction aux dispositions du plan d'occupation des sols alors en vigueur, mais à celles du futur plan, dès lors qu'elle a été prise sur le fondement de l'article L. 123-5 du code de l'urbanisme précité ; que, par suite, la commune n'est pas fondée à soutenir que la circonstance que la décision de sursis à statuer avait la portée d'un retrait du permis tacite impliquait nécessairement que le moyen tiré de ce que le projet de construction n'était pas de nature à compromettre ni à rendre plus onéreuse l'exécution du futur plan d'occupation des sols serait inopérant ; qu'elle ne peut davantage se prévaloir, pour justifier la légalité du sursis à statuer, de ce que le permis tacite n'aurait pas été conforme aux dispositions du plan en vigueur en octobre 2000 ;

Considérant que la société requérante se prévaut des dispositions de l'article UC 1 du futur plan d'occupation des sols qui autorisent, notamment, les constructions à usage d'habitat, sous réserve que leur construction ne porte pas atteinte au caractère ou à l'intérêt des lieux avoisinants du site par déboisement ou remodelage excessifs du terrain naturel ; qu'elle invoque également les dispositions de l'article UC 13 qui, si elles prévoient que les espaces boisés classés sont soumis à aux dispositions de l'article L. 130-1 du code de l'urbanisme, précisent que les plantations existantes devront être maintenues ou remplacées par des plantations équivalentes, un arbre de haute tige devant être maintenu à l'are ; qu'il est constant que le projet en cause implique l'abattage de six arbres, dont trois, au demeurant, ont été abattus par une tempête depuis le dépôt de la demande de permis ; que, toutefois, compte tenu notamment de la possibilité pour le maire de prescrire au pétitionnaire le remplacement de ces arbres par des plantations équivalentes, il n'apparaît pas que la construction de ces trois maisons d'habitation, parmi lesquelles seule la maison C serait implantée sur l'espace boisé classé, provoquerait un déboisement excessif du terrain d'assiette des constructions et serait de nature à compromettre ou à rendre plus onéreuse l'exécution du plan d'occupation des sols en cours de révision ; que, par suite, la SCI PATRICE ET KATY est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du maire de Saulx-les-Chartreux ;

Considérant qu'en l'état du dossier, aucun autre moyen n'est de nature à entraîner l'annulation de la décision du 13 octobre 2000 opposant un sursis à statuer sur la demande de permis de construire de la SCI PATRICE ET KATY ;

Sur les conclusions en injonction :

Considérant que la décision du 13 octobre 2000, intervenue en réponse à la demande de délivrance de l'attestation prévue à l'article R. 421-31 du code de l'urbanisme, doit être regardée comme refusant la délivrance de ce document ;

En ce qui concerne la recevabilité de la demande de première instance :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution. ;

Considérant que les conclusions susvisées, qui tendaient à ce qu'il soit enjoint au maire de délivrer à la SCI PATRICE ET KATY l'attestation certifiant qu'aucune décision négative n'était intervenue à l'égard de la demande de permis, doivent être regardées comme tendant à l'application des dispositions précitées ; qu'elles étaient donc recevables, contrairement à ce que soutenait la commune devant le tribunal administratif ;

Au fond :

Considérant que l'annulation de la décision du maire d'opposer un sursis à statuer sur la demande de permis de construire et d'attester de l'obtention par la SCI d'un permis tacite implique nécessairement qu'il soit enjoint au maire de délivrer le document sollicité ; qu'il y a lieu, en l'espèce, d'ordonner au maire de la commune de Saulx-les-Chartreux d'y procéder dans un délai de huit jours à compter de la notification du présent arrêt ; qu'il n'y a pas lieu dans les circonstances de l'espèce d'assortir cette injonction d'une astreinte ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'en vertu des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, le Tribunal ne peut pas faire bénéficier la partie tenue aux dépens ou la partie perdante du paiement par l'autre partie des frais qu'elle a exposés à l'occasion du litige soumis au juge ; que les conclusions présentées à ce titre par la commune de Saulx-les-Chartreux doivent dès lors être rejetées ; qu'en revanche, il y a lieu dans les circonstances de l'espèce de condamner la commune de Saulx-les-Chartreux à verser à la SCI PATRICE et KATY une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Versailles du 5 novembre 2002 et la décision du maire de la commune de Saulx-les-Chartreux du 13 octobre 2000 sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au maire de la commune de Saulx-les-Chartreux de délivrer à la SCI PATRICE ET KATY l'attestation prévue à l'article R. 421-31 du code de l'urbanisme dans un délai de huit jours à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : La commune de Saulx-les-Chartreux versera à la SCI PATRICE ET KATY une somme de 1500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Les conclusions de la commune de Saulx-les-Chartreux tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

02VE04363 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 2eme chambre
Numéro d'arrêt : 02VE04363
Date de la décision : 10/02/2005
Sens de l'arrêt : Satisfaction totale
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme LACKMANN
Rapporteur ?: Mme Mireille HEERS
Rapporteur public ?: M. PELLISSIER
Avocat(s) : RICHARD

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2005-02-10;02ve04363 ?
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