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17/07/2025 | FRANCE | N°23TL01354

France | France, Cour administrative d'appel de TOULOUSE, 4ème chambre, 17 juillet 2025, 23TL01354


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. C... G..., M. et Mme E... et B... A..., M. et Mme F... et H... D... et l'association Santé Environnement Sor et Agout (ASSESA) ont demandé au tribunal administratif de Toulouse l'annulation de l'arrêté du 20 septembre 2019 par lequel le préfet du Tarn a approuvé la révision du plan de prévention des risques d'inondation du bassin versant du Sor, ainsi que des décisions implicites par lesquelles cette même autorité a rejeté leurs recours gracieux respectifs présentés à

l'encontre de cet arrêté.



Par une ordonnance du président de la section du con...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... G..., M. et Mme E... et B... A..., M. et Mme F... et H... D... et l'association Santé Environnement Sor et Agout (ASSESA) ont demandé au tribunal administratif de Toulouse l'annulation de l'arrêté du 20 septembre 2019 par lequel le préfet du Tarn a approuvé la révision du plan de prévention des risques d'inondation du bassin versant du Sor, ainsi que des décisions implicites par lesquelles cette même autorité a rejeté leurs recours gracieux respectifs présentés à l'encontre de cet arrêté.

Par une ordonnance du président de la section du contentieux du Conseil d'Etat du 4 avril 2022, le dossier a été attribué au tribunal administratif de Nîmes.

Par un jugement n° 2021377 du 11 avril 2023, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté la demande présentée par M. G... et les autres requérants.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 12 juin 2023 et le 31 octobre 2024, M. G..., M. et Mme A..., M. et Mme D... et l'association Santé Environnement Sor et Agout (ASSESA), représentés par Me Thibaut, demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 11 avril 2023 ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet du Tarn du 20 septembre 2019 ainsi que les décisions implicites rejetant leurs recours gracieux respectifs ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 4 000 euros à leur verser solidairement sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- ils ont intérêt à agir contre l'arrêté attaqué ;

- la procédure suivie par l'autorité préfectorale est irrégulière en ce que la décision par laquelle l'autorité environnementale a dispensé la révision du plan de prévention des risques en litige de la réalisation d'une évaluation environnementale est intervenue avant l'arrêté portant prescription de la révision et sur la base d'un dossier incomplet ;

- la procédure suivie est également irrégulière en ce que le dossier soumis à l'enquête publique ne contenait pas la décision portant dispense d'évaluation environnementale, ce qui a nui à une bonne information de la population lors de l'enquête ;

- les dispositions du règlement du plan de prévention des risques d'inondation révisé relatives, d'une part, aux occupations et utilisations des sols soumises à prescriptions en zone rouge et, d'autre part, aux règles d'implantation applicables à ces occupations dans cette même zone, sont entachées d'une erreur manifeste d'appréciation en ce qu'elles sont trop permissives s'agissant des bâtiments agricoles et des bâtiments d'élevage ; le plan litigieux institue, au bénéfice de ces bâtiments, une différence de traitement injustifiée ; le préfet a ainsi méconnu le principe de précaution reconnu par la Charte de l'environnement ;

- les mêmes dispositions règlementaires sont incompatibles avec le plan de gestion des risques d'inondation du bassin Adour-Garonne et, plus spécifiquement, avec les prévisions de l'objectif stratégique n° 5 concernant la gestion des écoulements ;

- le règlement méconnaît le principe constitutionnel d'accessibilité et d'intelligibilité de la norme en tant qu'il porte sur ces mêmes dispositions.

Par un mémoire en défense, enregistré le 30 septembre 2024, la ministre de la transition écologique, de l'énergie, du climat et de la prévention des risques conclut au rejet de la requête.

Elle fait valoir que les moyens invoqués ne sont pas fondés.

Par une ordonnance en date du 1er octobre 2024, la clôture de l'instruction a été fixée au 15 novembre 2024.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la Constitution, notamment la Charte de l'environnement ;

- le code de l'environnement ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Jazeron, premier conseiller,

- et les conclusions de M. Diard, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Le préfet du Tarn a approuvé, par un arrêté pris le 13 novembre 2008, le plan de prévention des risques naturels d'inondation concernant le bassin versant du Sor, lequel couvre le territoire de trente-et-une communes de ce département. Par un arrêté du 8 juin 2016, prorogé le 20 mai 2019, la même autorité a prescrit la mise en œuvre d'une procédure de révision de ce plan. L'enquête publique a été organisée du 7 janvier au 8 février 2019 et, par un arrêté pris le 20 septembre 2019, le préfet a approuvé la révision du plan de prévention des risques. Des recours gracieux ont été présentés à l'encontre de cet arrêté préfectoral, le 12 novembre suivant, par M. G..., M. et Mme A... et M. et Mme D..., habitants de la commune de Lescout, incluse dans le périmètre du plan de prévention des risques, ainsi que par l'association Santé Environnement Sor et Agout (ASSESA). Par la présente requête, les personnes physiques et l'association susmentionnées interjettent appel du jugement du 11 avril 2023 par lequel le tribunal administratif de Nîmes a rejeté leur demande, initialement présentée devant le tribunal administratif de Toulouse, tendant à l'annulation de l'arrêté préfectoral du 20 septembre 2019, ainsi que des décisions implicites portant rejet de leurs recours gracieux respectifs.

Sur le bien-fondé du jugement :

2. En premier lieu, aux termes de l'article R. 122-17 du code de l'environnement dans sa rédaction applicable au litige : " (...) / II. - Les plans, schémas, programmes et autres documents de planification susceptibles de faire l'objet d'une évaluation environnementale après un examen au cas par cas (...) sont définis dans le tableau ci-dessous : / (...) / 2° Plan de prévention des risques technologiques prévu à l'article L. 515-15 du code de l'environnement et plan de prévention des risques naturels prévisibles prévu à l'article L. 562-1 du même code ; / (...) ". L'article R. 122-18 du même code mentionne que : " I. - Pour les plans, schémas, programmes ou documents de planification faisant l'objet d'une évaluation environnementale après un examen au cas par cas en application du II (...) de l'article R. 122-17, l'autorité administrative de l'Etat compétente en matière d'environnement détermine, au regard des informations fournies par la personne publique responsable et des critères de l'annexe II de la directive n° 2001/42/CE du Parlement européen et du Conseil du 27 juin 2001 relative à l'évaluation des incidences de certains plans et programmes sur l'environnement, si une évaluation environnementale doit être réalisée. / Dès qu'elles sont disponibles et, en tout état de cause, à un stade précoce dans l'élaboration du plan, schéma, programme ou document de planification, la personne publique responsable transmet à l'autorité de l'Etat compétente en matière d'environnement les informations suivantes : / - une description des caractéristiques principales du plan, schéma, programme ou document de planification, en particulier la mesure dans laquelle il définit un cadre pour d'autres projets ou activités ; / - une description des caractéristiques principales, de la valeur et de la vulnérabilité de la zone susceptible d'être touchée par la mise en œuvre du plan, schéma, programme ou document de planification ; / - une description des principales incidences sur l'environnement et sur la santé humaine de la mise en œuvre du plan, schéma, programme ou document de planification. / (...) ".

3. Il ressort des pièces du dossier que, par un arrêté du 20 octobre 2014, le préfet du Tarn, agissant en sa qualité d'autorité environnementale, a considéré que la révision du plan de prévention des risques naturels d'inondation concernant le bassin versant du Sor n'était pas susceptible d'entraîner des impacts négatifs notables sur l'environnement et que ladite révision ne serait, par conséquent, pas soumise à la réalisation d'une évaluation environnementale. Si les requérants relèvent que cette décision de dispense est intervenue avant même l'arrêté portant prescription de la procédure de révision et s'ils soutiennent qu'elle aurait ainsi été rendue sur la base d'un dossier incomplet, il ressort toutefois des éléments produits par le préfet en première instance que l'autorité environnementale avait été saisie de la demande d'examen au cas par cas le 30 septembre 2014 sur la base d'un dossier comportant l'ensemble des informations prévues à l'article R. 122-18 précité du code de l'environnement. Ledit dossier mentionnait, notamment, les objectifs et le contexte de la procédure de révision, en précisant que celle-ci s'inscrivait dans le cadre d'une politique nationale de mise à jour des plans les plus anciens et qu'elle visait à préciser la cartographie des limites des zones inondables sur la base d'outils actualisés, à adapter le zonage en conséquence et à améliorer la rédaction du règlement pour faciliter son application lors de l'instruction des demandes d'autorisation d'urbanisme. Le même dossier indiquait que le plan révisé ne prescrirait pas par lui-même des travaux de protection et exposait que la révision serait réalisée sur la base de critères inchangés s'agissant de la règlementation en zone de risque important et de la prévention des champs d'expansion des crues. Il décrivait également, avec une précision suffisante, tant les phénomènes naturels permettant de caractériser le niveau d'aléa que les enjeux spécifiques au territoire concerné en matière urbanistique et environnementale. Les requérants n'établissent par ailleurs pas que seraient intervenues, entre la décision de dispense et l'arrêté portant prescription de la révision, des évolutions significatives dans les données utiles à l'appréciation de l'autorité environnementale. En conséquence, le moyen tiré de l'irrégularité de la procédure en raison du caractère prématuré de la décision de dispense doit être écarté.

4. En deuxième lieu, aux termes de l'article R. 123-8 du code de l'environnement dans sa version applicable au litige : " Le dossier soumis à l'enquête publique comprend les pièces et avis exigés par les législations et réglementations applicables au projet, plan ou programme. / Le dossier comprend au moins : / 1° Lorsqu'ils sont requis, l'étude d'impact et son résumé non technique, le rapport sur les incidences environnementales et son résumé non technique, et, le cas échéant, la décision prise après un examen au cas par cas par l'autorité environnementale mentionnée au IV de l'article L. 122-1 ou à l'article L. 122-4, ainsi que l'avis de l'autorité environnementale mentionné au III de l'article L. 122-1 et à l'article L. 122-7 (...) ; / 2° En l'absence d'évaluation environnementale le cas échéant, la décision prise après un d'examen au cas par cas par l'autorité environnementale ne soumettant pas le projet, plan ou programme à évaluation environnementale et, lorsqu'elle est requise, l'étude d'incidence environnementale (...) et son résumé non technique, une note de présentation précisant les coordonnées du maître d'ouvrage ou de la personne publique responsable du projet, plan ou programme, l'objet de l'enquête, les caractéristiques les plus importantes du projet, plan ou programme et présentant un résumé des principales raisons pour lesquelles, notamment du point de vue de l'environnement, le projet, plan ou programme soumis à enquête a été retenu ; / (...) ".

5. Il est vrai que les seules mentions du rapport remis par la commission d'enquête le 6 mars 2019 ne permettent pas d'établir de manière certaine que le dossier soumis à l'enquête publique contenait l'arrêté préfectoral du 20 octobre 2014 évoqué au point 3 du présent arrêt, par lequel l'autorité environnementale a dispensé d'évaluation environnementale la procédure de révision du plan de prévention des risques d'inondation du bassin versant du Sor. Il ressort néanmoins des pièces du dossier que ledit arrêté préfectoral était explicitement visé tant dans l'arrêté du 8 juin 2016 prescrivant la révision litigieuse que dans l'arrêté du 27 novembre 2018 portant ouverture de l'enquête publique, lesquels figuraient dans le dossier soumis à enquête. Il ressort également de ces mêmes pièces que la commission d'enquête a mentionné expressément l'existence de la décision de dispense dans son rapport, au sein du paragraphe relatif au cadre juridique de l'enquête. Dans ces conditions, l'absence éventuelle de cette décision dans le dossier soumis à l'enquête publique n'a pas été de nature à nuire à l'information complète du public intéressé ou à exercer une influence sur les résultats de l'enquête et, par suite, sur le contenu du plan de prévention des risques. Dès lors, le moyen soulevé sur ce point doit être écarté.

6. En troisième lieu, l'article 5 de la Charte de l'environnement dispose que : " Lorsque la réalisation d'un dommage, bien qu'incertaine en l'état des connaissances scientifiques, pourrait affecter de manière grave et irréversible l'environnement, les autorités publiques veillent, par application du principe de précaution et dans leurs domaines d'attributions, à la mise en œuvre de procédures d'évaluation des risques et à l'adoption de mesures provisoires et proportionnées afin de parer à la réalisation du dommage. ". Selon l'article L. 562-1 du code de l'environnement : " I. - L'Etat élabore et met en application des plans de prévention des risques naturels prévisibles tels que les inondations, les mouvements de terrain, les avalanches, les incendies de forêt, les séismes, les éruptions volcaniques, les tempêtes ou les cyclones. / II. - Ces plans ont pour objet, en tant que de besoin : / 1° De délimiter les zones exposées aux risques, en tenant compte de la nature et de l'intensité du risque encouru, d'y interdire tout type de construction, d'ouvrage, d'aménagement ou d'exploitation agricole, forestière, artisanale, commerciale ou industrielle, notamment afin de ne pas aggraver le risque pour les vies humaines ou, dans le cas où des constructions, ouvrages, aménagements ou exploitations agricoles, forestières, artisanales, commerciales ou industrielles, pourraient y être autorisés, prescrire les conditions dans lesquelles ils doivent être réalisés, utilisés ou exploités ; / 2° De délimiter les zones qui ne sont pas directement exposées aux risques mais où des constructions, des ouvrages, des aménagements ou des exploitations agricoles, forestières, artisanales, commerciales ou industrielles pourraient aggraver des risques ou en provoquer de nouveaux et y prévoir des mesures d'interdiction ou des prescriptions telles que celles prévues au 1° ; / 3° De définir les mesures de prévention, de protection et de sauvegarde qui doivent être prises, dans les zones mentionnées au 1° et au 2°, par les collectivités publiques dans le cadre de leurs compétences, ainsi que celles qui peuvent incomber aux particuliers ; / (...) ".

7. L'article II.1.2 du règlement du plan de prévention des risques d'inondation issu de la révision approuvée le 20 septembre 2019 dispose que : " Sont interdits en zone rouge : Tous travaux, installations et activités de quelque nature qu'ils soient, à l'exception de ceux visés aux articles II.1.3 et II.1.4 ci-après. ". Selon le préambule de l'article II.1.3 de ce règlement : " Les occupations et utilisations du sol suivantes sont, par dérogation à la règle commune, autorisables, à condition : / - qu'elles n'aggravent pas les risques, / - qu'elles n'en provoquent pas de nouveaux, / - qu'elles ne présentent qu'une vulnérabilité restreinte, / - qu'elles respectent les principes de prévention et de sauvegarde des biens et des personnes, / - qu'elles respectent les prescriptions listées ci-dessous. / Les règles de construction listées au titre III doivent être appliquées pour tous les projets. ". Figurent au nombre des constructions nouvelles autorisées en zone rouge, aux termes du 2) de cet article II.1.3 : " La construction des bâtiments techniques (sans logement) des exploitations agricoles existantes, rendus nécessaires par des activités exercées à proximité, sous réserve du respect de l'article II.1.4. La construction de bâtiments destinés à l'hébergement des animaux n'est autorisée que si la hauteur de la crue de référence est inférieure à 0,50 m. Le plancher utilisé à ces fins doit être situé au-dessus du niveau de la crue de référence. ". Figurent, en outre, au nombre des travaux et aménagements autorisés sur l'existant en zone rouge, aux termes du 3) de ce même article II.1.3, d'une part, " l'extension en surface des bâtiments techniques des exploitations agricoles, sans création ou extension de logement, sous réserve d'assurer le stockage des produits sensibles ou polluants au-dessus du niveau de la crue de référence et sous réserve du respect de l'article II.1.4 " et, d'autre part, " l'extension des bâtiments d'hébergement des animaux si la hauteur de la crue de référence est inférieure à 1 m sous réserve que le plancher utilisé soit situé au-dessus du niveau de la crue de référence et sous réserve du respect de l'article II.1.4 ". Enfin, selon l'article II.1.4 auquel il est ainsi renvoyé, relatif aux règles d'implantation des occupations du sol autorisées en zone rouge : " A la date d'approbation du PPRI et pour chaque unité foncière : / - Si le coefficient d'emprise au sol des bâtiments (ou parties de bâtiments) existants situés en zone rouge est inférieur à 0,30 calculé sur la partie du terrain affecté par la zone rouge, le coefficient d'emprise au sol de l'ensemble des bâtiments en zone rouge ne pourra dépasser 0,35 après travaux. / - Si le coefficient d'emprise au sol des bâtiments (ou parties de bâtiments) existants situés en zone rouge est supérieur à 0,30 calculé sur la partie du terrain affecté par la zone rouge, ce coefficient peut, une et une seule fois, être porté à 120 % de sa valeur initiale. / L'axe principal des constructions et installations isolées doit être parallèle au flux du plus grand écoulement et la longueur de la façade perpendiculaire à ce flux doit être inférieure à 25 m. ".

8. Il résulte de la combinaison de l'ensemble des dispositions précitées du règlement du plan de prévention des risques d'inondation révisé que si la construction de nouveaux bâtiments agricoles, notamment de bâtiments d'élevage, ainsi que l'extension de ces mêmes bâtiments, peuvent être autorisées en zone rouge de ce plan, une telle possibilité demeure subordonnée au respect, d'une part, des cinq conditions générales prévues par le préambule de l'article II.1.3 du règlement, d'autre part, des règles d'implantation mentionnées à son article II.1.4 et, enfin, de l'ensemble des conditions propres aux bâtiments agricoles et aux bâtiments d'élevage prescrites, selon les cas, par le 2) ou le 3) de l'article II.1.3. En application de ce même article II.1.3, les travaux de construction ou d'extension des bâtiments d'élevage doivent, en outre, respecter les règles de construction prévues au titre III du règlement et, en particulier, à son article III.1, lequel impose de " conserver une transparence hydraulique " en précisant que " la mise hors de submersion se fera par réalisation de vides sanitaires inondables, aérés, vidangeables et non transformables " et que " pour ne pas augmenter la gêne à l'écoulement de la crue, il ne faut pas de remblais, de murs ou de clôtures pouvant constituer un obstacle à cet écoulement sur le reste de la parcelle ". Eu égard à l'ensemble des conditions ainsi posées par le règlement, alors même qu'il n'a pas été fixé une règle d'emprise au sol minimale exprimée en valeur absolue pour les bâtiments agricoles et d'élevage contrairement à ce qui a été prévu pour certains autres travaux et alors, notamment, que l'article II.1.4 n'a ni pour objet ni pour effet d'autoriser, par lui-même, tout projet qui atteindrait les coefficients maximaux qu'il mentionne, ledit règlement comporte des prescriptions suffisantes pour permettre à l'autorité administrative compétente de s'opposer aux projets concernant des bâtiments agricoles qui seraient de nature à accroître les risques, notamment pour la bonne expansion des crues. Dans ces conditions, le préfet du Tarn n'a pas commis d'erreur d'appréciation en n'imposant pas des restrictions supplémentaires pour l'implantation des bâtiments agricoles et d'élevage en zone rouge. Il n'a pas non plus commis une telle erreur en ne prévoyant pas, pour ces mêmes bâtiments, des prescriptions spécifiques en matière d'analyse des impacts hydrauliques ou de démonstration de l'absence de solution alternative. Pour les mêmes motifs, le préfet du Tarn n'a ni méconnu le principe de précaution, ni institué une différence de traitement injustifiée au profit des seuls bâtiments agricoles.

9. En quatrième lieu, selon les dispositions du VI de l'article L. 562-1 du code de l'environnement : " Les plans de prévention des risques d'inondation sont compatibles ou rendus compatibles avec les dispositions du plan de gestion des risques d'inondation défini à l'article L. 566-7. ". Selon l'article L. 566-7 du même code auquel il est ainsi renvoyé, dans sa rédaction applicable au litige : " L'autorité administrative arrête avant le 22 décembre 2015 à l'échelon de chaque bassin ou groupement de bassins, un plan de gestion des risques d'inondation pour les territoires définis à l'article L. 566-5. Ce plan fixe les objectifs en matière de gestion des risques d'inondation concernant le bassin ou groupement de bassins et les objectifs appropriés aux territoires mentionnés au même article L. 566-5. Ces objectifs doivent permettre d'atteindre les objectifs de la stratégie nationale mentionnée à l'article L. 566-4. / (...) ".

10. Il ressort des pièces du dossier que le territoire couvert par le plan de prévention des risques d'inondation du bassin versant du Sor s'inscrit dans le périmètre du plan de gestion des risques d'inondation du bassin Adour-Garonne. L'objectif stratégique n° 5 de ce dernier plan, pris dans sa version applicable en l'espèce, à savoir celle couvrant la période 2016/2021, vise à " gérer les capacités d'écoulement et restaurer les zones d'expansion des crues pour ralentir les écoulements " et se décline en huit dispositions référencées " D.5.1 " à " D.5.8 ", reprises du schéma directeur d'aménagement et de gestion des eaux applicable à ce même bassin pour cette même période. Compte tenu de ce qui a été exposé au point 8 du présent arrêt et alors que les requérants se bornent au demeurant à se référer aux seules considérations générales figurant au sein du préambule de l'objectif stratégique n° 5, les dispositions du règlement du plan de prévention des risques d'inondation en litige relatives aux bâtiments agricoles en zone rouge, telles que mentionnées au point 7, ne sont pas de nature à contrarier les orientations du plan de gestion des risques d'inondation et ne sont donc pas incompatibles avec ce document.

11. En cinquième lieu, les appelants soutiennent que le plan de prévention des risques litigieux méconnaîtrait l'objectif de valeur constitutionnelle d'accessibilité et d'intelligibilité de la norme en prévoyant la possibilité d'autoriser des constructions de bâtiments en zone rouge sans critères clairs et cohérents. Il ressort cependant de la lecture du règlement de ce plan que les prescriptions contestées sont énoncées en termes suffisamment précis et qu'elles ne présentent, notamment, aucune difficulté d'interprétation particulière qui, eu égard à leur ambiguïté ou à leur caractère contradictoire, serait source d'une insécurité juridique. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de cet objectif de valeur constitutionnelle ne peut qu'être écarté.

12. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède que M. G... et les autres requérants ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par son jugement du 11 avril 2023, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté leur demande tendant à l'annulation de l'arrêté préfectoral du 20 septembre 2019 ainsi que des décisions implicites rejetant leurs recours gracieux.

Sur les frais liés au litige :

13. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative s'opposent à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante en l'espèce, une quelconque somme à verser aux appelants au titre des frais non compris dans les dépens.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. G... et des autres requérants est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... G..., premier dénommé, pour l'ensemble des requérants, et à la ministre de la transition écologique, de la biodiversité, de la forêt, de la mer et de la pêche.

Copie en sera adressé au préfet du Tarn.

Délibéré après l'audience du 7 juillet 2025, à laquelle siégeaient :

M. Chabert, président,

M. Teulière, président assesseur,

M. Jazeron, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 17 juillet 2025.

Le rapporteur,

F. JazeronLe président,

D. Chabert

La greffière,

N. Baali

La République mande et ordonne à la ministre de la transition écologique, de la biodiversité, de la forêt, de la mer et de la pêche, en ce qui la concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 23TL01354


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de TOULOUSE
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 23TL01354
Date de la décision : 17/07/2025
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. Chabert
Rapporteur ?: M. Florian Jazeron
Rapporteur public ?: M. Diard
Avocat(s) : THIBAUD

Origine de la décision
Date de l'import : 18/08/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-07-17;23tl01354 ?
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