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17/07/2025 | FRANCE | N°23TL00797

France | France, Cour administrative d'appel de TOULOUSE, 4ème chambre, 17 juillet 2025, 23TL00797


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



La société BG Promotion a demandé au tribunal administratif de Toulouse de condamner la commune de Rouffiac-Tolosan à lui verser la somme de 657 131,07 euros assortie des intérêts légaux en réparation de l'illégalité fautive entachant le refus de permis de construire qui lui été opposé par arrêté du 16 juin 2017.



Par ordonnance n° 462171 du 4 avril 2022, le président de la section du contentieux du Conseil d'Etat a transmis au tribunal administrat

if de Montpellier le dossier de la requête présentée par la société BG Promotion en application de l'ar...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société BG Promotion a demandé au tribunal administratif de Toulouse de condamner la commune de Rouffiac-Tolosan à lui verser la somme de 657 131,07 euros assortie des intérêts légaux en réparation de l'illégalité fautive entachant le refus de permis de construire qui lui été opposé par arrêté du 16 juin 2017.

Par ordonnance n° 462171 du 4 avril 2022, le président de la section du contentieux du Conseil d'Etat a transmis au tribunal administratif de Montpellier le dossier de la requête présentée par la société BG Promotion en application de l'article R. 351-8 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 2025290 du 7 février 2023, le tribunal administratif de Montpellier a condamné la commune de Rouffiac-Tolosan à verser à la société BG Promotion la somme de 6 944 euros, assortie des intérêts au taux légal, a mis à la charge de la commune le versement d'une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et a rejeté le surplus des conclusions des parties.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 5 avril et 3 octobre 2023, la société BG Promotion, représentée par la SELAS Dufour-Duteillet, demande à la cour :

1°) d'annuler ou de réformer ce jugement en ce qu'il a rejeté sa demande indemnitaire présentée au titre du manque à gagner et de la perte des honoraires de maîtrise d'œuvre et de commercialisation ;

2°) de condamner la commune de Rouffiac-Tolosan à lui verser une somme complémentaire de 649 800 euros hors taxe, assortie des intérêts au taux légal depuis la demande indemnitaire préalable et de leur capitalisation ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Rouffiac-Tolosan une somme de 3 000 euros à lui verser au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement souffre d'une insuffisance de motifs pour ne pas avoir répondu aux arguments développés dans ses mémoires en réplique et sa note en délibéré ;

- le jugement doit être confirmé en ce qu'il lui a alloué une somme de 6 944 euros au titre des dépenses engagées ;

- il doit être réformé en ce qu'il a rejeté sa demande au titre du manque à gagner et de la perte des honoraires de gestion et de commercialisation ; elle a justifié des circonstances particulières qui devaient amener à considérer le préjudice certain en rappelant que la commune est en déficit de logements permettant l'arrivée de jeunes couples, en évoquant le dynamisme du marché immobilier du logement neuf à Toulouse sur la période du refus illégal, ainsi que le fait que la commune est située dans une zone tendue du dispositif Pinel, soit une circonstance particulière résultant de la loi ; son programme, par sa qualité, son positionnement et ses coûts raisonnables, avait toutes les chances de trouver des acquéreurs en cas de délivrance d'un permis de construire ; en outre, il ne pouvait être requis du promoteur dans le cas d'une vente en l'état futur d'achèvement qu'il justifie de la signature de contrats de réservation ou d'un état avancé de la commercialisation puisque ces exigences ne peuvent, par définition, être remplies avant la délivrance d'un permis de construire ;

- les arguments en défense sur l'absence de faute et le refus d'indemnisation au titre du manque à gagner sont infondés.

Par deux mémoires en défense, enregistrés les 28 juin et 11 octobre 2023, la commune de Rouffiac-Tolosan, représentée par Me Croels, conclut à l'annulation du jugement en ce qu'il l'a condamnée à verser à la société requérante une somme de 6 944 euros, au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 4 000 euros soit mise à la charge de la société BG Promotion au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- le jugement doit être annulé en ce qu'il retient une faute de la commune dès lors que le refus d'autorisation de construire n'était pas fautif ;

- la société a présenté un projet de construction en pleine connaissance de la position de refus de la commune et elle était parfaitement informée qu'il comportait un risque de non réalisation qu'elle a accepté de courir, une telle circonstance faisant obstacle à ce qu'elle puisse prétendre à une indemnisation ;

- l'exercice d'un recours contre le jugement du 20 mars 2018 n'était pas abusif ;

- la demande d'autorisation de construire aurait pu être refusée pour d'autres motifs que ceux invoqués en cours d'instance, tenant à la méconnaissance des articles UB 3 et UB 13 du règlement du plan local d'urbanisme ; en conséquence, la demande indemnitaire n'est pas fondée ;

- la société ne justifie pas qu'elle était en capacité de remplir les autres conditions suspensives de la seconde promesse de vente dans les délais impartis ;

- le jugement doit être annulé en ce qu'il a alloué à la requérante des sommes au titre de l'étude " Bbio ", des frais de géomètre-expert et de l'indemnisation versée aux propriétaires du terrain d'assiette du projet ; l'étude et les frais de géomètre ont été engagés dans le cadre de la première demande d'autorisation de construire déposée le 20 juin 2016 et refusée par arrêté du 2 septembre 2016, lequel n'a pas été contesté ; s'agissant de l'indemnisation des propriétaires, la société ne verse pas aux débats de justificatifs du paiement de la somme de 5 000 euros et la requérante a accepté cette nouvelle condition, en pleine connaissance du risque de non réalisation de son projet ;

- c'est à bon droit que le tribunal a rejeté les prétentions de la requérante au titre du manque à gagner et de la perte de rémunération de gestion et de commercialisation du projet.

Par une ordonnance du 28 septembre 2023, la clôture d'instruction a été fixée au 12 octobre 2023.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- la loi n° 2015-990 du 6 août 2015 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Après avoir entendu au cours de l'audience :

- le rapport de M. Teulière, président-assesseur,

- les conclusions de M. Diard, rapporteur public,

- les observations de Me Dufour, représentant la société BG Promotion,

- et les observations de Me Billa, représentant la commune de Rouffiac-Tolosan.

Considérant ce qui suit :

1. La société BG Promotion a demandé un permis de construire pour la réalisation d'un ensemble immobilier de 17 logements, après démolition des bâtiments existants, sur un terrain situé 67 rue de Montrabé à Rouffiac-Tolosan (Haute-Garonne). Par un arrêté du 21 février 2017, le maire de Rouffiac-Tolosan a rejeté cette demande. A la suite de l'introduction d'un recours pour excès de pouvoir de la société pétitionnaire contre ce refus, le maire, par deux arrêtés distincts du 16 juin 2017, a, d'une part, retiré l'arrêté du 21 février 2017 et, d'autre part, opposé un nouveau refus au projet. La société BG Promotion et le préfet de la Haute-Garonne ont contesté ce nouveau refus devant le tribunal administratif de Toulouse. Par un jugement nos 1701885, 1703713 et 1703383 du 20 mars 2018, le tribunal a prononcé un non-lieu à statuer sur le recours formé à l'encontre du refus du permis de construire du 21 février 2017 et annulé l'arrêté du 16 juin 2017. L'appel de la commune de Rouffiac-Tolosan à l'encontre de ce jugement a été rejeté par un arrêt n° 18BX02017 de la cour administrative d'appel de Bordeaux du 19 décembre 2019, devenu définitif. Par un jugement du 7 février 2023, le tribunal administratif de Montpellier, qui s'est vu transmettre le dossier de la requête indemnitaire tendant à la réparation des préjudices résultant de l'illégalité de ce refus de permis de construire, a notamment condamné la commune de Rouffiac-Tolosan à verser à la société BG Promotion la somme de 6 944 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter de la réception de la demande préalable. La société BG Promotion relève appel de ce jugement en tant qu'il a refusé l'indemnisation de son manque à gagner et de la perte d'honoraires de gestion et de commercialisation. La commune de Rouffiac-Tolosan forme, quant à elle, un appel incident contre ledit jugement en ce qu'il l'a condamnée à verser à la société requérante une somme de 6 944 euros.

Sur la régularité du jugement :

2. Si la société BG Promotion soutient que le jugement souffre d'une insuffisance de motivation pour ne pas avoir répondu aux arguments développés dans ses écritures en réplique et sa note en délibéré, elle ne précise pas à quels arguments le tribunal n'aurait pas répondu. En tout état de cause, le tribunal administratif de Montpellier, qui n'était pas tenu de répondre à tous les arguments soulevés devant lui, a suffisamment motivé son refus d'indemniser la société appelante au titre du manque à gagner et de la perte d'honoraires aux points 8 à 10 du jugement contesté. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation, en méconnaissance de l'obligation de motivation des jugements posée par l'article L. 9 du code de justice administrative, doit être écarté.

3. Le moyen soulevé par la commune de Rouffiac-Tolosan également tiré de l'absence de réponse à ses arguments de défense est insuffisamment précisé pour permettre à la cour d'en apprécier la portée et le bien-fondé.

Sur le bien-fondé du jugement :

4. En principe, toute illégalité commise par l'administration constitue une faute susceptible d'engager sa responsabilité, pour autant qu'il en soit résulté un préjudice direct et certain. La responsabilité de l'administration ne saurait en revanche être engagée pour la réparation des dommages qui ne trouvent pas leur cause dans cette illégalité.

En ce qui concerne la responsabilité pour faute de la commune de Rouffiac-Tolosan :

5. Il résulte de l'arrêt précité de la cour administrative d'appel de Bordeaux devenu définitif qu'en refusant illégalement, par l'arrêté du 16 juin 2017, le permis de construire sollicité par la société BG Promotion, pour les motifs erronés tirés, d'une part, de ce que le règlement de la zone UB du plan local d'urbanisme n'autorisait que les constructions de type pavillonnaire, d'autre part, de ce que le projet était de nature, compte tenu de ses dimensions et de son caractère collectif, à porter atteinte à l'intérêt des lieux avoisinants en méconnaissance de l'article 11 du règlement du plan local d'urbanisme applicable en zone UB, le maire de Rouffiac-Tolosan a commis une faute de nature à engager la responsabilité de la commune. Dès lors que toute illégalité commise constitue une faute, la commune de Rouffiac-Tolosan n'est pas fondée à contester, par la voie de l'appel incident, l'existence de la faute de son maire constituée par son refus illégal de permis de construire.

En ce qui concerne les préjudices et le lien de causalité :

6. Aux termes l'article L. 424-1 du code de l'urbanisme : " L'autorité compétente se prononce par arrêté sur la demande de permis ou, en cas d'opposition ou de prescriptions, sur la déclaration préalable. (...) ". Aux termes de l'article L. 424-3 du même code : " Lorsque la décision rejette la demande ou s'oppose à la déclaration préalable, elle doit être motivée. / Cette motivation doit indiquer l'intégralité des motifs justifiant la décision de rejet ou d'opposition, notamment l'ensemble des absences de conformité des travaux aux dispositions législatives et réglementaires mentionnées à l'article L. 421-6. / Il en est de même lorsqu'elle est assortie de prescriptions, oppose un sursis à statuer ou comporte une dérogation ou une adaptation mineure aux règles d'urbanisme applicables. ". Les dispositions introduites au deuxième alinéa de l'article L. 424-3 du code de l'urbanisme par l'article 108 de la loi du 6 août 2015 pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques visent à imposer à l'autorité compétente de faire connaître tous les motifs susceptibles de fonder le rejet de la demande d'autorisation d'urbanisme ou de l'opposition à la déclaration préalable. Combinées avec les dispositions de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme, elles mettent le juge administratif en mesure de se prononcer sur tous les motifs susceptibles de fonder une telle décision. Il ressort des travaux parlementaires de la loi du 6 août 2015 que ces dispositions ont pour objet de permettre d'accélérer la mise en œuvre de projets conformes aux règles d'urbanisme applicables en faisant obstacle à ce qu'en cas d'annulation par le juge du refus opposé à une demande d'autorisation d'urbanisme ou de l'opposition à la déclaration préalable, et compte tenu de ce que les dispositions de l'article L. 600-2 du même code conduisent à appliquer le droit en vigueur à la date de la décision annulée, l'autorité compétente prenne une nouvelle décision de refus ou d'opposition.

7. Aux termes de l'article UB 3 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune de Rouffiac-Tolosan, applicable à la zone UB où se situe le terrain d'assiette du projet et relatif aux accès et la voirie : " (...) 3.2 - Voirie (...) Les voies en impasse doivent comporter un dispositif de retournement permettant aux véhicules lourds de manœuvrer et de faire demi-tour (rayon de braquage intérieur de 11 m).(...)3.3 - Piste cyclable et chemins piétonniers (...) la largeur minimale des chemins piétonniers doit être de 1,50 mètre. ". L'article UB 13 de ce règlement, relatif aux espaces libres et plantations, dispose : " La végétation existante doit être maintenue ou remplacée par des plantations au moins équivalentes. (...) ".

8. D'une part, pour remettre en cause l'existence de préjudices en lien direct avec la faute résultant de l'illégalité du refus de permis de construire opposé le 16 juin 2017, la commune de Rouffiac-Tolosan ne peut utilement invoquer, sur le terrain de la responsabilité pour faute, les circonstances que la société pétitionnaire a présenté un projet de construction en pleine connaissance de la position de la commune et qu'elle était parfaitement informée que ce projet comportait un risque de non réalisation qu'elle a accepté de courir.

9. D'autre part, la commune fait valoir en défense que la demande de permis de construire aurait pu être refusée pour d'autres motifs que ceux opposés dans l'arrêté illégal. Elle précise sur ce point que le projet ne comprenait pas de raquette de retournement d'un rayon de 11 mètres et qu'il prévoyait un chemin piétonnier d'une largeur d'1,20 mètre au lieu d'1,50 mètre, en méconnaissance des dispositions citées au point précédent de l'article UB 3 du règlement du plan local d'urbanisme. Elle indique également que ce projet ne prévoyait que de replanter 17 arbres, sans précisions sur la nature de ces plantations pour 19 arbres abattus, en méconnaissance des dispositions précitées de l'article UB 13 de ce règlement. Toutefois, il lui appartenait, en application des dispositions citées au point 6, de faire connaître tous les motifs nouveaux susceptibles de fonder le rejet de la demande d'autorisation d'urbanisme présentée par la société BG Promotion, avant le terme de l'instance devant la cour administrative d'appel de Bordeaux, en sollicitant au besoin une substitution de motifs, ce qu'elle n'a pas fait. Dans ces conditions, la commune de Rouffiac-Tolosan ne peut utilement invoquer dans la présente instance la circonstance que la demande de permis de construire aurait pu être refusée pour des motifs qu'elle n'a pas opposés en temps utile.

S'agissant des dépenses engagées en pure perte :

10. D'une part, il résulte de l'instruction que la société BG Promotion a exposé deux dépenses, l'une, d'un montant de 1 200 euros, facturée le 31 mai 2016 par un bureau d'étude et relative à la réalisation d'une étude réglementaire nécessaire pour le dépôt de la demande de permis de construire du 17 janvier 2017, l'autre, d'un montant de 744 euros, facturée, le 14 mars 2016, par un géomètre-expert aux fins de procéder au bornage de la parcelle cadastrée section AE n° 1, terrain d'assiette du projet, lesquelles présentent un lien direct de causalité avec la faute de la commune. En effet et contrairement à ce que soutient la commune, il n'est pas établi que ces dépenses se rattacheraient uniquement au dépôt le 20 juin 2016 de la première demande de permis de construire de la société appelante, laquelle avait fait l'objet d'un premier refus non contesté du 2 septembre 2016 et qu'elles ne pourraient être rattachées à la demande de permis de construire du 17 janvier 2017 qui a fait l'objet de l'arrêté de refus de permis de construire illégal du 16 juin 2017.

11. D'autre part, il résulte de l'instruction que, par un acte notarié du 12 octobre 2018, les propriétaires du terrain d'assiette du projet et la société BG Promotion ont notamment convenu de proroger la date d'expiration de la validité de la promesse de vente initialement fixée au 30 octobre 2018 pour la porter au plus tard au 28 février 2019. L'acte précise que le bénéficiaire s'engage à payer jusqu'à la signature de l'acte authentique de vente une somme de 1 000 euros par mois au promettant. Il résulte également de l'instruction que les propriétaires ont attesté avoir reçu une somme de 5 000 euros à titre d'indemnité pour la prorogation de la promesse de vente de leur bien. Cette dépense, justifiée dans son montant par cette attestation des propriétaires, présente un lien direct avec le refus de permis de construire illégal. Si la commune fait valoir que la société a accepté cette condition en connaissance du risque pesant sur l'opération, le tribunal administratif de Toulouse avait déjà annulé l'arrêté de refus de permis de construire du 16 juin 2017 à la date de l'acte prévoyant cette obligation de versement à la charge du bénéficiaire de la promesse de vente.

S'agissant du manque à gagner et de la perte d'honoraires :

12. L'ouverture du droit à indemnisation est subordonnée au caractère direct et certain des préjudices invoqués. La perte de bénéfices ou le manque à gagner découlant de l'impossibilité de réaliser une opération immobilière en raison d'un refus illégal d'autorisation d'urbanisme revêt un caractère éventuel et ne peut, dès lors, en principe, ouvrir droit à réparation. Il en va toutefois autrement si le requérant justifie de circonstances particulières, tels que des engagements souscrits par de futurs acquéreurs ou l'état avancé des négociations commerciales avec ces derniers, permettant de faire regarder ce préjudice comme présentant, en l'espèce, un caractère direct et certain. Il est fondé, si tel est le cas, à obtenir réparation au titre du bénéfice qu'il pouvait raisonnablement attendre de cette opération.

13. D'une part, si la société BG Promotion invoque des éléments de contexte sur le déficit communal de logements permettant l'arrivée de jeunes couples, le dynamisme du marché immobilier du logement neuf à Toulouse au titre de la période du refus illégal de permis de construire, ou encore la situation de la commune en zone tendue du dispositif Pinel et si elle soutient également que son programme, par sa qualité, son positionnement et ses coûts raisonnables, avait toutes les chances de trouver des acquéreurs, elle ne justifie cependant pas ainsi de circonstances particulières permettant de faire regarder le préjudice de manque à gagner dont elle sollicite la réparation à hauteur de 359 800 euros hors taxes, comme présentant, en l'espèce, un caractère direct et certain. En outre, elle admet elle-même que la phase de commercialisation de son programme n'aurait débuté qu'après l'obtention du permis de construire et ne justifie donc pas d'un état d'avancement de son opération permettant de faire regarder le préjudice allégué comme certain.

14. D'autre part, la société appelante se borne à produire, à titre de justificatif, un état prévisionnel des dépenses et recettes attendues de l'opération immobilière, faisant également apparaître la marge hors taxe prévue pour la société civile de construction vente en charge de cette opération de construction vente. Elle ne justifie pas ainsi d'un préjudice propre de manque à gagner et n'étaye pas suffisamment le caractère certain d'un tel préjudice.

15. Enfin, pour justifier du caractère certain de la perte d'honoraires de gestion et de commercialisation, la société BG Promotion se borne à produire le même document justificatif faisant apparaître des honoraires de gestion pour un montant de 130 000 euros hors taxes et des honoraires internes de commercialisation pour un montant de 160 000 euros hors taxes. Par cet élément, elle n'étaye pas non plus suffisamment le caractère certain de la perte d'honoraires dont elle sollicite la réparation.

16. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède, d'une part, que la société requérante n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande indemnitaire au titre du manque à gagner et de la perte d'honoraires de gestion et de commercialisation et, d'autre part, que la commune de Rouffiac-Tolosan n'est pas fondée à se plaindre, de ce que par ce même jugement, le tribunal l'a condamnée à verser à la société BG Promotion une somme de 6 944 euros, assortie d'intérêts au taux légal à compter de la date de réception de sa demande indemnitaire préalable.

Sur les frais liés au litige :

17. En application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de laisser à la charge des parties les frais non compris dans les dépens qu'elles ont exposés dans le cadre de la présente instance d'appel.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de la société BG promotion est rejetée.

Article 2 : Les conclusions d'appel incident de la commune de Rouffiac-Tolosan et ses conclusions au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société BG Promotion et à la commune de Rouffiac-Tolosan.

Délibéré après l'audience du 7 juillet 2025, où siégeaient :

- M. Chabert, président de chambre,

- M. Teulière, président assesseur,

- M. Jazeron, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 17 juillet 2025.

Le président-assesseur,

T. Teulière

Le président,

D. ChabertLe greffier,

N. Baali

La République mande et ordonne au préfet de la Haute-Garonne en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 23TL00797


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de TOULOUSE
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 23TL00797
Date de la décision : 17/07/2025
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. Chabert
Rapporteur ?: M. Thierry Teulière
Rapporteur public ?: M. Diard
Avocat(s) : DUFOUR

Origine de la décision
Date de l'import : 18/08/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-07-17;23tl00797 ?
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