Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société d'exploitation des établissements André Delorme a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler l'arrêté du 25 août 2020 par lequel le préfet de Vaucluse a ordonné la suppression des installations qu'elle exploite, la cessation définitive des activités exercées et la remise en état des lieux dans le délai de trois mois ou, à défaut, d'annuler cet arrêté en tant qu'il a ordonné la suppression des installations et la remise en état des lieux dans le délai de trois mois.
Par un jugement n° 2003474 du 11 avril 2023, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 9 juin 2023, la société d'exploitation des établissements André Delorme, représentée par Me Vancraeyenest, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) à titre principal, d'annuler l'arrêté du 25 août 2020 du préfet de Vaucluse et à titre subsidiaire de l'annuler en tant qu'il prévoit un délai de trois mois ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- l'arrêté attaqué a été pris au terme d'une procédure irrégulière : le délai de quinze jours pour présenter ses observations sur le rapport de l'inspection de l'environnement n'était pas approprié et elle a ainsi été privée d'une garantie substantielle alors que l'urgence n'est pas caractérisée ;
- l'arrêté attaqué se fonde sur des faits matériellement inexacts dès lors qu'il existe une contradiction entre le constat de la présence de dépôts résiduels de déchets éparpillés sur l'ensemble de la parcelle et l'affirmation tenant à l'exploitation d'activités de regroupement et transit de métaux et de déchets de métaux non dangereux ;
- dès lors que ses installations ne constituent aucun danger, le délai de trois mois retenu par le préfet de Vaucluse pour la suppression des installations et la remise en état des lieux est entaché d'erreur manifeste d'appréciation.
Par un mémoire en défense, enregistré le 14 novembre 2024, la ministre de la transition écologique, de l'énergie, du climat et de la prévention des risques conclut au rejet de la requête.
Elle fait valoir qu'aucun des moyens soulevés par la société d'exploitation des établissements André Delorme n'est fondé.
Par ordonnance du 14 novembre 2024, la clôture d'instruction a été fixée au 16 décembre 2024.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'environnement ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Lasserre, première conseillère,
- et les conclusions de M. Diard, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. Lors de la visite effectuée le 14 février 2017 dans les locaux de la société d'exploitation des établissements André Delorme à Avignon (Vaucluse), l'inspection des installations classées pour la protection de l'environnement relevant de la direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement de Provence-Alpes-Côte d'Azur a constaté, sur les parcelles cadastrées section IM nos 271-272-340-341, l'exercice d'activités de regroupement et transit de métaux et de déchets de métaux non dangereux sur une surface supérieure à 1 000 m² et, sur la parcelle cadastrée section IP n° 20, l'exercice d'activités de stockage de déchets. Dès lors que de telles activités relevaient alors du régime de l'autorisation, la société d'exploitation des établissements André Delorme a ainsi fait l'objet d'un arrêté pris le 14 avril 2017 par le préfet de Vaucluse par lequel il l'a mise en demeure de régulariser sa situation administrative dans le délai de trois mois, soit en déposant un dossier de demande d'autorisation, soit en cessant ses activités. Un second arrêté du préfet de Vaucluse a été édicté le 18 mai 2017 par lequel l'autorité préfectorale a suspendu l'activité de stockage de déchets, exercée sur la parcelle IP n° 20, et a pris des mesures conservatoires à l'encontre de la société d'exploitation des établissements André Delorme, cet arrêté ayant été remplacé par un arrêté préfectoral ultérieur du 25 juillet 2017. Le site de la société d'exploitation des établissements André Delorme a, par la suite, fait l'objet de visites de l'inspection de l'environnement en date des 6 mars 2018, 3 décembre 2018 et 11 juin 2020. A la suite de cette dernière visite, le préfet de Vaucluse a pris à l'encontre de cette société, sur le fondement des dispositions du II de l'article L. 171-7 du code de l'environnement, un arrêté du 25 août 2020 par lequel il a ordonné la suppression des installations qu'elle exploite, la cessation définitive des activités exercées et la remise en état des lieux dans le délai de trois mois. Par la présente requête, la société d'exploitation des établissements André Delorme demande d'annuler le jugement par lequel le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ce dernier arrêté.
Sur les conclusions en annulation :
2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 171-7 du code de l'environnement : " I.- Indépendamment des poursuites pénales qui peuvent être exercées, lorsque des installations ou ouvrages sont exploités, (...) sans avoir fait l'objet de l'autorisation, de l'enregistrement, de l'agrément, de l'homologation, de la certification ou de la déclaration requis en application du présent code, ou sans avoir tenu compte d'une opposition à déclaration, l'autorité administrative compétente met l'intéressé en demeure de régulariser sa situation dans un délai qu'elle détermine, et qui ne peut excéder une durée d'un an. (...) / II.- S'il n'a pas été déféré à la mise en demeure à l'expiration du délai imparti, ou si la demande d'autorisation, d'enregistrement, d'agrément, d'homologation ou de certification est rejetée, ou s'il est fait opposition à la déclaration, l'autorité administrative ordonne la fermeture ou la suppression des installations ou ouvrages, la cessation de l'utilisation ou la destruction des objets ou dispositifs, la cessation définitive des travaux, opérations, activités ou aménagements et la remise des lieux dans un état ne portant pas préjudice aux intérêts protégés par le présent code. (...) / III.- Sauf en cas d'urgence, et à l'exception de la décision de mise en demeure prévue au premier alinéa du I du présent article, les mesures mentionnées au présent article sont prises après avoir communiqué à l'intéressé les éléments susceptibles de fonder les mesures et l'avoir informé de la possibilité de présenter ses observations dans un délai déterminé ". En outre, aux termes de l'article L. 514-5 du même code : " L'exploitant est informé par l'inspecteur des installations classées des suites du contrôle. L'inspecteur des installations classées transmet son rapport de contrôle au préfet et en fait copie simultanément à l'exploitant. Celui-ci peut faire part au préfet de ses observations ". Enfin, les dispositions des articles R. 512-39-1 à R. 512-39-4 du code de l'environnement fixent notamment les conditions dans lesquelles l'exploitant d'une ou plusieurs installations classées pour la protection de l'environnement procède à une cessation d'activité et assure la remise en état du site concerné.
3. Il appartient au juge du plein contentieux des installations classées pour la protection de l'environnement d'apprécier le respect des règles relatives à la forme et la procédure au regard des circonstances de fait et de droit en vigueur à la date de la décision dont il est saisi, et celui des règles de fond régissant l'installation au regard des circonstances de fait et de droit en vigueur à la date à laquelle il se prononce, sous réserve du respect des règles d'urbanisme, qui s'apprécie au regard des circonstances de fait et de droit applicables à la date de l'autorisation.
4. D'une part, la société appelante ne peut utilement se prévaloir des dispositions de l'article L. 514-5 du code de l'environnement qui concerne le rapport de l'inspecteur des installations classées, qui sert de fondement à la mise en demeure, et non comme en l'espèce, un rapport faisant suite à une visite ayant pour objet de vérifier s'il a été déféré à cette mise en demeure. D'autre part, il résulte de l'instruction que l'inspecteur des installations classées a effectué le 11 juin 2020 une visite sur le site de l'exploitation et a établi un rapport daté du 3 août 2020. Ce rapport a été notifié à la société d'exploitation des établissements André Delorme, par un courrier du même jour l'invitant à formuler ses observations auprès du préfet de Vaucluse dans un délai de quinze jours et mentionnant la proposition au préfet de Vaucluse d'ordonner, en application du II de l'article L. 171-7 du code de l'environnement, la suppression des installations, la cessation définitive des activités et la remise en état des lieux. Ainsi, et alors même que la société d'exploitation des établissements André Delorme a demandé, par courrier de son avocat du 13 août 2020, reçu le lendemain en préfecture, un délai complémentaire de quinze jours au vu de la période estivale et a produit des observations le 4 septembre suivant, soit postérieurement à l'édiction de l'arrêté attaqué, il ne résulte pas de l'instruction que le délai de quinze jours dont a bénéficié la société appelante pour présenter ses observations aurait été trop bref. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance du principe du contradictoire au sens des dispositions du III de l'article L. 171-7 du code de l'environnement doit être écarté.
5. En deuxième lieu, ainsi qu'il a été exposé au point 1 ci-dessus, par arrêté du 14 avril 2017, le préfet de Vaucluse a mis en demeure la société d'exploitation des établissements André Delorme de régulariser sa situation administrative dans le délai de trois mois, soit en déposant un dossier de demande d'autorisation, soit en cessant ses activités conformément aux articles R. 512-39-1 à R. 512-39-4 du code de l'environnement. D'une part, il est constant que la société appelante n'a pas déposé de dossier de demande d'autorisation de ses activités. D'autre part, et alors qu'il est aussi constant que l'activité de stockage de déchets et celle de regroupement et de transit de métaux et de déchets de métaux exercées par la société appelante relèvent respectivement des régimes de l'autorisation et de l'enregistrement, le seul dépôt d'un formulaire de déclaration de notification de la cessation d'activité d'une installation classée relevant du régime de la déclaration du 9 juillet 2021 ne peut pas être regardé comme un dossier de cessation des installations de la société d'exploitation des établissements André Delorme. En outre, s'il résulte de l'instruction, eu égard au rapport de la visite effectuée le 5 mai 2022 par l'inspection de l'environnement, que l'exploitant a cessé définitivement toute activité sur le site, ce rapport précise toutefois que les opérations de remise en état ne sont pas finalisées. A cet égard, le rapport précité souligne que, sur la parcelle IP n° 20, il demeure quelques déchets et fragments métalliques en nombre au sol alors que le hangar et l'appentis, situés au nord de la parcelle, n'ont pas été totalement vidés, et que les parcelles IM nos 271-340-341-272 sont toujours occupées par des métaux, en dépit de l'évacuation de métaux effectuée depuis la visite du 17 août 2021 à hauteur de 36 tonnes selon les affirmations du conseil de la société d'exploitation des établissements André Delorme auprès de l'inspection de l'environnement. Eu égard à ces circonstances de fait à la date du présent arrêt, la société appelante ne peut être regardée comme ayant ni totalement cessé ses activités au sens des R. 512-39-1 à R. 512-39-4 du code de l'environnement, ni finalisé les opérations de remise en état. Dans ces conditions, elle ne peut pas être regardée comme ayant déféré à la mise en demeure que prévoyait l'arrêté précité du 14 avril 2017 pris par le préfet de Vaucluse. Par suite, le moyen tiré de l'inexactitude matérielle des faits entachant l'arrêté attaqué du 25 août 2020 doit être écarté.
6. En troisième lieu, en se bornant à produire ses bilans comptables de 2017, 2018, et 2019, la société appelante ne démontre pas qu'elle n'avait pas les capacités financières pour procéder à l'évacuation des métaux et les déchets de métaux restants sur les parcelles IM nos 271-340-341-272 et IP n° 20. En outre, et alors même que ces derniers ne constituent pas un risque de pollution à court terme, le délai de trois mois n'apparaît pas, eu égard à la situation des installations et de l'exploitant en cause, au délai écoulé depuis 2017 et au courrier du conseil de la société d'exploitation des établissements André Delorme en date du 24 mai 2018 selon lequel le nettoyage de la parcelle IP n° 20 devait alors être totalement terminé dans quelques semaines, trop bref. Par suite, le moyen tiré de l'erreur d'appréciation entachant le délai de trois mois imparti par l'arrêté attaqué du 25 août 2020 doit être écarté.
7. Il résulte de tout ce qui précède que la société d'exploitation des établissements André Delorme n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande.
Sur les frais liés au litige :
8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante à la présente instance, une somme quelconque au titre des frais exposés par la société appelante et non compris dans les dépens.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de la société d'exploitation des établissements André Delorme est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société d'exploitation des établissements André Delorme et à la ministre de la transition écologique, de la biodiversité, de la forêt, de la mer et de la pêche.
Copie en sera adressée au préfet de Vaucluse.
Délibéré après l'audience du 27 mai 2025, à laquelle siégeaient :
M. Chabert, président,
M. Teulière, président assesseur,
Mme Lasserre, première conseillère,
Rendu public par mise à disposition au greffe le 12 juin 2025.
La rapporteure,
N. Lasserre
Le président,
D. ChabertLa greffière,
N. Baali
La République mande et ordonne à la ministre de la transition écologique, de la biodiversité, de la forêt, de la mer et de la pêche en ce qui la concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 23TL01338