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28/05/2025 | FRANCE | N°24TL02275

France | France, Cour administrative d'appel de TOULOUSE, 4ème chambre, 28 mai 2025, 24TL02275


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. C... B... et Mme A... D... ont demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté n° PC 082 134 22 N0021 du 22 mars 2023 par lequel le maire de Nègrepelisse a délivré au groupement agricole d'exploitation en commun (GAEC) Raujol Frères un permis de construire pour la réalisation de deux serres agricoles et d'un hangar de stockage avec panneaux photovoltaïques en toitures de ces constructions sur un terrain situé au lieu-dit Barrayrous, ainsi que la décision

du maire du 28 juin 2023 rejetant leur recours gracieux.



Par une ordonnanc...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... B... et Mme A... D... ont demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté n° PC 082 134 22 N0021 du 22 mars 2023 par lequel le maire de Nègrepelisse a délivré au groupement agricole d'exploitation en commun (GAEC) Raujol Frères un permis de construire pour la réalisation de deux serres agricoles et d'un hangar de stockage avec panneaux photovoltaïques en toitures de ces constructions sur un terrain situé au lieu-dit Barrayrous, ainsi que la décision du maire du 28 juin 2023 rejetant leur recours gracieux.

Par une ordonnance du 28 juin 2024, la présidente de la 6ème chambre du tribunal administratif de Toulouse a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrée le 22 août 2024, le 2 décembre 2024 et les 14 et 23 janvier 2025, M. B... et Mme D..., représentés par Me Dalbin, demandent à la cour :

1°) d'annuler l'ordonnance du 28 juin 2024 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 22 mars 2023 du maire de Nègrepelisse ainsi que la décision de rejet de recours gracieux du 28 juin 2023 ;

3°) de mettre à la charge solidaire de la commune de Nègrepelisse et du GAEC Raujol Frères la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

Sur la régularité de l'ordonnance :

- leur requête devant le tribunal administratif n'est pas tardive dès lors que le projet pour lequel le permis de construire litigieux a été délivré n'entre pas dans le champ de l'article R. 311-6 du code de justice administrative disposant que l'exercice d'un recours gracieux ne proroge pas le délai de recours contentieux de deux mois pour les décisions relatives aux ouvrages de production d'électricité à partir de l'énergie solaire photovoltaïque d'une puissance égale ou supérieure à 5 mégawatts (MW) ;

- les panneaux photovoltaïques installés en toiture sur les serres et le hangar agricole sont accessoires à la construction au sens de l'article R. 422-2-1 du code de l'urbanisme alors en vigueur donnant compétence au maire pour se prononcer sur la demande de permis de construire ; les constructions autorisées par le permis en litige ne peuvent être regardées comme des ouvrages de production d'électricité au sens de l'article R. 311-6 du code de justice administrative ;

- à supposer que le projet relève du champ de l'article R. 311-6 du code de justice administrative, la théorie de la connaissance acquise de la décision ne peut s'appliquer dès lors que la mention de la puissance de l'installation n'apparaissait pas sur le panneau d'affichage du permis de construire ; ils n'ont pu avoir accès au dossier de demande de permis de construire avant le 16 août 2023 après saisine de la Commission d'accès aux documents administratifs ;

- l'arrêté litigieux disposait en outre, qu'il était possible de contester la légalité de la décision par un recours gracieux introduit dans le délai de recours contentieux et prorogeant ce dernier de deux mois ;

- l'affichage du permis de construire a été réalisé au droit de la parcelle cadastrée section YK n° 97 alors qu'il aurait dû l'être sur la parcelle n° 100 par laquelle se fera la desserte du site, et qui est bordée par la voie publique le rendant à ce titre, irrégulier ;

- la mention relative au droit de recours des tiers en application de l'article R. 600-2 du code de l'urbanisme est illisible sur le panneau d'affichage du permis de construire depuis la voie publique ;

Sur la légalité du permis de construire :

- le permis de construire a été délivré par une autorité incompétente ;

- la consultation de la mission régionale d'autorité environnementale d'Occitanie est irrégulière dès lors qu'en l'état actuel des documents à sa disposition elle ne pouvait se prononcer sur l'impact réel du projet ;

- il n'est pas justifié du dépôt d'une demande de dérogation à l'interdiction de porter atteinte à des espèces protégées ;

- l'avis de l'autorité environnementale ainsi que l'avis de la mission régionale d'autorité environnementale n'ont pas étés joints au dossier d'enquête publique en méconnaissance des dispositions de l'article R. 123-8-1° du code de l'environnement ; ces vices ont été de nature à nuire à la bonne information du public ;

- l'étude d'impact est insuffisante dès lors qu'elle ne décrit pas l'ensemble des installations envisagées pour l'irrigation des serres ainsi que les caractéristiques des prélèvements et la ressource en eau impactée ;

- les incidences potentielles sur les habitats naturels, la faune, la flore, la ressource en eau et le paysage ne sont pas analysées ;

- les mesures d'évitement, de réduction ou de compensation appropriées à la réduction des impacts ne figurent pas dans l'étude d'impact ;

- l'étude d'impact n'a pas été mise à jour à la suite des résultats de l'instruction du dossier de demande de dérogation au titre des espèces protégées ; celle-ci méconnaît l'article L. 415-15 du code de l'urbanisme en ce qu'elle n'a pas été mise à jour à la suite des résultats de l'instruction du dossier de dérogation espèces protégées ;

- aucun élément du dossier ne permet de justifier que le projet retenu est la solution la moins impactante pour l'environnement au sens de l'article R. 122-5 du code de l'environnement ; la demande de dérogation espèces protégées n'a pas été déposée en application des articles L. 411-1 et L. 411-2 du code de l'environnement ; des éléments de leur parcelle sont classés comme patrimoine protégé au tire du 7° l'article L. 123-1-5 du code de l'urbanisme alors en vigueur au moment de la révision du plan local d'urbanisme de Nègrepelisse ;

- le rapport et les conclusions du commissaire enquêteur sont insuffisants ;

- le projet porte atteinte au caractère et à l'intérêt des lieux environnants et devait être refusé sur le fondement de l'article R. 111-27 du code de l'urbanisme ;

- il présente un risque pour la sécurité publique et ne pouvait être autorisé sans méconnaître l'article R. 111-2 du même code ;

- en raison des risques d'atteinte à l'environnement, le permis de construire a été délivré en violation de l'article R. 111-26 de ce code ;

- le permis de construire délivré ne comporte aucune prescription spéciale pour la mise en œuvre des mesures éviter, réduire, compenser ;

- en raison des risques d'atteinte à la sécurité et à la salubrité publiques, il est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation dans l'application de l'article 5 de la Charte de l'environnement.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 14 novembre 2024, 14 janvier 2025 et 7 février 2025, le GAEC Raujol Frères, représenté par Me Versini-Campinchi, conclut, à titre principal, au rejet de la requête, à titre subsidiaire, à ce qu'il soit sursis à statuer en vue de permettre la régularisation des vices éventuellement retenus à l'encontre de l'arrêté du 22 mars 2023 et à ce que soit mise à la charge des requérants la somme de 4 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la demande devant le tribunal administratif est irrecevable en raison de son caractère tardif dès lors que le permis de construire attaqué a fait l'objet d'un affichage régulier ; le délai de recours contentieux a commencé à courir à compter du 5 avril 2023, date d'affichage du permis ; le recours gracieux reçu par la commune le 8 juin 2023, soit après l'expiration du délai de recours contentieux, ne pouvait avoir pour effet de le proroger ;

- le panneau d'affichage du permis de construire a été correctement placé garantissant une visibilité optimale depuis la voie publique ;

- le chemin d'accès au site n'existe pas encore de sorte qu'il n'aurait pas été opportun de placer le panneau d'affichage sur la parcelle cadastrée section YK n° 100 compte tenu de son absence d'accès direct à la route départementale ; la circonstance que le panneau soit situé le long de la parcelle cadastrée section YK n° 97 bordant la route départementale n° 958 n'est pas de nature à remettre en cause la régularité de cet affichage ;

- le permis de construire a été délivré pour le projet dans son ensemble, comprenant les serres, le hangar et les panneaux photovoltaïques de sorte que ces derniers ne peuvent être considérés comme accessoires ; le projet entre dans le champ d'application de l'article R. 311-6 du code de justice administrative au regard du seul critère de la puissance de l'installation ;

- les requérants étaient au fait du contenu du permis de construire en formant leur recours gracieux manifestant ainsi la connaissance acquise de la décision ;

- ils ne peuvent se prévaloir de la mention erronée figurant dans l'arrêté du maire concernant les voies et délais de recours possibles pour contester celui-ci ;

- l'absence de mention des règles particulières de l'article R. 311-6 du code de l'urbanisme sur le panneau d'affichage n'empêche pas d'opposer aux requérants la règle relative à l'absence d'effet interruptif du délai de recours contentieux par l'exercice d'un recours administratif ;

- aucun des moyens soulevés par les requérants n'est fondé.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 17 décembre 2024 et 14 janvier 2025, la commune de Nègrepelisse, représentée par la SCP Courrech et Associés, conclut, à titre principal, au rejet de la requête comme irrecevable ou mal fondé, à titre subsidiaire, à ce qu'il soit fait application de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme et à ce que soit mise à la charge des appelants une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- à titre principal, la demande présentée devant le tribunal administratif est irrecevable en raison de son caractère tardif ; le permis de construire en litige a fait l'objet d'un affichage régulier sur le terrain d'assiette du projet à compter du 5 avril 2023 ; le recours gracieux reçu le 8 juin suivant, n'a pu interrompre le délai de recours qui était expiré ;

- en tout état de cause, le projet relevant du champ des dispositions de l'article R. 311-6 du code justice administrative en raison de la puissance installée des panneaux photovoltaïques supérieure à 5 MW, le recours gracieux n'a pu interrompre le délai du recours contentieux ;

- à titre subsidiaire, aucun des moyens invoqués quant à la légalité du permis de construire en litige n'est fondé ;

- le panneau d'affichage du permis de construire a été correctement implanté de sorte qu'il permet aux tiers intéressés d'être informés de l'existence d'un projet en construction et, le cas échéant, de faire valoir leurs droits ;

- le chemin d'accès au site n' ayant pas été encore créé, il n'aurait pas été opportun de placer le panneau d'affichage sur la parcelle cadastrée section YK n° 100 compte tenu de son absence d'accès direct à la voie publique ;

- le panneau d'affichage ne laisse aucun doute quant à la mention des voies et délais de recours contre le permis de construire ; l'article R. 311-6 du code de justice administrative n'avait pas à être renseigné ;

- le permis de construire a été délivré pour le projet dans son ensemble, comprenant les serres, le hangar et les panneaux photovoltaïques de sorte que ces derniers ne peuvent être considérés comme accessoires ; le projet entre dans le champ d'application de l'article R. 311-6 du code de justice administrative au regard du seul critère de la puissance de l'installation ; les dispositions des articles R. 422-2 et R. 422-2-1 du code de l'urbanisme auxquelles se référent les requérants, ne s'appliquent pas dès lors qu'elles sont relatives aux règles de compétence de l'autorité administrative pour délivrer l'autorisation d'urbanisme ; la modification de la rédaction de l'article R. 422-2-1 n'a aucune incidence sur le cas d'espèce ;

- dès lors que le projet entre dans le champ d'application de l'article R. 311-6 du code de justice administrative, l'introduction de la requête le 31 août 2023 devant le tribunal administratif est tardive ;

- les requérants étaient au fait du contenu du permis de construire en formant leur recours gracieux manifestant ainsi la connaissance acquise de la décision.

Par une ordonnance du 17 février 2025, la clôture d'instruction a été fixée au même jour.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la Constitution, notamment la Charte de l'environnement à laquelle renvoie son Préambule ;

- le code de l'énergie ;

- le code de l'environnement ;

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Chabert, président,

- les conclusions de M. Diard, rapporteur public,

- les observations de Me Schlegel, représentant la commune de Négrepelisse,

- et les observations de Me Louis, représentant le GAEC Raujol Frères.

Considérant ce qui suit :

1. Le groupement agricole d'exploitation en commun (GAEC) Raujol Frères a déposé le 3 juin 2022 auprès des services de la commune de Nègrepelisse (Tarn-et-Garonne) une demande de permis de construire pour la réalisation de deux serres agricoles et d'un hangar de stockage, ces constructions étant pourvues de panneaux photovoltaïques en toitures. Par un arrêté du 22 mars 2023 n° PC 082 134 22 N0021, le maire de Nègrepelisse a délivré le permis de construire sollicité. Par la présente requête, M. B... et Mme D... relèvent appel de l'ordonnance du 28 juin 2024 par laquelle la présidente de la 6ème chambre du tribunal administratif de Toulouse a rejeté comme irrecevable leur demande tendant à l'annulation de ce permis de construire.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Aux termes de l'article R. 222-1 du code de justice administrative : " (...) les présidents de formation de jugement (...) des tribunaux (...) peuvent, par ordonnance : / (...) 4° Rejeter les requêtes manifestement irrecevables, lorsque la juridiction n'est pas tenue d'inviter leur auteur à les régulariser ou qu'elles n'ont pas été régularisées à l'expiration du délai imparti par une demande en ce sens ; (...) ". L'article R. 311-6 du même code dispose que : " I.- Le présent article régit les litiges portant sur les installations et ouvrages suivants, y compris leurs ouvrages connexes : / -ouvrages de production d'électricité à partir de l'énergie solaire photovoltaïque d'une puissance égale ou supérieure à 5 MW ; / (...) II.- Le cas échéant par dérogation aux dispositions spéciales applicables aux décisions mentionnées au I, le délai de recours contentieux contre ces décisions est de deux mois à compter du point de départ propre à chaque réglementation. Ce délai n'est pas prorogé par l'exercice d'un recours administratif. / (...) III.- Le tribunal administratif statue dans un délai de dix mois à compter de l'enregistrement de la requête. Si à l'issue de ce délai il ne s'est pas prononcé ou en cas d'appel, le litige est porté devant la cour administrative d'appel, qui statue dans un délai de dix mois. Si, à l'issue de ce délai, elle ne s'est pas prononcée ou en cas de pourvoi en cassation, le litige est porté devant le Conseil d'Etat. (...) ".

3. L'article R. 600-2 du code de l'urbanisme dispose que : " Le délai de recours contentieux à l'encontre (...) d'un permis de construire (...) court à l'égard des tiers à compter du premier jour d'une période continue de deux mois d'affichage sur le terrain des pièces mentionnées à l'article R. 424-15. ". Aux termes de l'article R. 424-15 du même code auquel il est ainsi renvoyé : " Mention du permis explicite ou tacite (...) doit être affichée sur le terrain, de manière visible de l'extérieur, par les soins de son bénéficiaire, dès la notification de l'arrêté ou dès la date à laquelle le permis tacite ou la décision de non-opposition à la déclaration préalable est acquis et pendant toute la durée du chantier. (...) ". L'article A. 424-15 du même code dispose que : " L'affichage sur le terrain du permis de construire (...) prévu par l'article R. 424-15, est assuré par les soins du bénéficiaire du permis (...) sur un panneau rectangulaire dont les dimensions sont supérieures à 80 centimètres. ". Les articles A. 424-16 et A. 424-17 de ce code précisent les mentions qui doivent être portées sur le panneau prévu à l'article R. 424-15 et notamment : " " Droit de recours : / " Le délai de recours contentieux est de deux mois à compter du premier jour d'une période continue de deux mois d'affichage sur le terrain du présent panneau (art. R. 600-2 du code de l'urbanisme). / " Tout recours administratif ou tout recours contentieux doit, à peine d'irrecevabilité, être notifié à l'auteur de la décision et au bénéficiaire du permis ou de la décision prise sur la déclaration préalable. Cette notification doit être adressée par lettre recommandée avec accusé de réception dans un délai de quinze jours francs à compter du dépôt du recours (art. R. 600-1 du code de l'urbanisme). " ". Enfin, aux termes de l'article A. 424-18 du même code : " Le panneau d'affichage doit être installé de telle sorte que les renseignements qu'il contient demeurent lisibles de la voie publique ou des espaces ouverts au public pendant toute la durée du chantier. ".

4. Il résulte de la combinaison de ces dispositions que l'affichage du permis de construire sur le terrain d'assiette de la construction autorisée doit être effectué de telle façon que les mentions qu'il comporte soient lisibles de la voie publique ou, lorsque le terrain n'est pas desservi par une voie publique, d'une voie privée ouverte à la circulation du public. Lorsque le terrain d'assiette n'est pas desservi par une telle voie et que l'affichage sur le terrain ne pourrait, dès lors, satisfaire à cette exigence, seul un affichage sur un panneau placé en bordure de la voie publique ou de la voie privée ouverte à la circulation du public la plus proche du terrain fait courir le délai de recours contentieux à l'égard des tiers autres que les voisins qui empruntent la voie desservant le terrain pour leurs besoins propres.

5. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier, en particulier du dossier de demande de permis de construire déposé par le GAEC Raujol Frères, que le projet autorisé par l'arrêté en litige consiste à réaliser un hangar de stockage d'une emprise au sol de 718,9 m² dont la toiture sera pourvue de panneaux photovoltaïques pour une puissance installée de 0,1 mégawatt crète (MWc). Est également prévue la réalisation de deux serres de production agricole ayant une emprise au sol respective de 37 617,3 m² et de 34 387,9 m², dont les toitures seront aussi pourvues de panneaux photovoltaïques pour des puissances installées de 3,8 MWc et 4,8 MWc. S'il est vrai que la puissance cumulée des panneaux photovoltaïques installés en toitures de ces trois constructions est supérieure au seuil de 5 MW mentionné par les dispositions précitées de l'article R. 311-6 du code de justice administrative, le bâtiment à usage de hangar ainsi que les deux serres de production agricole, qui développent une surface de plancher totale de 72 005 m² relevant de la destination d'exploitation agricole ou forestière, ne peuvent être regardés comme constituant un ouvrage de production d'électricité à partir de l'énergie solaire photovoltaïque d'une puissance égale ou supérieure à 5 MW ni comme des ouvrages connexes à un tel ouvrage au sens et pour l'application de ces dispositions qui prévoient notamment que le délai de recours contentieux ouvert pour contester une décision relative à un tel ouvrage n'est pas interrompu par un recours administratif.

6. En deuxième lieu, il ressort des pièces du dossier, et notamment des constats du commissaire de justice dressés à la demande du GAEC Raujol Frères les 5 avril, 10 mai et 6 juin 2023, qu'un panneau d'affichage a été apposé sans interruption pendant une période continue de deux mois sur le bas-côté de la route départementale n° 958. Il est vrai que ce panneau d'affichage n'a pas été positionné sur les parcelles cadastrées section YK nos 96, 100 et 101, qui forment le terrain d'assiette du projet, du fait qu'aucune d'entre-elles ne dispose d'un accès direct à la voie publique, mais aux abords de la parcelle cadastrée section YK n° 97 n'appartenant pas au pétitionnaire. Toutefois, il ressort également des pièces du dossier que cet emplacement n'a pas été de nature à empêcher les tiers intéressés de prendre connaissance des informations figurant sur le panneau visible et lisible depuis la voie publique, le panneau étant en outre positionné au droit d'une plate-forme en bordure de la route et couvrant à cet endroit le fossé situé de part et d'autre. Dès lors, en apposant ce panneau d'affichage à proximité immédiate de la parcelle cadastrée section YK n° 97, le pétitionnaire s'est assuré que l'emplacement en bordure de la voie publique ouverte à la circulation du public et bénéficiant d'un terre-plein créé par une buse de chantier enherbée permettait ainsi à ce panneau d'être visible et lisible en toute sécurité par les tiers intéressés. Dans ces conditions, l'affichage du permis de construire a été réalisé dans le respect des dispositions citées aux points 3 et 4 ci-dessus et le délai de recours contentieux à l'encontre de cette autorisation d'urbanisme a commencé à courir à compter du 5 avril 2023 pour expirer le 6 juin suivant à minuit.

7. En troisième et dernier lieu, il résulte de ce qui vient d'être exposé au point 5 ci-dessus que le projet autorisé par le permis de construire en litige n'entre pas dans le champ d'application des dispositions précitées de l'article R. 311-6 du code de justice administrative. Si le délai de recours contentieux pouvait ainsi être régulièrement prorogé par l'exercice d'un recours administratif, il ressort des pièces du dossier que le recours gracieux formé le 6 juin 2023 par M. B... et Mme D... n'a été reçu en mairie de Nègrepelisse que le 8 juin suivant, soit après l'expiration du délai de recours contentieux. Dans ces conditions, ce recours gracieux, bien que rejeté par une décision expresse du maire de Nègrepelisse du 28 juin 2023, n'a pu interrompre ce délai qui était expiré et la demande d'annulation du permis de construire attaqué, enregistrée au greffe du tribunal administratif de Toulouse le 31 août 2023, était tardive et, par suite, entachée d'une irrecevabilité manifeste ne pouvant être couverte en cours d'instance.

8. Il résulte de tout ce qui précède que Mme D... et M. B... ne sont pas fondés à se plaindre que, par l'ordonnance attaquée, la présidente de la 6ème chambre du tribunal administratif de Toulouse a rejeté leur demande comme irrecevable.

Sur les frais liés au litige :

9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Nègrepelisse et du GAEC Raujol Frères, qui n'ont pas, dans la présente instance, la qualité de parties perdantes, une somme quelconque au titre des frais exposés par les appelants et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge des appelants une somme à verser à la commune de Nègrepelisse et au GAEC Raujol Frères sur le même fondement.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de Mme D... et M. B... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par la commune de Nègrepelisse et le GAEC Raujol Frères sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... D... et M. C... B..., à la commune de Nègrepelisse et au groupement agricole d'exploitation en commun Raujol Frères.

Délibéré après l'audience du 15 mai 2025, où siégeaient :

- M. Chabert, président de chambre,

- M. Teulière, président assesseur,

- M. Jazeron, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 28 mai 2025.

Le président-rapporteur,

D. Chabert

Le président-assesseur,

T. Teulière La greffière,

N. Baali

La République mande et ordonne au préfet de Tarn-et-Garonne en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 24TL02275


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de TOULOUSE
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 24TL02275
Date de la décision : 28/05/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. Chabert
Rapporteur ?: M. Denis Chabert
Rapporteur public ?: M. Diard
Avocat(s) : CGR AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 01/06/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-05-28;24tl02275 ?
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