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20/05/2025 | FRANCE | N°23TL01241

France | France, Cour administrative d'appel de TOULOUSE, 2ème chambre, 20 mai 2025, 23TL01241


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



Sous le n°2105890, M. C... A... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'enjoindre à la commune de Mireval-Lauragais de mettre à jour son dossier administratif individuel et de le lui transmettre ou, à tout le moins, son sommaire exhaustif et de prescrire à la commune les mesures d'exécution du jugement à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard à l'issue d'un délai de trente jours à compter de la notification du jugement et jusqu'à la date ré

elle et effective de son exécution.



Sous le n°2201155, M. C... A... a demand...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Sous le n°2105890, M. C... A... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'enjoindre à la commune de Mireval-Lauragais de mettre à jour son dossier administratif individuel et de le lui transmettre ou, à tout le moins, son sommaire exhaustif et de prescrire à la commune les mesures d'exécution du jugement à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard à l'issue d'un délai de trente jours à compter de la notification du jugement et jusqu'à la date réelle et effective de son exécution.

Sous le n°2201155, M. C... A... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'ordonner le paiement des indemnités légales inhérentes à l'arrêté du 13 juillet 2012 par lequel le maire de Mireval-Lauragais l'a réintégré dans son emploi d'adjoint technique de 2ème classe à temps complet à compter du 27 juillet 2008, avec effet rétroactif à compter de cette date, pour un montant de 202 120 euros et la mise à jour de son compte individuel sur la base de ces indemnités jusqu'à sa retraite et de prescrire les mesures d'exécution du jugement à intervenir, sous astreinte.

Par un jugement n°2105890, 2201155 du 28 mars 2023, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté ses demandes.

Procédure devant la cour :

Par une requête, un mémoire complémentaire et un mémoire en production de pièces, enregistrés les 25 mai 2023, 21 août 2024 et 5 septembre 2024, M. C... A..., représenté par Me Amalric-Zermati, demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures :

1°) de réformer ou d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Montpellier du 28 mars 2023 ;

2°) d'enjoindre à la commune de Mireval-Lauragais de lui verser la somme de 249 600 euros au titre de la reconstitution de sa carrière ou, à défaut, de procéder à la reconstitution de sa carrière, sous astreinte de 100 euros par jour de retard à l'expiration d'un délai de trente jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Mireval-Lauragais la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de la condamner aux entiers dépens.

Il soutient que :

- la fin de non-recevoir opposée par la commune tirée du défaut de liaison du contentieux doit être écartée dès lors que son courriel du 29 juillet 2019 constitue une demande indemnitaire préalable ;

- c'est à tort que les premiers juges ont considéré que le refus de réintégration dont il a fait l'objet était fondé ; sa réintégration n'était pas soumise à un avis du comité médical départemental, de sorte qu'il ne saurait lui être reproché de ne pas s'être présenté devant ce comité ; par un arrêté du 6 février 2009, la commune de Mireval-Lauragais l'a réintégré juridiquement dans ses effectifs, malgré l'absence de production d'un certificat médical et cet arrêté du 6 février 2009 annule l'arrêté du 28 octobre 2008 portant radiation des cadres ; par un courrier du 8 mars 2010, le comité médical supérieur l'a informé que son dossier avait été instruit lors de sa séance du 23 juin 2009 ; le docteur B..., psychiatre, a considéré le 28 décembre 2012 qu'il était apte à reprendre une activité professionnelle, hors de la commune de Mireval-Lauragais et la commune n'a pas tenu compte de ce certificat médical, dès lors qu'elle n'a pris aucune mesure pour qu'il puisse être réintégré ou pour le mettre à disposition du centre de gestion ; par un avis du 23 août 2005, le comité médical départemental avait déjà considéré qu'il était apte à reprendre ses fonctions à temps complet à compter du 27 octobre 2005 dans le cadre d'un détachement sur un autre lieu de travail et dans son avis du 16 octobre 2007, il a considéré qu'il n'était pas inapte de façon définitive et absolue à l'exercice de ses fonctions ; ainsi que l'a retenu la cour administrative d'appel de Marseille dans son arrêt du 24 février 2012, il n'était pas tenu de répondre aux convocations du comité médical départemental postérieurement à la saisine par la commune du comité médical supérieur ;

- par un arrêté du maire de Mireval-Lauragais du 13 juillet 2012, il a été réintégré juridiquement dans les effectifs communaux à compter du 27 juillet 2008 ;

- il y a lieu d'enjoindre à la commune de lui verser les traitements dont il a été privé afin de tirer les conséquences pécuniaires de sa réintégration rétroactive depuis le 27 juillet 2008, telle que prévue par l'arrêté du 13 juillet 2012, pour un montant de 249 600 euros ;

- il demande à ce qu'il soit enjoint à la commune de Mireval-Lauragais de modifier son dossier administratif individuel pour tenir compte de l'annulation des arrêtés des 23 août 2005 et 17 juin 2010 l'ayant placé en disponibilité d'office, de l'illégalité et de l'annulation de la décision du 23 juillet 2008 portant refus de réintégration et suspension de son traitement et de l'arrêté du 28 octobre 2008 portant radiation des cadres pour abandon de poste, ainsi que de la circonstance selon laquelle l'arrêté du 28 octobre 2008 et la décision du 22 mars 2012 sont dépourvus d'effet en ce qu'ils ont été suppléés par l'arrêté du 13 juillet 2012 par lequel il a été réintégré dans les effectifs communaux ; il doit donc être replacé dans sa situation statutaire à la date du 26 juillet 2005, c'est-à-dire à la date à laquelle son congé de maladie ordinaire a pris fin ; il demande également à ce qu'il soit enjoint à la commune de Mireval-Lauragais de mettre à jour son dossier administratif sur la base des indemnités relatives à sa réintégration depuis le 27 juillet 2008, et ce jusqu'à sa mise à la retraite, et de lui communiquer son dossier.

Par un mémoire en défense, enregistré le 12 juillet 2024, la commune de Mireval-Lauragais, représentée par le cabinet d'avocats Territoires Avocats, agissant par Me d'Albenas, conclut à la confirmation du jugement du tribunal administratif de Montpellier du 28 mars 2023, au rejet des demandes de M. A... et à ce que soit mise à sa charge la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- les conclusions indemnitaires présentées par M. A... sont irrecevables dès lors que par un courrier du 29 juillet 2019, il avait déjà sollicité le règlement des sommes qu'il estimait lui être dues au titre des traitements qu'il aurait selon lui dû percevoir en se fondant sur l'arrêté du 13 juillet 2012 portant réintégration à compter du 27 juillet 2008 ; cette demande indemnitaire préalable ayant été rejetée et ce refus n'ayant pas été contesté par l'intéressé, les conclusions indemnitaires présentées sur le même fondement sont irrecevables ;

- les conclusions indemnitaires sont irrecevables dès lors que le contentieux n'est pas lié ;

- M. A... n'est plus fondé à se prévaloir de l'arrêté du 13 juillet 2012 pour solliciter le versement d'une indemnité au titre des traitements qui lui seraient dus et la mise à jour rétroactive de son compte individuel de retraite, dès lors que cet arrêté du 13 juillet 2012 a été pris en exécution de l'arrêt de la cour administrative de Marseille du 24 février 2012, qui a été annulé par le Conseil d'Etat le 26 mars 2014, et que M. A... a refusé de réintégrer ses fonctions au sein de la commune.

Par une ordonnance du 14 janvier 2025, la clôture d'instruction a été fixée au 13 février 2025 à 12 heures.

M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 2 août 2023.

Par un courrier du 29 avril 2025, les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office tiré de l'irrecevabilité des conclusions de M. A... présentées devant le tribunal administratif de Montpellier tendant à ce qu'il soit enjoint à la commune de Mireval-Lauragais de modifier et de lui communiquer son dossier administratif individuel, lesquelles constituent des conclusions en injonction présentées à titre principal.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n°84-53 du 26 janvier 1984 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Hélène Bentolila, conseillère,

- les conclusions de Mme Michèle Torelli, rapporteure publique,

- les observations de Me Amalric-Zermati, représentant M. A....

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., adjoint technique territorial employé par la commune de Mireval-Lauragais (Aude), a bénéficié d'un congé de maladie ordinaire d'un an à compter du 26 juillet 2004. Dans le cadre de la prolongation de ce congé au-delà de six mois, par un avis du 23 août 2005, le comité médical départemental a relevé que l'intéressé était apte à reprendre ses fonctions à temps complet à compter du 27 octobre 2005 " dans le cadre d'un détachement sur un autre lieu de travail ". A l'expiration de ses droits à congés de maladie, il a été placé en position de disponibilité d'office du 27 juillet au 26 octobre 2005, puis du 27 octobre 2005 au 26 avril 2006 par deux arrêtés du maire de Mireval-Lauragais des 31 août 2005 et 2 décembre 2005. L'arrêté du 31 août 2005 a été annulé par un jugement du tribunal administratif de Montpellier n°0903286 du 21 mai 2010 en raison d'un vice de forme et l'arrêté du 8 juin 2010 par lequel le maire de Mireval-Lauragais a de nouveau placé M. A... en disponibilité d'office du 27 juillet au 26 octobre 2005 a été annulé par un jugement n°1003306 rendu par le même tribunal le 5 avril 2011, lequel a retenu que cet arrêté était entaché d'un vice de procédure. Le 17 avril 2007, le comité médical départemental a émis un avis favorable à la prolongation de sa disponibilité d'office pour raison de santé du 27 avril au 26 octobre 2007, en précisant qu'il était inapte de façon définitive et absolue à l'exercice de ses fonctions et qu'il y avait lieu de procéder à sa mise à la retraite pour invalidité. Puis, le 16 octobre 2007, le comité médical départemental a émis un nouvel avis favorable à la prolongation de sa disponibilité d'office pour raison de santé, cette fois pour la période comprise entre le 27 octobre 2007 et le 26 juillet 2008, en mentionnant que M. A... n'était pas inapte de façon définitive et absolue à l'exercice de ses fonctions, de sorte que sa mise à la retraite pour invalidité était injustifiée. Le 10 décembre 2007, le maire de Mireval-Lauragais a saisi le comité médical supérieur d'un recours contre l'avis du comité médical départemental du 16 octobre 2007. Avant l'expiration de la période de disponibilité d'office prévue le 27 juillet 2008, le maire a demandé à M. A... de répondre aux convocations du comité médical supérieur, auxquelles il n'avait pas déféré à deux reprises. Puis, par un courrier du 23 juillet 2008, le maire l'a informé qu'à défaut de s'être rendu à l'expertise médicale auprès d'un médecin agréé, le comité médical supérieur n'avait pu se prononcer quant à sa réintégration et a par conséquent refusé de le réintégrer dans ses fonctions à compter du 28 juillet 2008, jusqu'à ce qu'il soit en possession d'un certificat médical concernant son aptitude à la reprise, et a suspendu son traitement à compter du 28 juillet 2008. Par un nouveau courrier du 1er octobre 2008, le maire a mis en demeure M. A... de produire un certificat médical établi par un médecin agréé au plus tard le 15 octobre 2008, faute de quoi il serait considéré comme étant en abandon de poste. L'intéressé n'ayant pas répondu à cette mise en demeure, par un arrêté du 28 octobre 2008, le maire de Mireval-Lauragais a prononcé sa radiation des cadres pour abandon de poste. Par une ordonnance du 6 février 2009, le juge des référés du tribunal administratif de Montpellier a suspendu l'exécution de cet arrêté portant radiation des cadres pour abandon de poste et a enjoint à la commune de réintégrer provisoirement M. A.... En exécution de cette ordonnance, par un arrêté du 26 février 2009, le maire de Mireval-Lauragais a réintégré M. A... dans les effectifs communaux à compter du 6 février 2009. M. A... a également demandé l'annulation des décisions des 23 juillet, 1er octobre et 28 octobre 2008 et la condamnation de la commune à lui verser les indemnités correspondant aux traitements dont il s'estimait privé et par un jugement n°0900044-0902940-0903236 du 21 mai 2010, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté ses demandes. Puis, par un arrêt n°10MA02479-10MA02480-10MA02481 du 24 février 2012, la cour administrative d'appel de Marseille a notamment annulé les décisions du maire de Mireval-Lauragais des 23 juillet et 28 octobre 2008 portant refus de réintégration, suspension de rémunération et radiation des cadres pour abandon de poste et a enjoint à la commune de Mireval-Lauragais de réintégrer juridiquement M. A... dans les effectifs communaux à compter du 27 juillet 2008. En exécution de cet arrêt, par un arrêté du 13 juillet 2012, le maire de Mireval-Lauragais a réintégré l'intéressé dans son emploi d'adjoint technique de 2ème classe à temps complet à compter du 27 juillet 2008, au 8ème échelon de son grade et avec une ancienneté conservée de deux ans, deux mois, et quatre jours. M. A... a demandé l'annulation de cet arrêté du 13 juillet 2012 et par un jugement n°1202174, 1203950 du 31 décembre 2013, le tribunal administratif de Montpellier a notamment rejeté cette demande d'annulation. Il a alors relevé appel de ce jugement et par un arrêt n°14MA01159 du 20 septembre 2016, la cour administrative d'appel de Marseille a notamment donné acte du désistement de ses conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté du 13 juillet 2012 l'ayant réintégré dans son emploi à compter du 27 juillet 2008. Puis, par une décision n° 358824, 358861 du 26 mars 2014, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux, a annulé l'arrêt de la cour administrative d'appel de Marseille n°10MA02479-10MA02480-10MA02481 du 24 février 2012 et lui a renvoyé l'affaire. Statuant dans le cadre de ce renvoi, par un arrêt n° 14MA01632 du 20 septembre 2016, la cour administrative d'appel de Marseille a rejeté les demandes d'annulation présentées par M. A... devant le tribunal administratif de Montpellier. Par un jugement n°1404558 du 19 février 2016, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté comme irrecevables les conclusions indemnitaires et à fin d'injonction présentées par M. A... sur le fondement de la carence de la commune de Mireval-Lauragais dans la gestion de son recours devant le comité médical supérieur. Sur appel de M. A..., ce jugement a été confirmé par un arrêt de la cour administrative d'appel de Marseille n° 16MA01553 en date du 10 juillet 2018.

2. Par ailleurs, M. A... a demandé à la commune de Mireval-Lauragais de lui communiquer la copie intégrale de son dossier administratif et médical et par un avis n°20140503 du 13 mars 2014, la commission d'accès aux documents administratifs a émis un avis favorable à la communication directe de ce dossier. Estimant que le dossier transmis par la commune le 1er avril 2014 n'était pas complet, il a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'enjoindre à cette dernière de lui communiquer les pièces manquantes, sous astreinte journalière. Par un jugement n°1401832 du 19 mai 2015, le tribunal administratif de Montpellier a déclaré sans objet la demande de communication, d'une part des pièces déjà transmises à M. A..., d'autre part, d'une réponse, inexistante, du comité médical supérieur au courrier de l'avocat de la commune du 5 juillet 2012 et a annulé la décision de la commune refusant la communication des pièces que M. A... a énumérées dans son mémoire complémentaire du 1er août 2014, en enjoignant à la commune de Mireval-Lauragais de lui transmettre les pièces mentionnées au point 5 du jugement, sous réserve de leur existence, dans un délai de trois mois à compter de la notification du jugement. Le pourvoi qu'a formé la commune de Mireval-Lauragais à l'encontre de ce jugement a été rejeté par une décision du Conseil d'Etat statuant au contentieux n°393469 en date du 4 mai 2016. Puis, par un avis n°20165658 du 12 janvier 2017, la commission d'accès aux documents administratifs a émis un avis favorable à la communication à M. A..., sous réserve de l'existence de ces documents, de la demande de mise en disponibilité pour convenances personnelles qu'il avait formée, de la lettre de saisine pour avis de la commission administrative paritaire, de l'avis de cette commission, de l'arrêté de mise en disponibilité pour la période du 26 juillet 2005 au 27 juillet 2008 et de la lettre de notification de cet arrêté, de la lettre de saisine pour avis de la commission administrative paritaire au sujet de sa réintégration au terme de la période de disponibilité pour convenances personnelles, de l'avis émis par cette commission, de la lettre de saisine pour avis du comité médical départemental à fin de vérification de son aptitude à la reprise et de la convocation de cette instance ainsi que son avis. Par un courrier du 11 mai 2017, le centre de gestion de la fonction publique territoriale de l'Aude a informé M. A... que la commune de Mireval-Lauragais ne l'avait pas saisi d'une demande de mise en disponibilité pour convenances personnelles et qu'il n'avait été placé en disponibilité d'office qu'à la suite de l'épuisement de ses droits à congés maladie. M. A... a ensuite saisi le tribunal administratif de Montpellier qui, par un jugement n°1702700 du 16 octobre 2018, a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision par laquelle la commune de Mireval-Lauragais avait implicitement refusé de lui communiquer un copie de son courrier de demande de mise en disponibilité pour convenances personnelles et des documents relatifs à l'instruction de cette demande, après avoir considéré qu'il ne ressortait pas des pièces du dossier qu'une telle demande existerait, ni même que l'intéressé avait été placé dans cette position.

3. Le 29 juillet 2019, M. A... a adressé à la commune de Mireval-Lauragais et au centre de gestion de la fonction publique territoriale de l'Aude une demande indemnitaire tendant au versement des traitements lui étant dus, selon lui, depuis le 27 juillet 2008, date à compter de laquelle il a été réintégré juridiquement dans son emploi en vertu de l'arrêté du maire de Mireval-Lauragais du 13 juillet 2012. Cette demande a été rejetée par une décision du maire du 20 septembre 2019. Par un nouveau courrier du 31 décembre 2021, réceptionné le 7 janvier 2022, M. A... a adressé une nouvelle demande indemnitaire préalable à la commune de Mireval-Lauragais en se prévalant de l'arrêté du 13 juillet 2012 l'ayant réintégré juridiquement à compter du 27 juillet 2008. Cette demande, par laquelle l'intéressé a sollicité le versement de la somme de 201 150 euros correspondant aux traitements non versés depuis cette date, a été implicitement rejetée. Par une requête n°2201155, M. A... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'ordonner à la commune de lui verser les indemnités légales afférentes à l'arrêté du 13 juillet 2012 le réintégrant dans son emploi à compter du 27 juillet 2008, pour un montant de 202 120 euros et de procéder à la mise à jour de son compte individuel sur la base de ces indemnités jusqu'à sa retraite. Par une seconde requête enregistrée sous le n°2105890, il a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'enjoindre à la commune de Mireval-Lauragais de mettre à jour son dossier administratif individuel et de le lui transmettre ou, à tout le moins, son sommaire exhaustif. M. A... relève appel du jugement n°2105890, 2201155 du 28 mars 2023 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté ses demandes.

Sur les conclusions indemnitaires :

En ce qui concerne la responsabilité :

4. Si l'annulation, par une décision juridictionnelle devenue définitive, d'une annulation, assortie le cas échéant d'une injonction faite à l'administration, n'a pas pour effet par elle-même de faire disparaître la décision de l'administration prise en exécution de la première annulation, elle ouvre la faculté à l'administration de retirer ou d'abroger cette décision, alors même que celle-ci serait créatrice de droits.

5. De plus, en cas d'annulation, par une décision du juge de cassation, d'un arrêt rendu par le juge d'appel ayant prononcé l'annulation de la décision portant radiation des cadres pour abandon de poste d'un agent public, et sous réserve que les motifs de cette décision juridictionnelle ne fassent pas par eux-mêmes obstacle à une nouvelle décision de radiation des cadres pour abandon de poste, l'autorité compétente ne peut retirer la décision de réintégration prise en exécution de l'arrêt du juge d'appel que dans un délai raisonnable de quatre mois à compter de la notification à l'administration de la décision rendue en cassation. Passé ce délai, lorsque le juge de cassation renvoie l'affaire devant le juge d'appel et que celui-ci rejette la demande de l'agent tendant à l'annulation de la décision l'ayant radié des cadres pour abandon de poste, l'autorité compétente dispose à nouveau de la faculté de retirer la décision de réintégration de l'agent dans un délai raisonnable de quatre mois à compter de la réception de l'arrêt rendu par le juge d'appel auquel l'affaire avait été renvoyée. Dans tous les cas, elle doit, avant de procéder au retrait, inviter l'agent à présenter ses observations.

6. Il résulte de l'instruction que, par un arrêté du 28 octobre 2008, le maire de Mireval-Lauragais a procédé à la radiation des cadres pour abandon de poste de M. A..., après l'avoir mis en demeure de produire un certificat médical établi par un médecin agréé en vue de la reprise de l'exercice de ses fonctions à l'issue d'une période de congé de maladie ordinaire, puis de disponibilité d'office pour raison de santé. Saisi par M. A..., par une ordonnance du 6 février 2009, le juge des référés du tribunal administratif de Montpellier a suspendu l'exécution de cet arrêté et a enjoint à la commune de réintégrer provisoirement le fonctionnaire dans ses effectifs. En exécution de cette ordonnance, par un arrêté du 26 février 2009, le maire de Mireval-Lauragais l'a réintégré dans les effectifs communaux à compter du 6 février 2009, à titre provisoire. Statuant au fond, par un jugement n°0900044-0902940-0903236 du 21 mai 2010, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté la demande de M. A... tendant notamment à l'annulation de l'arrêté du 28 octobre 2008. Puis, par un arrêt n°10MA02479-10MA02480-10MA02481 du 24 février 2012, la cour administrative d'appel de Marseille a notamment annulé cet arrêté du 28 octobre 2008 portant radiation des cadres pour abandon de poste et a enjoint à la commune de Mireval-Lauragais de réintégrer juridiquement M. A... dans les effectifs communaux à compter du 27 juillet 2008. En exécution de cet arrêt, par un arrêté du 13 juillet 2012, le maire de Mireval-Lauragais a réintégré l'intéressé dans son emploi d'adjoint technique de 2ème classe à temps complet à compter du 27 juillet 2008, au 8ème échelon de son grade et avec une ancienneté conservée de deux ans, deux mois de quatre jours.

7. Ainsi que le fait valoir la commune, l'arrêt de la cour administrative d'appel de Marseille du 24 février 2012 a ensuite été annulé par le Conseil d'Etat, statuant au contentieux, dans sa décision n° 358824, 358861 du 26 mars 2014, lequel a renvoyé l'affaire à cette dernière. Statuant dans le cadre de ce renvoi, par un arrêt n° 14MA01632 du 20 septembre 2016, la cour administrative d'appel de Marseille a rejeté les demandes d'annulation présentées par M. A... devant le tribunal administratif de Montpellier. Toutefois, l'annulation de l'arrêt de la cour administrative d'appel de Marseille n°10MA02479-10MA02480-10MA02481 en date du 24 février 2012, n'a pas eu pour effet, par elle-même, de faire disparaître de l'ordonnancement juridique l'arrêté de réintégration du 13 juillet 2012 pris pour son exécution.

8. En application de ce qui a été énoncé au point 5 du présent arrêt, la commune disposait en revanche de la faculté d'abroger cet arrêté du 13 juillet 2012, ou de le retirer dans un délai raisonnable de quatre mois à compter de la réception de la décision du Conseil d'Etat n° 358824, 358861 du 26 mars 2014, puis d'un nouveau délai raisonnable de quatre mois à compter de la réception de l'arrêt de la cour administrative d'appel de Marseille n° 14MA01632 du 20 septembre 2016. Toutefois, il ne résulte pas de l'instruction que la commune de Mireval-Lauragais aurait procédé à l'abrogation ou au retrait de cet arrêté du 13 juillet 2012 par lequel M. A... a été réintégré dans son emploi à compter du 27 juillet 2008. Dès lors qu'il résulte de l'instruction que l'intéressé n'a, par la suite, pas été effectivement réintégré dans son emploi ou placé dans une position régulière et qu'il n'a perçu aucune rémunération, en le maintenant irrégulièrement hors du service à compter du 27 juillet 2008, la commune de Mireval-Lauragais a commis une faute de nature à engager sa responsabilité.

En ce qui concerne les préjudices :

9. Lorsque la réintégration d'un agent public radié des cadres pour abandon de poste a été prise en exécution d'une décision de justice, l'intéressé a droit de percevoir la rémunération correspondant à ses fonctions. Il ne peut en aller différemment qu'en cas d'absence de service fait, lorsque cette absence résulte du refus de l'agent d'effectuer les missions qui lui sont alors confiées ou lorsqu'une mesure ordonnée par l'autorité judiciaire fait obstacle à l'exercice par l'intéressé de toute fonction au sein des services de son administration. Les sommes ainsi versées à titre de rémunération ne peuvent, sauf absence de service fait dans les conditions précédemment énoncées, faire l'objet d'une répétition.

10. En l'espèce, il est constant que depuis l'arrêté du maire de Mireval-Lauragais ayant réintégré M. A... dans son emploi d'adjoint technique de 2ème classe à temps complet à compter du 27 juillet 2008, au 8ème échelon de son grade et avec une ancienneté conservée de deux ans, deux mois et quatre jours, l'intéressé n'a pas repris l'exercice effectif de ses fonctions et n'a accompli aucun service. De plus, il résulte de l'instruction que M. A... a été convoqué par le centre de gestion de la fonction publique territoriale de l'Aude à un examen médical devant se tenir le 1er octobre 2012 en vue de la reprise de l'exercice de ses fonctions, auquel il n'a pas déféré. L'intéressé a en revanche adressé à la commune un certificat médical établi le 28 décembre 2012 par son psychiatre, selon lequel son état psychique était compatible avec la reprise d'une activité professionnelle " sous une autre subordination hiérarchique en dehors de celle de la commune de Mireval-Lauragais ". A la suite de la transmission de ce certificat médical, par un courrier du 11 janvier 2013, le maire de la commune a mis en demeure l'intéressé de réintégrer " physiquement " les effectifs de la commune dans les plus brefs délais et, le cas échéant, qu'il lui indique l'administration d'accueil auprès de laquelle il souhaiterait être détaché. M. A... n'établit ni même n'allègue s'être conformé à cette demande ou avoir mis à même la commune de procéder aux démarches nécessaires à son détachement. Enfin, il ne résulte pas de l'instruction qu'il se serait présenté à la rencontre organisée le 2 octobre 2013, à laquelle il a été convié par un courrier du 12 septembre 2013 et à laquelle devaient notamment participer son avocate ainsi que le président, la directrice et un médecin du centre de gestion de la fonction publique territoriale de l'Aude. Dans ces conditions, l'absence de service fait de M. A... doit être regardée comme lui étant imputable, de sorte qu'il n'est pas fondé à demander la condamnation de la commune à lui verser une indemnité égale aux traitements qu'il aurait selon lui dû percevoir depuis le 27 juillet 2008. Par suite, ses conclusions tendant à ce qu'il soit enjoint à la commune de procéder à la reconstitution de sa carrière ne peuvent en tout état de cause qu'être rejetées.

Sur les conclusions de M. A... tendant à ce qu'il soit enjoint à la commune de Mireval-Lauragais de modifier son dossier administratif individuel et de le lui communiquer :

11. En dehors des cas expressément prévus par des dispositions législatives particulières du code de justice administrative, inapplicables en l'espèce, il n'appartient pas au juge administratif d'adresser des injonctions à l'administration. Les conclusions de M. A..., présentées devant le tribunal administratif de Montpellier dans l'instance n°2105890 et réitérées en appel, tendant à ce qu'il soit enjoint à la commune de Mireval-Lauragais de modifier son dossier administratif individuel et de le lui communiquer, n'entrent pas, notamment, dans les prévisions de l'article L. 911-1 du code de justice administrative en l'absence de conclusions à fin d'annulation présentées par l'intéressé à l'encontre d'une décision de refus de la commune de procéder à la modification de son dossier et à sa communication. Ces conclusions à fin d'injonction présentées à titre principal sont, par suite, irrecevables et ne peuvent qu'être rejetées.

12. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il besoin d'examiner les fins de non-recevoir opposées par la commune de Mireval-Lauragais, que M. A... n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté ses demandes.

Sur les frais liés au litige :

13. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de la commune de Mireval-Lauragais, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement des sommes que M. A... demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Par ailleurs, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions de la commune de Mireval-Lauragais relatives aux frais liés au litige.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la commune de Mireval-Lauragais présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A..., à Me Amalric-Zermati et à la commune de Mireval-Lauragais.

Délibéré après l'audience du 6 mai 2025, à laquelle siégeaient :

Mme Geslan-Demaret, présidente de chambre,

Mme Dumez-Fauchille, première conseillère,

Mme Bentolila, conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 20 mai 2025.

La rapporteure,

H. Bentolila

La présidente,

A. Geslan-Demaret

La greffière,

M-M. Maillat

La République mande et ordonne au préfet de l' Aude en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N°23TL01241


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de TOULOUSE
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 23TL01241
Date de la décision : 20/05/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Fonctionnaires et agents publics - Positions.

Fonctionnaires et agents publics - Contentieux de la fonction publique.


Composition du Tribunal
Président : Mme Geslan-Demaret
Rapporteur ?: Mme Helene Bentolila
Rapporteur public ?: Mme Torelli
Avocat(s) : AMALRIC-ZERMATI

Origine de la décision
Date de l'import : 25/05/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-05-20;23tl01241 ?
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