Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
L'association La Vigie Citoyenne Grand-Mottoise et Mme A... B... ont demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 9 décembre 2021 par lequel le préfet de l'Hérault a approuvé la modification du plan de prévention des risques d'inondation de la commune de La Grande-Motte.
Par un jugement n° 2200630 du 13 juin 2023, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté leur demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 28 juillet 2023, l'association La Vigie Citoyenne Grand-Mottoise, représentée par la SELARL Coupé, Peyronne et Associés, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler l'arrêté du 9 décembre 2021 du préfet de l'Hérault ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le jugement attaqué est irrégulier dès lors que les premiers juges ont omis de statuer sur plusieurs branches du moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation au regard de l'article L. 562-1 du code de l'environnement ;
- l'arrêté attaqué a été signé par une autorité incompétente en raison du caractère trop général de l'arrêté portant délégation de signature au bénéfice de M. D... ;
- l'évaluation environnementale est insuffisante en méconnaissance des articles L. 122-6 et R. 122-20 du code de l'environnement en ce qui concerne l'articulation avec les autres documents de planification, l'analyse de l'état initial, l'analyse des solutions de substitution et l'analyse des incidences, l'analyse de la séquence éviter-réduire-compenser et la description de la méthode utilisée ;
- la modification du plan de prévention du risque inondation n'est pas compatible avec les dispositions des articles L. 121-6 et L. 121-7 du code de l'urbanisme relatives à la protection du littoral;
- l'arrêté attaqué méconnaît l'article L. 562-1 du code de l'environnement et est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation dès lors qu'il est de nature à accroître le risque relatif à la submersion marine au vu de la montée du niveau de la mer à échéance 100 ans, le risque de remontée de nappes et le risque de ruissellement pluvial ; de plus, il n'a pas pris en compte les surcotes pour établir les aléas et n'a pas pris en compte l'incidence des futures constructions sur l'ensablement du port ; enfin, il n'a pas pris en compte l'aléa tsunami ;
- l'arrêté attaqué est incompatible avec le schéma directeur d'aménagement et de gestion des eaux Rhône-Méditerranée ;
- le plan de prévention du risque inondation aurait dû faire l'objet d'une procédure de révision sur le fondement l'article R. 562-10 du code de l'environnement et non être simplement modifié en application de l'article R. 562-10-1 de ce même code.
Par un mémoire en défense, enregistré le 12 novembre 2024, la ministre de la transition écologique, de l'énergie, du climat et de la prévention des risques conclut au rejet de la requête.
Elle fait valoir qu'aucun des moyens soulevés par l'association appelante n'est fondé.
Par un mémoire en défense, enregistré le 13 novembre 2024, la commune de La Grande-Motte, représentée par la SCP CGCB et associés, conclut au rejet de la requête, à titre subsidiaire, à ce qu'il soit sursis à statuer en vue de la régularisation de l'acte attaqué en application de l'article L. 191-1 du code de l'environnement et à ce qu'il soit mis à la charge de la requérante la somme de 5 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que :
- à titre principal, la requête est irrecevable dès lors qu'elle est insuffisamment motivée ;
- à titre subsidiaire, aucun des moyens soulevés par l'association appelante n'est fondé ou opérant ;
- les éventuels vices sont régularisables en application de l'article L. 191-1 du code de l'environnement.
Par ordonnance du 13 novembre 2024, la clôture d'instruction a été fixée au 4 décembre 2024.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'environnement ;
- le code de l'urbanisme ;
- le décret n° 2019-715 du 5 juillet 2019 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Lasserre, première conseillère,
- les conclusions de M. Diard, rapporteur public,
- les observations de M. C..., représentant l'association La Vigie Citoyenne Grand-Mottoise,
- et les observations de Me Gilliocq, représentant la commune de La Grande-Motte.
Considérant ce qui suit :
1. Par un arrêté du 16 avril 2014, le préfet de l'Hérault a approuvé le plan de prévention des risques naturels d'inondation et littoraux (submersion marine) de la commune de La Grande-Motte. En vue de la réalisation du projet dénommé " Port-Ville ", le préfet a prescrit, par un arrêté du 4 août 2020, la modification du règlement applicable à la zone rouge de déferlement (Rd) de ce plan. Par un arrêté du 9 décembre 2021, le préfet de l'Hérault a approuvé cette modification. Par la présente requête, l'association La Vigie Citoyenne Grand-Mottoise relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 9 décembre 2021.
Sur la régularité du jugement :
2. Il résulte des motifs mêmes du jugement attaqué, en son point 17, que le tribunal administratif de Montpellier, qui n'était pas tenu de répondre à tous les arguments des parties, a expressément répondu au moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation au regard de l'article L. 562-1 du code de l'environnement. Par suite, le moyen tiré de ce que le jugement serait entaché d'irrégularité à défaut d'avoir statué sur certains des arguments soulevés à l'appui de ce moyen doit être écarté.
Sur les conclusions en annulation :
En ce qui concerne la compétence du signataire de l'arrêté attaqué :
3. L'arrêté attaqué a été signé par M. Thierry Laurent, secrétaire général de la préfecture de l'Hérault. Par un arrêté n° 2020-01-1302 du 3 novembre 2020, régulièrement publié au recueil des actes administratifs de la préfecture le même jour, le préfet a donné délégation à M. D..., à l'effet de signer tous actes, arrêtés, décisions et circulaires relevant des attributions de l'Etat dans le département de l'Hérault à l'exception de certaines matières au nombre desquelles ne figure pas la décision attaquée. Par suite, et dès lors que cette délégation de signature ne présente pas un caractère trop général, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'acte attaqué doit donc être écarté.
En ce qui concerne la procédure applicable :
4. Aux termes de l'article L. 562-4-1 du code de l'environnement, " (...) II.- Le plan de prévention des risques naturels prévisibles peut également être modifié. La procédure de modification est utilisée à condition que la modification envisagée ne porte pas atteinte à l'économie générale du plan ou à condition que la modification envisagée consiste à abroger les dispositions relatives au recul du trait de côte de ce plan dans une ou plusieurs communes à la suite de l'entrée en vigueur d'un document d'urbanisme intégrant les dispositions relatives au recul du trait de côte en application du paragraphe 3 de la sous-section 3 de la section 1 du chapitre Ier du titre II du livre Ier du code de l'urbanisme. Le dernier alinéa de l'article L. 562-3 du présent code n'est pas applicable à la modification. Aux lieu et place de l'enquête publique, le projet de modification et l'exposé de ses motifs sont portés à la connaissance du public en vue de permettre à ce dernier de formuler des observations pendant le délai d'un mois précédant l'approbation par le préfet de la modification. ". Aux termes de l'article R. 562-10-1 du même code : " Le plan de prévention des risques naturels prévisibles peut être modifié à condition que la modification envisagée ne porte pas atteinte à l'économie générale du plan. La procédure de modification peut notamment être utilisée pour : / a) Rectifier une erreur matérielle ; / b) Modifier un élément mineur du règlement ou de la note de présentation ; / c) Modifier les documents graphiques délimitant les zones mentionnées aux 1° et 2° du II de l'article L. 562-1, pour prendre en compte un changement dans les circonstances de fait ".
5. Il ressort des termes de l'arrêté attaqué que ce dernier modifie le règlement applicable à la zone rouge de déferlement Rd et que, s'il permet la réalisation de travaux et aménagements dans cette zone, il les limite à ceux liés à une recomposition et/ou une extension du port existant sous réserve de ne pas créer de logement, de ne pas créer d'établissement à caractère stratégique ou vulnérable, et sous réserve qu'ils contribuent seulement à l'activité portuaire ou nautique avec des surfaces de planchers calées sur des cotes précisément définies et à condition que les aménagements n'aggravent pas les aléas littoraux susceptibles d'impacter les secteurs à enjeux forts urbanisés et que les constructions nouvelles ne soient pas exposées à des aléas forts. Dans ces conditions, et alors qu'aucune modification n'est apportée au règlement de la zone de déferlement concernant les autres occupations du sol, ni au règlement des autres zones, ni même au zonage du plan de prévention des risques inondation et dès lors que cette modification n'a pas vocation à accroître le risque de déferlement, cette modification ne porte pas atteinte à l'économie générale du plan et doit être regardée comme portant sur un élément mineur du règlement du plan au sens des dispositions du c) de l'article R. 562-10-1 du code de l'environnement. Par suite, le moyen tiré de ce que le préfet de l'Hérault ne pouvait pas modifier le règlement du plan de prévention des risques d'inondation et littoraux de la commune de La Grande-Motte selon la procédure prévue aux articles précités du code de l'environnement doit être écarté.
En ce qui concerne l'insuffisance de l'évaluation environnementale :
6. Aux termes de l'article R. 122-20 du code de l'environnement : " I.- L'évaluation environnementale est proportionnée à l'importance du plan, schéma, programme et autre document de planification, aux effets de sa mise en œuvre ainsi qu'aux enjeux environnementaux de la zone considérée. / II.- Le rapport environnemental, qui rend compte de la démarche d'évaluation environnementale, comprend un résumé non technique des informations prévues ci-dessous : / 1° Une présentation générale indiquant, de manière résumée, les objectifs du plan, schéma, programme ou document de planification et son contenu, son articulation avec d'autres plans, schémas, programmes ou documents de planification et, le cas échéant, si ces derniers ont fait, feront ou pourront eux-mêmes faire l'objet d'une évaluation environnementale ; / 2° Une description de l'état initial de l'environnement sur le territoire concerné, les perspectives de son évolution probable si le plan, schéma, programme ou document de planification n'est pas mis en œuvre, les principaux enjeux environnementaux de la zone dans laquelle s'appliquera le plan, schéma, programme ou document de planification et les caractéristiques environnementales des zones qui sont susceptibles d'être touchées par la mise en œuvre du plan, schéma, programme ou document de planification. Lorsque l'échelle du plan, schéma, programme ou document de planification le permet, les zonages environnementaux existants sont identifiés ; / 3° Les solutions de substitution raisonnables permettant de répondre à l'objet du plan, schéma, programme ou document de planification dans son champ d'application territorial. Chaque hypothèse fait mention des avantages et inconvénients qu'elle présente, notamment au regard des 1° et 2° ; / 4° L'exposé des motifs pour lesquels le projet de plan, schéma, programme ou document de planification a été retenu notamment au regard des objectifs de protection de l'environnement ; / 5° L'exposé : / a) Des effets notables probables de la mise en œuvre du plan, schéma, programme ou autre document de planification sur l'environnement, et notamment, s'il y a lieu, sur la santé humaine, la population, la diversité biologique, la faune, la flore, les sols, les eaux, l'air, le bruit, le climat, le patrimoine culturel architectural et archéologique et les paysages. Les effets notables probables sur l'environnement sont regardés en fonction de leur caractère positif ou négatif, direct ou indirect, temporaire ou permanent, à court, moyen ou long terme ou encore en fonction de l'incidence née du cumul de ces effets. Ils prennent en compte les effets cumulés du plan, schéma, programme avec d'autres plans, schémas, programmes ou documents de planification ou projets de plans, schémas, programmes ou documents de planification connus ; / b) De l'évaluation des incidences Natura 2000 mentionnée à l'article L. 414-4 ; / 6° La présentation successive des mesures prises pour : / a) Eviter les incidences négatives sur l'environnement du plan, schéma, programme ou autre document de planification sur l'environnement et la santé humaine ; / b) Réduire l'impact des incidences mentionnées au a ci-dessus n'ayant pu être évitées ; / c) Compenser, lorsque cela est possible, les incidences négatives notables du plan, schéma, programme ou document de planification sur l'environnement ou la santé humaine qui n'ont pu être ni évités ni suffisamment réduits. S'il n'est pas possible de compenser ces effets, la personne publique responsable justifie cette impossibilité. Les mesures prises au titre du b du 5° sont identifiées de manière particulière. / 7° La présentation des critères, indicateurs et modalités-y compris les échéances-retenus : / a) Pour vérifier, après l'adoption du plan, schéma, programme ou document de planification, la correcte appréciation des effets défavorables identifiés au 5° et le caractère adéquat des mesures prises au titre du 6° ; / b) Pour identifier, après l'adoption du plan, schéma, programme ou document de planification, à un stade précoce, les impacts négatifs imprévus et permettre, si nécessaire, l'intervention de mesures appropriées ; / 8° Une présentation des méthodes utilisées pour établir le rapport sur les incidences environnementales et, lorsque plusieurs méthodes sont disponibles, une explication des raisons ayant conduit au choix opéré ; / 9° Le cas échéant, l'avis émis par l'Etat membre de l'Union européenne consulté conformément aux dispositions de l'article L. 122-9 du présent code ".
7. En premier lieu, le résumé non technique de l'évaluation environnementale du projet de modification du plan de prévention des risques d'inondation et littoraux de la commune de La Grande-Motte en litige consacre un titre III.4 à l'articulation entre ce projet et les autres plans et programmes et apporte des informations concernant le schéma directeur d'aménagement et de gestion de l'eau Rhône-Méditerranée, le schéma d'aménagement et de gestion des eaux, la directive inondation et le plan de gestion des risques inondation 2016-2021 du bassin Rhône-Méditerranée, le schéma régional de cohérence écologique, le schéma de cohérence territoriale et le plan local d'urbanisme. En outre, à la suite de l'avis de l'autorité environnementale du 18 octobre 2019 qui relève que l'évaluation environnementale " ne traite pas de manière suffisamment approfondie des sujets spécifiques à la modification du PPRI, comme l'articulation avec les autres plans et programmes ", la direction départementale des territoires et de la mer de l'Hérault a complété le dossier de modification en y annexant un document intitulé " compléments à l'évaluation environnementale suite à l'avis de l'autorité environnementale ". Ce dernier apporte des précisions sur la cohérence du projet de modification en litige avec la stratégie locale de gestion du risque inondation du bassin versant de l'Or ou encore la stratégie régionale de gestion intégrées du trait de côte ainsi que sur sa compatibilité avec le plan de gestion des risques inondations Rhône-Méditerranée. Enfin, contrairement à ce que soutient l'association appelante, aucune disposition législative ou réglementaire n'impose au porteur de projet de présenter son articulation avec le plan communal de sauvegarde, lequel ne règlemente que la gestion de crise. Dans ces conditions, l'association appelante n'est pas fondée à soutenir que l'évaluation environnementale ne précise pas suffisamment l'articulation du projet de modification en litige avec d'autres plans, schémas, programmes ou documents de planification.
8. En deuxième lieu, l'évaluation environnementale présente l'état initial de l'environnement, et notamment du milieu physique, en rappelant la topographie du port, sa géologie, sa météorologie, les niveaux marins, les houles et le fonctionnement hydrosédimentaire. Si l'autorité environnementale, dans son avis du 18 octobre 2019, relève que la topographie du site est partielle, il ressort des pièces du dossier que cette dernière est adaptée à la modification envisagée, laquelle est mineure comme elle le relève elle-même, dès lors que, ainsi qu'il a été dit au point 5 du présent arrêt, elle n'a pour objet que de permettre la réalisation de travaux de requalification du port sans aggravation des aléas littoraux susceptibles d'avoir un impact sur les secteurs à enjeux forts urbanisés. En outre, et dès lors que l'arrêté attaqué ne modifie pas la cartographie des aléas, l'évaluation environnementale n'avait pas à tenir compte des travaux du groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat de 2019 qui ont réévalué l'évolution du niveau de la mer lié au changement climatique à l'horizon 2100. Au demeurant, l'évaluation environnementale indique que le niveau de référence à prendre en compte pour le littoral du Golfe du Lion est de +2,40 mètres du nivellement général de la France pour l'aléa submersion marine à l'horizon 2100 conformément aux dispositions du décret susvisé du 5 juillet 2019 relatif aux plans de prévention des risques qui tiennent compte des travaux du groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat de 2019. Enfin, si l'association requérante reproche à l'évaluation environnementale de ne pas indiquer les perspectives de son évolution probable si la modification du plan de prévention des risques d'inondation et littoraux de la commune de La Grande-Motte n'est pas mise en œuvre, il ressort des pièces du dossier que la seule perspective en l'absence de modification de ce plan est l'absence de réalisation des travaux de requalification du port. Dans ces conditions, l'association appelante n'est pas fondée à soutenir que l'évaluation environnementale ne précise pas suffisamment l'état initial de l'environnement sur le territoire concerné.
9. En troisième lieu, l'association appelante soutient que l'évaluation environnementale aurait dû faire état de solutions de substitution au projet d'extension du port de La Grande-Motte intitulé " ville-Port ". Toutefois, l'objet de la modification du plan de prévention des risques d'inondation et littoraux de La Grande-Motte consiste à permettre de limiter les risques d'inondation et de submersion marine de travaux de requalification du port de La Grande-Motte. Par suite, et au vu de cet objet qui ne porte pas directement sur un projet particulier d'extension du port de la Grande-Motte, l'évaluation environnementale n'avait à se prononcer sur aucune des solutions existantes pour agrandir le port.
10. En quatrième lieu, l'évaluation environnementale comporte une analyse succincte des incidences notables probables du projet en litige sur l'environnement qui apparaît suffisante au vu de l'absence de conséquence directe sur l'environnement de la modification envisagée du plan de prévention des risques d'inondation et littoraux de la commune de La Grande-Motte. Quant aux incidences sur les zones Natura 2000, il résulte du document intitulé " compléments à l'évaluation environnementale suite à l'avis de l'autorité environnementale " qu'aucun site Natura 2000 ne sera impacté par le projet de modification. Dans ces conditions, le moyen tiré de ce que l'évaluation environnementale ne précise pas suffisamment les incidences du projet en litige sur l'environnement doit être écarté.
11. En cinquième lieu, si l'association appelante soutient que la séquence éviter-réduire-compenser n'a pas été mise en œuvre de façon satisfaisante, l'évaluation environnementale comporte une analyse succincte des mesures prises pour éviter, limiter et compenser les incidences notables probables du projet de modification en litige sur l'environnement qui apparaît suffisante au vu de l'absence de conséquence directe de la modification envisagée du plan de prévention des risques d'inondation et littoraux de la commune de La Grande-Motte sur l'environnement.
12. En dernier lieu, contrairement à ce que soutient l'association appelante, l'évaluation environnementale indique dans son titre VI les méthodes utilisées pour analyser les impacts du projet de modification en litige sur l'environnement tels que l'analyse des retours d'expériences de projets portuaires similaires qui ont déjà été réalisés et dont les incidences ont été avérées, l'analogie avec les évaluations d'incidences de projets dans le même milieu et les modélisations ou simulations de certains effets en phase aménagée. Dans ces conditions, et alors qu'elle ne critique aucune de ces méthodes, l'association appelante n'est pas fondée à soutenir que l'évaluation environnementale ne précise pas suffisamment les méthodes utilisées pour établir le rapport des incidences du projet en litige sur l'environnement.
13. Il résulte de ce qui précède que, compte tenu du caractère mineur du projet en litige, qui ne porte que sur la modification du règlement applicable à une seule zone du plan de prévention des risques d'inondation et littoraux de La Grande Motte et non sur le projet " Ville-Port ", l'évaluation environnementale complétée est proportionnée au projet en litige. Par suite, le moyen tiré de son insuffisance doit être écarté.
En ce qui concerne l'incompatibilité du projet avec les dispositions du code de l'urbanisme relatives à la protection du littoral :
14. Aux termes de l'article L. 121-16 du code de l'urbanisme : " En dehors des espaces urbanisés, les constructions ou installations sont interdites sur une bande littorale de cent mètres à compter de la limite haute du rivage ou des plus hautes eaux pour les plans d'eau intérieurs désignés au 1° de l'article L. 321-2 du code de l'environnement ". Aux termes de l'article L. 121-17 de ce même code : " L'interdiction prévue à l'article L. 121-16 ne s'applique pas aux constructions ou installations nécessaires à des services publics ou à des activités économiques exigeant la proximité immédiate de l'eau (...) ".
15. La modification du plan de prévention des risques d'inondation en litige n'a ni pour objet ni pour effet de rendre inapplicables les dispositions précitées aux demandes d'autorisation d'urbanisme formées dans le périmètre de ce plan. Par suite, le moyen tiré de l'incompatibilité de l'arrêté en litige avec les dispositions des articles L. 121-16 et L. 121-17 du code de l'urbanisme doit être écarté.
En ce qui concerne l'erreur d'appréciation au regard des dispositions de l'article L. 562-1 du code de l'environnement :
16. Aux termes de l'article L. 562-14 du code de l'environnement, " I.- L'Etat élabore et met en application des plans de prévention des risques naturels prévisibles tels que les inondations, les mouvements de terrain, les avalanches, les incendies de forêt, les séismes, les éruptions volcaniques, les tempêtes ou les cyclones. II.- Ces plans ont pour objet, en tant que de besoin : / 1° De délimiter les zones exposées aux risques, en tenant compte de la nature et de l'intensité du risque encouru, d'y interdire tout type de construction, d'ouvrage, d'aménagement ou d'exploitation agricole, forestière, artisanale, commerciale ou industrielle, notamment afin de ne pas aggraver le risque pour les vies humaines ou, dans le cas où des constructions, ouvrages, aménagements ou exploitations agricoles, forestières, artisanales, commerciales ou industrielles, pourraient y être autorisés, prescrire les conditions dans lesquelles ils doivent être réalisés, utilisés ou exploités ; / 2° De délimiter les zones qui ne sont pas directement exposées aux risques mais où des constructions, des ouvrages, des aménagements ou des exploitations agricoles, forestières, artisanales, commerciales ou industrielles pourraient aggraver des risques ou en provoquer de nouveaux et y prévoir des mesures d'interdiction ou des prescriptions telles que prévues au 1° ; / 3° De définir les mesures de prévention, de protection et de sauvegarde qui doivent être prises, dans les zones mentionnées au 1° et au 2°, par les collectivités publiques dans le cadre de leurs compétences, ainsi que celles qui peuvent incomber aux particuliers ; / 4° De définir, dans les zones mentionnées au 1° et au 2°, les mesures relatives à l'aménagement, l'utilisation ou l'exploitation des constructions, des ouvrages, des espaces mis en culture ou plantés existants à la date de l'approbation du plan qui doivent être prises par les propriétaires, exploitants ou utilisateurs ".
17. L'association appelante soutient que la modification du plan de prévention des risques d'inondation en litige accroît les risques auxquels sont soumis tant la population que les milieux naturels. D'une part, il ressort des termes de l'arrêté attaqué que, s'il permet la réalisation de travaux et aménagements en zone rouge de déferlement, de tels travaux sont limités à ceux liés à une recomposition et/ou une extension du port existant sous réserve de ne pas créer de logement, de ne pas créer d'établissement à caractère stratégique ou vulnérable, et sous réserve qu'ils contribuent seulement à l'activité portuaire ou nautique avec des surfaces de planchers calées sur des cotes précisément définies et à condition que les aménagements n'aggravent pas les aléas littoraux susceptibles d'impacter les secteurs à enjeux forts urbanisés et que les constructions nouvelles ne soient pas exposées à des aléas forts. Ainsi, si les enjeux sont susceptibles d'être accrus par la réalisation des travaux ou aménagement désormais admis sous conditions en zone rouge de déferlement, les aléas ne sont pas modifiés et les risques, compte-tenu des mesures prévues, ne sont pas aggravés. A cet égard, tant la montée de niveau de la mer que les autres phénomènes comme celui des surcotes ont été pris en compte tant lors de l'élaboration du plan de prévention des risques d'inondation et littoraux édicté en 2014 que pour le calage des surfaces de plancher des aménagements prévus dans le cadre de la modification en litige. D'autre part, et dès lors que le plan de prévention des risques d'inondation et littoraux de la commune de La Grande-Motte ne porte que sur les aléas inondation et submersion marine, les incidences du projet de modification de ce plan sur l'ensablement du port ou l'absence de prise en compte de l'aléa tsunami ne peuvent être utilement invoqués. Par suite, le préfet de l'Hérault a pu, sans commettre d'erreur d'appréciation au regard des dispositions de l'article L. 562-1 du code de l'environnement, modifier, par l'arrêté en litige, le règlement du plan de prévention des risques d'inondation et littoraux de la commune de La Grande-Motte.
En ce qui concerne l'incompatibilité du projet avec le schéma directeur d'aménagement et de gestion des eaux Rhône-Méditerranée :
18. D'une part, aux termes de l'article L. 212-1 du code de l'environnement relatif aux schémas directeurs d'aménagement et de gestion des eaux : " (...) III. - Chaque bassin ou groupement de bassins hydrographiques est doté d'un ou de plusieurs schémas directeurs d'aménagement et de gestion des eaux fixant les objectifs visés au IV du présent article et les orientations permettant de satisfaire aux principes prévus aux articles L. 211-1 et L. 430-1 (...) / IV. - Les objectifs de qualité et de quantité des eaux que fixent les schémas directeurs d'aménagement et de gestion des eaux correspondent : / (...) 3° Pour les masses d'eau souterraines, à un bon état chimique et à un équilibre entre les prélèvements et la capacité de renouvellement de chacune d'entre elles ; (...) / IX. - Le schéma directeur détermine les aménagements et les dispositions nécessaires, comprenant la mise en place de la trame bleue figurant dans les schémas régionaux de cohérence écologique adoptés mentionnés à l'article L. 371-3 ou les schémas régionaux d'aménagement, de développement durable et d'égalité des territoires mentionnés à l'article L. 4251-1 du code général des collectivités territoriales, pour prévenir la détérioration et assurer la protection et l'amélioration de l'état des eaux et milieux aquatiques, pour atteindre et respecter les objectifs de qualité et de quantité des eaux mentionnées aux IV à VII. (...) / X. - Le schéma directeur d'aménagement et de gestion des eaux détermine les eaux maritimes intérieures et territoriales et les sous-bassins ou groupements de sous-bassins pour lesquels un schéma d'aménagement et de gestion des eaux défini à l'article L. 212-3 est nécessaire pour respecter les orientations fondamentales et les objectifs fixés en application du présent article, et fixe le délai dans lequel le schéma d'aménagement et de gestion des eaux doit être élaboré et révisé. (...) / XI. - Les programmes et les décisions administratives dans le domaine de l'eau doivent être compatibles ou rendus compatibles avec les dispositions des schémas directeurs d'aménagement et de gestion des eaux. (...) ".
19. Il résulte de ces dispositions que le schéma directeur d'aménagement et de gestion des eaux, d'une part, fixe, pour chaque bassin ou groupement de bassins, les objectifs de qualité et de quantité des eaux ainsi que les orientations permettant d'assurer une gestion équilibrée et durable de la ressource en eau et, d'autre part, détermine à cette fin les aménagements et les dispositions nécessaires. En vertu du XI de l'article L. 212-1 et de l'article L. 212-5-2 du code de l'environnement, les programmes pris dans le domaine de l'eau sont soumis à une simple obligation de compatibilité avec ce schéma. Pour apprécier cette compatibilité, il appartient au juge administratif de rechercher, dans le cadre d'une analyse globale le conduisant à se placer à l'échelle du territoire pertinent pour apprécier les effets du programme sur la gestion des eaux, si le programme ne contrarie pas les objectifs et les orientations fixés par le schéma, en tenant compte de leur degré de précision, sans rechercher l'adéquation du programme au regard de chaque orientation ou objectif particulier.
20. D'autre part, aux termes des dispositions de l'article L. 566-7 du code de l'environnement : " L'autorité administrative arrête, avant le 22 décembre 2015, à l'échelon de chaque bassin ou groupement de bassins, un plan de gestion des risques d'inondation pour les territoires définis à l'article L. 566-5. Ce plan fixe les objectifs en matière de gestion des risques d'inondation concernant le bassin ou groupement de bassins et les objectifs appropriés aux territoires mentionnés au même article L. 566-5. (...) Il est compatible avec les objectifs de qualité et de quantité des eaux que fixent les schémas directeurs d'aménagement et de gestion des eaux en application du IV de l'article L. 212-1 du présent code. ". Aux termes de l'article L. 562-1 du même code, " (...) VI. Les plans de prévention des risques d'inondation sont compatibles ou rendus compatibles avec les dispositions du plan de gestion des risques d'inondation défini à l'article L. 566-7. ".
21. Il résulte des dispositions précitées que si le plan de gestion des risques d'inondation Rhône-Méditerranée doit être compatible avec les orientations fondamentales du schéma directeur d'aménagement et de gestion des eaux Rhône-Méditerranée et que le plan de prévention des risques d'inondation et littoraux de la commune de La Grande Motte doit être compatible avec le plan de gestion des risques d'inondation Rhône-Méditerranée, l'association appelante ne peut utilement se prévaloir de l'incompatibilité entre la modification en litige de ce plan de prévention des risques d'inondation et les orientations fondamentales du schéma directeur d'aménagement et de gestion des eaux Rhône-Méditerranée.
22. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par la commune de La Grande-Motte, que l'association La Vigie Citoyenne Grand-Mottoise n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.
Sur les frais liés au litige :
23. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante à la présente instance, une somme quelconque au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de l'association La Vigie Citoyenne Grand-Mottoise une somme à verser à la commune de la Grande-Motte sur le fondement des mêmes dispositions.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de l'association La Vigie Citoyenne Grand-Mottoise est rejetée.
Article 2 : Les conclusions présentées par la commune de La Grande-Motte au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à l'association La Vigie Citoyenne Grand-Mottoise, à la ministre de la transition écologique, de la biodiversité, de la forêt, de la mer et de la pêche et à la commune de La Grande-Motte.
Copie en sera adressée au préfet de l'Hérault.
Délibéré après l'audience du 17 avril 2025, à laquelle siégeaient :
M. Chabert, président,
M. Jazeron, premier conseiller,
Mme Lasserre, première conseillère,
Rendu public par mise à disposition au greffe le 15 mai 2025.
La rapporteure,
N. Lasserre
Le président,
D. ChabertLa greffière,
N. Baali
La République mande et ordonne à la ministre de la transition écologique, de la biodiversité, de la forêt, de la mer et de la pêche en ce qui la concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 23TL01947