Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Montpellier l'annulation de l'arrêté du 17 septembre 2020 par lequel le maire de Garrigues s'est opposé à sa déclaration préalable de travaux portant sur la réalisation d'un abri de jardin, d'une terrasse, de deux pergolas, d'un carport, d'un muret et d'un portail.
Par un jugement n° 2005231 du 16 mars 2023, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté la demande de M. A... et a mis à sa charge une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 13 avril 2023, M. B... A..., représenté par Me Audouin, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du 16 mars 2023 ;
2°) d'annuler l'arrêté du maire de Garrigues du 17 septembre 2020 ;
3°) d'enjoindre au maire de Garrigues, à titre principal, de lui délivrer un arrêté de non-opposition à déclaration préalable dans un délai de quinze jours, le cas échéant sous astreinte, ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa déclaration préalable sur le fondement des règles d'urbanisme applicables à la date de cette déclaration ;
4°) de mettre à la charge de la commune de Garrigues une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le jugement est irrégulier en tant qu'il écarte le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 422-5 du code de l'urbanisme en ce qu'il est entaché d'une contradiction de motifs révélant une absence de motivation sur ce point ; les premiers juges ont commis une erreur dans l'application des articles L. 422-5 et R. 423-59 du code de l'urbanisme ;
- il est irrégulier en tant qu'il écarte le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 424-3 du même code et le moyen tiré du défaut d'examen particulier en ce que les réponses apportées par le tribunal à ces moyens sont insuffisamment motivées ;
- il est irrégulier en tant qu'il écarte le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation au regard du règlement du plan de prévention des risques d'inondation dès lors que son projet rentre dans le champ des projets admis sous conditions en zone " Rn " ;
- le préfet de l'Hérault doit être regardé comme ayant émis un avis conforme favorable tacite sur sa déclaration préalable ; si tel n'est pas le cas, l'ensemble des moyens ci-dessous sont soulevés à l'encontre de l'avis conforme défavorable rendu par le préfet ;
- l'arrêté en litige est entaché d'un vice de forme car il ne vise pas l'avis conforme du préfet et ne comporte en annexe ni cet avis ni la preuve de la saisine du préfet ;
- l'arrêté en cause a été rendu de manière prématurée au regard des articles L. 422-5 et R. 423-59 du code de l'urbanisme car il a été pris sans attendre l'avis du préfet ;
- il est insuffisamment motivé au regard de l'article L. 424-3 du même code ;
- le maire, lié par l'avis favorable du préfet, ne pouvait s'opposer aux travaux ;
- le maire n'a pas procédé à un examen particulier de sa déclaration préalable ;
- l'arrêté est entaché d'une erreur de droit et d'une erreur manifeste d'appréciation au regard du règlement du plan de prévention des risques naturels d'inondation dès lors que son projet entre dans le champ des projets admis sous conditions en zone " Rn " ; l'arrêté méconnaît par ailleurs le droit de se clore en tant qu'il s'oppose à la réalisation du portail.
Par un mémoire en défense, enregistré le 30 août 2023, la commune de Garrigues, représentée par la SCP Territoires avocats, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge du requérant une somme de 2 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que les moyens invoqués ne sont pas fondés.
Par une ordonnance en date du 19 octobre 2023, la clôture de l'instruction a été fixée au 23 novembre 2023.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code civil ;
- le code de l'environnement ;
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Jazeron, premier conseiller,
- les conclusions de M. Diard, rapporteur public,
- les observations de Me Audouin, représentant l'appelant,
- les observations de Me Chatron, représentant la commune.
Considérant ce qui suit :
1. M. A... est propriétaire d'un terrain constitué des trois parcelles cadastrées section ..., situées chemin de Galargues, sur le territoire de la commune de Garrigues (Hérault). Le terrain supporte déjà une maison individuelle de niveau R + 1 avec garage, dont l'implantation a été autorisée par un permis de construire le 27 décembre 2013, ainsi qu'une piscine, dont la réalisation est intervenue sur la base d'une déclaration préalable de travaux en 2015. L'intéressé a présenté en mairie, le 20 août 2020, une nouvelle déclaration préalable en vue de la réalisation d'un abri de jardin, d'une terrasse, de deux pergolas, d'un carport, d'un muret et d'un portail sur cette même unité foncière. Par un arrêté pris le 17 septembre 2020, le maire de Garrigues s'est opposé à cette déclaration préalable. Par la présente requête, M. A... relève appel du jugement du 16 mars 2023 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté et a mis à sa charge le versement d'une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Sur la régularité du jugement :
2. L'article L. 9 du code de justice administrative dispose que : " Les jugements sont motivés. ". En l'espèce, il ressort des termes du jugement attaqué que le tribunal administratif de Montpellier a mentionné, aux points 3 à 5 de ce jugement, les motifs pour lesquels il a écarté le moyen soulevé par le demandeur sur le fondement des articles L. 422-5 et R. 423-59 du code de l'urbanisme. Les premiers juges ont également énoncé, avec une précision suffisante, les raisons les ayant conduits à écarter, au point 6, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de l'arrêté litigieux, puis, aux points 8 à 10, le moyen tiré de ce que le maire de Garrigues n'aurait pas procédé à un examen particulier de la déclaration préalable de travaux. Le requérant n'est dès lors pas fondé à soutenir que le jugement serait insuffisamment motivé sur ces points.
3. Les moyens tirés de ce que le jugement critiqué serait entaché d'une contradiction de motifs ou d'erreurs de droit ou d'appréciation se rattachent au bien-fondé de ce jugement et sont sans incidence sur sa régularité. Ils relèvent en outre de l'office du juge de cassation et non du juge d'appel, auquel il appartient de statuer directement, dans le cadre de l'effet dévolutif de l'appel, sur la légalité de l'arrêté pris par le maire de Garrigues le 17 septembre 2020.
Sur le bien-fondé du jugement :
4. En premier lieu, aux termes de l'article L. 422-5 du code de l'urbanisme : " Lorsque le maire ou le président de l'établissement public de coopération intercommunale est compétent, il recueille l'avis conforme du préfet si le projet est situé : / a) Sur une partie du territoire communal non couverte par une carte communale, un plan local d'urbanisme ou un document d'urbanisme en tenant lieu ; / (...) ". Selon l'article R. 423-59 du même code : " Sous réserve des dispositions des articles L. 752-4, L. 752-14 et L. 752-17 du code de commerce et des exceptions prévues aux articles R. 423-60 à R. 423-71-1, les (...) services, autorités ou commissions qui n'ont pas fait parvenir à l'autorité compétente leur réponse motivée dans le délai d'un mois à compter de la réception de la demande d'avis sont réputés avoir émis un avis favorable. ".
5. Il résulte des dispositions précitées du code de l'urbanisme que, lorsque le permis de construire ou la déclaration préalable de travaux entrent dans leur champ d'application, le maire ne peut délivrer le permis de construire ou ne pas s'opposer à la déclaration préalable que si le préfet a émis, de manière expresse ou tacite, un avis favorable sur le projet. En revanche, ces mêmes dispositions ne font pas obstacle à ce que le maire, lorsqu'il estime disposer d'un motif légal de le faire, refuse le permis de construire sollicité ou s'oppose à la déclaration préalable, soit après un avis favorable émis par le préfet, soit sans attendre qu'un tel avis soit émis.
6. Il ressort des pièces du dossier que le territoire de la commune de Garrigues n'était pas couvert par une carte communale, un plan local d'urbanisme ou un document en tenant lieu lors de l'instruction de la déclaration préalable déposée par M. A... le 20 août 2020. Il ressort par ailleurs des pièces produites par ladite commune que cette dernière a saisi le préfet de l'Hérault, le 26 août 2020, pour solliciter l'avis conforme requis en vertu de l'article L. 422-5 précité du code de l'urbanisme. Si le requérant soutient que l'arrêté d'opposition en litige a été pris de manière prématurée le 17 septembre 2020 dès lors qu'aucun avis exprès ou tacite de l'autorité préfectorale n'était encore intervenu à cette dernière date, il résulte de ce qui a été indiqué au point précédent que le maire n'était pas tenu d'attendre l'avis du préfet pour pouvoir s'opposer à la déclaration préalable. Par suite, le moyen ainsi invoqué doit être écarté.
7. En deuxième lieu, l'article L. 424-3 du code de l'urbanisme dispose que : " Lorsque la décision rejette la demande ou s'oppose à la déclaration préalable, elle doit être motivée. / (...) ". L'article A. 424-3 du même code prévoit que : " L'arrêté indique, selon les cas : / (...) / b) Si le permis est refusé ou si la déclaration préalable fait l'objet d'une opposition ; / (...). ". Enfin, selon l'article A. 424-4 de ce code : " Dans les cas prévus aux b) à f) de l'article A. 424-3, l'arrêté précise les circonstances de droit et de fait qui motivent la décision (...). ".
8. L'arrêté contesté mentionne les textes dont il fait application, notamment le plan de prévention des risques naturels d'inondation applicable à la commune de Garrigues, approuvé par arrêté préfectoral du 28 juin 2017, ainsi que les avis sollicités ou recueillis à l'occasion de l'instruction de la déclaration préalable présentée par M. A.... Il rappelle la nature des travaux sur lesquels porte cette déclaration, précise que le terrain d'assiette du projet se situe en zone " Rn " du plan de prévention des risques naturels d'inondation et énonce que lesdits travaux ne rentrent pas dans les catégories de " travaux et projets nouveaux admis sous conditions " par le règlement de ce plan dans cette zone. Le maire de Garrigues a ainsi exposé avec une précision suffisante les motifs pour lesquels il s'est opposé à la déclaration préalable. En outre, alors que l'arrêté contesté indique explicitement que le préfet de l'Hérault a été saisi sur cette déclaration le 26 août 2020, il ne résulte d'aucun texte ni d'aucun principe que le maire aurait été tenu de joindre à cet arrêté la preuve de cette saisine, ni même l'avis du préfet si celui-ci avait déjà été rendu. Par conséquent, l'arrêté en litige ne se trouve entaché d'aucun vice de forme.
9. En troisième lieu, il résulte de ce qui a été dit précédemment et il n'est au demeurant pas contesté qu'aucun avis conforme favorable du préfet de l'Hérault n'était encore intervenu à la date à laquelle le maire de Garrigues a fait opposition à la déclaration préalable de M. A.... Dès lors et en tout état de cause, le requérant ne peut utilement soutenir que le maire aurait été lié par un tel avis et que l'arrêté d'opposition en litige serait illégal pour cette raison.
10. En quatrième lieu, il ne ressort ni de la motivation de l'arrêté contesté, ni des autres pièces du dossier, que le maire de Garrigues n'aurait pas procédé à un examen particulier de la déclaration préalable de travaux présentée par l'appelant ou qu'il n'aurait pas pris en compte les spécificités des travaux projetés par l'intéressé avant de s'opposer à sa déclaration.
11. En cinquième lieu, aux termes du règlement du plan de prévention des risques naturels d'inondation de la commune de Garrigues régissant la zone rouge naturelle de danger " Rn " dans laquelle sont prévus les travaux déclarés par le requérant : " Sont interdits : / Tous les travaux et projets nouveaux, de quelque nature qu'ils soient, à l'exception de ceux visés au paragraphe ci-dessous intitulé " sont admis ". / Sont admis sous réserve de l'application des dispositions constructives définies au chapitre 4.5 de la 1ère partie : / (...) / - Les modifications de constructions existantes et/ou leur changement de destination, sous réserve : / ' de ne pas créer de logements supplémentaires, / ' en zone Rn uniquement, en cas de changement de destination, que ce changement n'augmente pas la vulnérabilité et améliore la sécurité des personnes, / ' que la surface du 1er plancher aménagé soit calée sur vide sanitaire à la cote minimum PHE + 30 cm et que celle du garage soit calée au minimum à la cote PHE. (...) / - Les extensions au sol des bâtiments d'habitation existants (une seule fois à compter de la date d'application du présent document), sans création de nouveaux logements, dans la limite de 20 m2 d'emprise au sol (...), sous réserve : / ' que la surface du 1er plancher aménagé soit calée sur vide sanitaire à la cote minimum PHE + 30 cm et que celle du garage soit calée au minimum à la cote PHE. (...), / ' que l'extension s'accompagne de mesures compensatoires de nature à diminuer la vulnérabilité du bâtiment lui-même (pose de batardeaux à chaque ouvrant situé sous la PHE, etc.). / ' Cas particulier des bâtiments d'habitation existants disposant d'un étage accessible : / Leur extension pourra être autorisée au même niveau que le plancher du rez-de-chaussée existant, dans la limite de 20 m2 d'emprise au sol, sous réserve que l'extension s'accompagne de mesures compensatoires de nature à diminuer la vulnérabilité du bâtiment lui-même (pose de batardeaux à chaque ouvrant situé sous la PHE, etc.). / (...) / - En zone Rn uniquement, la création ou la modification de clôtures et de murs dans la mesure où ils permettent une transparence à l'écoulement (grillages à mailles larges, c'est-à-dire dont le plus petit côté est supérieur à 5 cm, sur un mur bahut de 20 cm de haut maximum). / (...) ".
12. D'une part, les travaux déclarés par M. A... pour la construction d'un abri de jardin de 4,85 m2 sur une dalle de 12 m2, d'une terrasse de 18 m2, de deux pergolas de 12 m2 et 9,9 m2 et d'un carport de 17,5 m2, portent sur la création d'éléments annexes à la maison et au garage déjà implantés et ne constituent, notamment, ni des modifications de ces constructions préexistantes, ni des extensions au sol de l'habitation existante dès lors que ces éléments ne s'inscrivent pas dans la même enveloppe bâtie. Par suite et alors même que ces travaux ne créent pas de nouveaux logements, ils ne sont pas au nombre des travaux et projets susceptibles d'être autorisés en zone " Rn " du plan de prévention des risques naturels d'inondation. De tels travaux sont, au surplus, malgré leur relative modestie, de nature à entraver le libre écoulement des eaux voire à créer des embâcles comme le souligne la commune intimée. D'autre part, le muret et le portail projetés, tels qu'ils sont représentés sur les documents graphiques joints à la déclaration préalable, ne sont pas conformes aux prescriptions prévues par le plan de prévention des risques naturels d'inondation en vue d'assurer la transparence hydraulique des clôtures et des murs. Le requérant ne peut à cet égard utilement invoquer la violation du " droit de clore son héritage " mentionné à l'article 647 du code civil, dès lors qu'il lui est loisible de prévoir une clôture respectant les prescriptions édictées par le plan de prévention des risques dans un but de sécurité publique. En conséquence, le maire n'a commis ni erreur de droit ni erreur d'appréciation dans l'application du règlement du plan de prévention des risques naturels d'inondation.
13. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du maire de Garrigues pris le 17 septembre 2020.
Sur les conclusions à fin d'injonction :
14. Le présent arrêt rejette les conclusions en annulation présentées par M. A... et n'implique ainsi aucune mesure d'exécution au titre des articles L. 911-1 et suivants du code de justice administrative. Les conclusions à fin d'injonction doivent donc être rejetées.
Sur les frais liés au litige :
15. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative s'opposent à ce que soit mise à la charge de la commune de Garrigues, laquelle n'a pas la qualité de partie perdante dans la présente instance, une somme quelconque au titre des frais exposés par le requérant et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de M. A... la somme réclamée par la commune à ce même titre.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Les conclusions présentées par la commune de Garrigues sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et à la commune de Garrigues.
Copie en sera adressée au préfet de l'Hérault.
Délibéré après l'audience du 3 avril 2025, à laquelle siégeaient :
M. Moutte, président,
M. Jazeron, premier conseiller,
Mme Lasserre, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 17 avril 2025.
Le rapporteur,
F. JazeronLe président,
J.F. Moutte
La greffière,
N. Baali
La République mande et ordonne au préfet de l'Hérault, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N° 23TL00858