Vu les procédures suivantes :
Procédure contentieuse antérieure :
L'association de défense du Grand Agde, Touristes et Habitants Ensemble, dite " Agathé ", a demandé au tribunal administratif de Montpellier l'annulation de la décision par laquelle le maire d'Agde ne s'est pas opposé à la déclaration préalable de travaux n° DP 34003 21 K0299 présentée par la société par actions simplifiée Cottageparks Méditerranée pour l'implantation et la construction de quarante habitations légères de loisirs sur un terrain situé n° 4 rue du commandant A... sur le territoire de cette commune.
Par un jugement n° 2201193 du 9 février 2023, le tribunal administratif de Montpellier a annulé la décision de non-opposition à déclaration préalable du 13 janvier 2022 (article 1er), a mis à la charge de la commune d'Agde une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative (article 2) et a rejeté le surplus des conclusions de la demande présentée par l'association " Agathé " (article 3).
Procédures devant la cour :
I - Par une requête n° 23TL00808, enregistrée le 7 avril 2023, la commune d'Agde, représentée par la SCP CGCB et associés, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du 9 février 2023 en tant qu'il a annulé la décision de non-opposition à déclaration préalable du 13 janvier 2022 ;
2°) de mettre à la charge de l'association " Agathé " une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la demande était irrecevable pour absence de qualité pour agir de l'association et de son président et pour absence d'intérêt à agir contre l'acte en litige ;
- le maire d'Agde n'était pas lié par l'avis conforme défavorable de l'architecte des bâtiments de France dès lors que cet avis repose sur une inexacte application de l'article 2.5.1 du règlement du site patrimonial remarquable de la ville d'Agde, lequel doit être interprété à la lumière du règlement du plan local d'urbanisme de la commune et ne doit pas être lu comme posant une inconstructibilité de principe dans la pinède de la Tamirissière ;
- les habitations légères de loisirs constituent des aménagements légers autorisés par le règlement du plan local d'urbanisme dans le camping de la Tamarissière ;
- les travaux contestés ne méconnaissent pas les dispositions du code de l'urbanisme relatives aux espaces remarquables du littoral : à titre principal, le terrain d'assiette du projet ne peut être regardé comme relevant des espaces remarquables ; à titre subsidiaire, le projet porte sur un aménagement léger et sur une extension limitée nécessaire à une activité économique, lesquels sont autorisés par la règlementation au sein des espaces remarquables ;
- le projet en litige respecte les dispositions des articles L. 113-1 et L. 113-2 du code de l'urbanisme relatives aux espaces boisés classés.
Par un mémoire en défense, enregistré le 24 juillet 2024, l'association de défense du Grand Agde, Touristes et Habitants Ensemble, dite " Agathé ", représentée par Me Mazas, conclut au rejet de la requête, à ce qu'il soit enjoint à la société Cottageparks Méditerranée de remettre le site en état dans le délai d'un mois sous astreinte de 5 000 euros par jour de retard et à ce qu'il soit mis à la charge de la commune d'Agde une somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que :
- sa demande était recevable ;
- la décision litigieuse est entachée d'un vice de procédure substantiel au regard de l'article R. 425-21 du code de l'urbanisme ;
- le maire se trouvait lié par l'avis conforme défavorable rendu par l'architecte des bâtiments de France sur la déclaration préalable ;
- les chalets ne constituent pas des habitations légères de loisirs : ils ne relèvent pas du régime de la déclaration préalable, mais du permis de construire ;
- le projet méconnaît la règlementation relative aux espaces remarquables du littoral et le règlement du plan local d'urbanisme applicable au secteur concerné ;
- il méconnaît le règlement du plan de prévention des risques naturels d'inondation de la commune d'Agde compte tenu de sa localisation en zone rouge ;
- il méconnaît la législation relative aux espaces boisés classés ;
- il méconnaît le règlement du site patrimonial remarquable.
La clôture de l'instruction est intervenue le 16 octobre 2024 en application de l'article R. 611-11-1 du code de justice administrative.
II - Par une requête n° 23TL00812, enregistrée le 7 avril 2023, l'association de défense du Grand Agde, Touristes et Habitants Ensemble, dite " Agathé ", représentée par Me Mazas, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du 9 février 2023 en tant qu'il a rejeté ses conclusions en injonction tendant à la remise en état par la société pétitionnaire ;
2°) d'enjoindre à la société Cottageparks Méditerranée de remettre le site en état dans le délai d'un mois sous astreinte de 5 000 euros par jour de retard ;
3°) de mettre à la charge de la commune d'Agde une somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le jugement est irrégulier en tant qu'il statue sur ses conclusions à fin d'injonction dès lors que la réponse à ces conclusions n'est pas suffisamment motivée et qu'elle se fonde, en méconnaissance du contradictoire, sur un moyen qui n'a pas été soulevé ;
- l'annulation de la décision litigieuse implique nécessairement que la société intimée remette le site en état, ce que le juge administratif est en mesure de lui ordonner dès lors qu'il s'agit d'une personne privée en charge de la gestion d'un service public ;
- le jugement se trouve entaché d'un défaut d'analyse des conclusions des parties et les premiers juges ont méconnu l'étendue de leurs compétences sur ce point.
Par un mémoire en défense, enregistré le 24 juillet 2024, la commune d'Agde, représentée par la SCP CGCB et associés, conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de l'association " Agathé " une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que les moyens ne sont pas fondés.
La requête a été communiquée le 5 mai 2023 à la société Cottageparks Méditerranée, laquelle n'a produit aucun mémoire en défense.
La clôture de l'instruction est intervenue le 16 octobre 2024 en application de l'article R. 611-11-1 du code de justice administrative.
III - Par une requête n° 23TL00881, enregistrée le 17 avril 2023, la société par actions simplifiée Cottageparks Méditerranée, représentée par l'AARPI Urban Act avocats, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du 9 février 2023 en tant qu'il a annulé la décision de non-opposition à déclaration préalable du 13 janvier 2022 ;
2°) de mettre à la charge de l'association " Agathé " une somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le jugement attaqué est entaché d'irrégularité en ce que l'association " Agathé " ne justifiait pas d'un intérêt pour agir contre l'acte en litige ;
- le jugement est insuffisamment motivé ;
- le maire d'Agde n'était pas lié par l'avis conforme défavorable de l'architecte des bâtiments de France, dès lors que cet avis n'a pas été rendu au vu d'un dossier complet et repose sur une inexacte application de l'article 2.5.1 du règlement du site patrimonial remarquable, lequel doit être interprété à la lumière du plan local d'urbanisme et ne doit pas être lu comme posant une inconstructibilité de principe dans la pinède de la Tamirissière ;
- les habitations légères de loisirs peuvent être légalement implantées dans le secteur de la Tamarissière, objet d'une concession de service public pour la gestion d'un camping : le site ne peut être regardé comme relevant des espaces remarquables ; à supposer que ce soit le cas, le projet porte sur un aménagement léger nécessaire à une activité économique ;
- le projet en litige respecte les dispositions des articles L. 113-1 et L. 113-2 du code de l'urbanisme relatives aux espaces boisés classés.
Par un mémoire en défense, enregistré le 24 juillet 2024, l'association de défense du Grand Agde, Touristes et Habitants Ensemble, dite " Agathé ", représentée par Me Mazas, conclut au rejet de la requête, à ce qu'il soit enjoint à la société Cottageparks Méditerranée de remettre le site en état dans le délai d'un mois sous astreinte de 5 000 euros par jour de retard et à ce qu'il soit mis à la charge de la commune d'Agde une somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que :
- sa demande était recevable ;
- la décision en litige est entachée d'un vice de procédure substantiel au regard de l'article R. 425-21 du code de l'urbanisme ;
- le maire se trouvait lié par l'avis conforme défavorable rendu par l'architecte des bâtiments de France sur la déclaration préalable ;
- les chalets ne constituent pas des habitations légères de loisirs : ils ne relèvent pas du régime de la déclaration préalable, mais du permis de construire ;
- le projet méconnaît la règlementation relative aux espaces remarquables du littoral et le règlement du plan local d'urbanisme applicable au secteur concerné ;
- il méconnaît le règlement du plan de prévention des risques naturels d'inondation de la commune d'Agde compte tenu de sa localisation en zone rouge ;
- il méconnaît la législation relative aux espaces boisés classés ;
- il méconnaît le règlement du site patrimonial remarquable.
La clôture de l'instruction est intervenue le 16 octobre 2024 en application de l'article R. 611-11-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces des dossiers.
Vu :
- le code de l'environnement ;
- le code du patrimoine ;
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Jazeron, premier conseiller,
- les conclusions de M. Diard, rapporteur public,
- les observations de Me Mazas, représentant l'association " Agathé ".
Considérant ce qui suit :
1. La commune d'Agde (Hérault) a concédé à la société Cottageparks Méditerranée, le 13 avril 2021, l'exploitation du camping municipal " La Tamarissière ", lequel occupe, depuis 1955, une unité foncière de 218 154 m2, composée des parcelles cadastrées sections HA n° 36 et HH n° 46 et située au n° 4 de la rue du commandant A... sur le territoire de cette commune. La société Cottageparks Méditerranée a présenté, le 6 août 2021, une déclaration préalable de travaux prévoyant la construction de cinquante habitations légères de loisirs sur ces parcelles. La même société a déposé, le 7 septembre 2021, une nouvelle déclaration préalable, modifiant la précédente et portant sur la construction de quarante habitations légères de loisirs, à raison d'une surface de plancher totale de 1 331,35 m2. Le maire d'Agde n'a pas pris de décision expresse sur la déclaration préalable ainsi présentée et a établi, le 13 janvier 2022, un certificat indiquant qu'il n'avait pas été fait opposition à cette déclaration préalable. Par un jugement du 9 février 2023, le tribunal administratif de Montpellier, sur demande de l'association de défense du Grand Agde, Touristes et Habitants Ensemble, dite " Agathé ", a annulé la décision de non-opposition en litige (article 1er), a mis à la charge de la commune une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative (article 2) et a rejeté le surplus des conclusions de l'association (article 3). Par leurs requêtes respectives n° 23TL00808 et n° 23TL00881, la commune d'Agde et la société Cottageparks Méditerranée relèvent appel de ce jugement en tant qu'il a annulé la décision de non-opposition. Par sa requête n° 23TL00812, l'association " Agathé " relève appel de ce jugement en tant qu'il a rejeté ses conclusions tendant à ce qu'il soit enjoint à ladite société de remettre le site en état. Ces trois requêtes étant dirigées contre le même jugement, il y a lieu de les joindre pour se prononcer par un seul et même arrêt.
Sur la régularité du jugement :
En ce qui concerne les conclusions à fin d'annulation :
2. L'article L. 9 du code de justice administrative dispose que : " Les jugements sont motivés. ". La société Cottageparks Méditerranée soutient que le tribunal administratif de Montpellier aurait insuffisamment motivé son jugement en omettant de prendre en compte l'ancienneté de l'exploitation du site du camping de la Tamarissière, l'existence et le contenu de la concession de service public la liant à la commune et les conséquences de l'annulation pour l'exécution de ladite concession. Il ressort toutefois des termes mêmes du jugement attaqué que le tribunal a mentionné, avec une précision suffisante, les raisons pour lesquelles il a accueilli plusieurs des moyens soulevés par l'association " Agathé " à l'encontre de la décision de non-opposition en litige. Les premiers juges n'étaient pas tenus de répondre à l'ensemble des arguments avancés par les parties et ont ainsi suffisamment motivé leur jugement.
3. Le moyen invoqué par la société Cottageparks Méditerranée et tenant à ce que les premiers juges auraient reconnu à tort l'intérêt à agir de l'association " Agathé " se rapporte au bien-fondé du jugement contesté et reste, par suite, sans incidence sur sa régularité.
En ce qui concerne les conclusions à fin d'injonction :
4. L'article L. 5 du code de justice administrative prévoit que : " L'instruction des affaires est contradictoire. ". Par ailleurs, l'article L. 911-1 du même code mentionne que : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution. / (...) ".
5. Il ressort du point 23 du jugement litigieux que, pour rejeter les conclusions de l'association " Agathé " tendant à ce qu'il soit enjoint à la société Cottageparks Méditerranée de remettre le site en état, le tribunal administratif de Montpellier a indiqué que son jugement n'impliquait aucune mesure d'exécution et précisé qu'il n'appartenait pas au juge de l'excès de pouvoir de se substituer au maire ou au préfet dans l'exercice éventuel de leurs pouvoirs de police. Les premiers juges ont ainsi répondu aux conclusions à fin d'injonction dont ils étaient saisis, de manière suffisamment motivée, sans méconnaître le principe du contradictoire en se fondant sur un moyen qui n'aurait pas été soulevé et sans méconnaître, non plus, l'étendue de leur compétence. L'association " Agathé " n'est, dès lors, pas fondée à soutenir que le jugement serait entaché d'une irrégularité en tant qu'il statue sur ses conclusions en injonction.
Sur le bien-fondé du jugement :
En ce qui concerne la recevabilité de la demande :
6. L'article L. 600-1-1 du code de l'urbanisme dispose que : " Une association n'est recevable à agir contre une décision relative à l'occupation ou l'utilisation des sols que si le dépôt des statuts de l'association en préfecture est intervenu au moins un an avant l'affichage en mairie de la demande du pétitionnaire. ". L'article R. 600-4 du même code ajoute que : " Les requêtes dirigées contre une décision relative à l'occupation ou l'utilisation du sol régie par le présent code doivent, à peine d'irrecevabilité, être accompagnées du titre de propriété, de la promesse de vente, du bail, (...) ou de tout autre acte de nature à établir le caractère régulier de l'occupation ou de la détention de son bien par le requérant. / Lorsqu'elles sont introduites par une association, ces mêmes requêtes doivent, à peine d'irrecevabilité, être accompagnées des statuts de celle-ci, ainsi que du récépissé attestant de sa déclaration en préfecture. / (...) ".
7. D'une part, l'association " Agathé " a produit au soutien de sa demande de première instance les éléments permettant d'attester de la publication de ses statuts depuis sa création en 1975, ainsi que la version en vigueur de ces statuts telle que modifiée le 1er août 2009 et le récépissé de sa déclaration de changement de siège social, délivré par les services de la préfecture de l'Hérault le 15 novembre 2016. Elle a également produit la copie de la délibération prise par son bureau le 5 mars 2022 pour autoriser son président, conformément à l'article 20 de ses statuts, à contester la décision de non-opposition en litige devant le tribunal administratif de Montpellier. Il en résulte que la fin de non-recevoir opposée par la commune d'Agde, tenant à l'absence de qualité pour agir de l'association et de son président, doit être écartée.
8. D'autre part, l'article 2 des statuts de l'association " Agathé " stipule que son objet recouvre notamment la défense du site et du patrimoine de la ville d'Agde, de son canton et de la communauté d'agglomération dont elle est membre, en veillant, en particulier, au respect des règles de l'urbanisme et de la construction, ainsi que la défense de l'environnement naturel, des intérêts collectifs des habitants et de la qualité de la vie. L'objet social de l'association et son périmètre d'action géographique ainsi énoncés sont suffisamment précis pour lui reconnaître un intérêt à contester la décision en litige, par laquelle le maire d'Agde ne s'est pas opposé à la réalisation de quarante constructions présentant une emprise au sol totale significative dans un secteur de pinède situé à proximité immédiate du rivage de la mer et bénéficiant de plusieurs régimes de protection du point de vue patrimonial et environnemental. Il s'ensuit que la fin de non-recevoir invoquée par la commune et par la société Cottageparks Méditerranée, tenant à l'absence d'intérêt pour agir de l'association " Agathé ", doit être également écartée.
En ce qui concerne les conclusions à fin d'annulation :
9. En vertu des dispositions de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme, il appartient au juge d'appel, saisi d'un jugement par lequel un tribunal administratif a annulé un acte intervenu en matière d'urbanisme, de se prononcer sur le bien-fondé des motifs d'annulation retenus par les premiers juges et d'apprécier si l'un au moins de ces moyens justifie l'annulation. Dans ce cas, le juge d'appel n'a pas à examiner les autres moyens de première instance.
10. Il ressort de la motivation du jugement attaqué que, pour prononcer l'annulation de la décision de non-opposition à déclaration préalable prise par le maire d'Agde, les premiers juges ont retenu, d'une part, que l'avis conforme défavorable de l'architecte des bâtiments de France ne procédait pas d'une inexacte application de l'article 2.5.1 du règlement du site patrimonial remarquable de la ville d'Agde, si bien que le maire était en situation de compétence liée pour s'opposer à la déclaration préalable en litige et qu'il a méconnu ce même article en ne s'y opposant pas, d'autre part, que les travaux prévus par la société pétitionnaire ne pouvaient pas être légalement autorisés dans les espaces remarquables au sens des dispositions du code de l'urbanisme relatives au littoral et, enfin, que lesdits travaux étaient de nature à compromettre l'espace boisé classé identifié par le plan local d'urbanisme de la commune d'Agde.
11. En premier lieu, aux termes de l'article L. 632-1 du code du patrimoine : " Dans le périmètre d'un site patrimonial remarquable, sont soumis à une autorisation préalable les travaux susceptibles de modifier l'état des parties extérieures des immeubles bâtis, y compris du second œuvre, ou des immeubles non bâtis. / (...) / L'autorisation peut être refusée ou assortie de prescriptions lorsque les travaux sont susceptibles de porter atteinte à la conservation ou à la mise en valeur du site patrimonial remarquable. ". Selon l'article L. 632-2 du même code dans sa rédaction alors en vigueur : " I - L'autorisation prévue à l'article L. 632-1 est, sous réserve de l'article L. 632-2-1, subordonnée à l'accord de l'architecte des Bâtiments de France, le cas échéant assorti de prescriptions motivées. A ce titre, ce dernier s'assure du respect de l'intérêt public attaché au patrimoine, à l'architecture, au paysage naturel ou urbain, à la qualité des constructions et à leur insertion harmonieuse dans le milieu environnant. Il s'assure, le cas échéant, du respect des règles du plan de sauvegarde et de mise en valeur ou du plan de valorisation de l'architecture et du patrimoine. (...) / Le permis de construire, le permis de démolir, le permis d'aménager, l'absence d'opposition à déclaration préalable, (...) tient lieu de l'autorisation prévue à l'article L. 632-1 du présent code si l'architecte des Bâtiments de France a donné son accord, dans les conditions prévues au premier alinéa du présent I. ".
12. Le règlement du site patrimonial remarquable de la ville d'Agde, en sa section 2.5 relative au secteur n° 5 " La pinède de la Tamarissière " dans lequel se situent les parcelles en litige, dispose que : " 2.5.1. Les espaces libres de la pinède de la Tamarissière : / Ce secteur n'a pas vocation à être bâti. / Les espaces libres doivent être maintenus et ne pas être bâtis. La végétation de la pinède est à conserver et doit être entretenue. L'abattage d'arbres n'est pas autorisé. (...) / Le secteur est à conserver en pleine terre. Les cheminements piétons nécessaires doivent maintenir une bonne perméabilité. / Le mobilier, les matériaux et revêtements sont homogènes sur l'ensemble de la pinède et choisis dans une gamme limitée, discrète et naturelle. / Des aménagements liés à la fonctionnalité du lieu peuvent être autorisés, sous réserve de s'inscrire dans une démarche d'intégration et de préserver la dominante végétale. / Les zones de stationnement liées aux occupations autorisées dans la zone peuvent être autorisées sous conditions : / • La perméabilité des sols doit être maintenue ; (...) / • L'aménagement doit faire l'objet d'un projet d'accompagnement paysagé renforcé, afin d'assurer l'intégration de la zone de stationnement dans le paysage. (...) / L'enfouissement des réseaux est à privilégier. / Les dépôts et stockages divers sont interdits sur l'ensemble du secteur. / Les campings : / L'aménagement des campings existants doit être étudié en termes d'intégration paysagère et de développement durable : / • La perméabilité des sols doit être maintenue. Le traitement des espaces libres est entièrement perméable. Le cas échéant, les surfaces de stationnement et de cheminement sont réalisées en plateau absorbant. / • L'aménagement doit faire l'objet d'un projet d'accompagnement paysagé renforcé, afin d'assurer l'intégration du camping dans le paysage. La dominante végétale est à maintenir et à renforcer. / • Les piscines enterrées sont autorisées au sein des campings. Les piscines hors sol sont interdites. (...) ".
13. D'une part, il ressort des pièces du dossier que l'architecte des bâtiments de France, saisi de la déclaration préalable déposée le 6 août 2021, a rendu un avis conforme défavorable le 7 septembre 2021 en relevant que l'opération projetée était prévue dans la pinède constituant le secteur n° 5 du site patrimonial remarquable dans lequel le règlement de ce site imposait le maintien des espaces libres et leur caractère non bâti et en considérant que, par conséquent, l'implantation de constructions, même légères et démontables, ne pouvait être acceptée dans ce site car elles porteraient atteinte au caractère des lieux. Il est vrai que, comme le souligne la société Cottageparks Méditerranée, l'architecte des bâtiments de France a émis son avis sur la base d'un dossier ne comportant pas les éléments complémentaires déposés le 7 septembre 2021. Néanmoins, eu égard à la teneur de l'avis rendu par cet architecte, telle que rappelée ci-dessus, il n'apparaît pas que les modifications apportées au projet, à savoir principalement la réduction du nombre de constructions de cinquante à quarante, aient été de nature à rendre nécessaire une nouvelle consultation de cette autorité et à influer sur le contenu de son avis. Dès lors, l'avis de l'architecte des bâtiments de France n'a pas été émis dans des conditions irrégulières.
14. D'autre part, il résulte expressément de l'article 2.5.1 précité du règlement du site patrimonial remarquable non seulement que le secteur de la pinède de la Tamarissière n'a pas vocation à être bâti, mais également et, plus spécifiquement, que les espaces libres existant dans ladite pinède doivent être maintenus comme tels et ne pas être bâtis. La seule circonstance que l'article en cause n'exclut pas la possibilité de réaliser certains aménagements dans le secteur de la pinède, notamment au sein des campings existants, ne saurait faire regarder les auteurs de ce règlement comme ayant entendu permettre d'y implanter des constructions nouvelles, même légères, hormis les piscines enterrées explicitement visées par cet article. De la même manière, si le règlement du plan local d'urbanisme de la commune d'Agde autorise l'implantation des habitations légères de loisirs, sous certaines conditions, dans la zone naturelle " Nter " où sont prévues les constructions en litige, les dispositions de ce plan n'ont toutefois ni pour objet ni pour effet de faire obstacle à l'application du règlement du site patrimonial remarquable, lequel présente, selon l'article L. 631-1 du code du patrimoine, le caractère d'une servitude d'utilité publique affectant l'utilisation des sols. Enfin, la circonstance que le contrat de concession de service public conclu entre la commune et la société Cottageparks Méditerranée le 28 avril 2021 prévoit la réalisation de travaux de réaménagement du camping n'est, en tout état de cause, pas non plus susceptible d'avoir une incidence sur l'application de la règlementation propre au site patrimonial remarquable. Ainsi, l'architecte des bâtiments de France n'a pas fait une inexacte application de l'article 2.5.1 susmentionné en émettant son avis conforme défavorable.
15. Il résulte de ce qui a été exposé ci-dessus que l'avis conforme défavorable rendu par l'architecte des bâtiments de France n'était entaché d'aucune illégalité. Par suite et ainsi que l'ont estimé à bon droit les premiers juges, le maire d'Agde était en situation de compétence liée pour s'opposer à la déclaration préalable présentée par la société Cottageparks Méditerranée. Il résulte par ailleurs de ce qui a été énoncé au point 14 que, comme l'a également jugé le tribunal, le maire a méconnu les prescriptions de l'article 2.5.1 précité du règlement du site patrimonial remarquable de la ville d'Agde en ne faisant pas opposition à la déclaration préalable.
16. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 121-23 du code de l'urbanisme : " Les documents et décisions relatifs à la vocation des zones ou à l'occupation et à l'utilisation des sols préservent les espaces terrestres et marins, sites et paysages remarquables ou caractéristiques du patrimoine naturel et culturel du littoral et les milieux nécessaires au maintien des équilibres biologiques. / Un décret fixe la liste des espaces et milieux à préserver, comportant notamment, en fonction de l'intérêt écologique qu'ils présentent, les dunes et les landes côtières, les plages et lidos, les forêts et zones boisées côtières (...). ". Selon l'article R. 121-4 du même code : " En application de l'article L. 121-23, sont préservés, dès lors qu'ils constituent un site ou un paysage remarquable ou caractéristique du patrimoine naturel et culturel du littoral et sont nécessaires au maintien des équilibres biologiques ou présentent un intérêt écologique : / (...) / 2° Les forêts et zones boisées proches du rivage de la mer et des plans d'eau intérieurs d'une superficie supérieure à 1 000 hectares ; / (...) / 7° Les parties naturelles des sites inscrits ou classés en application des articles L. 341-1 et L. 341-2 du code de l'environnement (...). ".
17. En outre, aux termes de l'article L. 121-24 du même code : " Des aménagements légers, dont la liste limitative et les caractéristiques sont définies par décret en Conseil d'Etat, peuvent être implantés dans ces espaces et milieux lorsqu'ils sont nécessaires à leur gestion, à leur mise en valeur notamment économique ou, le cas échéant, à leur ouverture au public, et qu'ils ne portent pas atteinte au caractère remarquable du site. Ces projets d'aménagement sont soumis, préalablement à leur autorisation, à enquête publique (...). Dans les autres cas, ils sont soumis à une mise à disposition du public (...). ". Enfin, aux termes de l'article R. 121-5 du même code : " Seuls peuvent être implantés dans les espaces et milieux mentionnés à l'article L. 121-24, dans les conditions prévues par cet article, les aménagements légers suivants, à condition que leur localisation et leur aspect ne dénaturent pas le caractère des sites, ne compromettent pas leur qualité architecturale et paysagère et ne portent pas atteinte à la préservation des milieux : / (...) / 3° La réfection des bâtiments existants et l'extension limitée des bâtiments et installations nécessaires à l'exercice d'activités économiques ; / (...). ".
18. D'une part, il ressort des pièces du dossier que les parcelles en litige, situées à proximité immédiate du rivage de la mer et très faiblement artificialisées, supportent la majeure partie du bois de pins de la Tamarissière, lequel est planté de tamaris dans le but de stabiliser le sable entre la plage, l'étang du Clos de Vias et l'embouchure du fleuve Hérault. La pinède de la Tamarissière est inscrite depuis le 16 juillet 1943, avec les dunes voisines longeant la plage, à l'inventaire des sites dont la conservation présente un intérêt général. Elle constitue un secteur du site patrimonial remarquable d'Agde comme il a été dit précédemment et est incluse dans une zone naturelle d'intérêt écologique, faunistique et floristique. Dans ce contexte, alors même que le terrain d'assiette du projet est bordé par un secteur urbanisé le long du fleuve à l'est et qu'un parc de stationnement et un chemin de promenade y ont été aménagés, ledit terrain doit être regardé comme relevant des espaces et milieux remarquables ou caractéristiques du patrimoine naturel ou culturel du littoral à préserver en application des dispositions citées au point 16 du présent arrêt. Le plan local d'urbanisme de la commune d'Agde, dans sa version applicable au litige, classe au demeurant tout le périmètre du camping en zones naturelles " Ner " et " Nter ", lesquelles correspondent précisément aux espaces remarquables au sens de la loi littoral.
19. D'autre part, l'implantation d'habitations légères de loisirs ne figure pas dans la liste limitative des aménagements légers susceptibles d'être implantés dans les espaces et milieux remarquables ou caractéristiques du patrimoine naturel et culturel du littoral, telle que prévue par les dispositions mentionnées au point 17. En particulier, contrairement à ce que soutiennent tant la commune que la société pétitionnaire, la réalisation de telles constructions ne saurait être regardée comme entrant dans le champ d'application du 3° de l'article R. 121-5 du code de l'urbanisme, dès lors qu'à supposer même que les travaux projetés répondent à une nécessité pour l'exercice de l'activité économique du camping, ils ne consistent ni en la réfection de bâtiments existants, ni en l'extension limitée de tels bâtiments, mais en la réalisation, sur des portions de terrain antérieurement à l'état naturel, de bâtiments nouveaux venant s'ajouter, selon les indications de la notice explicative, aux soixante habitations légères de loisirs déjà présentes sur le site du camping. La commune et la société ne peuvent, par ailleurs, utilement se prévaloir ni de la circulaire du 15 septembre 2005 relative aux espaces remarquables du littoral, laquelle ne revêt aucune valeur règlementaire et n'évoque au demeurant pas les habitations légères de loisirs, ni de la circonstance que le règlement du plan local d'urbanisme d'Agde permette la réalisation de telles constructions en zone " Nter ", dès lors que les dispositions énoncées au point 17 sont directement opposables aux autorisations d'urbanisme et que les auteurs du plan local d'urbanisme ne pouvaient, en toute hypothèse, légalement autoriser l'implantation de telles habitations au sein des espaces remarquables sans méconnaître ces mêmes dispositions.
20. Eu égard à ce qui a été exposé aux deux points précédents, c'est à bon droit que les premiers juges ont retenu que les travaux prévus par la société Cottageparks Méditerranée ne pouvaient être légalement autorisés au regard des dispositions du code de l'urbanisme relatives à la préservation des espaces remarquables ou caractéristiques du patrimoine du littoral.
21. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 113-1 du code de l'urbanisme : " Les plans locaux d'urbanisme peuvent classer comme espaces boisés, les bois, forêts, parcs à conserver, à protéger ou à créer, qu'ils relèvent ou non du régime forestier, enclos ou non, attenant ou non à des habitations. Ce classement peut s'appliquer également à des arbres isolés, des haies ou réseaux de haies ou des plantations d'alignements. ". Selon l'article L. 113-2 du même code : " Le classement interdit tout changement d'affectation ou tout mode d'occupation du sol de nature à compromettre la conservation, la protection ou la création des boisements. / (...) ". Les dispositions précitées imposent à l'autorité saisie d'une déclaration préalable de travaux portant sur un espace boisé classé, puis au juge, saisi de la légalité de la décision prise par cette autorité, d'apprécier si les travaux sont de nature à compromettre la conservation, la protection ou la création des boisements classés dans le plan local d'urbanisme.
22. Il ressort des pièces du dossier que le terrain d'assiette du projet est intégralement recouvert par un espace boisé classé sur le règlement graphique du plan local d'urbanisme de la commune d'Agde. Les travaux déclarés par la société Cottageparks Méditerranée portent sur l'implantation de quarante habitations légères de loisirs posées sur des plots ou des longrines en béton préfabriqué et la notice explicative établie par cette société mentionne que " le projet se répartit sur une superficie de 12 435 m2 ". Les constructions prévues présentent une surface de plancher unitaire comprise entre 32 m2 et 40 m2 et l'ensemble correspond à une surface de plancher totale créée de 1 331,35 m2. Si la commune et la société pétitionnaire soulignent que la surface totale ainsi calculée ne représente qu'un pourcentage minime de la superficie globale de l'espace boisé classé, l'emprise au sol totale du projet sera toutefois nécessairement supérieure à la surface de plancher totale et il convient notamment d'y ajouter, pour apprécier complètement l'incidence de l'opération en termes d'artificialisation des sols, les superficies occupées tant par les terrasses extérieures des chalets que par les quarante places de stationnement positionnées à proximité de chacun d'eux. Eu égard à l'importance de l'emprise globale des travaux et alors même que la notice précise que les arbres existants et les plantations denses seront conservés, le projet contesté est de nature à compromettre la conservation, la protection ou la création des boisements classés et c'est, par conséquent, à juste titre que les premiers juges ont estimé qu'il méconnaissait les articles L. 113-1 et L. 113-2 du code de l'urbanisme cités ci-dessus.
23. Il résulte de tout ce qui précède que la commune d'Agde et la société Cottageparks Méditerranée ne sont pas fondées à soutenir que c'est à tort que, par l'article 1er du jugement du 9 février 2023, le tribunal administratif de Montpellier a prononcé l'annulation de la décision de non-opposition à déclaration préalable révélée par le certificat établi le 13 janvier 2022.
En ce qui concerne les conclusions à fin d'injonction :
24. L'annulation de la décision de non-opposition en litige n'appelle, par elle-même, aucune mesure d'exécution particulière au titre des articles L. 911-1 et suivants du code de justice administrative. Elle n'implique notamment pas qu'il soit enjoint à la société chargée de l'exploitation du camping municipal de remettre le site en état, alors même qu'elle aurait déjà réalisé tout ou partie des travaux et que ces travaux ne seraient pas régularisables au regard des illégalités constatées ci-dessus. Il en résulte que l'association " Agathé " n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par l'article 3 du jugement contesté, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté les conclusions en injonction qu'elle avait présentées en ce sens.
Sur les conclusions à fin d'injonction présentées en appel :
25. Il résulte de ce qui vient d'être mentionné au point précédent que l'exécution du présent arrêt n'implique pas qu'il soit enjoint à la société Cottageparks Méditerranée de remettre le site en état. Par voie de conséquence, les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte présentées par l'association " Agathé " devant la cour ne peuvent qu'être rejetées.
Sur les frais liés aux litiges :
26. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative s'opposent à ce que soit mise à la charge de l'association " Agathé ", laquelle n'a pas la qualité de partie perdante pour le principal dans les présentes instances, une somme quelconque au titre des frais respectivement exposés par la commune d'Agde et par la société Cottageparks Méditerranée et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge respective de la commune d'Agde et de la société Cottageparks Méditerranée une somme de 1 500 euros chacune à verser à l'association " Agathé " au titre de ces dispositions.
D E C I D E :
Article 1er : Les requêtes présentées par la commune d'Agde, l'association " Agathé " et la société Cottageparks Méditerranée sont rejetées.
Article 2 : La commune d'Agde et la société Cottageparks Méditerranée verseront chacune une somme de 1 500 euros à l'association de défense du Grand Agde, Touristes et Habitants Ensemble, sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la commune d'Agde, à l'association de défense du Grand Agde, Touristes et Habitants Ensemble et à la société par actions simplifiée Cottageparks Méditerranée.
Copie en sera adressée au procureur de la République près le tribunal judiciaire de Béziers, au préfet de l'Hérault et à l'architecte des bâtiments de France.
Délibéré après l'audience du 3 avril 2025, à laquelle siégeaient :
M. Moutte, président,
M. Jazeron, premier conseiller,
Mme Lasserre, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 17 avril 2025.
Le rapporteur,
F. JazeronLe président,
J.F. Moutte
La greffière,
N. Baali
La République mande et ordonne au préfet de l'Hérault, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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Nos 23TL00808, 23TL00812, 23TL00881