Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 10 mars 2021 par lequel le maire de Sérignan l'a placée en congé de maladie ordinaire à compter du 7 janvier 2020, d'annuler la décision du 10 mars 2021 régularisant sa situation financière sur la période du 8 janvier 2020 au 5 mars 2021 et lui notifiant un trop-perçu d'un montant total de 6 127 euros au titre de la même période, d'enjoindre à la commune de Sérignan de la rétablir dans la plénitude de ses droits à rémunération à compter du 8 janvier 2020 et de mettre à la charge de la commune de Sérignan une somme de 2 000 euros à lui verser au titre de l'article L 761-1 du code de justice administrative.
Par un jugement n° 2101852 du 21 octobre 2022, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté ses demandes et a rejeté les conclusions présentées par la commune de Sérignan en application de l'article L. 761- 1 du code de justice administrative.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés le 22 décembre 2022 et le 24 mai 2024, Mme A... B..., représentée par Me Tronche, de la société civile professionnelle CGBG, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Montpellier rendu le 21 octobre 2022 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 10 mars 2021 la plaçant en congé de maladie ordinaire à compter du 7 janvier 2020 ;
3°) d'annuler la décision du 10 mars 2021 par laquelle le maire de Sérignan a régularisé sa situation financière à compter du 8 janvier 2020, et à ce titre, l'a placée à demi-traitement à compter du 8 avril 2020, et l'a donc privée de traitement à compter du 8 janvier 2021 et lui a notifié un trop-perçu d'un montant de 6 127 euros ;
4°) d'enjoindre à la commune de Sérignan de la placer en congé pour invalidité temporaire imputable au service et de la rétablir dans la plénitude de ses droits à rémunération à compter du 7 janvier 2020, ou à tout le moins, de procéder au réexamen de sa situation dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;
5°) de mettre à la charge de la commune de Sérignan la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le jugement contesté est entachée d'une erreur de droit et d'une erreur d'appréciation ;
- le tribunal n'a pas répondu au moyen tiré de la méconnaissance de l'article 17 du décret du 30 juillet 1987 ;
Sur l'arrêté du 10 mars 2021 :
- il méconnaît les dispositions de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983 ;
- il requalifie ses arrêts de travail en congés de maladie ordinaire à compter du 7 janvier 2020 et est entaché d'erreur de droit dès lors qu'il est fondé sur la seule circonstance que son état de santé serait consolidé à cette même date ;
- en admettant même qu'il soit également fondé sur son aptitude à reprendre une activité professionnelle, c'est à tort que les premiers juges ont estimé qu'elle était apte à une reprise du travail à la date du 7 janvier 2020 ;
- elle aurait dû se voir verser un demi-traitement à compter du 7 janvier 2020 ;
- en la privant de tout traitement à compter du 8 janvier 2021, le maire de Sérignan a méconnu les dispositions de l'article 17 du décret du 30 juillet 1987 ;
Sur la décision du même jour :
- elle méconnaît les dispositions de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983 ;
- compte tenu de l'illégalité de l'arrêté du 10 mars 2021, elle est dépourvue de base légale ;
- elle méconnaît les dispositions de l'article 17 du décret du 30 juillet 1987 ;
- elle est fondée à se prévaloir de l'autorité qui s'attache au jugement n°2105398, rendu le 23 juin 2023 et devenu définitif, par lequel le tribunal administratif de Montpellier a annulé l'arrêté du maire de Sérignan du 19 mai 2021 en tant qu'il l'a placée en disponibilité du 1er au 6 janvier 2021 et qu'il l'a privée d'un demi-traitement du 7 janvier au 31 juillet 2021 et a enjoint au maire de lui verser un demi-traitement du 7 janvier au 31 juillet 2021 ;
- elle est fondée à se prévaloir de l'autorité qui s'attache au jugement n°2106713, rendu le 23 juin 2023 et devenu définitif, par lequel le tribunal administratif de Montpellier a annulé l'arrête du maire de Sérignan du 14 octobre 2021 la plaçant en disponibilité d'office pour raison de santé en tant qu'il l'a privée d'un demi-traitement et a enjoint au maire de Sérignan de régulariser sa situation en lui versant un demi-traitement à compter du 1er octobre 2021, et ce, pendant la période couverte par l'arrêté.
Par un mémoire en défense, enregistré le 15 mars 2023, la commune de Sérignan, représentée par Me Gaspar, de la société d'exercice libéral par actions simplifiée Charrel et Associés, demande à la cour de rejeter la requête, de confirmer le jugement attaqué et de mettre à la charge de Mme B... la somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que les moyens soulevés ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;
- le décret n° 87-602 du 30 juillet 1987 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Delphine Teuly-Desportes, présidente-assesseure,
- les conclusions de Mme Michèle Torelli, rapporteure publique ;
- et les observations de Me Welcklen représentant la commune de Sérignan.
Considérant ce qui suit :
1. Mme B..., adjointe technique territoriale, exerçant des fonctions de chargée de propreté des espaces publics de la commune de Sérignan (Hérault), a été victime, le 11 mai 2017, d'un accident reconnu imputable au service par un arrêté du 5 février 2019. La commission de réforme a retenu, dans un avis émis le 11 février 2021, que l'état de santé de Mme B... était consolidé au 7 janvier 2020 et s'est prononcée en faveur de l'aménagement du poste de la requérante. Par un arrêté du 10 mars 2021, le maire de Sérignan a décidé de fixer la date de consolidation au 7 janvier 2020 et placé Mme B... en congé maladie ordinaire à compter de cette même date. Le même jour, le maire a informé l'intéressée d'une régularisation de sa situation à la suite du placement en congé maladie ordinaire à compter du 7 janvier 2020 et lui a notifié un trop-perçu d'un montant total de 6 127 euros au titre de la période du 8 janvier 2020 au 5 mars 2021. Le 19 mai 2021, Mme B... a été placée en disponibilité d'office en raison de l'épuisement de ses droits statutaires à congé maladie à compter du 1er janvier 2021 jusqu'au 1er août 2021. Le comité médical a estimé, dans un avis du 7 mars 2022, que Mme B... était apte à la reprise de ses fonctions sous réserve de deux aménagements de poste. Par courrier du 11 mars 2022, la commune de Sérignan a décidé d'affecter Mme B... sur un poste d'animatrice d'accueil de loisirs périscolaires / accueil de loisirs sans hébergement en école maternelle et primaire pour le groupe " ados ", à compter du 1er avril 2022. Mme B... relève appel du jugement, rendu le 21 octobre 2022, par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 10 mars 2021 fixant sa date de consolidation au 7 janvier 2020 et la plaçant en congé maladie ordinaire à compter de cette date et de la décision du même jour tirant les conséquences de la fin du congé de maladie imputable au service.
Sur le bien-fondé du jugement :
En ce qui concerne la légalité de l'arrêté du 10 mars 2021 :
2. Aux termes de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 : portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale applicable au litige : " Le fonctionnaire en activité a droit (...) 2°) à des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions (...)Toutefois, si la maladie provient (...) d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service et ou jusqu'à la mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident ".
3. La date de consolidation des séquelles d'un accident de service correspond au moment où ces lésions se fixent et acquièrent un caractère permanent, ce qui permet alors d'apprécier un taux d'incapacité permanente partielle qui a résulté de cet accident. La consolidation de l'état de santé ne peut, en revanche, être assimilée à la guérison et ne constitue pas davantage une circonstance impliquant nécessairement la fin des soins nécessités par cet accident.
4. Par l'arrêté en litige du 10 mars 2021, le maire de Sérignan, procédant au retrait de des arrêtés des 12 mai et 7 octobre 2020 maintenant l'imputabilité au service de l'accident subi par la fonctionnaire pour les périodes respectives du 1er janvier au 30 juin 2020 et du 1er juillet au 30 septembre 2020, a placé Mme B... en congé de maladie ordinaire à plein traitement à compter du 7 janvier 2020 au seul motif que son état de santé devait être consolidé à cette date. En procédant de la sorte, le maire de Sérignan, ainsi que le soutient à bon droit l'appelante, n'a pas statué sur son aptitude à reprendre son travail et a entaché sa décision d'une erreur de droit dès lors qu'en application des principes rappelés au point 3, la consolidation ne signifiait pas la guérison de la fonctionnaire.
5. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens soulevés à l'appui des conclusions à fin d'annulation ou sur la régularité du jugement, que Mme B... est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué du 21 octobre 2022, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 10 mars 2021.
En ce qui concerne la légalité de la décision du 10 mars 2021 :
6. En raison des effets qui s'y attachent, l'annulation pour excès de pouvoir d'un acte administratif, qu'il soit ou non réglementaire, emporte, lorsque le juge est saisi de conclusions recevables, l'annulation par voie de conséquence des décisions administratives consécutives qui n'auraient pu légalement être prises en l'absence de l'acte annulé ou qui sont en l'espèce intervenues en raison de l'acte annulé. Il en va ainsi, notamment, des décisions qui ont été prises en application de l'acte annulé et de celles dont l'acte annulé constitue la base légale.
7. Il incombe au juge de l'excès de pouvoir, lorsqu'il est saisi de conclusions recevables dirigées contre de telles décisions consécutives, de prononcer leur annulation par voie de conséquence, le cas échéant en relevant d'office un tel moyen qui découle de l'autorité absolue de chose jugée qui s'attache à l'annulation du premier acte.
8. Par la décision du 10 mars 2021, le maire de Sérignan a placé Mme B... en congé de maladie ordinaire sans traitement à compter du 8 décembre 2020 et l'a déclarée redevable d'un trop-perçu de traitement d'un montant de 6 127 euros pour la période du 7 janvier au 8 décembre 2020.
9. Mme B... soutient en appel, à l'appui de ses conclusions dirigées contre la décision du 10 mars 2021 la plaçant en congé de maladie ordinaire, que l'annulation de l'arrêté du même jour mettant fin au congé de maladie imputable au service emporte, par voie de conséquence, l'annulation de cette décision qui la place en congé de maladie sans traitement à compter du 8 décembre 2020 et en tire les conséquences en termes de trop-versé de rémunération.
10. Or, cette décision, qui trouve sa base légale dans l'arrêté du 10 mars 2021 mettant fin à son congé de maladie imputable au service, encourt l'annulation, par voie de conséquence, au regard de l'illégalité de cet arrêté retenue au point 4.
11. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens soulevés à l'appui des conclusions à fin d'annulation ou sur la régularité du jugement que Mme B... est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaquédu 21 octobre 2022, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande d'annulation de la décision du 10 mars 2021.
Sur les conclusions à fin d'injonction :
12. Eu égard au motif d'annulation retenu, le présent arrêt n'implique pas nécessairement que le maire de Sérignan place Mme B... en congé pour invalidité temporaire imputable au service à compter du 8 janvier 2020 et procède à une reconstitution de ses droits à traitement et carrière, mais seulement qu'il réexamine l'imputabilité au service du congé de maladie à compter de cette date en fixant la date de guérison. Or, il ne résulte pas de l'instruction que le maire se serait prononcé sur la date de reprise. Par suite, il y a lieu d'ordonner une telle injonction dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.
Sur les frais liés au litige :
13. Les dispositions de l'article L. 761-1 font obstacle à ce que soit mise à la charge de Mme B..., qui n'est pas dans cette instance, la partie perdante, la somme que sollicite la commune de Sérignan au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. En revanche, il y a lieu de mettre à la charge de la commune de Sérignan, sur le même fondement, la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par Mme B... et non compris dans les dépens.
D E C I D E :
Article 1er : Le jugement n° 2101852 du 21 octobre 2022 du tribunal administratif de Montpellier est annulé.
Article 2 : L'arrêté du 10 mars 2021 par lequel le maire de Sérignan a fixé la date de consolidation au 7 janvier 2020 et placé Mme B... en congé de maladie ordinaire à compter de cette date et la décision du même jour en tirant les conséquences pécuniaires sont annulés.
Article 3 : Il est enjoint au maire de Sérignan de procéder au réexamen de la situation de Mme B... s'agissant de l'imputabilité au service de son congé de maladie en se prononçant sur l'aptitude à une reprise du travail de cette dernière dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 4 : La commune de Sérignan versera la somme de 1 500 euros à Mme B... en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 6 : Les conclusions présentées par la commune de Sérignan en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 7 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B... et à la commune de Sérignan.
Délibéré après l'audience du 11 mars 2025 à laquelle siégeaient :
Mme Geslan-Demaret, présidente de chambre,
Mme Teuly-Desportes, présidente-assesseure,
Mme Dumez-Fauchille, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 25 mars 2025.
La rapporteure,
D. Teuly-Desportes
La présidente,
A. Geslan-Demaret
La greffière,
M-M. Maillat
La République mande et ordonne au préfet de l'Hérault, en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
N°22TL22609 2