Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Le syndicat Confédération générale du travail du centre hospitalier Ariège-Couserans a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler la note de service du 20 décembre 2019 du directeur du centre hospitalier Ariège-Couserans relative au temps de travail et de mettre à la charge du centre hospitalier Ariège-Couserans la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Par un jugement n°2000940 du 5 mai 2022, le tribunal administratif de Toulouse a annulé cette note de service du 20 décembre 2019 et a mis à la charge du centre hospitalier Ariège-Couserans une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 6 juillet 2022, le centre hospitalier Ariège-Couserans, représenté par Me Dubourdieu, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulouse du 5 mai 2022 ;
2°) de rejeter la demande du syndicat Confédération générale du travail du centre hospitalier Ariège-Couserans ;
3°) de mettre à la charge du syndicat Confédération générale du travail du centre hospitalier Ariège-Couserans la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail a bien été consulté avant l'édiction de la note de service litigieuse et n'a été privé d'aucune garantie en l'espèce ; un délai de quinze jours s'est écoulé entre l'envoi du projet de note de service, le 4 décembre 2019, et sa réunion le 19 décembre 2019 ; le comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail est réputé avoir rendu un avis négatif à l'issue d'un délai de deux mois à compter de la communication des informations relatives à sa consultation, soit en l'espèce le 4 février 2020 ; le comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail ne s'est d'ailleurs jamais plaint de l'irrégularité de sa consultation préalable ; dans sa séance du 19 décembre 2019, le comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail a émis un avis défavorable au projet de note de service, de sorte qu'un avis a bien été émis ; le comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail n'avait pas à être obligatoirement consulté préalablement à l'édiction de la note de service litigieuse ; à titre subsidiaire, les manquements invoqués par le syndicat dans la consultation de cette instance représentative n'ont pas exercé d'influence sur le sens de la note de service litigieuse ;
- seule la consultation du comité technique d'établissement était exigée en l'espèce et cet organe consultatif a été consulté le 19 décembre 2019 ;
- la commission médicale d'établissement et le directoire n'avaient pas à être consultés préalablement à l'édiction de la note de service litigieuse ;
- la note de service litigieuse ne méconnaît pas les dispositions du décret n°2002-9 du 4 janvier 2002 relatif au temps de travail et à l'organisation du travail dans les établissements mentionnés à l'article 2 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière, dès lors que la pause méridienne est prévue par l'article 7 de ce décret ;
- le contrat local sur l'organisation, l'aménagement et la réduction du temps de travail signé en 2002 n'est pas créateur de droits, de sorte que contrairement à ce que soutient le syndicat, la note de service litigieuse n'a pas eu pour effet de procéder à son abrogation implicite ;
- la note de service litigieuse ne méconnaît pas l'article 5 du décret n°2002-9 du 4 janvier 2002.
Par un mémoire en défense, enregistré le 12 juillet 2023, le syndicat Confédération générale du travail du centre hospitalier Ariège-Couserans, représenté par Me Faivre-Vilotte, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge du centre hospitalier Ariège-Couserans la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il fait valoir que :
- le comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail devait être consulté préalablement à l'édiction de la note de service litigieuse en application de l'article L. 4612-8 du code du travail dès lors que cette note de service constitue une décision modifiant les conditions de santé et de sécurité ou les conditions de travail au sens de ces dispositions ;
- le comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail n'a pas été consulté dans des conditions régulières dès lors qu'au cours de sa séance du 19 décembre 2019, il s'est estimé insuffisamment éclairé sur les incidences que pourrait avoir la note de service litigieuse sur les conditions de travail et la sécurité des agents et a considéré qu'il était nécessaire d'avoir recours à un expert agréé, à savoir le cabinet d'expertise SECAFI ; le 30 décembre 2019, le centre hospitalier a attaqué cette délibération devant le tribunal judiciaire de Foix qui, par un jugement du 9 juin 2020, devenu définitif, a considéré que le recours à une telle expertise était justifié ; contrairement à ce que soutient le centre hospitalier, le comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail n'a pas émis d'avis avant l'édiction de la note de service litigieuse ; la décision litigieuse est par suite entachée d'un vice de procédure ; le recours à un expert agréé constitue une garantie pour permettre au comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail de rendre un avis suffisamment éclairé sur le projet qui lui est soumis ; la circonstance que l'avis du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail ait été sollicité mais que le centre hospitalier n'ait pas attendu son avis pour donner un caractère exécutoire à la note de service entache nécessairement la procédure d'irrégularité ; cette irrégularité a également exercé une influence sur le sens de la décision ;
- la note de service litigieuse méconnaît l'article 5 du décret n°2002-9 du 4 janvier 2002 relatif au temps de travail et à l'organisation du travail dans les établissements mentionnés à l'article 2 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière ;
- s'agissant des autres moyens invoqués devant le tribunal administratif, il s'en remet à ses écritures de première instance.
Par une ordonnance du 25 janvier 2024, la clôture d'instruction a été fixée au 23 février 2024 à 12 heures.
La demande d'exécution du jugement du tribunal administratif de Toulouse du 5 mai 2022 présentée par le syndicat Confédération générale du travail du centre hospitalier Ariège-Couserans le 19 octobre 2022 a fait l'objet d'un classement administratif le 9 mai 2023.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de la santé publique ;
- le code du travail ;
- la loi n°86-33 du 9 janvier 1986 ;
- le décret n° 2002-9 du 4 janvier 2002 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Hélène Bentolila, conseillère,
- les conclusions de Mme Michèle Torelli, rapporteure publique,
- et les observations de Me Dubourdieu, représentant le centre hospitalier Ariège-Couserans et de Me Faivre-Vilotte, représentant le syndicat Confédération générale du travail du centre hospitalier Ariège-Couserans.
Considérant ce qui suit :
1. Par une note de service du 20 décembre 2019, le directeur du centre hospitalier Ariège-Couserans a modifié les règles relatives au temps de travail des agents à compter du 1er janvier 2020. Par un jugement du 5 mai 2022, dont le centre hospitalier Ariège-Couserans relève appel, le tribunal administratif de Toulouse a annulé cette note de service.
Sur le moyen d'annulation retenu par le tribunal :
2. Il ressort des termes du jugement attaqué que pour annuler la note de service litigieuse, le tribunal s'est fondé sur la circonstance selon laquelle la consultation du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail, préalablement à l'édiction de la note de service litigieuse, était irrégulière.
3. Aux termes de l'article L. 4612-8-1 du code du travail, applicable en l'espèce : " Le comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail est consulté avant toute décision d'aménagement important modifiant les conditions de santé et de sécurité ou les conditions de travail et, notamment, avant toute transformation importante des postes de travail découlant de la modification de l'outillage, d'un changement de produit ou de l'organisation du travail, avant toute modification des cadences et des normes de productivité liées ou non à la rémunération du travail ". Aux termes de l'article L. 4614-12 du même code, alors applicable : " Le comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail peut faire appel à un expert agréé : (...) / 2° En cas de projet important modifiant les conditions de santé et de sécurité ou les conditions de travail, prévu à l'article L. 4612-8-1. ". Aux termes de l'article L. 4614-13 du code du travail, alors applicable : " (...) l'employeur qui entend contester la nécessité de l'expertise, la désignation de l'expert (...), l'étendue ou le délai de l'expertise saisit le juge judiciaire dans un délai de quinze jours à compter de la délibération du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail (...). Le juge statue, en la forme des référés, en premier et dernier ressort, dans les dix jours suivant sa saisine. Cette saisine suspend l'exécution de la décision du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail (...) jusqu'à la notification du jugement (...) ".
4. Dans le cas où, sans y être légalement tenue, elle sollicite l'avis d'un organisme consultatif, l'administration doit procéder à cette consultation dans des conditions régulières.
5. Si les actes administratifs doivent être pris selon les formes et conformément aux procédures prévues par les lois et règlements, un vice affectant le déroulement d'une procédure administrative préalable, suivie à titre obligatoire ou facultatif, n'est de nature à entacher d'illégalité la décision prise que s'il ressort des pièces du dossier qu'il a été susceptible d'exercer, en l'espèce, une influence sur le sens de la décision prise ou qu'il a privé les intéressés d'une garantie.
6. Il ressort des pièces du dossier que par un courriel du 4 décembre 2019, la direction des ressources humaines et des soins du centre hospitalier Ariège-Couserans a informé les membres du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail de la tenue d'une séance le 19 décembre suivant de 10 heures 30 à 12 heures 30, comportant, au point n° 1 de l'ordre du jour, un avis sur la révision des modalités de gestion du temps de travail, et leur a transmis un projet de note de service à ce sujet. De plus, il ressort du procès-verbal de la séance du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail du 19 décembre 2019 que les membres de cette instance, estimant que les informations données par le chef d'établissement ne leur permettaient pas d'émettre un avis éclairé, ont adopté à l'unanimité un " avis défavorable (...) dans l'attente des conclusions de l'expertise SECAFI afin d'avoir un avis éclairé ". Les membres de ce comité ont ainsi décidé de solliciter, en application des dispositions précitées de l'article L. 4614-12 du code du travail, de recourir à un expert externe agréé afin de disposer d'une étude complète sur les enjeux et les impacts de ce projet. Contrairement à ce que soutient le centre hospitalier, le comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail ne saurait par conséquent ni être regardé comme ayant émis le 19 décembre 2019 un avis défavorable à l'adoption de la note de service litigieuse, ni être regardé comme ayant tacitement émis un avis défavorable deux mois après s'être vu communiquer les éléments adressés à ses membres par le courriel précité du 4 décembre 2019.
7. Il ressort également des pièces du dossier que le 30 décembre 2019, le centre hospitalier Ariège-Couserans a contesté devant le juge judiciaire la nécessité de recourir à l'expertise demandée par le comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail, comme le lui permettait l'article L. 4614-13 du code du travail précité. Toutefois, sans attendre l'intervention du jugement du président du tribunal judiciaire de Foix, statuant en la forme des référés, lequel a été rendu le 9 juin 2020, il a rendu applicable la note de service litigieuse dès le 1er janvier 2020. Au surplus, il ressort des termes de ce jugement que le juge des référés du tribunal judiciaire de Foix a considéré que le recours à cette expertise était fondé compte tenu de l'importance du projet instaurant des modifications apportées à la gestion du temps de travail.
8. Compte tenu de ces circonstances, et eu égard à la garantie que constitue le recours à un expert agréé pour permettre au comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail de rendre un avis suffisamment éclairé sur le projet soumis à son examen, c'est à bon droit que les premiers juges ont considéré que la note de service du 20 décembre 2019 avait été prise à l'issue d'une procédure irrégulière et était ainsi entachée d'illégalité. A cet égard, si le centre hospitalier, sans se prévaloir d'aucune disposition applicable en l'espèce, soutient que le comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail n'avait pas à être obligatoirement consulté préalablement à l'édiction de la note de service litigieuse compte tenu de la consultation du comité technique d'établissement, eu égard à ce qui a dit au point 4 du présent arrêt, à supposer-même que cette consultation n'ait pas été obligatoire, le centre hospitalier, qui a procédé à la consultation de cette instance, était tenu de la consulter dans des conditions régulières.
9. Il résulte de ce qui précède que le centre hospitalier Ariège-Couserans n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a annulé la note de service du 20 décembre 2019.
Sur les frais liés au litige :
10. D'une part, les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge du syndicat Confédération générale du travail du centre hospitalier Ariège-Couserans, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement de la somme que le centre hospitalier Ariège-Couserans demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.
11. D'autre part, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions du syndicat Confédération générale du travail du centre hospitalier Ariège-Couserans et de mettre à la charge du centre hospitalier Ariège-Couserans une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.
D E C I D E :
Article 1er : La requête du centre hospitalier Ariège-Couserans est rejetée.
Article 2 : Le centre hospitalier Ariège-Couserans versera au syndicat Confédération générale du travail du centre hospitalier Ariège-Couserans la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au centre hospitalier Ariège-Couserans et au syndicat Confédération générale du travail du centre hospitalier Ariège-Couserans.
Délibéré après l'audience du 7 janvier 2025, à laquelle siégeaient :
Mme Geslan-Demaret, présidente de chambre,
Mme Dumez-Fauchille, première conseillère,
Mme Bentolila, conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 21 janvier 2025.
La rapporteure,
H. Bentolila
La présidente,
A. Geslan-Demaret La greffière,
M-M. Maillat
La République mande et ordonne à la ministre du travail, de la santé, des solidarités et des familles en ce qui la concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N°22TL21535