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31/12/2024 | FRANCE | N°24TL00312

France | France, Cour administrative d'appel de TOULOUSE, 4ème chambre, 31 décembre 2024, 24TL00312


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler l'arrêté du 5 mai 2022 par lequel le maire de Caumont-sur-Durance a accordé un permis d'aménager à la société à responsabilité limitée Statim Provence pour la réalisation d'un lotissement composé de sept lots à bâtir, ainsi que la décision implicite par laquelle cette même autorité a rejeté son recours gracieux contre cet arrêté.



Par un jugement n° 2203311 rendu le 28 novemb

re 2023, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté la demande de M. B....

Procédure devant la cour ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler l'arrêté du 5 mai 2022 par lequel le maire de Caumont-sur-Durance a accordé un permis d'aménager à la société à responsabilité limitée Statim Provence pour la réalisation d'un lotissement composé de sept lots à bâtir, ainsi que la décision implicite par laquelle cette même autorité a rejeté son recours gracieux contre cet arrêté.

Par un jugement n° 2203311 rendu le 28 novembre 2023, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté la demande de M. B....

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 5 février 2024 et le 30 août 2024, M. A... B..., représenté par Me Héquet, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 28 novembre 2023 ;

2°) d'annuler l'arrêté du maire de Caumont-sur-Durance du 5 mai 2022 et la décision implicite rejetant son recours gracieux présenté contre cet arrêté ;

3°) de mettre à la charge solidaire de la commune de Caumont-sur-Durance et de la société Statim Provence le versement d'une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- il a intérêt à agir contre le permis d'aménager en litige ;

- il a respecté les délais de recours et a accompli les formalités de notification prévues par l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme ;

- les premiers juges n'ont pas tiré toutes les conséquences de l'acquiescement aux faits résultant de l'absence de production de tout mémoire par la commune ainsi que par la société pétitionnaire à la suite des mises en demeure qui leur avaient été adressées en application de l'article R. 612-6 du code de justice administrative ;

- le permis d'aménager a été signé par un auteur incompétent dès lors notamment que l'arrêté de délégation pris par le maire le 18 octobre 2021 n'a été ni transmis en préfecture, ni publié au recueil des actes administratifs de la commune ;

- le dossier de demande de permis d'aménager est insuffisant au regard des articles L. 441-4, R. 441-3 et R. 441-4 du code de l'urbanisme ;

- le permis d'aménager en litige méconnaît les articles UC 7 et UC 8 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune de Caumont-sur-Durance s'agissant de la distance minimale entre les constructions au sein du lotissement ;

- il méconnaît l'article UC 3 du même règlement en ce que la voie permettant l'accès au lot n° 7, sur laquelle la société pétitionnaire n'a aucun droit, ne présente pas les caractéristiques suffisantes et ne disposera plus d'une aire de retournement ;

- il méconnaît l'article UC 4 du même règlement en ce que le lot n° 7 ne pourra pas bénéficier d'un point d'eau incendie contrairement à ce qu'exige le règlement départemental de défense extérieure contre l'incendie de Vaucluse ;

- il méconnaît l'article L. 111-11 du code de l'urbanisme dès lors que le lot n° 7 ne pourra pas non plus être raccordé au réseau électrique.

Des mises en demeure ont été adressées à la commune de Caumont-sur-Durance et à la société Statim Provence le 13 mai 2024.

Par une ordonnance du 30 août 2024, la clôture de l'instruction a été fixée en dernier lieu au 13 septembre 2024.

Les parties ont été informées, le 4 novembre 2024, que la cour était susceptible de surseoir à statuer, en application de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme, au motif de l'incompétence du premier adjoint au maire de Caumont-sur-Durance pour signer l'arrêté en litige en l'absence de preuve de la transmission en préfecture de l'arrêté du 18 octobre 2021 portant délégation de fonctions dans le domaine de l'urbanisme.

La commune de Caumont-sur-Durance a produit une pièce, le 12 novembre 2024, en réponse à l'information ainsi adressée par la cour.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Jazeron, premier conseiller,

- les conclusions de M. Diard, rapporteur public,

- et les observations de Me Héquet, représentant l'appelant.

Une note en délibéré, produite par M. B..., représenté par Me Héquet, a été enregistrée le 20 décembre 2024.

Considérant ce qui suit :

1. La société Statim Provence a demandé, le 17 janvier 2022, un permis d'aménager portant sur la réalisation d'un lotissement nommé " Les Coquilles d'Argent ", composé de sept lots à bâtir à raison d'une surface totale de plancher maximale de 1 500 m2, sur une unité foncière présentant une superficie de 4 718 m2, constituée par les deux parcelles cadastrées section AH nos 113 et 115, situées route de Gadagne, lieu-dit " Picabrier ", sur le territoire de la commune de Caumont-sur-Durance (Vaucluse). Le maire de ladite commune a accordé ce permis d'aménager par un arrêté du 5 mai 2022. M. B..., propriétaire d'une parcelle voisine du terrain d'assiette du projet de lotissement, a présenté un recours gracieux contre cet arrêté le 26 juin 2022, lequel a été rejeté implicitement par le maire. Par sa requête, l'intéressé relève appel du jugement du 28 novembre 2023 par lequel le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté et de cette décision implicite de rejet.

Sur le bien-fondé du jugement :

2. L'article R. 612-6 du code de justice administrative dispose que : " Si, malgré une mise en demeure, la partie défenderesse n'a produit aucun mémoire, elle est réputée avoir acquiescé aux faits exposés dans les mémoires du requérant ". Malgré les mises en demeure qui leur ont été adressées par la cour le 13 mai 2024, la commune de Caumont-sur-Durance et la société Statim Provence n'ont produit aucune observation avant la clôture de l'instruction. Elles sont donc réputées avoir acquiescé aux faits exposés dans la requête. Il appartient cependant au juge de vérifier que ces faits ne sont pas contredits par l'instruction et qu'aucune règle d'ordre public ne s'oppose à ce qu'il soit donné satisfaction au requérant. En outre, l'acquiescement aux faits est par lui-même sans conséquence sur leur qualification juridique au regard des textes sur lesquels l'administration s'est fondée ou dont le requérant revendique l'application.

3. En premier lieu, aux termes de l'article L. 422-1 du code de l'urbanisme : " L'autorité compétente pour délivrer le permis de construire, d'aménager ou de démolir et pour se prononcer sur un projet faisant l'objet d'une déclaration préalable est : / (...) / a) Le maire, au nom de la commune, dans les communes qui se sont dotées d'un plan local d'urbanisme ou d'un document d'urbanisme en tenant lieu (...) ". Selon l'article L. 2122-18 du code général des collectivités territoriales : " Le maire est seul chargé de l'administration, mais il peut, sous sa surveillance et sa responsabilité, déléguer par arrêté une partie de ses fonctions à un ou plusieurs de ses adjoints et à des membres du conseil municipal. (...) ". L'article L. 2131-1 du même code, dans sa rédaction applicable au litige, mentionne que : " Les actes pris par les autorités communales sont exécutoires de plein droit dès qu'il a été procédé à leur publication ou affichage ou à leur notification aux intéressés ainsi qu'à leur transmission au représentant de l'Etat dans le département ou à son délégué dans l'arrondissement. / Le maire peut certifier, sous sa responsabilité, le caractère exécutoire de ces actes. / La preuve de la réception des actes par le représentant de l'Etat dans le département ou son délégué dans l'arrondissement peut être apportée par tout moyen. L'accusé de réception, qui est immédiatement délivré, peut être utilisé à cet effet mais n'est pas une condition du caractère exécutoire des actes. / (...) ".

4. Le permis d'aménager en litige a été signé, pour le maire de Caumont-sur-Durance, par M. C... D..., premier adjoint. Il ressort des pièces produites par la commune en réponse aux lettres adressées par le tribunal administratif de Nîmes, puis par la cour, sur le fondement de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme, que, par un premier arrêté pris le 3 août 2020, le maire a accordé à M. D... une délégation de fonctions concernant les travaux, la voirie et les canaux, ainsi que les services techniques et les marchés publics, et que, par un nouvel arrêté pris le 18 octobre 2021, le maire a modifié ce premier arrêté en accordant à l'intéressé une délégation de fonctions portant sur le domaine de l'urbanisme et, notamment, sur la délivrance des autorisations d'urbanisme. Si la commune a justifié de l'accomplissement de l'ensemble des formalités requises pour établir le caractère exécutoire de l'arrêté du 3 août 2020, il résulte de ce qui vient d'être dit que cet arrêté ne couvrait pas le domaine de l'urbanisme, si bien qu'il ne permettait pas à M. D... de signer compétemment le permis d'aménager en litige. Si la commune a également justifié de l'affichage de l'arrêté du 18 octobre 2021 sur les panneaux prévus à cet effet aux portes de la mairie pendant une durée continue de deux mois, de sorte que son absence de publication au recueil des actes administratifs de la commune, à la supposer même avérée, serait sans incidence sur son opposabilité, l'arrêté en cause ne comporte pas la mention de sa transmission aux services du préfet de Vaucluse et la commune n'a pas produit le moindre commencement de preuve d'une telle transmission. Par suite, l'arrêté du 18 octobre 2021 donnant délégation à M. D... pour signer les autorisations d'urbanisme ne peut être regardé comme étant devenu exécutoire à la date du permis d'aménager en litige et l'appelant est donc fondé à soutenir que ce permis a été pris par un auteur incompétent.

5. En deuxième lieu, selon l'article L. 441-4 du code de l'urbanisme : " La demande de permis d'aménager concernant un lotissement ne peut être instruite que si la personne qui désire entreprendre des travaux soumis à une autorisation a fait appel aux compétences nécessaires en matière d'architecture, d'urbanisme et de paysage pour établir le projet architectural, paysager et environnemental dont, pour les lotissements de surface de terrain à aménager supérieure à un seuil fixé par décret en Conseil d'Etat, celles d'un architecte au sens de l'article 9 de la loi n° 77-2 du 3 janvier 1977 sur l'architecture ou celles d'un paysagiste concepteur au sens de l'article 174 de la loi n° 2016-1087 du 8 août 2016 pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages. ". L'article R. 441-3 du même code mentionne que : " Le projet d'aménagement comprend une notice précisant : / 1° L'état initial du terrain et de ses abords et indiquant, s'il y a lieu, les constructions, la végétation et les éléments paysagers existants ; / 2° Les partis retenus pour assurer l'insertion du projet dans son environnement et la prise en compte des paysages, faisant apparaître, en fonction des caractéristiques du projet : / a) L'aménagement du terrain, en indiquant ce qui est modifié ou supprimé ; / b) La composition et l'organisation du projet, la prise en compte des constructions ou paysages avoisinants, le traitement minéral et végétal des voies et espaces publics et collectifs ; / (...) ". En outre, l'article R. 441-4 du même code prévoit que : " Le projet d'aménagement comprend également : / 1° Un plan de l'état actuel du terrain à aménager et de ses abords faisant apparaître les constructions et les plantations existantes (...) ; / 2° Un plan coté dans les trois dimensions faisant apparaître la composition d'ensemble du projet et les plantations à conserver ou à créer. ".

6. La circonstance que le dossier de demande de permis d'aménager ne comporterait pas l'ensemble des documents exigés par les dispositions du code de l'urbanisme, ou que les documents produits seraient insuffisants, imprécis ou comporteraient des inexactitudes, n'est susceptible d'entacher d'illégalité le permis qui a été accordé que dans le cas où les omissions, inexactitudes ou insuffisances entachant le dossier ont été de nature à fausser l'appréciation portée par l'administration sur la conformité du projet à la réglementation applicable.

7. D'une part, il ressort des pièces du dossier, notamment des mentions portées sur le formulaire de demande de permis d'aménager, que le dossier de demande présenté par la société Statim Provence contenait l'ensemble des pièces dont la production est imposée par les articles R. 411-1 et suivants du code de l'urbanisme à l'appui d'une telle demande. Il ressort en outre du même formulaire que le projet architectural, paysager et environnemental du lotissement a été réalisé par un architecte, lequel a d'ailleurs apposé sa signature tant sur ledit formulaire que sur l'ensemble des pièces graphiques versées au dossier, ainsi que l'exige l'article R. 441-4-2 du même code pour tout projet de lotissement dont le terrain d'assiette présente une superficie de plus de 2 500 m². D'autre part, la notice de présentation produite avec la demande de permis mentionne que les parcelles à lotir comportent pour partie un sol rocheux pourvu de " peu de végétation " et la notice hydraulique également jointe à cette demande précise que le reste de l'unité foncière est constitué d'un " cailloutis compact sur lequel pousse une végétation de garrigue du type chênes verts et cades ". La notice de présentation indique que le point culminant rocheux sera conservé en l'état sous forme d'un " espace naturel commun non constructible " et le plan de composition du lotissement permet d'identifier à l'aide d'une légende spécifique tant les arbres à planter que les plantations basses et végétaux existants à conserver. L'article II-13 du règlement du lotissement prévoit par ailleurs la conservation du maximum d'arbres existants et leur remplacement en nombre identique en cas de suppression. Le service instructeur a ainsi été mis à même d'apprécier en connaissance de cause la conformité du projet de lotissement aux règles d'urbanisme applicables en matière d'espaces libres et de plantations. Le moyen tiré de l'insuffisance du dossier de demande de permis d'aménager doit donc être écarté.

8. En troisième lieu, aux termes de l'article R. 151-21 du code de l'urbanisme : " (...) / Dans le cas d'un lotissement ou dans celui de la construction, sur une unité foncière ou sur plusieurs unités foncières contiguës, de plusieurs bâtiments dont le terrain d'assiette doit faire l'objet d'une division en propriété ou en jouissance, l'ensemble du projet est apprécié au regard de la totalité des règles édictées par le plan local d'urbanisme, sauf si le règlement de ce plan s'y oppose. ". Selon l'article UC 7 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune de Caumont-sur-Durance, applicable à la zone UC dans laquelle se situe le terrain d'assiette du projet de lotissement en litige : " Implantation des constructions par rapport aux limites séparatives : / Lorsque les constructions ne jouxtent pas les limites séparatives, la distance comptée horizontalement de tout point du bâtiment au point de la limite parcellaire qui en est le plus rapproché doit être au moins égale à la moitié de la différence de niveau entre ces deux points, sans pouvoir être inférieure à 4 mètres. ". Et aux termes de l'article UC 8 du même règlement : " Implantation des constructions les unes par rapport aux autres sur une même propriété : / Deux constructions non contiguës, implantées sur une même propriété, doivent respecter l'une par rapport à l'autre une distance au moins égale à 5 mètres. ".

9. Les lotissements, qui constituent des opérations d'aménagement ayant pour but l'implantation de constructions, doivent respecter les dispositions tendant à la maîtrise de l'occupation des sols édictées par le code de l'urbanisme ou les documents locaux d'urbanisme, même s'ils n'ont pour objet ou pour effet, à un stade où il n'existe pas encore de projet concret de construction, que de permettre le détachement d'un ou plusieurs lots d'une unité foncière. Il appartient, en conséquence, à l'autorité administrative de refuser le permis d'aménager ou de s'opposer à la déclaration préalable notamment lorsque, compte tenu de ses caractéristiques telles qu'elles ressortent des pièces du dossier qui lui est soumis, un projet de lotissement permet l'implantation de constructions dont la conformité avec les règles d'urbanisme ne pourra être ultérieurement assurée lors de la délivrance des autorisations d'urbanisme requises.

10. Il ressort des pièces du dossier que le règlement du lotissement projeté, produit par la société Statim Provence à l'appui de sa demande de permis d'aménager, mentionne, en son article II-7, d'une part, que : " Lorsque les constructions ne jouxtent pas les limites séparatives du périmètre du lotissement, la distance comptée horizontalement de tout point du bâtiment au point de la limite parcellaire qui en est le plus rapproché doit être au moins égale à la moitié de la différence de niveau entre ces deux points, sans pouvoir être inférieure à 4 mètres " et, d'autre part, que " Lorsque les constructions ne jouxtent pas les limites séparatives (correspondant aux limites entre les lots 1 à 7 créés), la distance comptée horizontalement de tout point du bâtiment au point de la limite séparative des lots 1 à 7 créés doit être d'un minimum de 3 mètres ". L'article II-8 du même règlement prévoit par ailleurs que : " Deux constructions non contiguës, implantées sur une même propriété, doivent respecter l'une par rapport à l'autre une distance au moins égale à 5 mètres ". Eu égard aux termes mêmes de ces deux articles, le règlement du lotissement projeté permettra d'assurer par lui-même le respect, par les futures constructions à implanter, des distances minimales de 4 mètres et 5 mètres respectivement prescrites par les articles UC 7 et UC 8 du règlement du plan local d'urbanisme. Dans ces conditions et alors au surplus que le plan de composition du lotissement matérialise pour chacun des lots le tracé de la " zone constructible " correspondant aux distances ainsi prévues, le moyen tiré de ce que le permis d'aménager en litige méconnaîtrait les articles UC 7 et UC 8 doit être écarté.

11. En quatrième lieu, selon l'article UC 3 du règlement du plan local d'urbanisme : " Accès et voirie : / Pour être constructible, un terrain doit avoir accès à une voie publique ou privée présentant les caractéristiques techniques adaptées aux usages qu'elle supporte et aux opérations qu'elle dessert (défense contre l'incendie, sécurité civile, ramassage des ordures). / Les accès doivent également ne pas présenter de risque pour la sécurité des usagers des voies publiques ou pour celle des personnes utilisant ces accès. Cette sécurité doit être appréciée compte tenu notamment de la position des accès, de leur configuration et de la nature et de l'intensité du trafic. / Les voies nouvelles se terminant en impasse doivent être aménagées de telle sorte que les véhicules puissent faire demi-tour. / Ces voies doivent avoir une largeur minimale de 4 mètres pour la desserte d'une ou deux constructions et de 5 mètres pour plus de deux constructions ou pour un chemin de longueur supérieure à 50 mètres. / (...) ".

12. Le permis d'aménager, qui est délivré sous réserve des droits des tiers, a pour seul objet d'assurer la conformité du projet qu'il autorise avec la réglementation d'urbanisme. Dès lors, si l'autorité administrative et le juge doivent, pour l'application des règles d'urbanisme relatives à la desserte et à l'accès des terrains, s'assurer de l'existence d'une desserte suffisante de la parcelle par une voie ouverte à la circulation publique et, le cas échéant, de l''existence d'un titre créant une servitude de passage donnant accès à cette voie, il ne leur appartient de vérifier ni la validité de cette servitude, ni l'existence d'un titre permettant l'utilisation de la voie qu'elle dessert, si elle est privée, dès lors que celle-ci est ouverte à la circulation publique.

13. Il ressort des pièces du dossier que si les lots nos 1 à 6 seront accessibles par une voirie interne aménagée depuis la route de Gadagne située à l'ouest du terrain d'assiette de l'opération, le lot n° 7 ne sera accessible que par l'impasse de Picabrier située à l'est de l'unité foncière. D'une part, il ne ressort pas des photographies versées au dossier par l'appelant et il n'est au demeurant pas même allégué que la voie privée constituée par cette impasse, laquelle permet déjà de desservir une douzaine de constructions, ne serait pas ouverte à la circulation publique. Par conséquent, la société pétitionnaire n'avait pas à justifier de l'existence d'une servitude de passage établie à son profit sur l'impasse de Picabrier à l'appui de sa demande de permis d'aménager. D'autre part, s'il est vrai que ladite impasse comporte à son extrémité une placette de retournement empiétant pour partie sur la parcelle cadastrée section AH n° 113, il ressort tant de la notice de présentation que du plan de composition du projet que cette parcelle n'a pas été incluse pour l'intégralité de sa surface dans le périmètre du lotissement et qu'une superficie de 34 m2 correspondant à une " servitude de fait " a été réservée sur sa partie sud-est, si bien que la placette de retournement existante ne sera pas supprimée, mais verra seulement sa surface réduite, sans qu'aucun élément produit au dossier ne permette de regarder l'emprise restante comme étant insuffisante pour permettre le retournement des véhicules susceptibles de fréquenter cette voie. Dans ces conditions et alors que le requérant ne peut par ailleurs utilement se prévaloir des dispositions du dernier alinéa précité de l'article UC 3 du règlement du plan local d'urbanisme dès lors que le projet n'a pas pour objet de créer une nouvelle impasse, il n'apparaît pas que, malgré sa largeur d'un peu moins de 3 mètres à certains endroits, la voie en litige ne serait pas adaptée aux usages qu'elle supporte, qu'elle ne pourrait pas absorber le surcroît de trafic qui résulterait de l'ajout d'une maison individuelle sur le lot n° 7 ou qu'elle ne serait pas accessible aux véhicules de secours dans des conditions suffisantes de sécurité. Il résulte au surplus des termes mêmes de l'arrêté contesté que le maire y a repris l'ensemble des prescriptions émises tant par l'agence routière en charge de la gestion de la voirie que par le service départemental d'incendie et de secours de Vaucluse et par le service des déchets de la communauté d'agglomération du Grand Avignon. Dès lors, le permis d'aménager attaqué ne méconnaît pas les dispositions de l'article UC 3 du règlement du plan local d'urbanisme.

14. En cinquième lieu, selon l'article UC 4 du règlement du plan local d'urbanisme : " Desserte par les réseaux : / (...) / 5 - Défense extérieure contre l'incendie : / Les futurs projets devront respecter les règles précisées au titre IX du présent règlement (dispositions issues du règlement départemental de défense extérieure contre l'incendie - RDDECI). ". Le " tableau récapitulatif des besoins en eau ", inséré au titre IX ainsi mentionné, impose, s'agissant des lotissements composés d'habitations individuelles d'une surface de plancher inférieure ou égale à 250 mètres carrés, la présence d'un poteau d'incendie présentant un débit de 30 mètres cubes par heure pendant une heure situé à moins de 200 mètres des bâtiments ou d'un point d'eau naturel ou artificiel d'une capacité de 30 mètres cubes situé à moins de 150 mètres.

15. Il ressort des pièces du dossier de demande de permis d'aménager, notamment des mentions du règlement du lotissement projeté, que la société Statim Provence a prévu d'assurer la défense extérieure de l'opération contre l'incendie par la mise en place d'un poteau incendie, positionné sur la voirie interne au niveau d'une aire de retournement à aménager au droit de l'accès sur la route de Gadagne et dont les caractéristiques techniques seront contrôlées par le service départemental d'incendie et de secours de Vaucluse. Si l'appelant soutient que l'hydrant prévu à cet emplacement ne pourra pas desservir le lot n° 7 en raison de la présence d'un rocher présentant un dénivelé important qui sépare ce lot du reste du projet, il ressort toutefois du règlement du lotissement que la société pétitionnaire a prévu de garder en espace commun une bande de terrain située entre les lots nos 3 et 4, reliant l'aire de retournement au lot n° 7 en longeant le rocher sur moins de 200 mètres de longueur, pour alimenter ledit lot n° 7 en eau potable via une canalisation empruntant une servitude spécifique, laquelle est représentée sur le plan de composition. Par suite et alors qu'il a été rappelé au point 13 du présent arrêt que le maire a assorti le permis des prescriptions émises par le service départemental d'incendie et de secours de Vaucluse, rien ne permet de supposer qu'une maison ne pourrait pas être réalisée sur le lot n° 7 dans le respect des exigences de l'article UC 4 et du titre IX du règlement du plan local d'urbanisme. Par conséquent, le moyen soulevé en ce sens ne peut qu'être écarté.

16. En sixième lieu, aux termes de l'article L. 111-11 du code de l'urbanisme : " Lorsque, compte tenu de la destination de la construction ou de l'aménagement projeté, des travaux portant sur les réseaux publics de distribution d'eau, d'assainissement ou de distribution d'électricité sont nécessaires pour assurer la desserte du projet, le permis de construire ou d'aménager ne peut être accordé si l'autorité compétente n'est pas en mesure d'indiquer dans quel délai et par quelle collectivité publique ou par quel concessionnaire de service public ces travaux doivent être exécutés. / (...) ". Il résulte de ces dispositions que le permis doit être refusé lorsque, d'une part, des travaux d'extension ou de renforcement de la capacité des réseaux publics sont nécessaires à la desserte du projet et, d'autre part, l'autorité compétente n'est pas en mesure d'indiquer dans quel délai et par quelle collectivité ou par quel concessionnaire de service public les travaux en cause doivent être exécutés, après avoir, le cas échéant, accompli les diligences appropriées pour recueillir les informations nécessaires à son appréciation.

17. Le formulaire de demande de permis d'aménager indique que le lotissement projeté nécessitera une puissance électrique de 84 kilovolts-ampères triphasés et la notice mentionne que le réseau souterrain interne à l'opération sera posé par l'aménageur et raccordé sur un coffret préexistant au sud du terrain d'assiette du projet. Il ressort par ailleurs des visas de l'arrêté en litige que la société Enedis a rendu un avis sur le projet sur la base de la puissance demandée par la société pétitionnaire et que celle-ci a donné son accord pour la prise en charge des travaux nécessaires pour le raccordement du lotissement au réseau électrique, lesquels consistent en un simple allongement des câbles sur une longueur de 80 mètres, selon les propres écritures du requérant. Eu égard à leur ampleur limitée, les travaux en cause doivent être regardés comme relevant d'un simple branchement au réseau et ne constituent pas des travaux d'extension ou de renforcement au sens et pour l'application des dispositions de l'article L. 111-11 du code de l'urbanisme. En conséquence et alors qu'il ne ressort en outre d'aucune pièce du dossier que le lot n° 7 ne pourrait pas être raccordé au réseau électrique interne du lotissement, le moyen invoqué sur le fondement de l'article précité ne peut qu'être écarté comme inopérant.

Sur la régularisation du permis :

18. L'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme dispose que : " Sans préjudice de la mise en œuvre de l'article L. 600-5, le juge administratif qui, saisi de conclusions dirigées contre un permis de construire, de démolir ou d'aménager ou contre une décision de non-opposition à déclaration préalable estime, après avoir constaté que les autres moyens ne sont pas fondés, qu'un vice entraînant l'illégalité de cet acte est susceptible d'être régularisé, sursoit à statuer, après avoir invité les parties à présenter leurs observations, jusqu'à l'expiration du délai qu'il fixe pour cette régularisation, même après l'achèvement des travaux. / (...) ".

19. Il résulte de tout ce qui précède que seul est fondé le moyen, retenu au point 4 du présent arrêt, tiré de l'incompétence du signataire du permis d'aménager en litige. Le vice ainsi relevé étant susceptible d'être régularisé par un permis d'aménager modificatif et la société pétitionnaire n'ayant pas indiqué à la cour qu'elle ne souhaitait pas bénéficier d'une mesure de régularisation, il y a lieu de surseoir à statuer sur la légalité du permis d'aménager en cause, pendant un délai de deux mois suivant la notification du présent arrêt, dans l'attente d'une mesure de régularisation éventuelle permettant de remédier au vice ainsi constaté.

D E C I D E :

Article 1er : Il est sursis à statuer sur la requête présentée par M. B..., pendant un délai de deux mois suivant la notification du présent arrêt, dans l'attente d'une mesure de régularisation permettant de remédier au vice relevé au point 4 de cet arrêt.

Article 2 : Tous droits et moyens des parties sur lesquels il n'est pas expressément statué par le présent arrêt sont réservés jusqu'à la fin de l'instance.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B..., à la commune de Caumont-sur-Durance et à la société à responsabilité limitée Statim Provence.

Délibéré après l'audience du 19 décembre 2024, à laquelle siégeaient :

M. Chabert, président,

M. Teulière, président assesseur,

M. Jazeron, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 31 décembre 2024.

Le rapporteur,

F. JazeronLe président,

D. Chabert

La greffière,

N. Baali

La République mande et ordonne au préfet de Vaucluse, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 24TL00312


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de TOULOUSE
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 24TL00312
Date de la décision : 31/12/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. Chabert
Rapporteur ?: M. Florian Jazeron
Rapporteur public ?: M. Diard
Avocat(s) : HEQUET

Origine de la décision
Date de l'import : 05/01/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-12-31;24tl00312 ?
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