Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler la décision du 24 novembre 2020 par laquelle le directeur des ressources humaines des ministères sociaux a rejeté sa demande de rupture conventionnelle de la fonction publique et la décision du 18 décembre 2020 par laquelle cette même autorité a rejeté son recours gracieux dirigé contre cette décision, d'enjoindre à l'Etat de réexaminer sa demande et de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Par un jugement n° 2100856 du 21 octobre 2022, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 21 décembre 2022, Mme B... A..., représentée par Me Manya, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Montpellier du 21 octobre 2022 ;
2°) d'annuler la décision du 24 novembre 2020 par laquelle le directeur des ressources humaines des ministères sociaux a rejeté sa demande de rupture conventionnelle de la fonction publique, ensemble la décision du 18 décembre 2020 par laquelle cette même autorité a rejeté son recours gracieux dirigé contre cette décision ;
3°) d'enjoindre à l'Etat de réexaminer sa demande de rupture conventionnelle ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- les décisions du 24 novembre 2020 et du 18 décembre 2020 ont été signées par une autorité incompétente ;
- le refus de sa demande de rupture conventionnelle est intervenu à l'issue d'une procédure irrégulière dès lors qu'elle n'a pas été informée de son droit à être assistée durant l'entretien faisant suite à sa demande de rupture conventionnelle, que cet entretien n'a pas fait l'objet d'un compte-rendu partagé avec l'agent et a été très informel, en méconnaissance des articles 3 et 4 du décret n°2019-1593 du 31 décembre 2019 ;
- le refus de rupture conventionnelle qui lui a été opposé est entaché d'erreur de droit en ce qu'il se fonde sur ce qu'une commission ad hoc devait se réunir alors qu'elle n'était à ce jour soi-disant pas encore créée ;
- ce refus est discriminatoire dès lors qu'un autre agent a pu, dans le même temps, bénéficier d'une rupture conventionnelle.
Par un mémoire en défense, enregistré le 5 juillet 2023, le ministre du travail, du plein-emploi et de l'insertion conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que les moyens soulevés par Mme A... ne sont pas fondés.
Par ordonnance du 8 novembre 2023, la clôture d'instruction a été fixée au 11 décembre 2023.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;
- la loi n° 2019-828 du 6 août 2019 ;
- le décret n°2005-850 du 27 juillet 2005 modifié par le décret n°2013-810 du 9 septembre 2013 ;
- le décret n° 2019-1593 du 31 décembre 2019 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Virginie Dumez-Fauchille, première conseillère,
- et les conclusions de Mme Michèle Torelli, rapporteure publique.
Considérant ce qui suit :
1. Mme A..., agent titulaire de la fonction publique d'Etat affectée à l'unité départementale des Pyrénées-Orientales de la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi d'Occitanie, a présenté, le 14 février 2020, une demande de rupture conventionnelle de la fonction publique. Par décision du 24 novembre 2020, le directeur des ressources humaines des ministères sociaux a rejeté sa demande. Par décision du 18 décembre 2020, la ministre du travail, de l'emploi et de l'insertion a rejeté le recours gracieux formé par Mme A... contre cette décision. Par jugement du 21 octobre 2022, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté la demande de Mme A... tendant à l'annulation des décisions du 24 novembre 2020 et du 18 décembre 2020, à ce qu'il soit enjoint à l'Etat de réexaminer sa demande de rupture conventionnelle et à ce que lui soit versée une somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Mme A... relève appel de ce jugement.
Sur les conclusions aux fins d'annulation :
En ce qui concerne la décision du 24 novembre 2020 :
2. En premier lieu, comme l'ont à bon droit relevé les premiers juges, en vertu de l'article 1er du décret du 27 juillet 2005 modifié par un décret du 9 septembre 2013 régulièrement publié, relatif aux délégations de signature des membres du gouvernement, M. E..., nommé directeur des ressources humaines au secrétariat général des ministères chargés des affaires sociales à compter du 26 novembre 2018 par décret du 24 octobre 2018, et signataire de la décision attaquée, avait reçu compétence à l'effet de signer l'ensemble des actes, à l'exception des décrets, relatifs aux affaires des services placés sous leur autorité. Par suite, le moyen tiré de ce que la décision attaquée a été prise par une autorité incompétente manque en fait.
3. En deuxième lieu, aux termes de l'article 72 de la loi du 6 août 2019 de transformation de la fonction publique : " I. - L'administration et le fonctionnaire mentionné à l'article 2 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 précitée, l'autorité territoriale et le fonctionnaire mentionné à l'article 2 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 précitée, les établissements mentionnés à l'article 2 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 précitée et les fonctionnaires de ces établissements peuvent convenir en commun des conditions de la cessation définitive des fonctions, qui entraîne radiation des cadres et perte de la qualité de fonctionnaire. La rupture conventionnelle, exclusive des cas mentionnés à l'article 24 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 précitée, ne peut être imposée par l'une ou l'autre des parties. /La rupture conventionnelle résulte d'une convention signée par les deux parties. La convention de rupture définit les conditions de celle-ci, notamment le montant de l'indemnité spécifique de rupture conventionnelle, qui ne peut pas être inférieur à un montant fixé par décret. /Durant la procédure de rupture conventionnelle, le fonctionnaire peut se faire assister par un conseiller désigné par une organisation syndicale de son choix. ". Aux termes de l'article 2 du décret du 31 décembre 2019 relatif à la procédure de rupture conventionnelle dans la fonction publique : " La procédure de la rupture conventionnelle peut être engagée à l'initiative du fonctionnaire ou de l'administration, de l'autorité territoriale ou de l'établissement dont il relève. (...) Dans les conditions prévues aux articles 3 et 4, un entretien relatif à cette demande se tient à une date fixée au moins dix jours francs et au plus un mois après la réception de la lettre de demande de rupture conventionnelle. (...) ". Aux termes de l'article 3 du même décret, dans sa version résultant de la décision du Conseil d'Etat du 13 décembre 2021 n° 439031, 439216, 439217 : " Le fonctionnaire qui souhaite se faire assister (...) au cours du ou des entretiens en informe au préalable l'autorité avec laquelle la procédure est engagée. (...) ".Aux termes de l'article 4 du même décret : " Le ou les entretiens préalables prévus à l'article 2 portent principalement sur : 1° Les motifs de la demande et le principe de la rupture conventionnelle ; 2° La fixation de la date de la cessation définitive des fonctions ; 3° Le montant envisagé de l'indemnité spécifique de rupture conventionnelle ; 4° Les conséquences de la cessation définitive des fonctions, notamment le bénéfice de l'assurance chômage, l'obligation de remboursement prévue à l'article 8 et le respect des obligations déontologiques prévues aux articles 25 octies et 26 de la loi du 13 juillet 1983 susvisée et à l'article 432-13 du code pénal. ".
4. Il ressort des pièces du dossier que Mme A... a bénéficié de l'entretien prévu par les dispositions précitées de l'article 2 du décret du 31 décembre 2019, le 24 février 2020, soit 10 jours après l'envoi de sa demande de rupture conventionnelle. Mme A... n'est en conséquence pas fondée à soutenir qu'un délai trop important s'est écoulé entre sa demande et cet entretien. Par ailleurs il ne résulte ni des dispositions précitées du décret du 31 décembre 2019 ni d'aucune disposition législative ou réglementaire que l'agent devrait être informé de son droit d'être assisté lors de l'entretien, ni de ce que cet entretien devrait faire l'objet d'un compte-rendu partagé avec l'agent. Enfin, la requérante n'établit pas que l'entretien n'a pas porté sur les points mentionnés à l'article 4 du décret. Par suite, la requérante n'est pas fondée à soutenir que la décision attaquée a été prise à l'issue d'une procédure irrégulière.
5. En troisième lieu, certes Mme A... a reçu de l'adjointe au sous-directeur de la gestion administrative et de la paye de la direction des ressources humaines des ministères sociaux un courriel en date du 4 septembre 2020 mentionnant, notamment, le souhait de mettre en place une commission afin de gérer ces demandes dans le cadre d'une enveloppe budgétaire fermée, et l'examen à venir de sa propre demande par une telle commission. Toutefois, un tel courriel fait seulement état d'orientations envisagées, à cette date, pour le traitement des demandes de rupture conventionnelle, et il ne ressort pas des pièces du dossier que le refus opposé le 24 novembre 2020 à la demande de Mme A... serait motivé par le défaut de constitution de la commission en cause. Par suite, Mme A... n'est pas fondée à soutenir que la décision attaquée est entachée d'erreur de droit.
6. En dernier lieu, il résulte des dispositions du I de l'article 72 de la loi du 6 août 2019 de transformation de la fonction publique que la rupture conventionnelle, soumise à un accord entre l'administration et son agent sans pouvoir être imposée par l'une ou l'autre des parties, ne constitue pas un droit pour celui-ci. Saisie d'une demande de rupture conventionnelle présentée sur le fondement de ces dispositions, l'administration peut la rejeter dans l'intérêt du service. Il n'appartient au juge de l'excès de pouvoir de censurer l'appréciation ainsi portée par l'autorité administrative qu'en cas d'erreur manifeste.
7. Par ailleurs, il appartient au juge administratif, dans la conduite de la procédure inquisitoire, de demander aux parties de lui fournir tous les éléments d'appréciation de nature à établir sa conviction. Cette responsabilité doit, dès lors qu'il est soutenu qu'une mesure a pu être empreinte de discrimination, s'exercer en tenant compte des difficultés propres à l'administration de la preuve en ce domaine et des exigences qui s'attachent aux principes à valeur constitutionnelle des droits de la défense et de l'égalité de traitement des personnes. S'il appartient au requérant qui s'estime lésé par une telle mesure de soumettre au juge des éléments de fait susceptibles de faire présumer une atteinte à ce dernier principe, il incombe au défendeur de produire tous ceux permettant d'établir que la décision attaquée repose sur des éléments objectifs étrangers à toute discrimination. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si la décision contestée devant lui a été ou non prise pour des motifs entachés de discrimination, se détermine au vu de ces échanges contradictoires. En cas de doute, il lui appartient de compléter ces échanges en ordonnant toute mesure d'instruction utile.
8. La requérante se borne à se prévaloir de ce qu'un autre agent de la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi a, à une époque contemporaine de l'examen de sa propre demande, obtenu le bénéfice d'une rupture conventionnelle. Au regard de cette seule circonstance qu'invoque la requérante, cette dernière n'est pas fondée à soutenir que la décision attaquée présenterait un caractère discriminatoire et serait entachée d'erreur manifeste d'appréciation.
En ce qui concerne la décision du 18 décembre 2020 :
9. En premier lieu, par arrêté du 5 novembre 2020, M. E..., nommé directeur des ressources humaines au secrétariat général des ministères chargés des affaires sociales à compter du 26 octobre 2018 par décret du 24 octobre 2018, a donné délégation à Mme D..., chef de la mission des procédures précontentieuses et signataire de la décision attaquée, à l'effet de signer tous actes relevant du périmètre de la mission concernée, en cas d'absence ou d'empêchement de M. C..., chef du département du contentieux et du précontentieux. Par suite, n'étant par ailleurs pas sérieusement contesté que M. (F...( était absent ou empêché, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de la décision attaquée manque en fait.
10. En second lieu, à supposer que Mme A... ait entendu soulever contre la décision attaquée les mêmes moyens que ceux dont elle se prévaut à l'encontre de la décision du 24 novembre 2020, ceux-ci doivent être écartés pour les mêmes motifs que ceux exposés aux points 4 à 8.
11. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté ses demandes.
Sur les conclusions à fin d'injonction :
12. Le présent arrêt, qui rejette les conclusions aux fins d'annulation de la requête, n'appelle aucune mesure d'exécution au titre des articles L. 911-1 et suivants du code de justice administrative. Par suite, les conclusions aux fins d'injonction de la requête doivent être rejetées.
Sur les frais exposés à l'occasion du litige :
13. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme demandée par Mme A... au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.
Article 2 : Le présent jugement sera notifié à Mme B... A... et à la ministre du travail et de l'emploi.
Délibéré après l'audience du 26 novembre 2024, à laquelle siégeaient :
Mme Geslan-Demaret, présidente de chambre,
Mme Teuly-Desportes, présidente assesseure,
Mme Dumez-Fauchille, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 10 décembre 2024.
La rapporteure,
V. Dumez-Fauchille
La présidente,
A. Geslan-DemaretLa greffière,
M-M. Maillat
La République mande et ordonne à la ministre du travail et de l'emploi en ce qui la concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N°22TL22604