Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 16 juin 2021 par lequel le préfet de l'Hérault lui a retiré sa carte de séjour pluriannuelle, d'enjoindre à cette autorité de lui délivrer une carte de séjour pluriannuelle dans un délai de 15 jours sous astreinte de 150 euros par jour de retard et de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Par un jugement n° 2104242 du 15 décembre 2022, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté la demande de M. A....
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 29 mars 2023, M. B... A..., représenté par Me Ruffel, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n°2104242 du tribunal administratif de Montpellier du 15 décembre 2022 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 16 juin 2021 par lequel le préfet de l'Hérault lui a retiré sa carte de séjour pluriannuelle ;
3°) d'enjoindre au préfet de l'Hérault de lui délivrer une carte de séjour pluriannuelle dans un délai de 15 jours sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- l'arrêté attaqué a été signé par une autorité incompétente ;
- il a été pris à l'issue d'une procédure irrégulière en raison de la méconnaissance du principe du contradictoire prescrit par les articles L. 211-2, L. 122-1 et L. 122-2 du code des relations entre le public et l'administration ;
- il est entaché d'erreur de droit et est dépourvu de base légale, dès lors que sa situation ne relève pas des dispositions de l'article L. 432-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile visé par le préfet ;
- la décision de retrait est fondée sur des pièces obtenues en méconnaissance de l'article R. 170 du code de procédure pénale, sur lesquelles le préfet ne pouvait donc se fonder ;
- elle porte atteinte au principe de présomption d'innocence et est fondée sur des faits non probants, dont il nie la matérialité.
Par un mémoire en défense, enregistré le 26 juillet 2023, le préfet de l'Hérault conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que les moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés.
Par ordonnance du 28 septembre 2023, la clôture d'instruction a été fixée au 23 octobre 2023.
M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 8 mars 2023.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code du travail ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Ont été entendus, au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Virginie Dumez-Fauchille, première conseillère,
- et les observations de Me Ruffel, pour M. A....
Une note en délibéré présentée pour M. A... a été enregistrée le 22 octobre 2024.
Considérant ce qui suit :
1. M. A..., ressortissant marocain, était titulaire d'une carte de séjour pluriannuelle, valable du 15 mars 2021 au 14 mars 2023. Par arrêté du 16 juin 2021, le préfet de l'Hérault lui a retiré cette carte de séjour pluriannuelle et a délivré à l'intéressé une carte de séjour valable un an. M. A... relève appel du jugement du 15 décembre 2022 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur les conclusions aux fins d'annulation :
2. Aux termes de l'article L. 432-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Une carte de séjour temporaire ou pluriannuelle peut être retirée à tout employeur, titulaire d'une telle carte, en infraction avec l'article L. 8251-1 du code du travail (...). ". Aux termes de l'article L. 432-11 du même code : " Tout employeur titulaire d'une carte de résident peut se la voir retirer s'il a occupé un travailleur étranger en violation des dispositions de l'article L. 8251-1 du code du travail ". Aux termes de l'article L. 8251-1 du code du travail : " Nul ne peut, directement ou indirectement, embaucher, conserver à son service ou employer pour quelque durée que ce soit un étranger non muni du titre l'autorisant à exercer une activité salariée en France (...) ".
3. La décision attaquée qui vise l'article L. 432-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et, par une erreur de plume, l'article L. 432-11 du même code, se fonde sur ce que M. A... a permis l'aide au séjour irrégulier d'un étranger en l'embauchant sans titre et a omis de déclarer l'embauche d'un étranger sans titre, faits réprimés par les articles L. 8221-5, L. 8251-1 et L. 8256-2 du code du travail. Il ressort des pièces du dossier qu'une procédure judiciaire a été engagée contre M. A... concernant ces faits, à la suite, d'une part, de l'encaissement, par un étranger démuni d'autorisation de travail, d'un chèque provenant de la société du requérant et d'autre part, des déclarations de cet étranger faisant état d'un travail réalisé pour le compte de cette société. Alors, par ailleurs, que M. A... nie les faits qui lui sont reprochés et que l'issue de cette procédure judiciaire n'est pas précisée, ces seuls éléments ne suffisent pas à tenir pour établis les faits en cause à la date de la décision contestée. Par suite, le préfet a fait une inexacte application de l'article L. 432-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
4. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que M. A... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du préfet de l'Hérault du 16 juin 2021.
Sur les conclusions à fin d'injonction sous astreinte :
5. Il résulte de l'instruction que la carte de séjour pluriannuelle retirée par l'arrêté litigieux était valable jusqu'au 14 mars 2023. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a donc pas lieu d'enjoindre au préfet de délivrer une carte de séjour pluriannuelle à M. A.... Par suite, les conclusions à fin d'injonction sous astreinte doivent être rejetées.
Sur les frais exposés à l'occasion du litige :
6. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros à verser à Me Ruffel, conseil de M. A..., en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991 sous réserve qu'il renonce au bénéfice de l'aide juridictionnelle.
D E C I D E :
Article 1er : Le jugement n°2104242 du tribunal administratif de Montpellier du 15 décembre 2022 et l'arrêté du préfet de l'Hérault du 16 juin 2021 sont annulés.
Article 2 : L'Etat versera à Me Ruffel, conseil de M. A..., une somme de 1 500 (mille cinq cents) euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991 sous réserve qu'il renonce au bénéfice de l'aide juridictionnelle.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de M. A... est rejeté.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A..., à Me Ruffel, et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de l'Hérault.
Délibéré après l'audience du 22 octobre 2024, à laquelle siégeaient :
Mme Geslan-Demaret, présidente de chambre,
Mme Teuly-Desportes, présidente assesseure,
Mme Dumez-Fauchille, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 12 novembre 2024.
La rapporteure,
V. Dumez-Fauchille
La présidente,
A. Geslan-Demaret
La greffière,
M-M. Maillat
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N° 23TL00745