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02/07/2024 | FRANCE | N°22TL21370

France | France, Cour administrative d'appel de TOULOUSE, 2ème chambre, 02 juillet 2024, 22TL21370


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



Mme B... C... a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler la décision du 16 mars 2020 par laquelle le président de la communauté de communes du pays de Sommières a procédé à sa radiation des cadres pour abandon de poste à compter du 13 janvier 2020, d'enjoindre à l'autorité territoriale de procéder au réexamen de sa situation dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement à intervenir et de mettre à la charge de la communauté de commun

es du pays de Sommières la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de ju...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... C... a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler la décision du 16 mars 2020 par laquelle le président de la communauté de communes du pays de Sommières a procédé à sa radiation des cadres pour abandon de poste à compter du 13 janvier 2020, d'enjoindre à l'autorité territoriale de procéder au réexamen de sa situation dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement à intervenir et de mettre à la charge de la communauté de communes du pays de Sommières la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 2001429 du 15 avril 2022, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté ses demandes.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 15 juin 2022, et un mémoire, enregistré le 22 mars 2023, Mme C..., représentée par Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nîmes du 15 avril 2022 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 7 janvier 2020 par lequel le président de la communauté de communes du pays de Sommières a prononcé sa radiation des cadres pour abandon de poste, ensemble la décision du 16 mars 2020 portant rejet de son recours gracieux ;

3°) d'enjoindre à la communauté de communes du pays de Sommières de réexaminer sa situation dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et de procéder à la reconstitution de sa carrière et de ses droits à la retraite à compter du 13 janvier 2020 ;

4°) de mettre à la charge de la communauté de communes du pays de Sommières la somme de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'arrêté contesté, de même que la décision de rejet de son recours gracieux, sont illégaux du fait de l'absence d'abandon de poste ; l'administration doit démontrer, de manière non équivoque, son intention, même tacite, de rompre tout lien avec son employeur ; le courrier du docteur A... adressé quelques mois plus tôt, associé à l'arrêt de travail de prolongation établi par le même médecin psychiatre manifestent son intention de ne pas abandonner son poste ;

- il est entaché d'erreur d'appréciation dès lors que l'abandon de poste n'était pas caractérisé du fait de son état de santé ; les raisons l'ayant empêchée de reprendre son poste sont d'ordre médical ; les documents médicaux produits doivent être regardés comme apportant des éléments nouveaux ; eu égard à ses troubles dépressifs sévères associés à des troubles de l'attention et de la mémoire, elle n'était pas apte à reprendre son poste.

Par deux mémoires en défense, enregistrés le 8 novembre 2022 et le 14 avril 2023, ce dernier n'ayant pas été communiqué, la communauté de communes du pays de Sommières, représentée par la SCP CGCB avocats et associés, agissant par Me Arroudj, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 1 500 euros soit mise à la charge de Mme C... en application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que le moyen d'annulation soulevé n'est pas fondé.

Par une ordonnance du 22 mars 2023, la clôture d'instruction a été reportée au 17 avril 2023.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

- le décret n° 86-442 du 14 mars 1986 ;

- le décret n° 87-602 du 30 juillet 1987 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Thierry Teulière, premier conseiller,

- les conclusions de Mme Michèle Torelli, rapporteure publique,

- les observations de Me C..., représentant Mme C... et les observations de Me Arroudj, représentant la communauté de communes du pays de Sommières.

Considérant ce qui suit :

1. Mme C..., adjoint administratif territorial principal de 2ème classe de la communauté de communes du pays de Sommières (Gard), a développé, à compter de l'année 2017, un syndrome anxio-dépressif. Par un avis du 5 octobre 2017, le comité médical près le centre de gestion du Gard s'est déclaré défavorable à la demande de l'intéressée tendant à la prolongation au-delà de six mois de son congé de maladie ordinaire. Cet avis a été confirmé le 2 mai 2018 par le comité médical supérieur. Par une lettre du 15 mai 2018, le président de la communauté de communes du pays de Sommières a notamment informé Mme C... du report de sa reprise de fonctions du 17 mai au 9 juillet 2018. Par une lettre en date du 1er juillet 2018 accompagnée d'un arrêt de travail et d'un certificat médical, l'agent a sollicité le bénéfice d'un congé de longue maladie. Le 13 septembre 2018, le comité médical a rendu un avis défavorable quant à l'octroi d'un congé de longue maladie, puis a rendu, le 7 mars 2019, un avis favorable à la demande de l'intéressée tendant à la prolongation au-delà de six mois de son congé de maladie ordinaire pour la période allant du 1er janvier au 17 mars 2019, en précisant qu'elle était apte à une reprise à temps plein le 18 mars 2019. Ce dernier avis a été confirmé par un avis du 29 octobre 2019 du comité médical supérieur. Par une lettre en date du 3 décembre 2019, le président de la communauté de communes du pays de Sommières a informé l'agent de ce que sa reprise de fonctions interviendrait le 10 décembre 2019. Ne s'étant pas présentée à son poste de travail à la date indiquée, Mme C... a été mise en demeure, le 13 décembre 2019, de reprendre ses fonctions le 6 janvier 2020 et de se présenter auprès de la médecine du travail dès le 26 décembre 2019. Etant absente à ces convocations, l'agent a alors fait l'objet d'un arrêté du 7 janvier 2020, l'informant de sa radiation des cadres pour abandon de poste à compter du 13 janvier 2020. Mme C... relève appel du jugement en date du 15 avril 2022 par lequel le tribunal administratif de Nîmes a notamment rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 7 janvier 2020 et de la décision du 16 mars 2020 portant rejet de son recours gracieux.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

2. Une mesure de radiation des cadres pour abandon de poste ne peut être régulièrement prononcée que si l'agent concerné a, préalablement à cette décision, été mis en demeure de rejoindre son poste ou de reprendre son service dans un délai approprié qu'il appartient à l'administration de fixer. Une telle mise en demeure doit prendre la forme d'un document écrit, notifié à l'intéressé, l'informant du risque qu'il court d'une radiation des cadres sans procédure disciplinaire préalable. Lorsque l'agent ne s'est pas présenté et n'a fait connaître à l'administration aucune intention avant l'expiration du délai fixé par la mise en demeure, et en l'absence de toute justification d'ordre matériel ou médical, présentée par l'agent, de nature à expliquer le retard qu'il aurait eu à manifester un lien avec le service, cette administration est en droit d'estimer que le lien avec le service a été rompu du fait de l'intéressé.

3. L'agent qui se trouve en position de congé de maladie est regardé comme n'ayant pas cessé d'exercer ses fonctions. Par suite, il ne peut en principe faire l'objet d'une mise en demeure de rejoindre son poste ou de reprendre son service à la suite de laquelle l'autorité administrative serait susceptible de prononcer, dans les conditions définies au point 2 ci-dessus, son licenciement pour abandon de poste. Il en va toutefois différemment lorsque l'agent, reconnu apte à reprendre ses fonctions par le comité médical départemental, se borne, pour justifier sa non présentation ou l'absence de reprise de son service, à produire un certificat médical prescrivant un nouvel arrêt de travail sans apporter, sur l'état de santé de l'intéressé, d'éléments nouveaux par rapport aux constatations sur la base desquelles a été rendu l'avis du comité médical.

4. Il ressort des pièces du dossier que Mme C... a été déclarée apte à la reprise de ses fonctions à temps plein à compter du 18 mars 2019 par un avis rendu le 7 mars 2019 par le comité médical départemental, sur la base de l'expertise réalisée par un médecin psychiatre et confirmé par le comité médical supérieur. L'intéressée, qui a été mise en demeure de reprendre ses fonctions, ne s'est pas présentée à son poste de travail le 6 janvier 2020 et a justifié a posteriori de cette absence par un arrêt de travail de prolongation au titre de la période du 9 décembre 2019 au 27 février 2020. Contrairement à ce que soutient la requérante, cet arrêt de travail, signé du docteur A..., son médecin psychiatre, qui se borne à prolonger un arrêt précédent indiquant qu'elle souffre de troubles anxio-dépressifs réactionnels sévères, ne peut être regardé comme apportant des éléments nouveaux relatifs à son état de santé, même en considération du compte-rendu de ce même médecin, en date du 11 février 2019, adressé au médecin agréé en charge de l'expertise présentée au comité médical, qui évoquait déjà notamment un contexte de troubles anxio-dépressifs réactionnels sévères anciens d'allure mélancoliforme, et ne comportait ainsi pas plus d'éléments nouveaux par rapport aux constatations sur la base desquelles a été rendu l'avis du comité médical. Elle n'apporte, en outre, aucun élément de nature à justifier son refus de se rendre à la convocation auprès de la médecine du travail prévue le 26 décembre 2019. Les autres pièces versées au débat, consistant en une convocation en date du 15 juin 2022 pour une consultation mémoire en hospitalisation de jour accompagnée du compte-rendu de cette consultation, en date du 10 août 2022, sont largement postérieures à la période concernée par la mise en demeure de reprendre les fonctions et aux actes en litige. En particulier, aucun élément n'établit que la requérante était déjà atteinte d'une dégradation du fonctionnement cognitif global révélé par la consultation mémoire du mois de juin 2022 sur la période allant du 18 mars 2019, date à compter de laquelle elle a été regardée comme apte à reprendre, au 7 janvier 2020, date de l'arrêté de radiation des cadres litigieux. Enfin, si le document de protocole de soins, établi le 2 février 2023 et signé de son médecin généraliste, également postérieur à l'arrêté querellé, mentionne que les troubles dépressifs récurrents sévères de l'intéressée relèvent d'une affection de longue durée qui aurait débuté le 1er janvier 2018, ces seuls éléments sont, par eux-mêmes, insuffisants à établir qu'en estimant Mme C... apte à une reprise à temps plein dès le 18 mars 2019, les comités médicaux auraient entaché leurs avis concordants d'erreur d'appréciation, ni, par suite, à justifier son absence du service le 6 janvier 2020. En conséquence et nonobstant la présentation d'arrêts de travail postérieurs, l'autorité territoriale a pu, dans ces circonstances, considérer, sans commettre d'erreur d'appréciation, que le lien avec le service avait été rompu du fait de l'intéressée.

5. Il résulte de ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté ses demandes.

Sur les frais liés au litige :

6. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de la communauté de communes du pays de Sommières, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement à Mme C... de la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.

7. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme C... le versement de la somme que demande la communauté de communes du pays de Sommières au titre des frais d'instance exposés et non compris dans les dépens.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par la communauté de communes du pays de Sommières au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... C... et à la communauté de communes du pays de Sommières.

Délibéré après l'audience du 18 juin 2024 à laquelle siégeaient :

Mme Geslan-Demaret, présidente,

M. Teulière, premier conseiller,

Mme Arquié, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 2 juillet 2024.

Le rapporteur,

Thierry Teulière

La présidente,

A. Geslan-Demaret

La greffière,

M-M. Maillat

La République mande et ordonne au préfet du Gard, en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

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N° 22TL21370


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de TOULOUSE
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 22TL21370
Date de la décision : 02/07/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-10-04 Fonctionnaires et agents publics. - Cessation de fonctions. - Abandon de poste.


Composition du Tribunal
Président : Mme Geslan-Demaret
Rapporteur ?: M. Thierry Teulière
Rapporteur public ?: Mme Torelli
Avocat(s) : MARTINEZ

Origine de la décision
Date de l'import : 07/07/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-07-02;22tl21370 ?
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