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19/03/2024 | FRANCE | N°23TL00651

France | France, Cour administrative d'appel de TOULOUSE, 3ème chambre, 19 mars 2024, 23TL00651


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Nîmes, par trois demandes distinctes, l'annulation de la décision par laquelle le préfet de Vaucluse a implicitement rejeté sa demande de titre de séjour, de celle du 13 janvier 2022, par laquelle le préfet précité l'a expressément rejetée et de l'arrêté du 21 octobre 2022 de cette même autorité portant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours.

Par un jugement n°s 2104252

, 2200324, 2203568 du 21 février 2023, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté ses demandes.
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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Nîmes, par trois demandes distinctes, l'annulation de la décision par laquelle le préfet de Vaucluse a implicitement rejeté sa demande de titre de séjour, de celle du 13 janvier 2022, par laquelle le préfet précité l'a expressément rejetée et de l'arrêté du 21 octobre 2022 de cette même autorité portant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours.

Par un jugement n°s 2104252, 2200324, 2203568 du 21 février 2023, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté ses demandes.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 16 mars 2023, M. A..., représenté par Me El Mabrouk, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 21 février 2023 du tribunal administratif de Nîmes ;

2°) d'annuler les décisions des 13 janvier et 21 octobre 2022 du préfet de Vaucluse portant refus de séjour et obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours ;

3°) d'enjoindre à la préfète de Vaucluse de lui délivrer une autorisation de séjour au titre de la vie privée et familiale ;

4°) de mettre à la charge de l'État la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le refus de séjour est entaché d'une erreur d'appréciation au regard des dispositions de l'article L. 423-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors qu'il en remplit les conditions, étant le père de deux enfants français, qu'il a reconnus, avec lesquels il a partagé une vie commune entre 2010 et 2020, et dont il participe à l'éducation et à l'entretien ;

- le refus de séjour et l'obligation de quitter le territoire français portent une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale au regard de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- les décisions attaquées méconnaissent les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant.

Par une ordonnance du 23 janvier 2024, la clôture d'instruction a été fixée au 20 février 2024.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 en matière de séjour et d'emploi ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Bentolila a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., ressortissant marocain né le 2 juillet 1977, a sollicité, le 18 février 2021, auprès du préfet de Vaucluse, la délivrance d'un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " en se prévalant du fait qu'il était père de deux enfants français. Après rejet implicite de sa demande, le préfet de Vaucluse a expressément rejeté celle-ci par une décision du 13 janvier 2022. À la suite de son interpellation, le 21 octobre 2022, la préfète de Vaucluse a pris, le 21 octobre 2022, un arrêté obligeant M. A... à quitter le territoire français dans le délai de trente jours.

2. Par la présente requête, M. A... relève appel du jugement du 21 février 2023 par lequel le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande en annulation des décisions précitées des 13 janvier et 21 octobre 2022.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

3. En premier lieu, aux termes de l'article L. 423-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France et qui établit contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil, depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins deux ans, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1 ".

4. Il résulte de ces dispositions que l'étranger qui sollicite la délivrance d'une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " au motif qu'il est parent d'un enfant français doit justifier de sa contribution effective à l'entretien et à l'éducation de son enfant.

5. M. A..., qui soutient, sans en justifier, avoir obtenu un titre de séjour en qualité de travailleur saisonnier entre 2005 et 2010, et qui ne justifie pas non plus être revenu en France en 2015 avec un visa Schengen, est père de deux enfants français, qu'il a reconnus, nés le 27 septembre 2010 et le 8 janvier 2019. Il est séparé de la mère de ses enfants depuis 2020. Il ressort des pièces du dossier que, par un jugement du 14 janvier 2021, le juge aux affaires familiales du tribunal judiciaire de Carpentras a décidé d'un exercice conjoint de l'autorité parentale, de la résidence habituelle des deux enfants au domicile maternel, d'un droit de visite et d'hébergement de M. A... sur ses deux enfants, ainsi que d'une part contributive de ce dernier fixée à un total de 100 euros par mois.

6. Les documents produits par l'appelant sous forme de copie de mandats " Western Union " , de versement d'espèces sur le compte de la mère de ses enfants ainsi que des tickets d'achats dans différents magasins au profit de ses enfants, établissent le respect par l'intéressé de ses obligations financières à l'égard de ses enfants.

7. Toutefois, M. A... dispose de l'autorité parentale sur ses deux enfants, ce qui implique, ainsi que le rappelle le jugement du juge aux affaires familiales du tribunal judiciaire de Carpentras, au-delà du respect du droit d'hébergement et de visite de ses enfants, une participation active aux décisions concernant notamment leur scolarisation et leur santé.

8. A cet égard, M. A..., s'il produit des photographies le montrant avec ses enfants, n'apporte, pas plus en appel qu'en première instance, de précisions sur les modalités selon lesquelles il exerce l'autorité parentale sur ses enfants. Dans ces conditions, ainsi que l'ont considéré les premiers juges, il ne peut être regardé, au sens des dispositions précitées de l'article L. 423-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile comme participant à leur entretien et à leur éducation de ses enfants, et le préfet de Vaucluse n'a dès lors pas fait une inexacte application de ces dispositions en refusant de lui délivrer sur ce fondement un titre de séjour.

9. En deuxième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

10. M. A..., qui ne justifie, ainsi qu'il est dit au point 5 du présent arrêt, ni avoir obtenu un titre de séjour en qualité de travailleur saisonnier entre 2005 et 2010, ni être revenu en France en 2015 avec un visa Schengen, ne justifie donc pas d'une ancienneté de présence en France significative. S'il se prévaut de la présence en France de ses parents et de son frère il se borne à produire la photocopie du titre de séjour de son père, ainsi que la photocopie de la carte nationale d'identité française de son frère, sans établir la réalité et, à fortiori, l'intensité des liens qu'il entretiendrait avec eux. Dans ces conditions, et compte tenu par ailleurs, de ce que, ainsi qu'il est indiqué au point 8, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'il exercerait pleinement ses obligations quant à l'éducation de ses enfants et alors même qu'il se prévaut d'une promesse d'embauche du 25 janvier 2021, M. A..., qui ne justifie pas qu'il n'aurait plus d'attaches familiales au Maroc, n'est pas fondé à soutenir que le refus de séjour et l'obligation de quitter le territoire litigieuse auraient porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale au regard des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

11. En troisième et dernier lieu, en vertu de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant dispose : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale. (...) ". Il résulte de ces stipulations que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant. En l'espèce, faute, ainsi qu'il est indiqué au point 10, d'être pleinement impliqué dans l'éducation de ses enfants et de justifier de l'intensité des liens entretenu avec eux, M. A... n'est pas fondé à soutenir que les décisions litigieuses méconnaîtraient l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant.

12. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande. Doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte ainsi que celles tendant à l'application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée à la préfète de Vaucluse

Délibéré après l'audience du 5 mars 2024, à laquelle siégeaient :

M. Rey-Bèthbéder, président,

M. Bentolila, président-assesseur,

Mme El Gani-Laclautre, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 19 mars 2024.

Le rapporteur,

P. Bentolila

Le président,

É. Rey-Bèthbéder

La greffière,

C. Lanoux

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N°23TL00651 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de TOULOUSE
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 23TL00651
Date de la décision : 19/03/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. REY-BÈTHBÉDER
Rapporteur ?: M. Pierre BENTOLILA
Rapporteur public ?: Mme PERRIN
Avocat(s) : EL MABROUK

Origine de la décision
Date de l'import : 31/03/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-03-19;23tl00651 ?
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