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30/01/2024 | FRANCE | N°23TL01504

France | France, Cour administrative d'appel, 3ème chambre, 30 janvier 2024, 23TL01504


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



Le syndicat MICT CGT centre hospitalier de Thuir a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler, d'une part, la décision du 14 décembre 2022 portant rejet de son recours gracieux exercé contre les résultats des élections professionnelles qui se sont tenues au centre hospitalier Léon-Jean Grégory, à Thuir, du 6 au 8 décembre 2022 et, d'autre part, les résultats de ces élections professionnelles, qui ont porté sur l'élection des représentants du personnel au

comité social d'établissement du centre hospitalier précité, au comité social d'établisse...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le syndicat MICT CGT centre hospitalier de Thuir a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler, d'une part, la décision du 14 décembre 2022 portant rejet de son recours gracieux exercé contre les résultats des élections professionnelles qui se sont tenues au centre hospitalier Léon-Jean Grégory, à Thuir, du 6 au 8 décembre 2022 et, d'autre part, les résultats de ces élections professionnelles, qui ont porté sur l'élection des représentants du personnel au comité social d'établissement du centre hospitalier précité, au comité social d'établissement du groupement de coopération sanitaire Pharmacoopé, aux commissions administratives paritaires locales n° 6 " personnel d'encadrement administratif et des assistants médico-administratifs " et aux commissions administratives paritaires locales n° 7 " personnel de la filière ouvrière et technique " du centre hospitalier.

Par une ordonnance n° 2300810 du 24 avril 2023, le président de la 5ème chambre du tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 24 juin 2023, le syndicat MICT CGT centre hospitalier de Thuir, représenté par Me Cacciapaglia, demande à la cour :

1°) d'annuler cette ordonnance n° 2300810 du 24 avril 2023 du président de la 5ème chambre du tribunal administratif de Montpellier ;

2°) d'annuler, d'une part, la décision du 14 décembre 2022 portant rejet de son recours gracieux exercé contre les résultats des élections professionnelles qui se sont tenues au centre hospitalier Léon-Jean Grégory, à Thuir, du 6 au 8 décembre 2022 et, d'autre part, les résultats de ces élections professionnelles, qui ont porté sur l'élection des représentants du personnel au comité social d'établissement du centre hospitalier précité, au comité social d'établissement du groupement de coopération sanitaire Pharmacoopé, aux commissions administratives paritaires locales n° 6 " personnel d'encadrement administratif et des assistants médico-administratifs " du centre hospitalier, et aux commissions administratives paritaires locales n° 7 " personnel de la filière ouvrière et technique " du centre hospitalier ;

3°) d'enjoindre au centre hospitalier précité de procéder à l'organisation de nouvelles élections des représentants du personnel au comité social d'établissement de ce centre hospitalier, au comité social d'établissement groupement de coopération sanitaire Pharmacoopé, aux commissions administratives paritaires locales n° 6 " personnel d'encadrement administratif et des assistants médico-administratifs " et aux commissions administratives paritaires locales n° 7 " personnel de la filière ouvrière et technique " du centre hospitalier ;

4°) de mettre à la charge du centre hospitalier Léon-Jean Grégory une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- l'ordonnance attaquée est entachée d'irrégularité ;

- en effet, si le tribunal administratif lui a adressé, le 15 février 2023, une demande de régularisation tendant à ce qu'il présente quatre requêtes distinctes, il y a été satisfait le 25 mars 2023 ;

- en outre, la requête présentée en première instance s'analysait en une requête collective réelle et les décisions contestées présentaient entre elles, contrairement à ce qu'a estimé le premier juge, un lien suffisant pour faire l'objet d'une même requête puisqu'il s'agissait d'élections se déroulant le même jour dans le même établissement et que les agents de ce dernier disposaient d'un code unique pour voter en ligne en une seule fois pour l'ensemble de ces élections ; de plus, ces élections étaient toutes entachées des mêmes illégalités.

Par un mémoire en défense, enregistré le 25 octobre 2023, le centre hospitalier Léon-Jean Grégory, représenté par Me Champenois, conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge du syndicat appelant une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la demande du syndicat était irrecevable en tant qu'elle contestait l'élection des représentants du personnel au comité social d'établissement du groupement de coopération sanitaire Pharmacoopé, en l'absence de recours préalable adressé à l'administrateur de ce dernier ;

- contrairement à ce que soutient l'appelant, aucune fraude massive n'a été constatée lors des scrutins litigieux, un seul incident ayant été identifié, lequel n'a pas été de nature à altérer la sincérité du scrutin.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le décret n° 2003-655 du 18 juillet 2003 ;

- le décret n° 2021-1570 du 3 décembre 2021 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer ses conclusions à l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Rey-Bèthbéder, président-rapporteur ;

- les conclusions de Mme Perrin, rapporteure publique ;

- et les observations de Me Jacquet substituant Me Champenois, représentant le centre hospitalier spécialisé Léon-Jean Grégory.

Considérant ce qui suit :

1. Le 6 décembre 2022 se sont tenues, à Thuir, d'une part, l'élection des représentants du personnel au comité social d'établissement du centre hospitalier Léon-Jean Grégory et aux commissions administratives paritaires locales n° 6 " personnel d'encadrement administratif et des assistants médico-administratifs " et n° 7 " personnel de la filière ouvrière et technique " de ce même centre hospitalier et, d'autre part, l'élection des représentants du personnel au comité social d'établissement du groupement de coopération sanitaire Pharmacoopé. Le syndicat MICT CGT centre hospitalier de Thuir a, le 13 décembre 2022, formé un recours gracieux à l'encontre des résultats de ces élections, qui a été rejeté le lendemain par la directrice du centre hospitalier Léon-Jean Grégory

2. Le syndicat MICT CGT centre hospitalier de Thuir relève appel de l'ordonnance du 24 avril 2023 par laquelle le président de la 5ème chambre du tribunal administratif de Montpellier a rejeté comme irrecevable sa protestation tendant à l'annulation, d'une part, de la décision de rejet de son recours gracieux formé à l'encontre des résultats des élections professionnelles citées au point précédent et, d'autre part, de ces résultats.

Sur la régularité de l'ordonnance attaquée :

3. Aux termes de l'article R. 222-1 du code de justice administrative : " (...) les présidents de formation de jugement des tribunaux (...) peuvent, par ordonnance : (...) 4° Rejeter les requêtes manifestement irrecevables, lorsque la juridiction n'est pas tenue d'inviter leur auteur à les régulariser ou qu'elles n'ont pas été régularisées à l'expiration du délai imparti par une demande en ce sens ; (...) ". Et aux termes de l'article R. 612-1 de ce code : " Lorsque des conclusions sont entachées d'une irrecevabilité susceptible d'être couverte après l'expiration du délai de recours, la juridiction ne peut les rejeter en relevant d'office cette irrecevabilité qu'après avoir invité leur auteur à les régulariser. / (...) La demande de régularisation mentionne que, à défaut de régularisation, les conclusions pourront être rejetées comme irrecevables dès l'expiration du délai imparti qui, sauf urgence, ne peut être inférieur à quinze jours. La demande de régularisation tient lieu de l'information prévue à l'article R. 611-7 ".

4. Les requêtes manifestement irrecevables qui peuvent être rejetées par ordonnance en application de ces dispositions sont celles dont l'irrecevabilité ne peut en aucun cas être couverte, celles qui ne peuvent être régularisées que jusqu'à l'expiration du délai de recours, si ce délai est expiré, et celles qui ont donné lieu à une invitation à régulariser, si le délai que la juridiction avait imparti au requérant à cette fin, en l'informant des conséquences qu'emporte un défaut de régularisation comme l'exige l'article R. 612-1 du code de justice administrative, est expiré.

5. L'ordonnance attaquée a été prise sur le fondement des dispositions précitées de l'article R. 222-1 du code de justice administrative, en raison de ce que le syndicat MICT CGT du centre hospitalier de Thuir n'avait pas, dans le délai de trente jours qui lui avait été imparti dans une lettre du greffe du tribunal administratif de Montpellier du 15 février 2023, régularisé sa protestation en présentant des requêtes distinctes. Cependant, la demande de régularisation adressée au syndicat précité ne précisait aucunement les conséquences emportées par un défaut de régularisation dans le délai imparti pour ce faire, en méconnaissance des dispositions précitées de l'article R. 612-1 du code de justice administrative. Par conséquent, le président de la 5ème chambre du tribunal administratif de Montpellier ne pouvait rejeter comme irrecevable la protestation du syndicat requérant en se fondant sur le 4° de l'article R. 222-1 du code de justice administrative. Dès lors et en tout état de cause, son ordonnance est entachée d'irrégularité.

6. Par suite, il y a lieu d'annuler cette ordonnance et de statuer sur la demande du syndicat MICT CGT du centre hospitalier de Thuir par la voie de l'évocation.

Sur les conclusions tendant à l'annulation de la décision du 14 décembre 2022 et des élections litigieuses :

En ce qui concerne la motivation de la décision du 14 décembre 2022 :

7. Aux termes de l'article 42 du décret du 18 juillet 2003 relatif aux commissions administratives paritaires locales et départementales de la fonction publique hospitalière : " Les contestations sur la validité des opérations électorales sont portées, dans un délai de cinq jours à compter de la proclamation des résultats, devant le directeur de l'établissement qui assure la gestion de la commission administrative paritaire. Celui-ci statue dans les quarante-huit heures par une décision motivée. Les contestations sont ensuite portées, le cas échéant, devant la juridiction administrative ". Et aux termes de l'article 34 du décret du 3 décembre 2021 relatif aux comités sociaux d'établissement des établissements publics de santé, des établissements sociaux, des établissements médico-sociaux et des groupements de coopération sanitaire de moyens de droit public : " Les contestations de la validité des élections sont portées dans un délai de cinq jours à compter de la proclamation des résultats devant le directeur de l'établissement ou devant l'administrateur du groupement de coopération sanitaire de moyens de droit public. Celui-ci statue dans les quarante-huit heures par une décision motivée, dont il adresse aussitôt une copie au directeur général de l'agence régionale de santé. Les contestations sont ensuite portées, le cas échéant, devant la juridiction administrative ".

8. Si le syndicat requérant soutient que la décision du 14 décembre 2022 par laquelle la directrice du centre hospitalier Léon-Jean Grégory a rejeté son recours formé à l'encontre des élections citées au point 1 serait insuffisamment motivée en droit, il ressort des termes mêmes de cette décision qu'elle précise, de manière détaillée, les raisons pour lesquelles les griefs articulés au soutien de ce recours n'ont pu avoir eu pour effet d'altérer la sincérité des scrutins concernés. Par conséquent, elle doit être regardée comme suffisamment motivée tant au regard des motifs de droit que des considérations de fait qui la fondent.

En ce qui concerne les élections contestées :

9. Il est constant, en premier lieu, qu'à l'occasion des scrutins visant à l'élection des représentants du personnel au comité social d'établissement du centre hospitalier Léon-Jean Grégory et aux commissions administratives paritaires locales n° 6 " personnel d'encadrement administratif et des assistants médico-administratifs " et n° 7 " personnel de la filière ouvrière et technique " de ce même centre hospitalier - scrutins au cours desquels chaque électeur pouvait voter au moyen de tout terminal usuel connecté à internet ou dans les kiosques mis à leur disposition dans les locaux de l'établissement - il a été constaté qu'une électrice s'est trouvée dans l'impossibilité de voter en raison de ce que son vote électronique avait déjà été enregistré.

10. Toutefois et à supposer même établie la circonstance que deux ou trois autres électeurs auraient été démarchés par le syndicat FO afin de récupérer leurs codes et identifiants, mais sans avoir été ensuite empêchés de voter, il ressort des écarts de voix constatés, toujours nettement supérieurs à une voix, qu'aucun des résultats des élections litigieuses n'a pu être modifié, dans la répartition des sièges entre les candidats, par l'incident cité au point précédent.

11. En second lieu, si le syndicat requérant fait valoir que des incidents avaient été mentionnés au procès-verbal de l'élection des représentants du personnel au comité social d'établissement du centre hospitalier Léon-Jean Grégory, il résulte de l'instruction et notamment de ce procès-verbal, que ces incidents n'ont consisté qu'en des comportements jugés inappropriés d'une représentante syndicale, mais non circonstanciés, et des propos acerbes échangés entre représentants de deux autres syndicats. En conséquence, ces incidents ne constituent pas, en eux-mêmes, des irrégularités et n'ont pu avoir, du reste, d'influence sur les résultats du scrutin

12. Il résulte de tout ce qui précède que, sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée aux conclusions tendant à l'annulation de l'élection des représentants du personnel au comité social d'établissement du groupement de coopération sanitaire Pharmacoopé, le syndicat MICT CGT centre hospitalier de Thuir n'est pas fondé à demander l'annulation des élections litigieuses.

Sur les frais liés au litige :

13. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge du centre hospitalier Léon-Jean Grégory, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme demandée par le syndicat MICT CGT centre hospitalier de Thuir, au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens. Il y a lieu, en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de ce syndicat une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par le centre hospitalier Léon-Jean Grégory et non compris dans les dépens.

DÉCIDE:

Article 1 : L'ordonnance du 24 avril 2023 du président de la 5ème chambre du tribunal administratif de Montpellier est annulée.

Article 2 : La demande du syndicat MICT CGT centre hospitalier de Thuir est rejetée.

Article 3 : Le syndicat MICT CGT centre hospitalier de Thuir versera au centre hospitalier Léon-Jean Grégory la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au syndicat MICT CGT centre hospitalier de Thuir et centre hospitalier Léon-Jean Grégory. Copie en sera adressée au groupement de coopération sanitaire Pharmacoopé.

Délibéré après l'audience du 16 janvier 2024, à laquelle siégeaient :

M. Rey-Bèthbéder, président,

M. Bentolila, président-assesseur,

Mme El Gani-Laclautre, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 30 janvier 2024.

Le président-assesseur,

P. Bentolila

Le président-rapporteur,

É. Rey-Bèthbéder

La greffière,

C. Lanoux

La République mande et ordonne à la ministre de la santé et de la prévention en ce qui la concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 23TL01504


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de TOULOUSE
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 23TL01504
Date de la décision : 30/01/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Élections et référendum - Élections diverses.

Élections et référendum - Règles de procédure contentieuse spéciales - Introduction de l'instance.

Élections et référendum - Règles de procédure contentieuse spéciales - Pouvoirs du juge - Griefs - Griefs inopérants.


Composition du Tribunal
Président : M. REY-BÈTHBÉDER
Rapporteur ?: M. Eric REY-BÈTHBÉDER
Rapporteur public ?: Mme PERRIN
Avocat(s) : CACCIAPAGLIA MARIE

Origine de la décision
Date de l'import : 04/02/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-01-30;23tl01504 ?
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