Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. Prince E... G... a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du 1er février 2021 par lequel le préfet de la Haute-Garonne lui a refusé le renouvellement de son titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de renvoi et lui a fait interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée de deux ans.
Par un jugement n° 2101359 du 21 avril 2022, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés le 18 novembre 2022 et le 18 avril 2023, M. G..., représenté par Me Bachelet, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 21 avril 2022 du tribunal administratif de Toulouse ;
2°) d'annuler l'arrêté du 1er février 2021 par lequel le préfet de la Haute-Garonne lui a refusé le renouvellement de son titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Haute-Garonne de lui délivrer le titre de séjour sollicité dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et sous astreinte de cent euros par jour de retard ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation dès la notification de l'arrêt à intervenir ;
4°) de mettre à la charge de l'État une somme de 2 000 euros, à verser à son conseil, sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- les décisions en litige sont insuffisamment motivées ;
- elles sont entachées d'un défaut d'examen de sa situation personnelle ;
- la décision portant refus de titre de séjour méconnaît l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle méconnaît l'article 3 paragraphe 1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation quant aux conséquences qu'elle emporte sur sa situation personnelle.
- la décision portant obligation de quitter le territoire français est illégale en raison de l'illégalité entachant la décision portant refus de titre de séjour ;
- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle méconnaît de l'article 3 paragraphe 1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.
- la décision fixant le pays de renvoi est illégale en raison de l'illégalité entachant la décision portant obligation de quitter le territoire français.
Par des mémoires en défense, enregistrés les 8 mars et 26 avril 2023, le préfet de la Haute-Garonne conclut au rejet de la requête.
Il soutient, en se référant à ses écritures et pièces de première instance, que les moyens soulevés par l'appelant ne sont pas fondés.
M. G... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle partielle à hauteur de 55 % par une décision du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Toulouse du 21 octobre 2022.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer ses conclusions à l'audience.
Le rapport de Mme El Gani-Laclautre a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. G..., ressortissant nigérian, né le 27 mars 1973, déclare être entré en France le 3 juin 2014. L'intéressé a été définitivement débouté de sa demande d'asile par une décision de la Cour nationale du droit d'asile du 31 août 2015. La demande de réexamen de sa demande d'asile a également été rejetée par une ordonnance de la même cour du 23 juin 2017. Par un arrêté du 15 novembre 2017, le préfet de la Haute-Garonne a édicté une mesure d'éloignement à son encontre. Par la suite, l'intéressé a bénéficié d'un titre de séjour, délivré en raison de son état de santé, valable du 11 avril au 10 octobre 2019, dont il a sollicité le renouvellement le 7 octobre 2019, sur le fondement des dispositions alors codifiées au 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un jugement du 21 avril 2021, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté la demande de M. G... tendant à l'annulation de l'arrêté du 1er février 2021 par lequel le préfet de la Haute-Garonne lui a refusé le renouvellement de son titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. M. G... relève appel de ce jugement.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
En ce qui concerne les moyens communs aux décisions en litige :
2. En premier lieu, l'arrêté en litige vise les dispositions applicables à la situation de M. G..., en particulier l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile sur le fondement duquel a été examinée sa demande de titre de séjour et mentionne l'ensemble des éléments relatifs à sa situation administrative et personnelle en rappelant les conditions de son entrée sur le territoire français, les raisons de fait pour lesquelles sa demande de titre de séjour doit être rejetée en précisant, ensuite, en s'appropriant les motifs de l'avis rendu le 16 janvier 2020 par le collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, que son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut ne devrait pas entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité et lui permet de voyager sans risque vers son pays d'origine. Par ailleurs, dès lors que la décision obligeant l'appelant à quitter le territoire a été prise sur le fondement d'un refus de titre de séjour lui-même motivé, elle n'avait pas à faire l'objet d'une motivation distincte, conformément aux dispositions alors codifiées à l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. En outre, l'arrêté litigieux précise que le délai de départ volontaire de trente jours pourra faire l'objet d'une prolongation s'il apparaît nécessaire de tenir compte de circonstances propres à la situation personnelle de l'intéressé. Enfin, la décision fixant le pays de renvoi mentionne la nationalité de M. G... et relève qu'il n'établit pas être exposé à des peines et traitements inhumains contraires aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en cas de retour dans son pays d'origine. L'arrêté litigieux, qui contient l'ensemble des considérations de fait et de droit qui constituent le fondement des décisions qu'il comporte est, dès lors, suffisamment motivé.
3. En second lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier, en particulier de la motivation exhaustive de l'arrêté en litige, que l'autorité préfectorale se serait abstenue de procéder à un examen particulier de la situation de M. G....
En ce qui concerne la décision portant refus de titre de séjour :
4. En premier lieu, aux termes du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dispositions dont l'appelant doit être regardé comme se prévalant de la méconnaissance et désormais codifiées à l'article L. 423-23 du même code : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) / À l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus (...) ".
5. Lorsqu'il est saisi d'une demande de délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de l'une des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet n'est pas tenu, en l'absence de dispositions expresses en ce sens, d'examiner d'office si l'intéressé peut prétendre à une autorisation de séjour sur le fondement d'une autre disposition de ce code. Il est toutefois loisible au préfet d'examiner d'office si l'intéressé peut prétendre à un titre de séjour sur le fondement d'une autre disposition du code. Il lui est aussi possible, exerçant le pouvoir discrétionnaire qui lui appartient dès lors qu'aucune disposition expresse ne le lui interdit, de régulariser la situation d'un étranger en lui délivrant un titre de séjour, compte tenu de l'ensemble des éléments de sa situation personnelle. En revanche, lorsque le préfet, statuant sur la demande de titre de séjour, examine d'office si l'étranger est susceptible de se voir délivrer un titre sur un autre fondement, tous les motifs de rejet de la demande, y compris donc les motifs se prononçant sur les fondements examinés d'office par le préfet, peuvent être utilement contestés devant le juge de l'excès de pouvoir.
6. Il ressort de la demande de titre de séjour présentée en préfecture le 7 octobre 2019 que M. G... a sollicité son admission au séjour en se prévalant des seules dispositions alors codifiées au 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, tandis qu'il ressort des termes de l'arrêté en litige, que le préfet de la Haute-Garonne s'est borné à examiner son droit au séjour sur ce seul fondement à l'exclusion de tout autre. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est inopérant.
7. En deuxième lieu, d'une part, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...). / 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". D'autre part, aux termes de l'article 3 paragraphe 1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ". Il résulte de ces stipulations que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant.
8. M. G... soutient qu'il est présent en France de manière continue depuis juin 2014, qu'il y a résidé de manière régulière d'avril 2019 jusqu'à l'arrêté en litige en occupant des emplois dans le domaine du nettoyage qui lui ont permis de disposer d'une insertion professionnelle, que sa compagne, également de nationalité nigériane, dispose d'un titre de séjour en qualité de parent d'un enfant de nationalité française né en 2014 d'une précédente union dont il contribue à l'entretien et à l'éducation aux côtés de leur fils commun C... F..., né en 2016 à Toulouse et scolarisé en France. Toutefois, par ces seules allégations, M. G... ne produit aucun élément circonstancié de nature à établir la nature, l'ancienneté et la stabilité des liens qu'il a développés en France où il est entré à l'âge de 41 ans, au regard de ceux qu'il a conservés dans son pays d'origine, où résident ses deux enfants aînés, A... D... et A... B..., respectivement nés en 2000 et 2005, selon les mentions portées dans sa première demande de titre de séjour pour raisons de santé souscrite en 2018, tandis qu'il s'est déclaré célibataire dans le cadre de ses demandes de titre de séjour présentées en 2018 et 2019, n'a pas mentionné l'identité de sa compagne dans la rubrique dédiée ni leur adresse commune et ne démontre pas contribuer à l'entretien et à l'éducation de son fils né en France. L'appelant ne produit pas davantage d'élément probant ni quant à la réalité de leur communauté de vie, laquelle aurait débuté, selon sa compagne, en 2016 ni quant à la nature des liens entre le fils aîné de sa compagne et son père de nationalité française. En outre, il ressort des pièces du dossier que M. G... a développé sa vie privée et familiale en France de manière récente, alors même qu'il se trouvait en situation irrégulière et s'y est maintenu en dépit du rejet définitif de sa demande d'asile. Enfin, dès lors qu'il n'est pas démontré que le fils aîné de sa compagne aurait conservé des liens avec son père de nationalité française et dès lors que M. G..., sa compagne et leur enfant H... sont tous les trois de nationalité nigériane, il ne fait aucun obstacle à ce que la cellule familiale se reconstitue au Nigéria où les enfants pourront poursuivre leur scolarité.
9. Dans ces conditions, compte tenu des conditions d'entrée et de séjour de l'intéressé sur le territoire français, le préfet de la Haute-Garonne n'a pas, en refusant la délivrance d'un titre de séjour à M. G..., porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts poursuivis et n'a, dès lors, méconnu ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ni celles de l'article 3 paragraphe 1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ni davantage entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation quant aux conséquences qu'elle emporte sur sa situation personnelle.
En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :
10. En premier lieu, l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour n'étant pas établie, ainsi qu'il a été dit aux points 4 à 9, le moyen tiré de ce que la décision faisant obligation à M. G... de quitter le territoire français serait, par voie de conséquence, illégale doit être écarté.
11. En second lieu, les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 3 paragraphe 1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant doivent être écartés pour les mêmes motifs que ceux retenus au point 8.
En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi :
12. L'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français n'étant pas établie, ainsi qu'il a été dit aux points 10 et 11, le moyen tiré de ce que la décision fixant le pays à destination duquel M. G... est susceptible d'être éloigné serait, par voie de conséquence illégale, ne peut qu'être écarté.
13. Il résulte de tout ce qui précède que M. G... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Haute-Garonne du 1er février 2021. Par voie de conséquence, il y a lieu de rejeter ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées au titre des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.
DÉCIDE:
Article 1 : La requête de M. G... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. Prince E... G... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.
Copie en sera adressée au préfet de la Haute-Garonne.
Délibéré après l'audience du 6 juillet 2023, à laquelle siégeaient :
M. Rey-Bèthbéder, président,
M. Bentolila, président-assesseur,
Mme El Gani-Laclautre, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 20 juillet 2023.
La rapporteure,
N. El Gani-LaclautreLe président,
É. Rey-Bèthbéder
La greffière,
C. Lanoux
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 22TL22258