La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

11/07/2023 | FRANCE | N°21TL03516

France | France, Cour administrative d'appel de Toulouse, 3ème chambre, 11 juillet 2023, 21TL03516


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

En premier lieu, l'association des producteurs du marché de gros à Perpignan a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler, d'une part, la délibération n° 2018/02/11 du 15 février 2018 par lequel le conseil de la communauté urbaine Perpignan Méditerranée Métropole a approuvé la modification et la réduction du périmètre du marché de gros dans lequel s'applique le règlement intérieur du marché de gros de Perpignan Méditerranée Métropole, d'autre part, la délibération n° 2018/10

/192 du 22 octobre 2018 par laquelle le conseil de la communauté urbaine Perpignan Médi...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

En premier lieu, l'association des producteurs du marché de gros à Perpignan a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler, d'une part, la délibération n° 2018/02/11 du 15 février 2018 par lequel le conseil de la communauté urbaine Perpignan Méditerranée Métropole a approuvé la modification et la réduction du périmètre du marché de gros dans lequel s'applique le règlement intérieur du marché de gros de Perpignan Méditerranée Métropole, d'autre part, la délibération n° 2018/10/192 du 22 octobre 2018 par laquelle le conseil de la communauté urbaine Perpignan Méditerranée Métropole a abrogé la délibération du 22 mai 2017, a constaté la désaffectation du domaine public des parcelles cadastrées IL n° 911, n° 913, n° 877 et n° 878 et a prononcé par voie de conséquence leur déclassement et, enfin, d'annuler la décision n° 2019/07/82 du 5 juillet 2019 par laquelle le bureau de la communauté urbaine de Perpignan Méditerranée Métropole a autorisé la cession de biens immobiliers de la zone réservée aux grossistes du marché de gros de Perpignan au profit de la société Gin 66 et les actes relatifs à cette cession.

Par des jugements n° 1801801, n° 1805911, n° 1904676 du 17 juin 2021, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté ses demandes.

En deuxième lieu, la société anonyme à responsabilité limitée Expo Fruits a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler, d'une part, la décision n° 2017/06/94 du 9 juin 2017 par laquelle le bureau du conseil de la communauté urbaine Perpignan Méditerranée Métropole a retiré la décision du 10 février 2017 approuvant la vente des halls A et B de la zone aux grossistes du marché de gros de Perpignan à la société Gavignaud Marée Services et autorisant la cession de cet ensemble immobilier à M. et Mme C..., d'autre part, la délibération n° 2018/02/11 du 15 février 2018 par laquelle le conseil de la communauté urbaine Perpignan Méditerranée Métropole a approuvé la modification et la réduction du périmètre du marché de gros dans lequel s'applique le règlement intérieur du marché de gros de Perpignan Méditerranée Métropole, et, enfin, la décision n° 2019/07/82 du 5 juillet 2019 par lequel le bureau de la communauté urbaine précitée a autorisé la cession de biens immobiliers de la zone réservée aux grossistes du marché de gros de Perpignan au profit de la société Gin 66 et les actes relatifs à cette cession.

Par des jugements n° 1801374, 1801443 et 1904649 du 17 juin 2021, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté ses demandes.

En dernier lieu, la société Guillem Export France a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler d'une part, la décision du président de la communauté urbaine Perpignan Méditerranée Métropole, notifiée le 6 mai 2019, rejetant l'offre d'acquisition qu'elle a présentée avec la société Expo Fruits lors de la procédure de mise en vente des halls A et B de la zone des grossistes du marché de gros de Perpignan et, d'autre part, la décision du 5 juillet 2019 par lequel le bureau de la communauté urbaine de Perpignan Méditerranée Métropole a autorisé la cession de biens immobiliers de la zone réservée aux grossistes du marché de gros de Perpignan au profit de la société Gin 66 et les actes relatifs à cette cession.

Par un jugement n° 1904141 du 17 juin 2021, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

I.- Par une requête n° 21TL03516, enregistrée le 16 août 2021, au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille, puis le 1er mars 2022 au greffe de la cour administrative d'appel de Toulouse, des mémoires enregistrés le 20 mars et les 12, 17 et 20 avril 2023 et le 21 juin 2023, ces quatre derniers mémoires n'ayant pas été communiqués, et des pièces enregistrées le 18 avril 2023, l'association des producteurs du marché de production de Perpignan, représentée par Me Vigo, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1801801 du tribunal administratif de Montpellier du 17 juin 2021 ;

2°) d'annuler la délibération du conseil de la communauté urbaine Perpignan Méditerranée Métropole du 15 février 2018 ;

3°) de mettre à la charge de cette communauté urbaine la somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement est irrégulier dès lors que la note en délibéré déposée à la suite de la tenue de l'audience n'a pas été communiquée et que l'instruction n'a pas été rouverte en méconnaissance du principe du contradictoire posé par l'article L. 5 du code de justice administrative ; en effet, il était manifeste que la formation de jugement, sur la foi des conclusions du rapporteur public, se méprendrait sur la prétendue " désaffectation " des halles aux grossistes ;

- la délibération attaquée est entachée d'un vice d'incompétence ;

- dès lors que la délibération contestée concerne et affecte directement le fonctionnement et l'existence même du marché de gros, elle est entachée d'un vice de procédure en l'absence de consultation du comité technique consultatif prévue par l'article 2 du règlement intérieur du marché de gros ;

- par la voie de l'exception d'illégalité, la délibération du 9 juin 2017 portant retrait de la délibération du 10 février 2017 et approuvant la cession à M. et Mme C... est entachée d'illégalité et entraîne par voie de conséquence l'illégalité de la délibération attaquée ;

- la désaffectation des halls A, B et C du marché de gros ne peut résulter d'une prétendue absence de producteurs locaux dans ces halls dès lors qu'ils n'ont jamais eu pour finalité d'accueillir les producteurs locaux ;

- la délibération contestée est entachée d'une erreur de droit puisqu'elle méconnaît les principes de désaffectation de fait préalable à tout déclassement, d'inaliénabilité et d'imprescriptibilité du domaine public ; la désaffectation d'une dépendance du domaine public résulte d'un état de fait et conditionne son déclassement ; à la date de la délibération attaquée, une partie importante de la halle aux grossistes qui faisait partie du domaine public était effectivement utilisée par des entreprises spécialisées dans le commerce de gros ; les halls de la halle aux grossistes, objet de la réduction du périmètre du marché de gros, sont indissociables au sens de l'article L. 2111-2 du code général de la propriété des personnes publiques, de la halle aux carreaux, non concernée par elle et le marché de gros ne pourra survivre sans elle ; de plus, l'activité du centre de contrôle international et des douanes, au sein de la halle aux grossistes, constitue une activité de service public ;

- cette délibération qui ne sert aucun intérêt général, est entachée d'un détournement de pouvoir ; elle ne s'inscrit que dans la perspective du déclassement du domaine public aux fins de réaliser une opération immobilière et de contourner l'obstacle posé par le principe de l'inaliénabilité du domaine public ; elle porte atteinte au fonctionnement et à l'existence même du service public que constitue le marché de gros de Perpignan ;

- cette délibération constitue avec l'ensemble des actes accomplis pour parvenir à sa cession, une fraude à la loi puisqu'elle a été spécialement conçue dans le but de faire échec au principe d'indisponibilité de la dépendance domaniale et de permettre son achat par la société SCI Gin 66.

Par deux mémoires en défense, enregistrés le 9 septembre 2022 et le 21 avril 2023, ce dernier n'ayant pas été communiqué, la communauté urbaine Perpignan Méditerranée Métropole, représentée par Me Boissy, conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de l'association des producteurs du marché de gros la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- le jugement attaqué est régulier dès lors que l'association appelante qui a été mise à même de produire une note en délibéré, doit être regardée comme ayant pu faire valoir ses droits dans le respect du principe du contradictoire ;

- M. A... D... était parfaitement compétent pour signer la délibération attaquée, en vertu de la délégation reçue le 27 juillet 2016 ;

- la procédure d'adoption de la délibération attaquée n'est pas viciée dès lors que le règlement intérieur du marché de gros adopté en 2011 ne s'applique qu'à la halle aux carreaux à l'exception de la halle aux grossistes ; à supposer même que le règlement intérieur du marché de gros s'applique à la halle aux grossistes, la consultation du comité technique consultatif préalablement à l'adoption de la délibération attaquée relevant de la compétence de la communauté urbaine, ne constitue pas pour le gestionnaire une obligation dont la méconnaissance serait sanctionnée ;

- la mission d'intérêt général dévolue au marché de gros consistait à favoriser la commercialisation des fruits et légumes issus de la production locale ; la halle aux carreaux et la halle aux grossistes ont ainsi été spécialement affectées au service public d'organisation de la commercialisation des fruits et légumes issus de la production locale ; tirant les conséquences de la perte d'affectation de la halle aux grossistes à ce service public, elle a décidé de réduire le périmètre du marché de gros en le limitant à la halle aux carreaux qui seule répondait à la mission d'intérêt général initialement dévolue ; cette désaffectation de la halle aux grossistes est le résultat de la diminution drastique de la production de fruits et légumes dans les Pyrénées-Orientales et du changement des modes d'écoulement de cette production ; le service public du marché de gros avait pris fin avant la réduction du périmètre du marché de gros.

Par des mémoires en intervention, enregistrés le 1er juin 2022, le 19 mai 2023, ce dernier n'ayant pas été communiqué, et le 4 juin 2023, la société civile immobilière Gin 66, représentée par Me Brenot et Me Maurel, conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de l'association appelante une somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir qu'elle justifie d'un intérêt à intervenir au soutien de la défense de la communauté urbaine Perpignan Méditerranée Métropole et que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

II.- Par une requête n° 21TL03517, enregistrée le 16 août 2021, au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille, puis, le 1er mars 2022, au greffe de la cour administrative d'appel de Toulouse, des mémoires enregistrés le 20 mars et les 12, 17 et 20 avril 2023 et le 21 juin 2023, ces quatre derniers mémoires n'ayant pas été communiqués, et des pièces enregistrées le 20 avril 2023, l'association des producteurs du marché de production de Perpignan, représentée par Me Vigo, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1805911 du tribunal administratif de Montpellier du 17 juin 2021 ;

2°) d'annuler la délibération du conseil de la communauté urbaine Perpignan Méditerranée Métropole du 22 octobre 2018 ;

3°) de mettre à la charge de cette communauté urbaine la somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement est irrégulier dès lors que la note en délibéré déposée à la suite de la tenue de l'audience n'a pas été communiquée et que l'instruction n'a pas été rouverte en méconnaissance du principe du contradictoire posé par l'article L. 5 du code de justice administrative ; en effet, il était manifeste que la formation de jugement, sur la foi des conclusions du rapporteur public, se méprendrait sur la prétendue " désaffectation " des halles aux grossistes ;

- la délibération attaquée est entachée d'un vice d'incompétence ;

- dès lors que cette délibération concerne et affecte directement le fonctionnement et l'existence même du marché de gros, elle est entachée d'un vice de procédure en l'absence de consultation du comité technique consultatif prévue par l'article 2 du règlement intérieur du Marché de gros ;

- la désaffectation des halls A, B et C du marché de gros ne peut résulter d'une prétendue absence de producteurs locaux dans ces halls dès lors qu'ils n'ont jamais eu pour finalité d'accueillir les producteurs locaux ;

- la halle aux grossistes du marché de gros de Perpignan est affectée de façon continue au service public auquel le marché participe et constitue, de ce fait, une dépendance du domaine public ; de plus, l'activité du centre de contrôle international et des douanes, au sein de la halle aux grossistes, constitue une activité de service public ;

- la délibération contestée est entachée d'une erreur de droit puisqu'elle méconnaît les principes de désaffectation de fait préalable à tout déclassement, d'inaliénabilité et d'imprescriptibilité du domaine public ; la désaffectation d'une dépendance du domaine public résulte d'un état de fait et conditionne son déclassement, en application de l'article L. 2141-1 du code général de la propriété des personnes publiques, le déclassement des halls de la halle aux grossistes ne pouvait intervenir faute de désaffectation matérielle de ces biens ; à la date de la délibération attaquée, une partie importante de la halle aux grossistes était effectivement utilisée par des entreprises spécialisées dans le commerce de gros ; la halle aux grossistes est indissociable, au sens de l'article L. 2111-2 du code général de la propriété des personnes publiques, de la halle aux carreaux, de sorte que le marché de gros ne pourra survivre sans elle ;

- la délibération attaquée est entachée d'un détournement de pouvoir ; elle ne s'inscrit que dans la perspective de réaliser une opération immobilière servant les intérêts de M. C... et a pour objet de contourner l'obstacle posé par le principe de l'inaliénabilité du domaine public ; la désaffectation de la halle aux grossistes, qui a été organisée pour permettre sa cession, résulte de la délibération du 15 février 2018 portant réduction du périmètre d'application du règlement intérieur du marché de gros ; elle porte atteinte au fonctionnement et à l'existence même du service public que constitue le marché de gros de Perpignan.

Par deux mémoires en défense, enregistrés le 9 septembre 2022 et le 21 avril 2023, ce dernier n'ayant pas été communiqué, la communauté urbaine Perpignan Méditerranée Métropole, représentée par Me Boissy, conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de l'association des producteurs du marché de gros la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- le jugement attaqué est régulier dès lors que l'association appelante, qui a été mise à même de produire une note en délibéré, doit être regardée comme ayant pu faire valoir ses droits dans le respect du principe du contradictoire ;

- M. B... E... était parfaitement compétent pour signer la délibération attaquée, en vertu de la délégation reçue le 16 mars 2018 ;

- la procédure d'adoption de la délibération attaquée n'est pas viciée dès lors que le règlement intérieur du marché de gros adopté en 2011 ne s'applique qu'à la halle aux carreaux à l'exception de la halle aux grossistes ; à supposer même que le règlement intérieur du marché de gros s'applique à la halle aux grossistes, la consultation du comité technique consultatif préalablement à l'adoption de la décision attaquée relevant de la compétence de la communauté urbaine, ne constitue pas pour le gestionnaire une obligation dont la méconnaissance serait sanctionnée ;

- dans la suite logique de réduire le périmètre d'application du règlement intérieur du marché de gros, la délibération attaquée a constaté la désaffectation du domaine public des parcelles en cause et a prononcé, par voie de conséquence, leur déclassement du domaine public ;

- la délibération attaquée ne porte pas atteinte au fonctionnement du service public auquel le marché de gros participe ; la halle aux grossistes constituait auparavant le corollaire indispensable à la halle aux carreaux dans le but de favoriser la commercialisation de la production locale ; désormais, la désaffectation de la halle aux grossistes est le résultat de la diminution drastique de la production de fruits et légumes dans les Pyrénées-Orientales et du changement des modes d'écoulement de cette production ; le service public du marché de gros avait pris fin avant la réduction du périmètre d'application du règlement intérieur de ce marché ;

-cette délibération n'est pas entachée d'un détournement de pouvoir.

Par des mémoires en intervention, enregistrés le 1er juin 2022 et le 23 mai 2023, ce dernier n'ayant pas été communiqué, la société civile immobilière Gin 66, représentée par Me Brenot et Me Maurel, conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de l'association appelante une somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir qu'elle justifie d'un intérêt à intervenir au soutien de la défense de la communauté urbaine Perpignan Méditerranée Métropole et que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

III.- Par une requête n° 21TL03518, enregistrée le 16 août 2021, au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille, puis, le 1er mars 2022, au greffe de la cour administrative d'appel de Toulouse, des mémoires enregistrés le 20 mars et les 12, 17 et 20 avril 2023 et le 21 juin 2023, ces quatre derniers mémoires n'ayant pas été communiqués, l'association des producteurs du marché de production de Perpignan, représentée par Me Vigo, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1904676 du tribunal administratif de Montpellier du 17 juin 2021 ;

2°) d'annuler la décision du bureau de la communauté urbaine Perpignan Méditerranée Métropole du 5 juillet 2019 ;

3°) de mettre à la charge de cette communauté urbaine la somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement est irrégulier dès lors que la note en délibéré déposée à la suite de la tenue de l'audience n'a pas été communiquée et que l'instruction n'a pas été rouverte en méconnaissance du principe du contradictoire posé par l'article L. 5 du code de justice administrative ; en effet, il était manifeste que la formation de jugement, sur la foi des conclusions du rapporteur public, se méprendrait sur la prétendue " désaffectation " des halles aux grossistes ;

- la décision attaquée est entachée d'un vice d'incompétence ; la cession immobilière intervenant après une mise en concurrence imposait de recueillir l'accord de l'assemblée délibérante communautaire qui n'était pas dessaisie de sa compétence en application de l'article L. 5211-37 du code général des collectivités territoriales ; en outre, le projet de cession relevant de la matière budgétaire, toute délégation était exclue en application de l'article L. 5211-10 du code général des collectivités territoriales ;

- le président de la communauté urbaine était incompétent pour signer un acte substantiellement différent de celui pour lequel il avait été habilité par la délibération attaquée ;

- la décision attaquée est insuffisamment motivée en méconnaissance de l'article L. 5211-37 du code général des collectivités territoriales ;

- dès lors que cette décision concerne et affecte directement le fonctionnement et l'existence même du marché de gros, elle est entachée d'un vice de procédure en l'absence de consultation du comité technique consultatif prévue par l'article 2 du règlement intérieur du marché de gros ;

- la décision est entachée d'une irrégularité de procédure en raison de l'insuffisance de la note explicative de synthèse communiquée aux membres du bureau de la communauté urbaine ;

- la procédure est irrégulière en l'absence d'avis du service des domaines sur les bâtiments visés par la décision attaquée, cet avis s'étant prononcé sur la halle agroalimentaire qui constitue un bâtiment distinct de ceux de la halle aux grossistes vendus aux termes de la décision attaquée ;

- les principes d'égalité de traitement des candidats, de transparence des procédures et de publicité n'ont pas été respectés ; la communauté urbaine, qui avait décidé, alors qu'elle n'y était pas tenue, de faire précéder la vente des biens déclassés d'une mise en concurrence préalable, n'a jamais rendu public le projet de cession ; la procédure s'est limitée à l'envoi de trois courriers recommandés adressés aux seuls candidats potentiels présélectionnés par le président ;

- la désaffectation des halls A, B et C du marché de gros ne peut résulter d'une prétendue absence de producteurs locaux dans ces halls dès lors qu'ils n'ont jamais eu pour finalité d'accueillir les producteurs locaux ;

- la décision attaquée méconnaît les dispositions de l'article L. 3112-4 du code général de la propriété des personnes publiques puisqu'une clause a été insérée dans la promesse de vente, puis dans l'acte de cession authentique qui maintient le bien dans le domaine public ;

- la halle aux grossistes du marché de gros de Perpignan est affectée de façon continue au service public auquel le marché participe et constitue, de ce fait, une dépendance du domaine public ; de plus, l'activité du centre de contrôle international et des douanes, au sein de la halle aux grossistes, constitue une activité de service public ;

- la délibération contestée est entachée d'une erreur de droit puisqu'elle méconnaît les principes de désaffectation de fait préalable à tout déclassement, d'inaliénabilité et d'imprescriptibilité du domaine public ; en application de l'article L. 2141-1 du code général de la propriété des personnes publiques, le déclassement des halls de la halle aux grossistes ne pouvait intervenir faute de désaffectation matérielle de ces biens ; à la date de la délibération attaquée, une partie importante de la halle aux grossistes était effectivement utilisée par des entreprises spécialisées dans le commerce de gros ; la halle aux grossistes est indissociable, au sens de l'article L. 2111- 2 du code général de la propriété des personnes publiques, de la halle aux carreaux, de sorte que le marché de gros ne pourra survivre sans elle ;

- la décision attaquée est entachée d'un détournement de pouvoir ; elle ne s'inscrit que dans la perspective de réaliser une opération immobilière servant les intérêts de M. C... et a pour objet de contourner l'obstacle posé par le principe de l'inaliénabilité du domaine public ; la désaffectation de la halle aux grossistes, qui a été organisée pour permettre sa cession, résulte de la délibération du 15 février 2018 portant réduction du périmètre d'application du règlement intérieur du marché de gros ; la vente organisée au profit de la société Gin 66 ne remet pas en cause l'affectation de la halle aux grossistes au service public compte tenu des clauses insérées dans la promesse de vente ; elle porte atteinte au fonctionnement et à l'existence même du service public que constitue le marché de gros de Perpignan.

Par un mémoire en défense, enregistré le 9 septembre 2022, la communauté urbaine Perpignan Méditerranée Métropole, représentée par Me Boissy, conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de l'association des producteurs du marché de gros la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- l'association appelante, qui n'a pas déposé de candidature dans le cadre de la procédure de mise en concurrence, est dépourvue d'intérêt à agir ;

- le jugement attaqué est régulier dès lors que l'association appelante, qui a été mise à même de produire une note en délibéré, doit être regardée comme ayant pu faire valoir ses droits dans le respect du principe du contradictoire ;

- la procédure d'adoption de la décision attaquée n'est pas viciée dès lors que le règlement intérieur du marché de gros adopté en 2011 ne s'applique qu'à la halle aux carreaux à l'exception de la halle aux grossistes ; à supposer même que le règlement intérieur du marché de gros s'applique à la halle aux grossistes, la consultation du comité technique consultatif préalablement à l'adoption de la délibération attaquée relevant de la compétence de la communauté urbaine ne constitue pas pour le gestionnaire une obligation dont la méconnaissance serait sanctionnée ;

- l'association appelante inverse la charge de la preuve en ce qui concerne l'irrégularité tirée de l'insuffisance de la notice explicative de synthèse ;

- l'avis du service du domaine du 29 mai 2019 qui porte sur les parcelles cadastrées section IL n° 877, 878, 911 et 913, correspond à l'ensemble immobilier identifié dans l'acte de vente ; la description des biens visés dans l'avis du service des domaines relève d'une simple erreur matérielle qui n'a pas d'incidence sur le prix de vente ;

- la décision attaquée ne porte pas atteinte au fonctionnement du service public auquel le marché de gros participe ; la halle aux grossistes constituait auparavant le corollaire indispensable à la halle aux carreaux dans le but de favoriser la commercialisation de la production locale ; désormais, la désaffectation de la halle aux grossistes est le résultat de la diminution drastique de la production de fruits et légumes dans les Pyrénées-Orientales et du changement des modes d'écoulement de cette production ; le service public du marché de gros avait pris fin avant la réduction du périmètre d'application du règlement intérieur de ce marché ;

- cette décision n'est pas entachée d'un détournement de pouvoir.

Par un mémoire en intervention, enregistré le 1er juin 2022, la société civile immobilière Gin 66, représentée par Me Brenot et Me Maurel, conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de l'association appelante une somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative

Elle fait valoir qu'elle justifie d'un intérêt à intervenir au soutien de la défense de la communauté urbaine Perpignan Méditerranée Métropole et que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

IV.- Par une requête n° 21TL03503, enregistrée le 16 août 2021, au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille, puis, le 1er mars 2022, au greffe de la cour administrative d'appel de Toulouse, la société Expo Fruits, représentée par Me de Gaulle, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1801374 du tribunal administratif de Montpellier du 17 juin 2021 ;

2°) d'annuler la décision du bureau du conseil de la communauté urbaine Perpignan Méditerranée Métropole du 9 juin 2017 ;

3°) de mettre à la charge de la communauté urbaine Perpignan Méditerranée Métropole la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement est irrégulier dès lors que les premiers juges ont prononcé à tort un non-lieu à statuer ;

- son recours en annulation contre la décision du 9 juin 2017, qui n'est pas tardif, est recevable ; à titre subsidiaire, la décision attaquée étant inexistante compte tenu de la gravité des irrégularités qui l'entachent, elle peut être contestée sans condition de délai ;

- la société Gin 66 ne justifie pas d'un intérêt à intervenir au soutien de la défense de la communauté urbaine Perpignan Méditerranée Métropole en ce qui concerne la décision du 9 juin 2017 ;

- la décision attaquée méconnaît les dispositions de l'article L. 2121-10 du code général des collectivités territoriales rendu applicable aux organes délibérants des établissements publics de coopération intercommunale par l'article L. 5211-1 de ce code ; il n'est pas établi que la convocation faite par le président comportait un ordre du jour complet ;

- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 2121-12 du code général des collectivités territoriales ; la communauté urbaine n'établit pas que, d'une part, la convocation a été adressée dans le délai de cinq jours francs à l'ensemble des conseillers communautaires, d'autre part, qu'une note explicative de synthèse était jointe à ces convocations ;

- la décision attaquée méconnaît les articles L. 2111-1 et L. 3111-1 du code général de la propriété des personnes publiques dès lors qu'à la date de la décision contestée, la halle aux grossistes du marché de gros de Perpignan, qui constitue un service public, appartenait au domaine public de l'établissement et n'avait pas été déclassée de ce domaine ; la communauté urbaine Perpignan Méditerranée Métropole a prononcé son déclassement du domaine public par une délibération postérieure du 22 octobre 2018 ;

- la cession a été consentie par la décision attaquée à un prix très inférieur à la valeur vénale de l'immeuble ; l'évaluation de France domaine ne correspond absolument pas à la valeur vénale réelle des biens cédés.

Par un mémoire en défense, enregistré le 9 septembre 2022, la communauté urbaine Perpignan Méditerranée Métropole, représentée par Me Boissy, conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de la société Expo Fruits la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- le jugement attaqué est régulier ; les premiers juges ont prononcé à bon droit le non-lieu à statuer dès lors que la demande de la société Expo Fruits était devenue en cours d'instance sans objet ;

- le recours en annulation de la société Expo Fruits est tardif dès lors qu'il a été présenté plus de deux mois après la publication de la décision litigieuse au recueil des actes administratifs ;

- elle a communiqué aux conseillers communautaires un courrier indiquant l'ordre du jour du bureau du 9 juin 2017, conformément aux dispositions de l'article L. 2121-10 du code général des collectivités territoriales ;

- les dispositions de l'article L. 2121-12 du code général des collectivités territoriales ont été respectées dès lors qu'il résulte des termes de la convocation faisant foi jusqu'à la preuve contraire que celle-ci a été adressée le 30 mai 2017, soit dans le délai imparti par ces dispositions, qu'il appartient à la société appelante de démontrer l'absence de note explicative de synthèse et que cette irrégularité l'aurait privée d'une garantie ou aurait été susceptible d'exercer une influence sur le sens de la décision prise par le conseil communautaire ;

- la décision attaquée ne méconnaît pas les articles L. 2111-1 et L. 3111-1 du code général de la propriété des personnes publiques ; en effet, par une délibération du 22 mai 2017, elle a prononcé le déclassement du domaine public des parcelles cadastrées section IL n° 854, 877, 878 et 879 ; si cette délibération a été retirée par la délibération du 22 octobre 2018, cette dernière en reprend cependant les termes ;

- la cession qui a été décidée l'a été conformément à l'évaluation de France domaine, au prix de 2 100 000 euros ; de plus, la société appelante ne démontre pas que les biens qu'elle prend comme termes de comparaison, se trouvaient dans un état comparable aux biens cédés.

Par un mémoire en intervention, enregistré le 3 juin 2022, la société civile immobilière Gin 66, représentée par Me Brenot et Me Maurel, conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de la société appelante une somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir qu'elle justifie d'un intérêt à intervenir au soutien de la défense de la communauté urbaine Perpignan Méditerranée Métropole et que les moyens ne sont pas fondés.

V.- Par une requête n° 21TL03502, enregistrée le 16 août 2021, au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille, puis le 1er mars 2022 au greffe de la cour administrative d'appel de Toulouse, des mémoires, enregistrés le 21 mars et le 21 juin 2023, ces derniers n'ayant pas été communiqués, la société Expo Fruits, représentée par Me de Gaulle, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1801443 du tribunal administratif de Montpellier du 17 juin 2021 ;

2°) d'annuler la délibération du conseil de la communauté urbaine Perpignan Méditerranée Métropole du 15 février 2018 ;

3°) de mettre à la charge de cette communauté urbaine la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement est irrégulier dès lors que les premiers juges ont omis de répondre au moyen tiré de ce qu'en réduisant le périmètre du marché de gros de Perpignan à la seule halle aux carreaux, la délibération attaquée portait une atteinte illégale au service public structuré autour des secteurs complémentaires de la halle aux carreaux et de la halle aux grossistes ;

- dès lors que la délibération contestée affecte directement le fonctionnement du marché de gros, elle est entachée d'un vice de procédure en l'absence de consultation du comité technique consultatif prévue par l'article 2 du règlement intérieur du marché de gros ; ce règlement est en effet applicable à la halle aux grossistes et les questions relatives au fonctionnement du marché doivent obligatoirement être soumises à ce comité ;

- elle est entachée d'un vice de procédure dès lors que les membres du conseil communautaire n'ont pas reçu une information suffisante pour leur permettre d'appréhender le contexte, de comprendre les motifs des mesures envisagées et de mesurer l'implication de leurs décisions ; la note explicative qui leur a été adressée est la stricte reprise du projet de délibération ;

- cette délibération, qui exclut la halle aux grossistes du périmètre d'application du règlement intérieur du marché de gros est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation dès lors qu'elle porte atteinte à l'exploitation du marché de gros de Perpignan, qui constitue un service public et dont l'activité de grossiste fait partie intégrante ; ce service public, qui est structuré autour de deux secteurs complémentaires que sont la halle aux carreaux et la halle aux grossistes, ne peut fonctionner sans la halle aux grossistes ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation dès lors qu'à la date de son adoption, les halls A et B de la halle aux grossistes demeuraient affectés au service public du marché de gros ;

- elle est entachée d'un détournement de procédure dès lors que la réduction du périmètre du marché de gros était exclusivement motivée par la réalisation d'une opération immobilière alors même que l'activité de marché de gros s'exerçait dans la halle aux grossistes à la date de la délibération attaquée ; la diminution du taux d'occupation de la halle aux grossistes ne reflète pas une défection des grossistes mais la volonté de la communauté urbaine Perpignan Méditerranée Métropole de vider cet espace des grossistes pour procéder à sa vente.

Par un mémoire en défense, enregistré le 8 septembre 2022, la communauté urbaine Perpignan Méditerranée Métropole, représentée par Me Boissy, conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de la société Expo Fruits la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- le jugement attaqué est régulier dès lors que le moyen prétendument omis a été visé et que les premiers juges n'étaient pas tenus de répondre à un simple argument ;

- la procédure d'adoption de la délibération attaquée n'est pas viciée dès lors que le règlement intérieur du marché de gros adopté en 2011 ne s'applique qu'à la halle aux carreaux à l'exception de la halle aux grossistes ; à supposer même que le règlement intérieur du marché de gros s'applique à la halle aux grossistes, la consultation du comité technique consultatif préalablement à l'adoption de la délibération attaquée ne constitue pas pour le gestionnaire une obligation dont la méconnaissance serait sanctionnée ;

- les dispositions de l'article L. 2121-12 du code général des collectivités territoriales ont été respectées dès lors que la note de synthèse rappelle le contexte dans lequel ce texte est proposé, les dispositions du règlement intérieur et les motivations l'ayant conduite à solliciter la réduction du périmètre du marché de gros ;

- la mission de service public dévolue au marché de gros consistait à favoriser la commercialisation des fruits et légumes issus de la production locale ; la halle aux carreaux et la halle aux grossistes ont ainsi été spécialement affectées au service public d'organisation de la commercialisation des fruits et légumes issus de la production locale ; tirant les conséquences du constat de la perte d'affectation de la halle aux grossistes à ce service public, elle a décidé de réduire le périmètre du marché de gros en le limitant à la halle aux carreaux qui seule répondait à la mission d'intérêt général initialement dévolue ; cette désaffectation de la halle aux grossistes est le résultat de la diminution drastique de la production de fruits et légumes dans les Pyrénées-Orientales et du changement des modes d'écoulement de cette production.

Par des mémoires en intervention, enregistrés le 1er juin 2022 et le 4 juin 2023, la société civile immobilière Gin 66, représentée par Me Brenot et Me Maurel, conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de la société appelante une somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir qu'elle justifie d'un intérêt à intervenir au soutien de la défense de la communauté urbaine Perpignan Méditerranée Métropole et que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

VI.- Par une requête n° 21TL03525, enregistrée le 17 août 2021, au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille, puis le 1er mars 2022 au greffe de notre cour, un mémoire, enregistré le 21 mars 2023 n'ayant pas été communiqué, et un mémoire du 31 mai 2023, la société Expo Fruits, représentée par Me de Gaulle, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1904649 du tribunal administratif de Montpellier du 17 juin 2021 ;

2°) d'annuler la décision du bureau de la communauté urbaine Perpignan Méditerranée Métropole du 5 juillet 2019 ;

3°) d'enjoindre à la communauté urbaine Perpignan Méditerranée Métropole de procéder à la résolution amiable de la vente autorisée par la décision du 5 juillet 2019, ou, à défaut, de saisir le juge judiciaire afin qu'il tire les conséquences de l'annulation de cette décision et ce, sous astreinte de 500 euros par jour ;

4°) de mettre à la charge de cette communauté urbaine la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement est irrégulier dès lors que, d'une part, les premiers juges se sont mépris sur la décision attaquée et se sont prononcés sur la délibération du 15 février 2018, qui n'était pas la décision contestée, et, d'autre part, ont omis de répondre au moyen tiré de ce que les biens, objets de la vente contestée, demeuraient dans les faits affectés au service public du marché de gros de Perpignan ;

- la décision attaquée, qui a été adoptée par le bureau de la communauté urbaine Perpignan Méditerranée Métropole, est entachée d'un vice d'incompétence ; compte tenu de la portée générale de l'article L. 5211-37 du code général des collectivités territoriales auquel l'article L. 5211-10 de ce code ne saurait déroger, les cessions immobilières des établissements publics de coopération intercommunale doivent être autorisées par son organe délibérant ; la compétence du conseil communautaire pour autoriser la cession immobilière ne pouvait être régulièrement déléguée au bureau en application de l'article L. 5211-37 du code général des collectivités territoriales et ce, en dépit des dispositions de l'article L. 5211-10 de ce code ;

- la décision attaquée est insuffisamment motivée en méconnaissance de l'article L. 5211-37 du code général des collectivités territoriales ;

- la procédure est irrégulière en l'absence d'avis du service des domaines sur les bâtiments visés par la décision attaquée, cet avis s'étant prononcé sur la halle agroalimentaire et sur l'immeuble Sopro bureaux, qui constituent des bâtiments distincts de ceux de la halle aux grossistes vendus aux termes de la décision attaquée ;

- le principe d'inaliénabilité du domaine public a été méconnu ; au jour de la décision contestée, la halle aux grossistes demeurait affectée au service public du marché de gros de Perpignan ; la réduction du périmètre de ce marché, la désaffectation et le déclassement qui s'en sont suivis, n'étaient motivés que par le seul projet de cession des halls A et B de la halle aux grossistes ;

- le principe d'égalité de traitement des candidats a été méconnu compte tenu de l'asymétrie d'informations entre elle et la société dont l'offre d'acquisition a été retenue.

Par un mémoire en défense, enregistré le 9 septembre 2022, la communauté urbaine Perpignan Méditerranée Métropole, représentée par Me Boissy et Me Herlin, conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de la société appelante la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- le jugement attaqué est régulier dès lors que, d'une part, les premiers juges ne se sont pas mépris sur la décision attaquée en faisant référence, au point 12 de leur jugement, à la délibération portant réduction du périmètre du marché de gros dans lequel s'applique le règlement intérieur de ce marché ; d'autre part, ils n'ont pas omis de répondre au moyen selon lequel les biens, objet de la cession, étaient toujours affectés au service public et demeuraient intégrés au domaine public

- la décision du 5 juillet 2019 n'est pas entachée d'un vice d'incompétence ;

- cette décision est suffisamment motivée ;

- l'avis du service du domaine du 29 mai 2019, qui porte sur les parcelles cadastrées section IL n° 877, 878, 911 et 913, correspond à l'ensemble immobilier identifié dans l'acte de vente ;

- la décision attaquée ne porte pas atteinte au principe d'inaliénabilité du domaine public ; en effet, dès lors que la délibération a constaté la désaffectation des parcelles en cause du domaine public et prononcé, par voie de conséquence, leur déclassement du domaine public, ce principe a été respecté ;

- la société appelante ne justifie pas de l'atteinte portée au principe d'égalité de traitement des candidats en se fondant sur des éléments survenus avant la date de l'engagement de la procédure de mise en concurrence.

Par un mémoire en intervention, enregistré le 1er juin 2022, la société civile immobilière Gin 66, représentée par Me Brenot et Me Maurel, conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de la société appelante une somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir qu'elle justifie d'un intérêt à intervenir au soutien de la défense de la communauté urbaine Perpignan Méditerranée Métropole et que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

VII. Par une requête n° 21TL03360, enregistrée le 6 août 2021, au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille, puis, le 1er mars 2022, au greffe de la cour administrative d'appel de Toulouse, et des mémoires, enregistrés le 28 février 2023 et le 2 juin 2023, la société par actions simplifiée Guillem Export France, représentée par Me Gallois, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1904141 du tribunal administratif de Montpellier du 17 juin 2021 ;

2°) d'annuler les décisions des 6 mai et 5 juillet 2019 ;

3°) d'enjoindre à la communauté urbaine Perpignan Méditerranée Métropole de saisir le tribunal judiciaire compétent pour que soit ordonnée la résolution de la vente ;

4°) de mettre à la charge de cette communauté urbaine la somme de 6 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement attaqué, qui a omis de répondre aux moyens relatifs à la garantie bancaire irrévocable, est irrégulier ;

- la décision du bureau du 5 juillet 2019 a été prise par une autorité incompétente ; l'article L. 5211-37 du code général des collectivités territoriales s'oppose à une possibilité de délégation de sa compétence pour décider de la vente d'un bien immobilier ;

- la décision du président de la communauté urbaine du 6 mai 2019 et celle du bureau du 5 juillet 2019 sont illégales par la voie de l'exception d'illégalité des délibérations du conseil de la communauté urbaine Perpignan Méditerranée Métropole du 24 avril 2014 et du 22 mai 2017 octroyant une délégation permanente au bureau sans être assortie de conditions et de limites ;

- l'organe délibérant était seul compétent pour établir le cahier des charges, fixer les critères de sélection des candidats et instituer la composition de la commission en application de l'article L. 5211-37 du code général des collectivités territoriales ;

- la composition partiale de la commission, qui comportait parmi ses cinq membres deux fonctionnaires territoriaux placés sous l'autorité hiérarchique du président, est entachée d'une irrégularité qui l'a privée de la garantie d'un égal traitement avec l'autre candidat ;

- la commission mise en place par le président ne pouvait pas retenir l'offre de la société Gin 66 dès lors que la lettre produite par cette dernière ne mentionne nullement que son engagement est irrévocable ;

- les membres du bureau ne se sont pas prononcés en pleine connaissance de cause en l'absence de note explicative de synthèse jointe à leurs convocations.

Par un mémoire, enregistré le 3 mars 2023, la société Guillem Export France demande à la cour de transmettre au Conseil d'État une question prioritaire de constitutionnalité relative à la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution des dispositions de l'article L. 5211-10 du code général des collectivités territoriales.

Par deux mémoires en défense, enregistrés le 8 septembre 2022 et le 22 mai 2023, ce dernier n'ayant pas été communiqué, la communauté urbaine Perpignan Méditerranée Métropole, représentée par Me Boissy, conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de la société Guilhem Export France la somme de 6 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Un mémoire en observations sur la question prioritaire de constitutionalité a été enregistré le 22 mai 2023 et n'a pas été communiqué.

Elle fait valoir que :

- le jugement attaqué est régulier dès lors que le moyen prétendument omis a été visé et que les premiers juges n'étaient pas tenus de répondre à un simple argument ;

- le bureau était compétent pour autoriser la cession en application de l'article L. 5211-10 du code général des collectivités territoriales et le président était habilité à lancer une procédure de mise en concurrence concernant un ensemble immobilier en exécution de la délibération du 15 février 2018 modifiant le périmètre du marché de gros en vue de la cession deux ensembles immobiliers en application de l'article L. 5211-9 de ce code ;

- la société Gin 66 a été la seule des deux candidats à fournir une garantie bancaire irrévocable qui consiste en un engagement irrévocable d'une banque de verser une somme déterminée à un bénéficiaire dans le cas où un tiers n'accomplirait pas la prestation convenue et non en une obtention de prêt ; en tout état de cause, ce n'est pas cet élément qui a déterminé le choix de l'acquéreur mais le montant de l'offre d'acquisition beaucoup plus élevé de la société Gin 66.

Par un mémoire en intervention, enregistré le 3 juin 2022, la société civile immobilière Gin 66, représentée par Me Brenot et Me Maurel, conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de la société appelante une somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir qu'elle justifie d'un intérêt à intervenir au soutien de la défense de la communauté urbaine Perpignan Méditerranée Métropole et que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Cette société a également présenté un mémoire en réponse à la question prioritaire de constitutionnalité, enregistré le 26 mai 2023, qui n'a pas été communiqué.

En application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, les parties ont été informées, par lettre du 24 mai 2023, que la cour était susceptible de soulever d'office l'irrecevabilité des conclusions en annulation de la décision du 5 juillet 2019 autorisant la cession des halls A et B de la halle aux grossistes dès lors qu'en qualité de tiers au contrat administratif du 19 septembre 2019, l'association des producteurs du marché de gros de Perpignan, la société Expo Fruits et la société Guillem Export France disposaient d'un recours en pleine juridiction pour en contester la validité.

En application de ces même dispositions, les parties ont été informées par lettre du 26 mai 2023 que la cour était susceptible de soulever d'office l'irrecevabilité des conclusions en annulation de la société Guillem Export France dirigées contre la décision du président de la communauté urbaine Perpignan Méditerranée Métropole, notifiée le 6 mai 2019, rejetant son offre d'acquisition des halls A et B de la halle aux grossistes dès lors qu'en qualité de tiers au contrat administratif du 19 septembre 2019, la société Guillem Export France disposait d'un recours en pleine juridiction pour en contester la validité.

Ces moyens soulevés d'office par la cour ont fait l'objet d'observations, enregistrées le 26 mai 2023, de la part de la société Guillem Export France et de la société Expo Fruits et le, 29 mai 2023, de la part de l'association des producteurs du marché de production de Perpignan et de la communauté urbaine Perpignan Méditerranée Métropole.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la Constitution, notamment son article 61-1 et son Préambule ;

- l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique sur le Conseil constitutionnel, notamment ses articles 23-1 à 23-3 ;

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code général de la propriété des personnes publiques ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Karine Beltrami, première conseillère,

- les conclusions de Mme Françoise Perrin, rapporteure publique,

- les observations de Me Vigo, représentant l'association des producteurs du marché de gros de Perpignan, celles de Me Weill, représentant la société Expo Fruits, celles de Me Gallois, représentant la société Guillem Export France, celles de Me Herlin, représentant la communauté urbaine Perpignan Méditerranée Métropole et celles de Me Maurel, représentant la société Gin 66.

Deux notes en délibéré ont été déposées pour la société Gin 66 les 1er et 3 juillet 2023.

Considérant ce qui suit :

1. Le marché de gros de Perpignan Méditerranée Métropole, installé sur l'espace économique Grand Saint-Charles, a pour principale activité le commerce de gros et de demi-gros de fruits, légumes et fleurs récoltés dans le Roussillon. Il est structuré en plusieurs bâtiments autour du secteur n° 1 de la halle aux carreaux dédiée aux producteurs de fruits et légumes des Pyrénées-Orientales, qui vendent leur production à des acheteurs professionnels, du secteur n° 2 de la halle agroalimentaire et du secteur n° 3 de la halle aux grossistes, qui a vocation à accueillir des entreprises de commerce de gros et demi-gros de fruits et légumes. Par une délibération du 10 février 2017, la communauté urbaine Perpignan Méditerranée Métropole a approuvé la vente des halls A et B de la halle aux grossistes à la société Gavignaud Marée Services moyennant le prix de 2 100 000 euros. Cette délibération a été retirée par une délibération du 9 juin 2017 qui réitère l'autorisation de procéder à la cession au profit des époux C..., propriétaires de la société Gavignaud Marée Service, ou de toute personne qui s'y substituerait. Par une délibération n° 2018/02/11 du 15 février 2018, le conseil communautaire de la communauté urbaine Perpignan Méditerranée Métropole a décidé de réduire le périmètre du marché de gros en le limitant à la halle aux carreaux et aux voiries et, par une délibération n° 2018/10/192 du 22 octobre 2018, le conseil communautaire a abrogé la délibération du 22 mai 2017 et a déclassé du domaine public les parcelles cadastrées à Perpignan section IL n° 911, 913, 877 et 878. La communauté urbaine a décidé d'engager une procédure de mise en concurrence pour l'achat de ces parcelles. À l'issue de cette procédure, organisée le 2 mai 2019, la commission constituée d'élus de la communauté urbaine désignait la société Gin 66 comme acquéreur des halls A et B de la zone du marché de gros de Perpignan et le président de la communauté urbaine Perpignan Méditerranée Métropole notifiait à la société Guillem Export France, le 6 mai 2019, le rejet de son offre présentée avec la société Expo Fruits en raison de l'existence d'une offre supérieure en matière de prix et de garantie bancaire. Le bureau de la communauté urbaine de Perpignan Méditerranée Métropole a ensuite, par une délibération n° 2019/07/82 du 5 juillet 2019, autorisé la cession de biens immobiliers de la zone grossistes du marché de gros de Perpignan au profit de la société Gin 66 et les actes relatifs à cette cession. Le 19 septembre 2019, la communauté urbaine Perpignan Méditerranée Métropole et la société Gin 66 ont signé l'acte authentique de vente relatif aux bâtiments A et B de la halle aux grossistes.

2. Par une requête n° 21TL03516, l'association des Producteurs du marché de production de Perpignan relève appel du jugement n° 1801801 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande d'annulation de la délibération du conseil communautaire du 15 février 2018. Par une requête n° 21TL03517, cette association relève appel du jugement n° 1805911 par lequel ce tribunal administratif a rejeté sa demande d'annulation de la délibération du conseil communautaire du 22 octobre 2018. Par une requête n° 21TL03518, elle relève appel du jugement n° 1904676 par lequel ce même tribunal a rejeté sa demande d'annulation de la décision du bureau du 5 juillet 2019.

3. Par une requête n° 21TL03503, la société Expo Fruits relève appel du jugement n° 1801374 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande d'annulation de la décision du bureau du 9 juin 2017. Par une requête n° 21TL03502, elle relève appel du jugement n° 1801443 par lequel ce tribunal a rejeté sa demande d'annulation de la délibération du conseil communautaire du 15 février 2018. Par une requête n° 21TL03525, cette société relève appel du jugement n° 1904649 par lequel ce même tribunal a rejeté sa demande d'annulation de la décision du bureau du 5 juillet 2019.

4. Par une requête n° 21TL03360, la société Guillem Export France relève appel du jugement n° 1904141 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande d'annulation de la décision du 6 mai 2019 du président de la communauté urbaine Perpignan Méditerranée Métropole rejetant son offre d'acquisition des halls A et B de la halle aux grossistes et de la décision du bureau du 5 juillet 2019.

5. Les sept requêtes précitées présentent à juger des questions similaires. Il y a lieu de les joindre pour qu'il y soit statué par un même arrêt.

Sur la question prioritaire de constitutionnalité présentée par la société Guillem Export France :

6. Il résulte des dispositions combinées des articles 23-1 et 23-2 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel, que la juridiction relevant du Conseil d'État, saisie d'un moyen tiré de ce qu'une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution présenté dans un écrit distinct et motivé, statue sans délai par une décision motivée sur la transmission de la question prioritaire de constitutionnalité au Conseil d'État et procède à cette transmission si est remplie la triple condition que la disposition contestée soit applicable au litige ou à la procédure, qu'elle n'ait pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel, sauf changement des circonstances et que la question ne soit pas dépourvue de caractère sérieux. L'article 23-2 de la même ordonnance précise que : " (...) En tout état de cause, la juridiction doit, lorsqu'elle est saisie de moyens contestant la conformité d'une disposition législative, d'une part, aux droits et libertés garantis par la Constitution et, d'autre part, aux engagements internationaux de la France, se prononcer par priorité sur la transmission de la question de constitutionnalité au Conseil d'État (...) ".

7. La société Guillem Export France soutient que les dispositions de l'article L. 5211-10 du code général des collectivités territoriales, qui n'excluent pas les cessions immobilières et de droits réels du champ de la délégation consentie par l'organe délibérant d'un établissement public de coopération intercommunale au président, à un vice-président ou au bureau, portent atteinte au principe de libre administration des collectivités territoriales garanti par l'article 72 de la Constitution, au droit de propriété garanti par l'article 17 et à l'objectif de valeur constitutionnelle d'accessibilité et d'intelligibilité de la loi.

8. Ces dispositions, qui sont applicables au présent litige, n'ont pas déjà fait l'objet d'une déclaration de conformité à la Constitution.

9. En premier lieu, la méconnaissance par le législateur de sa propre compétence ne peut être invoquée à l'appui d'une question prioritaire de constitutionnalité que dans le cas où est affecté un droit ou une liberté que la Constitution garantit. De même, la méconnaissance de l'objectif de valeur constitutionnelle d'intelligibilité et d'accessibilité de la loi ne peut, en elle-même, être invoquée à l'appui d'une question prioritaire de constitutionnalité sur le fondement de l'article 61-1 de la Constitution. Par suite, la société Guillem Export France n'est pas fondée à se prévaloir de la méconnaissance par le législateur de sa propre compétence qui affecterait l'objectif de valeur constitutionnelle d'intelligibilité et d'accessibilité, lequel ne constitue pas un droit ou une liberté que la Constitution garantit.

10. En deuxième lieu, les établissements publics de coopération intercommunale ne constituent pas des collectivités territoriales au sens de l'article 72 de la Constitution. Dès lors, la société Guillem Export France n'est pas fondée à soutenir que l'article L. 5211-10, qui concerne les règles de composition et des attributions du bureau d'un établissement public de coopération intercommunale, méconnaît le principe de libre administration des collectivités territoriales.

11. En dernier lieu, la circonstance que le bureau d'un établissement public de coopération intercommunale auquel une délégation a été consentie par son organe délibérant, puisse autoriser la cession de biens en lieu et place de cet organe, n'emporte, en elle-même, aucune privation ou limitation dans l'exercice du droit de propriété. Par suite, la société Guillem Export France n'est pas fondée à soutenir que les dispositions de l'article L. 5211-10 du code général des collectivités territoriales portent atteinte au droit de propriété que la Constitution garantit.

12. Il résulte de ce qui précède que la question prioritaire de constitutionnalité invoquée est dépourvue de caractère sérieux. Il n'y a pas lieu, par suite, de la transmettre au Conseil d'État.

Sur la régularité des jugements n° 1801801, n° 1805911 et n° 1904676 :

13. Dans l'intérêt d'une bonne justice, le juge administratif a toujours la faculté de rouvrir l'instruction, qu'il dirige, lorsqu'il est saisi d'une production postérieure à la clôture de celle-ci. Il lui appartient, dans tous les cas, de prendre connaissance de cette production avant de rendre sa décision et de la viser. S'il décide d'en tenir compte, il rouvre l'instruction et soumet au débat contradictoire les éléments contenus dans cette production qu'il doit, en outre, analyser. Dans le cas particulier où cette production contient l'exposé d'une circonstance de fait ou d'un élément de droit dont la partie qui l'invoque n'était pas en mesure de faire état avant la clôture de l'instruction et qui est susceptible d'exercer une influence sur le jugement de l'affaire, le juge doit alors en tenir compte, à peine d'irrégularité de sa décision.

14. Il ressort des pièces de la procédure devant le tribunal administratif de Montpellier que l'association des producteurs du marché de gros de Perpignan a, postérieurement à l'audience du 3 juin 2021, déposé, le 4 juin 2021, une note en délibéré concernant les instances n° 1801801, n° 1805911 et n° 1904676. Si elle soutient que l'instruction aurait dû être rouverte dans ces trois affaires à la suite de la production de cette note, elle ne se prévalait toutefois d'aucune circonstance de fait ni d'un élément de droit dont elle n'était pas en mesure de faire état avant la clôture de l'instruction. L'association des producteurs du marché de production de Perpignan n'est, par suite, pas fondée à soutenir que les premiers juges auraient méconnu le principe du caractère contradictoire de la procédure en ne rouvrant pas l'instruction.

15. Il en résulte que l'association des producteurs du marché de gros de Perpignan n'est pas fondée à soutenir que les jugements attaqués seraient irréguliers.

Sur la régularité du jugement n° 1801374 :

16. Est entaché d'irrégularité un jugement qui a prononcé à tort un non-lieu à statuer.

17. D'une part, un recours pour excès de pouvoir dirigé contre un acte administratif n'a d'autre objet que d'en faire prononcer l'annulation avec effet rétroactif. Si, avant que le juge n'ait statué, l'acte attaqué est rapporté par l'autorité compétente et si le retrait ainsi opéré acquiert un caractère définitif faute d'être critiqué dans le délai du recours contentieux, il emporte alors disparition rétroactive de l'ordonnancement juridique de l'acte contesté, ce qui conduit à ce qu'il n'y ait lieu pour le juge de la légalité de statuer sur le mérite du pourvoi dont il était saisi. Il en va ainsi, quand bien même l'acte rapporté aurait reçu exécution. Dans le cas où l'administration se borne à procéder à l'abrogation de l'acte attaqué, cette circonstance prive d'objet le pourvoi formé à son encontre, à la double condition que cet acte n'ait reçu aucune exécution pendant la période où il était en vigueur et que la décision procédant à son abrogation soit devenue définitive.

18. D'autre part, lorsqu'une décision administrative faisant l'objet d'un recours contentieux est retirée en cours d'instance pour être remplacée par une décision ayant la même portée, il n'y a plus lieu de statuer sur les conclusions dirigées contre la décision initiale, qui ont perdu leur objet dans le cas où le retrait a acquis un caractère définitif. Le juge doit, en revanche, statuer sur les conclusions dirigées contre la nouvelle décision.

19. Il est constant que, postérieurement à l'introduction de la demande en annulation de la décision du 9 juin 2017 de la société Expo Fruits devant le tribunal administratif de Montpellier, la communauté urbaine Perpignan Méditerranée Métropole a, par une décision n° 2019/07/82 du 5 juillet 2019, procédé au retrait de la décision attaquée. Cependant, cette dernière décision n'a pas une portée strictement identique à celle du 9 juin 2017 dès lors que la consistance des biens et le montant du prix de cession diffèrent et que la procédure de cession est intervenue non pas de gré à gré mais à la suite de la mise en œuvre d'une procédure de mise en concurrence. De plus, en cours d'instance devant le tribunal, la société Expo Fruits a formé un recours en annulation, dans le délai de recours contentieux, à l'encontre de la décision du 5 juillet 2019. Dès lors que le retrait de la décision attaquée du 9 juin 2017, qui, au demeurant, n'a pas été remplacée par un acte de même portée, n'a pas acquis un caractère définitif, la demande conservait un objet. Par suite, les premiers juges ont prononcé à tort un non-lieu à statuer, et, en conséquence ont entaché leur jugement d'irrégularité.

20. Il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par la société Expo Fruits devant le tribunal administratif de Montpellier.

Sur la régularité du jugement n° 1904141 :

21. En jugeant, au point 8 de leur jugement n° 1904141 du 17 juin 2021, que la production d'une acceptation irrévocable d'obtention de prêt de la part de la banque a été satisfaite par la société Gin 66, ce qui établit que cette condition n'était pas impossible à remplir, le tribunal a répondu au moyen tiré de l'impossibilité de fournir un tel engagement. De plus, les premiers juges n'étaient pas tenus de répondre à l'ensemble des arguments soulevés par la société Guillem Export France au soutien de ce moyen.

22. Il en résulte que la société Guillem Export France n'est pas fondée à soutenir que le jugement attaqué serait irrégulier.

Sur la fin de non-recevoir opposée en défense à la requête n° 2103503 de la société Expo Fruits :

23. La publication d'une décision administrative dans un recueil autre que le journal officiel fait courir le délai du recours contentieux à l'égard de tous les tiers si l'obligation de publier cette décision dans ce recueil résulte d'un texte législatif ou réglementaire lui-même publié au Journal officiel de la République française. En l'absence d'une telle obligation, cet effet n'est attaché à la publication que si le recueil peut, eu égard à l'ampleur et aux modalités de sa diffusion, être regardé comme aisément consultable par toutes les personnes susceptibles d'avoir un intérêt leur donnant qualité pour contester la décision.

24. Si, en application des dispositions, alors en vigueur, de l'article L. 5211-47 du code général des collectivités territoriales, dans les établissements publics de coopération intercommunale comprenant au moins une commune de 3 500 habitants et plus, le dispositif des actes réglementaires pris par l'organe délibérant ou l'organe exécutif est transmis dans le mois, pour affichage, aux communes membres ou est publié dans un recueil des actes administratifs, l'obligation d'affichage ou de publication au recueil des actes administratifs imposée par ce texte ne concernait que les actes réglementaires et non les actes non réglementaires. Il ressort des pièces du dossier que la décision du bureau du conseil communautaire du 9 juin 2017, qui n'a pas un caractère réglementaire, a été publiée au registre des actes administratifs de la communauté urbaine Perpignan Méditerranée Métropole le 4 juillet 2017 et que ce recueil a été mis à disposition du public pour consultation à compter du 16 octobre 2017 au siège de la communauté urbaine et dans chaque commune membre. Toutefois, il ne ressort pas des pièces du dossier que le public ait été informé par affichage, notamment aux lieux habituels de l'affichage officiel de la communauté urbaine et des communes membres, que le recueil contenant la décision attaquée était mis à sa disposition. Eu égard à la faiblesse et à la confidentialité de la diffusion de ce recueil, la publication de la décision du 9 juin 2017 dans un tel recueil ne peut être regardée comme suffisante pour avoir fait courir le délai de recours à l'égard des tiers. Dès lors, la communauté urbaine Perpignan Méditerranée Métropole n'est pas fondée à soutenir que la demande de la société Expo Fruits enregistrée le 23 mars 2018 au greffe du tribunal administratif de Montpellier, soit plus de deux mois après la publication de la décision du 9 juin 2017 au recueil des actes administratifs, serait tardive. Par suite, la fin de non-recevoir opposée en défense ne peut être accueillie.

Sur l'intervention de la société Gin 66 :

25. En sa qualité d'acquéreur des halls A et B de la zone réservée aux grossistes du marché de gros de Perpignan, la société Gin 66, dont la validité de la cession de ces biens est subordonnée à la légalité des décisions attaquées, justifie d'un intérêt suffisant à intervenir au soutien de la communauté urbaine Perpignan Méditerranée Métropole concluant au rejet des recours en annulation dirigés contre les délibérations du 15 février 2018, du 22 octobre 2018 et contre les décisions du 9 juin 2017 et du 5 juillet 2019. Par suite, son intervention est recevable.

Sur les conclusions en annulation de la décision du 9 juin 2017 de la société Expo Fruits :

Quant à la légalité externe :

26. Aux termes de l'article L. 2121-12 du code général des collectivités territoriales, rendues applicables aux établissements publics de coopération intercommunale comportant au moins 3 500 habitants par l'article L. 5211-1 du même code : " Dans les communes de 3 500 habitants et plus, une note explicative de synthèse sur les affaires soumises à délibération doit être adressée avec la convocation aux membres du conseil municipal ". Il résulte de ces dispositions que le défaut d'envoi avec la convocation de la note explicative de synthèse portant sur chacun des points de l'ordre du jour entache d'irrégularité les délibérations prises, à moins que le président de l'établissement public n'ait fait parvenir aux membres du conseil, en même temps que la convocation, les documents leur permettant de disposer d'une information adéquate pour exercer utilement leur mandat.

27. Alors que la société appelante soutient que la communauté urbaine Perpignan Méditerranée Métropole ne justifie pas de ce que la convocation des membres du conseil communautaire à la séance du 9 juin 2017 avait été accompagnée d'une note explicative de synthèse sur les affaires soumises à délibération, la communauté urbaine se borne à faire valoir que l'existence du vice allégué n'est pas établie, sans faire état d'une note de synthèse ni d'aucun autre document en tenant lieu. Dès lors, les conseillers communautaires ne peuvent être regardés comme ayant été suffisamment éclairés sur la nature et l'importance de la cession immobilière afin de mesurer l'implication de leur décision. Par suite, les dispositions de l'article L. 2121-12 du code général des collectivités territoriales ont été méconnues.

28. La société Expo Fruits est fondée à soutenir, sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de sa demande, que c'est à tort que, par le jugement n° 1801374, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande d'annulation de la décision du 9 juin 2017 .

Sur les conclusions en annulation de la délibération du 15 février 2018 de l'association des producteurs du Marché de gros de Perpignan et de la société Expo Fruits :

29. D'une part, les usagers d'un service public qui n'est pas obligatoire n'ont aucun droit au maintien de ce service au fonctionnement duquel l'administration peut mettre fin lorsqu'elle l'estime nécessaire.

30. D'autre part, la désaffectation d'un bien du domaine public, à la différence du déclassement qui exige un acte formel de la collectivité propriétaire de ce bien, résulte d'un état de fait.

31. Il ressort des pièces du dossier que le marché de gros de Perpignan a été relocalisé en 2011 sur l'espace Grand-Saint Charles afin de favoriser le développement de la commercialisation des fruits, légumes et fleurs issus de la production locale. Afin de répondre à cette mission d'intérêt général, ce marché a été spécialement aménagé en trois halles dont la halle aux grossistes destinée à accueillir des grossistes en fruits, légumes et fleurs commercialisant la production locale. Dès lors, la halle aux grossistes du marché de gros étant affectée au service public local pour lequel elle a été aménagée, elle doit être regardée comme faisant partie du domaine public de la communauté urbaine Perpignan Méditerranée Métropole.

32. La communauté urbaine Perpignan Méditerranée Métropole a tout d'abord fait valoir que la délibération du 15 février 2018 portant réduction du champ d'application du règlement intérieur du marché de gros Perpignan Méditerranée visait à tirer les conséquences de la perte d'affectation de la halle aux grossistes au service public organisant la commercialisation des fruits et légumes issus de la production locale.

33. Si la communauté urbaine Perpignan Méditerranée Métropole sollicite une substitution de motif tirée de ce que la réduction du périmètre du marché de gros était justifiée par la désaffectation de la halle aux grossistes, il est toutefois constant qu'à la date de la délibération attaquée, le hall B de cette halle restait occupé par la société Expo Fruits, qui exploitait les entrepôts n° 12, n° 13 et n° 17 d'une superficie de 1 000 m² de ce hall et écoulait des fruits et légumes issus de la production locale. À cet égard, sur les 8 000 tonnes de marchandises échangées annuellement sur le marché de gros de Perpignan, halle aux carreaux et halle aux grossistes confondues, la société Expo Fruits a commercialisé, en 2018, 650 tonnes de marchandises provenant des producteurs locaux du marché, ce qui représente, pour cet opérateur, 8,12 % des marchandises échangées sur le marché de gros. Il en résulte que les bâtiments de la halle aux grossistes ne pouvaient pas être regardés comme étant entièrement désaffectés à la date de la délibération attaquée.

34. La délibération portant réduction du périmètre du champ d'application du règlement intérieur du marché de gros de Perpignan ne pouvait avoir ni pour objet ni pour effet d'entraîner la désaffectation de la halle aux grossistes. Toutefois, la communauté urbaine Perpignan Méditerranée Métropole a utilisé à cette fin cette réduction du périmètre d'application du règlement intérieur du marché de gros de Perpignan, alors que ce texte a pour seul objet de fixer les règles et les modalités de fonctionnement de ce marché. Par suite, la délibération attaquée est entachée d'un détournement de procédure et doit être annulée.

35. Il en résulte que l'association des producteurs du marché de gros de Perpignan est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement n° 1801801, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande d'annulation de la délibération du 15 février 2018.

36. La société Expo Fruits est fondée, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de sa requête, à demander l'annulation de la délibération du 15 février 2018.

Sur les conclusions en annulation de la délibération du 22 octobre 2018 de l'association des producteurs du Marché de gros de Perpignan :

37. D'autre part, en raison des effets qui s'y attachent, l'annulation pour excès de pouvoir d'un acte administratif, qu'il soit ou non réglementaire, emporte, lorsque le juge est saisi de conclusions recevables, l'annulation par voie de conséquence des décisions administratives consécutives qui n'auraient pu légalement être prises en l'absence de l'acte annulé ou qui sont en l'espèce intervenues en raison de l'acte annulé. Il en va ainsi, notamment, des décisions qui ont été prises en application de l'acte annulé et de celles dont l'acte annulé constitue la base légale.

38. Il incombe au juge de l'excès de pouvoir, lorsqu'il est saisi de conclusions recevables dirigées contre de telles décisions consécutives, de prononcer leur annulation par voie de conséquence, le cas échéant en relevant d'office un tel moyen qui découle de l'autorité absolue de chose jugée qui s'attache à l'annulation du premier acte.

39. Il ressort des termes mêmes de la délibération du 22 octobre 2018 prononçant le déclassement des parcelles que la désaffectation au service public du marché de gros ou à l'usage direct du public des terrains d'assiette des halls de la zone réservée aux grossistes découle de la délibération du 15 février 2018. Cette dernière délibération devant être annulée pour les motifs exposés précédemment, il y a lieu, par voie de conséquence, d'annuler la délibération du 22 octobre 2018.

40. Il en résulte que l'association des producteurs du marché de gros de Perpignan est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement n° 1805911, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande d'annulation de la délibération du 22 octobre 2018.

Sur les conclusions en annulation de la décision du 5 juillet 2019 de l'association des producteurs du marché de gros de Perpignan, des sociétés Expo Fruits et Guillem Export France :

41. La décision du 5 juillet 2019 autorisant la cession des halls A et B de la halle aux grossistes procède des délibérations du 15 février 2018 du 22 octobre 2018. Ces délibérations devant être annulées pour les motifs exposés précédemment, il y a lieu, par voie de conséquence, d'annuler la décision du 5 juillet 2019 qui n'aurait pas pu être prise en l'absence de ces délibérations annulées.

42. Il en résulte que l'association des producteurs du marché de gros de Perpignan est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement n° 1904676, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande d'annulation de la décision du 5 juillet 2019.

43. La société Expo Fruits est fondée à demander l'annulation de la décision du 5 juillet 2019.

44. La société Guillem Export France est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement n° 1904141, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande d'annulation de la décision du 5 juillet 2019.

Sur les conclusions en annulation de la décision du 6 mai 2019 :

45. Par voie de conséquence de l'annulation des délibérations du 15 février et du 22 octobre 2018, le président de la communauté urbaine Perpignan Méditerranée Métropole ne pouvait, comme il l'a fait dans sa décision du 6 mai 2019, que rejeter l'offre d'acquisition des sociétés Expo Fruits et Guillem Export France des halls A et B de la halle aux grossistes.

46. Il en résulte que la société Guillem Export France n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement n° 1904141, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande d'annulation de la décision du 6 mai 2019.

Sur les conclusions en injonction présentées par les sociétés Expo Fruits et Guillem Export France :

47. L'annulation d'un acte détachable d'un contrat de droit privé n'impose pas nécessairement à la personne publique partie au contrat de saisir le juge du contrat afin qu'il tire les conséquences de cette annulation. Il appartient au juge de l'exécution de rechercher si l'illégalité commise peut être régularisée et, dans l'affirmative, d'enjoindre à la personne publique de procéder à cette régularisation. Lorsque l'illégalité commise ne peut être régularisée, il lui appartient d'apprécier si, eu égard à la nature de cette illégalité et à l'atteinte que l'annulation ou la résolution du contrat est susceptible de porter à l'intérêt général, il y a lieu d'enjoindre à la personne publique de saisir le juge du contrat afin qu'il tire les conséquences de l'annulation de l'acte détachable.

48. En principe, un contrat cédant à une personne privée un bien du domaine public qui n'a pas fait l'objet d'un déclassement préalable reste un contrat de de droit privé sauf si son objet est l'exécution d'un service public ou s'il comporte des clauses impliquant un régime exorbitant de droit public.

49. En premier lieu, l'acte de vente du 9 septembre 2019 comporte une servitude d'affectation imposée au fonds servant, constitué des halls A et B de la halle aux grossistes acquis par la société Gin 66, au profit du fonds dominant, constitué par la partie du marché de gros conservée par le vendeur, à savoir la halle aux carreaux. À cet égard, " de par la situation particulière du bien acquis en relation avec le Marché de gros dédié au négoce de fruits, légumes, fleurs et d'agro-alimentaire et à l'activité du centre de contrôle international des douanes ", cette servitude d'affectation interdit à l'acquéreur du fonds servant sur l'ensemble de l'assiette de ce fonds, toute exploitation autre qu'une activité de négoce de fruits, légumes, fleurs et agro-alimentaire et de centre de contrôle international des douanes.

50. D'une part, la constitution de la servitude d'affectation litigieuse qui a pour finalité, selon l'acte de vente, " de préserver la vocation de l'ensemble du site du Marché de gros " avec lequel le fonds servant est en relation, a pour objet de faciliter ou du moins de ne pas entraver l'exploitation du fonds dominant que constitue la halle aux carreaux. Dès lors que cette servitude suppose que le fonds dominant en faveur duquel elle est en accordée en recueille une utilité, la communauté urbaine Perpignan Méditerranée Métropole doit être regardée comme ayant reconnu une utilité publique à affecter les halls A et B de la halle aux grossistes à l'activité de négoce de fruits, de légumes, fleurs et agro-alimentaire et de centre de contrôle international des douanes. Toutefois, d'une part, l'intérêt général reconnu à cette activité de négoce par la communauté urbaine ne permet pas de la qualifier de service public dès lors que la personne publique n'exerce aucun contrôle sur le fonctionnement de l'activité de négoce proprement dite, n'impose à l'acquéreur du fonds servant aucun objectif dans sa politique commerciale, ni ne prend des mesures pour en vérifier la conformité. Il en résulte que par l'insertion dans l'acte de vente d'une servitude d'affectation à l'activité de négoce de fruits, de légumes, fleurs et agro-alimentaire, la communauté urbaine Perpignan Méditerranée Métropole n'a pas confié l'exécution d'un service public à l'acquéreur du fonds servant, la société Gin.

51. S'agissant, d'autre part, de la servitude d'affectation du fonds servant à l'activité de centre de contrôle international des douanes qui constitue une mission de service public, il ressort de l'acte de vente que l'acquéreur s'est engagé à poursuivre la mise à disposition des locaux 8, 9, 10 et 11 du hall B à l'usage du centre du contrôle international des douanes qui au jour de la vente bénéficiait d'un bail moyennant une redevance mensuelle de 7 500 euros. Certes, par cette obligation d'affectation, la communauté urbaine Perpignan Méditerranée Métropole a imposé à l'acquéreur du fonds servant la mise à disposition d'une partie du fonds acquis au centre des douanes pour qu'il puisse continuer à y exercer sa mission de service public. Pour autant, elle n'a pas confié à l'acquéreur du fonds l'exécution d'une mission de service public qui reste accomplie par le centre des douanes.

52. D'autre part, si la servitude d'affectation à l'activité de négoce a été imposée à l'acquéreur du fonds servant, sans contrepartie, la sujétion imposée au fonds servant ne présente cependant pas un caractère exorbitant pour l'acquéreur de ce fonds dès lors que ce dernier exerce l'une des activités limitativement autorisées par la servitude d'affectation. En ce qui concerne la servitude d'affectation à l'activité du centre international de contrôle des douanes, la mise à disposition d'une partie du fonds servant au profit des douanes comporte cependant une contrepartie pour l'acquéreur du fonds servant qui est en droit de percevoir les redevances mensuelles. Enfin, si l'acte de vente prévoit qu'en cas d'infraction, le propriétaire du fonds servant sera de plein droit redevable au propriétaire du fonds dominant d'une indemnité forfaitaire de 240 000 euros, ce pouvoir de la communauté urbaine de sanctionner l'éventuel manquement contractuel à la servitude d'affectation ne caractérise pas l'exercice d'une prérogative exorbitante de la part de la personne publique dès lors que deux contractants privés peuvent prévoir qu'un manquement contractuel soit sanctionné par l'octroi automatique de dommages-intérêts. Il en résulte que la servitude d'affectation aux activités strictement définies par l'acte de vente, imposée à l'acquéreur du fonds servant, ne caractérise pas un rapport de droit public et ne constitue pas une clause exorbitante du droit commun.

53. En deuxième lieu, l'acte de vente litigieux stipule également que " pour interdire toute spéculation foncière et tout profit indu tiré des conditions financières d'acquisition, en cas de revente dans les cinq ans du bien acquis par l'acquéreur, celui-ci devra impérativement avant toute vente faire part à la communauté urbaine Perpignan Méditerranée Métropole de son intention de revendre le bien et devra alors lui proposer de se porter acquéreur par priorité à tout autre candidat et ce, au prix auquel l'acquéreur a acheté le bien à la communauté urbaine ". Cette clause de priorité d'achat en faveur de la communauté urbaine en cas de revente du bien dans un certain délai, institue une clause antispéculative qui n'impose pas à l'acquéreur une sujétion exorbitante dès lors qu'elle est la contrepartie, librement acceptée par l'acquéreur, des conditions financières d'acquisition. Cette clause de priorité d'achat ne caractérise dès lors pas un rapport de droit public et ne constitue pas une clause exorbitante du droit commun.

54. Il résulte de tout ce qui précède que le contrat de vente du 9 septembre 2019 doit être regardé comme un contrat de droit privé.

55. Compte tenu des principes constitutionnels qui constituent le fondement du principe de l'inaliénabilité du domaine public, la décision du bureau du 5 juillet 2019, qui approuve la cession de parcelles appartenant au domaine public de la communauté urbaine Perpignan Méditerranée Métropole, et non à son domaine privé faute d'avoir été déclassées préalablement à leur cession, est entachée d'une illégalité d'une particulière gravité. Le contrat de vente du 19 septembre 2019 portant sur ces parcelles non déclassées est dès lors entaché de nullité. Cette nullité devant être constatée d'office par le juge, il y a lieu d'enjoindre à la personne publique de saisir le juge judiciaire du contrat afin qu'il tire les conséquences de l'annulation de la décision détachable du 5 juillet 2019. Il n'y a cependant pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte.

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

56 Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions de la communauté urbaine Perpignan Méditerranée Métropole et de la société Gin 66 sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, l'association des producteurs du marché de production de Perpignan, la société Expo Fruits et la société Guillem Export France n'étant pas la partie perdante.

57. Il y a lieu, dans les circonstances, de l'espèce de mettre à la charge de la communauté urbaine Perpignan Méditerranée Métropole sur le fondement de ces mêmes dispositions une somme de 1 500 euros à verser à chacune des personnes appelantes.

DÉCIDE:

Article 1er : L'intervention de la société Gin 66 est admise.

Article 2 : Les jugements n° 1801801, n° 1805911, n° 1904676, n° 1801374, n° 1801443, et n° 1904649 du tribunal administratif de Montpellier sont annulés.

Article 3 : Le jugement n° 1904141 du tribunal administratif de Montpellier est annulé en tant qu'il rejette la demande de la société Guillem export tendant à l'annulation de la délibération du bureau de la communauté urbaine Perpignan Méditerranée Métropole du 5 juillet 2019.

Article 4 : Les délibérations du conseil de la communauté urbaine Perpignan Méditerranée Métropole du 9 juin 2017, des 15 février et 22 octobre 2018, la décision du bureau de cette communauté du 5 juillet 2019 sont annulées.

Article 5 : Il est enjoint à la communauté urbaine Perpignan Méditerranée Métropole de saisir le juge judiciaire du contrat afin qu'il tire les conséquences de l'annulation de la décision du 5 juillet 2019.

Article 6 : La communauté urbaine Perpignan Méditerranée Métropole versera une somme de 1500 euros, respectivement, à l'association des producteurs du marché de production de Perpignan, à la société Expo Fruits et à la société Guillem Export France sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 7 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 8 : Le présent arrêt sera notifié à l'association des producteurs du marché de production de Perpignan, à la société Expo Fruits, à la société Guillem Export France, à la communauté urbaine Perpignan Métropole Méditerranée et à la société civile immobilière Gin 66.

Délibéré après l'audience du 27 juin 2023 à laquelle siégeaient :

M. Rey-Bèthbéder, président,

M. Bentolila, président-assesseur,

Mme Beltrami, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 11 juillet 2023.

La rapporteure,

K. Beltrami

Le président,

É. Rey-Bèthbéder

La greffière,

C. Lanoux

La République mande et ordonne au préfet des Pyrénées-Orientales en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 21TL03516, 21TL03517, 21TL03518, 21TL03502, 21TL03503, 21TL03525, 21TL03360


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Toulouse
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 21TL03516
Date de la décision : 11/07/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Collectivités territoriales - Coopération.

Domaine - Domaine public - Consistance et délimitation.

Domaine - Domaine public - Régime.

Procédure.


Composition du Tribunal
Président : M. REY-BÈTHBÉDER
Rapporteur ?: Mme Karine BELTRAMI
Rapporteur public ?: Mme PERRIN
Avocat(s) : BOISSY AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 10/08/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.toulouse;arret;2023-07-11;21tl03516 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award