Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société anonyme VOA Verrerie d'Albi a demandé au tribunal administratif de Toulouse de prononcer la décharge des suppléments de cotisation foncière des entreprises auxquels elle a été assujettie au titre des années 2010 à 2015. Par deux jugements n° 1303353, 1303472 du 12 mai 2016 et n° 1505658, 1603034 du 5 mars 2018, ce tribunal a prononcé une décharge partielle, à concurrence de l'exclusion des bases d'imposition de la valeur locative de certaines immobilisations, et rejeté le surplus des conclusions de la demande.
Par un arrêt n° 16BX01944, 18BX01607 du 30 novembre 2018, la cour administrative d'appel de Bordeaux a, sur appel de la société VOA Verrerie d'Albi, de nouveau réduit les bases d'imposition et prononcé la décharge correspondante, réformé le jugement en ce qu'il avait de contraire et rejeté le surplus des conclusions de la requête.
Par une décision n° 427551 du 22 mars 2021, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux, d'une part, a prononcé l'admission des conclusions du pourvoi de la société VOA Verrerie d'Albi dirigées contre l'article 3 de l'arrêt n° 16BX01944, 18BX01607 du 30 novembre 2018 de la cour administrative d'appel de Bordeaux, en tant qu'il s'est prononcé sur l'inclusion dans les bases d'imposition de cotisation foncière des entreprises de la valeur locative des cuves de stockage, du réseau informatique, du système de sécurité-incendie, du système de traitement de l'air et des murs anti-bruit et, d'autre part, n'a pas admis le surplus des conclusions.
Par une décision n° 427551 du 9 juillet 2021, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux, a annulé l'article 3 de l'arrêt n° 16BX01944, 18BX01607 du 30 novembre 2018 de la cour administrative d'appel de Bordeaux en tant qu'il s'est prononcé sur l'inclusion dans les bases d'imposition de la cotisation foncière des entreprises de la valeur locative des cuves de stockage, du réseau informatique, du système de sécurité-incendie, du système de traitement de l'air et des murs anti-bruit et a renvoyé l'affaire, dans cette mesure, à la cour administrative d'appel de Bordeaux.
Procédure devant la cour après le renvoi :
Par un mémoire en défense, enregistré le 14 septembre 2021 au greffe de la cour administrative d'appel de Bordeaux sous le n° 21BX02931 et ensuite au greffe de la cour administrative d'appel de Toulouse sous le n° 21TL22931, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête.
Il soutient que :
- en l'absence de précisions données par la société sur la dimension des cuves de stockage, celles-ci sont passibles de la taxe foncière en application tant de la loi fiscale, notamment des dispositions de l'article 1381 du code général des impôts, que de l'interprétation administrative de la loi fiscale ;
- les murs anti-bruit font partie des biens mentionnés aux 1° et 2° de l'article 1381 du code général des impôts ;
- les pièces produites par la société ne permettent d'établir ni la nature exacte des biens ou travaux et leur prise en compte dans les bases imposables à la cotisation foncière des entreprises ni que le réseau informatique et le système de sécurité incendie et de traitement de l'air constitueraient des équipements spécifiquement adaptés à l'activité susceptible d'être exercée dans un établissement industriel.
Une ordonnance du 24 novembre 2022 a prononcé la clôture de l'instruction à la même date en application des articles R. 611-11-1 et R. 613-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. A...,
- les conclusions de Mme Cherrier, rapporteure publique.
Considérant ce qui suit :
1. La société VOA Verrerie d'Albi, qui exerce une activité de fabrication de verre creux, a fait l'objet en 2011, d'une vérification de comptabilité par la direction des vérifications nationales et internationales à la suite de laquelle l'administration a majoré la valeur locative des biens passibles de la taxe foncière au titre des années 2010 à 2012 et en a tiré les conséquences sur les montants de cotisation foncière des entreprises au titre des mêmes années. L'administration a également, en conséquence, assujetti la société VOA Verrerie d'Albi à des suppléments de cotisation foncière des entreprises au titre des années 2013 à 2015.
2. Par deux jugements n° 1303353, 1303472 du 12 mai 2016 et n° 1505658, 1603034 du 5 mars 2018, le tribunal administratif de Toulouse a prononcé une décharge partielle, à concurrence de l'exclusion des bases d'imposition de la valeur locative de certaines immobilisations. La société VOA Verrerie d'Albi France a alors saisi la cour administrative d'appel de Bordeaux de deux requêtes tendant à l'annulation de ces jugements en tant qu'ils ont rejeté le surplus de ses demandes. Par un arrêt du 30 novembre 2018, la cour a prononcé une nouvelle réduction de la base imposable à la cotisation foncière des entreprises, correspondant à des travaux de peinture et de lutte contre les insectes, à des matériels de cloisonnement, à des panonceaux, à des stores, à des cases à déchets et à une benne à déchets et elle a rejeté le surplus des conclusions de la société VOA Verrerie d'Albi. Saisi d'un pourvoi contre l'article 3 de cet arrêt rejetant le surplus des conclusions des requêtes d'appel, le Conseil d'Etat a, par une décision du 9 juillet 2021, annulé cet article en tant qu'il s'est prononcé sur l'inclusion dans les bases d'imposition à la cotisation foncière des entreprises de la valeur locative des cuves de stockage, du réseau informatique, du système de sécurité-incendie, du système de traitement de l'air et des murs anti-bruit. Il a renvoyé l'affaire, dans cette mesure, à la cour administrative d'appel de Bordeaux et cette affaire relève à présent de celle de Toulouse.
Sur l'application de la loi fiscale :
3. D'une part, aux termes de l'article 1'article 1467 du code général des impôts, la cotisation foncière des entreprises a pour base " la valeur locative des biens passibles d'une taxe foncière situés en France, à l'exclusion des biens exonérés de taxe foncière sur les propriétés bâties en vertu (du) 11° (...) de l'article 1382, dont le redevable a disposé pour les besoins de son activité professionnelle (...) / La valeur locative des biens passibles d'une taxe foncière est calculée suivant les règles fixées pour l'établissement de cette taxe (...) ".
4. D'autre part, aux termes de l'article 1380 du code général des impôts : " La taxe foncière est établie annuellement sur les propriétés bâties sises en France à l'exception de celles qui en sont expressément exonérées par les dispositions du présent code ". L'article 1381 du même code dispose que : " Sont également soumis à la taxe foncière sur les propriétés bâties : 1°) Les installations destinées à abriter des personnes ou des biens ou à stocker des produits ainsi que les ouvrages en maçonnerie présentant le caractère de véritables constructions tels que, notamment, les cheminées d'usine, des réfrigérants atmosphériques, les formes de radoub, les ouvrages servant de support aux moyens matériels d'exploitation ; 2°) Les ouvrages d'art et les voies de communication (...) ". Aux termes de l'article 1382 du même code : " Sont exonérés de taxe foncière sur les propriétés bâties : (...) 11°) Les outillages et autres installations et moyens matériels d'exploitation des établissements industriels à l'exclusion de ceux visés au 1° et 2° de l'article 1381 (...) ". L'article 1495 du même code dispose que : " Chaque propriété ou fraction de propriété est appréciée d'après sa consistance, son affectation, sa situation et son état, à la date de l'évaluation ". Aux termes du II de l'article 324 B de l'annexe III au même code : " Pour l'appréciation de la consistance, il est tenu compte de tous les travaux, équipements ou éléments d'équipement existant au jour de l'évaluation ".
5. En premier lieu, il résulte de l'instruction que les cuves de la société VOA Verrerie d'Albi sont des installations destinées à stocker des produits. Elles font donc partie des biens mentionnés au 1° de l'article 1381 du code général des impôts et ne peuvent donc bénéficier de l'exonération prévue au 11° de l'article 1382 du même code. Elles sont ainsi soumises à la taxe foncière sur les propriétés bâties et, par voie de conséquence, à la cotisation foncière des entreprises.
6. En second lieu, pour apprécier, en application de l'article 1495 du code général des impôts et de l'article 324 B de l'annexe III, la consistance des propriétés qui entrent, en vertu notamment des articles 1380 et 1381, dans le champ de la cotisation foncière des entreprises et des taxes annexes, il est tenu compte, non seulement de tous les éléments d'assiette mentionnés par ces deux derniers articles mais également des biens faisant corps avec eux. Sont toutefois exonérés de ces taxes, en application du 11° de l'article 1382, ceux de ces biens qui font partie des outillages, autres installations et moyens matériels d'exploitation d'un établissement industriel, c'est-à-dire ceux de ces biens qui relèvent d'un établissement qualifié d'industriel au sens de l'article 1499, qui sont spécifiquement adaptés aux activités susceptibles d'être exercées dans un tel établissement et qui ne sont pas au nombre des éléments mentionnés aux 1° et 2° de l'article 1381.
7. Il ne résulte pas de l'instruction, notamment des factures et des photographies produites, que le réseau informatique, le système de sécurité-incendie, le système de traitement de l'air et les murs anti-bruit ne feraient pas corps avec des propriétés bâties entrant dans le champ de la cotisation foncière des entreprises en vertu notamment des articles 1380 et 1381. En outre, alors que le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique le conteste expressément, la société VOA Verrerie d'Albi ne produit pas les éléments, qu'elle est seule en mesure de détenir, de nature à établir que ces équipements auraient été spécifiquement adaptés aux activités susceptibles d'être exercées dans un établissement qualifié d'industriel au sens de l'article 1499 du code général des impôts.
Sur l'interprétation administrative de la loi fiscale :
8. Aux termes de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, applicable au présent litige : " Il ne sera procédé à aucun rehaussement d'impositions antérieures si la cause du rehaussement poursuivi par l'administration est un différend sur l'interprétation par le redevable de bonne foi du texte fiscal et s'il est démontré que l'interprétation sur laquelle s'est fondée la première décision a été, à l'époque, formellement admise par l'administration. / Lorsque le redevable a appliqué un texte fiscal selon l'interprétation que l'administration avait fait connaître par ses instructions ou circulaires publiées et qu'elle n'avait pas rapportée à la date des opérations en cause, elle ne peut poursuivre aucun rehaussement en soutenant une interprétation différente (...) ".
9. En premier lieu, le paragraphe 6 de la doctrine administrative 6 C-112 du 15 décembre 1998, repris par le paragraphe 30 de la doctrine portant la référence BOI-IF-TFB-10-10-20 du 12 septembre 2012, indique que : " En définitive, à titre de règle pratique, sont imposables toutes les installations de stockage, à l'exception : / - des installations d'une capacité inférieure à 100 mètres cubes ; / - des installations d'une capacité égale ou supérieure à 100 mètres cubes lorsqu'elles peuvent être déplacées par des moyens normaux ". Il ne résulte pas de l'instruction, notamment des photographies produites par la société VOA Verrerie d'Albi, que les cuves aient, chacune, une capacité inférieure à 100 mètres cubes et qu'elles peuvent être déplacées par des moyens normaux. La société VOA Verrerie d'Albi n'est ainsi pas fondée à se prévaloir de ces énonciations de la doctrine.
10. En second lieu, les points 160 et 170 de la doctrine portant la référence BOI-IF-TFB-10-50-30, d'une part, donnent la liste d'un certain nombre d'équipements dont ne font pas partie les réseaux informatiques, les systèmes de sécurité-incendie, les systèmes de traitement de l'air et de murs anti-bruit et, ainsi, ne comportent pas d'interprétation de la loi différente de celle dont il a été fait application précédemment aux points 6 et 7.
11. Il résulte de tout ce qui précède que la société VOA Verrerie d'Albi n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par les jugements attaqués, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande en ce qui concerne l'inclusion dans les bases d'imposition à la cotisation foncière des entreprises de la valeur locative des cuves de stockage, du réseau informatique, du système de sécurité-incendie, du système de traitement de l'air et des murs anti-bruit.
12. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, une somme à verser à la société VOA Verrerie d'Albi au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.
D E C I D E :
Article 1er : Les conclusions des requêtes de la société VOA Verrerie d'Albi, en ce qui concerne l'inclusion dans les bases d'imposition à la cotisation foncière des entreprises de la valeur locative des cuves de stockage, du réseau informatique, du système de sécurité-incendie, du système de traitement de l'air et des murs anti-bruit, ainsi que les conclusions au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, sont rejetées.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société VOA Verrerie d'Albi et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.
Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal Sud-Pyrénées.
Délibéré après l'audience du 13 avril 2023, où siégeaient :
- M. Barthez, président,
- M. Lafon, président assesseur,
- Mme Restino, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 11 mai 2023.
Le président-rapporteur,
A. A...L'assesseur le plus ancien,
N. Lafon
Le greffier,
F. Kinach
La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
N°21TL22931 2