Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler l'arrêté du 15 janvier 2022 par lequel le préfet de la Dordogne l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination et lui a interdit de retourner sur le territoire français pendant une durée de six mois.
Par un jugement n° 2200128 du 20 janvier 2022, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 20 février 2022 sous le n° 22MA00630 au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille et ensuite sous le n° 22TL00630 au greffe de la cour administrative d'appel de Toulouse, M. B..., représenté par Me Dounies, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler l'arrêté du 15 janvier 2022 du préfet de la Dordogne ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Dordogne, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour dans un délai de quinze jours à compter de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard ou, à titre subsidiaire, de réexaminer situation ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- les décisions portant refus de séjour, obligation de quitter le territoire, fixation du pays de destination et interdiction de retour sur le territoire français sont insuffisamment motivées, révélant un défaut d'examen réel et sérieux de sa situation ;
- il aurait dû être admis au séjour pour motif exceptionnel ou humanitaire ;
- compte tenu de ses craintes en cas de retour en Géorgie, les décisions portant obligation de quitter le territoire, fixation du pays de destination et interdiction de retour sur le territoire français méconnaissent l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et sont entachées d'erreur manifeste dans l'appréciation de sa situation ;
- la décision portant interdiction de retour sur le territoire français méconnaît l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors que le préfet n'a pas examiné s'il représentait une menace pour l'ordre public avant de fixer la durée de cette mesure à six mois.
Par un mémoire enregistré le 9 février 2023, le préfet de la Dordogne conclut au rejet de la requête. Il soutient qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.
Par une décision du 13 juillet 2022, M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale.
Par ordonnance du 30 janvier 2023, la clôture d'instruction a été fixée au 20 février 2023.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Virginie Restino, première conseillère, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., né en 1955 en Russie, qui possède un passeport russe et se déclare de nationalité géorgienne, relève appel du jugement du 20 janvier 2022 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 15 janvier 2022 par lequel le préfet de la Dordogne l'a obligé à quitter le territoire français, a fixé le pays de destination et lui a interdit de retourner sur le territoire français pendant une durée de six mois.
Sur le bien-fondé du jugement :
2. En premier lieu, l'arrêté critiqué qui, au demeurant ne porte pas refus de séjour contrairement à ce que prétend le requérant, vise les éléments de droit et de faits sur lesquels il se fonde. Par ailleurs, il ne ressort ni de cette motivation ni des autres pièces du dossier que le préfet n'aurait pas procédé à un examen réel et sérieux de la situation du requérant. Par suite, les moyens tirés de l'insuffisante motivation et de l'absence d'examen réel et sérieux de la situation du requérant doivent être écartés.
3. En deuxième lieu, dès lors, d'une part, que l'arrêté critiqué ne porte pas refus de séjour et, d'autre part, que le requérant n'établit ni même n'allègue avoir sollicité la délivrance d'un titre de séjour, il n'est pas fondé à soutenir qu'il aurait dû être admis au séjour.
4. En troisième lieu, aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ". Le requérant n'apporte aucun élément sur les risques personnels qu'il encourrait en cas de retour en Russie ou en Géorgie. En tout état de cause, ce moyen est sans incidence sur la légalité des décisions portant obligation de quitter le territoire français sans délai et interdiction de retour sur le territoire français, qui ne fixent pas, par elles-mêmes, le pays de destination. Dès lors, le moyen doit être écarté. Le préfet n'a pas davantage commis d'erreur manifeste dans l'appréciation de la situation personnelle de M. B..., qui est célibataire et sans enfant, en l'obligeant à quitter le territoire français.
5. En dernier lieu, aux termes de l'article L. 612-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Lorsqu'aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger, l'autorité administrative assortit la décision portant obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français. Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative n'édicte pas d'interdiction de retour. / Les effets de cette interdiction cessent à l'expiration d'une durée, fixée par l'autorité administrative, qui ne peut excéder trois ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français ". Aux termes de l'article L. 612-10 du même code : " Pour fixer la durée des interdictions de retour mentionnées aux articles L. 612-6 (...), l'autorité administrative tient compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français (...) ".
6. M. B..., qui a été interpellé le 14 janvier 2022 et placé en garde à vue pour vol à l'étalage, déclare être entré sur le territoire français en décembre 2021 en provenance d'Espagne, démuni des documents prévus à l'article L. 311-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Il ressort des pièces du dossier que le requérant, célibataire et sans enfant, a déjà fait l'objet d'une précédente obligation de quitter le territoire français le 27 mars 2018. Par ailleurs, il ne justifie pas d'une intégration sociale et professionnelle en France. Par suite, M. B... n'est pas fondé à soutenir que le préfet de la Dordogne n'aurait pas tenu compte des critères énoncés à l'article L. 612-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en fixant à six mois la durée de l'interdiction de retour sur le territoire français. Le préfet n'a pas davantage commis d'erreur dans l'appréciation de la situation de M. B... en fixant cette durée.
7. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande.
Sur les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte :
8. Le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation présentées par M. B..., n'implique aucune mesure d'exécution. Par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte ne peuvent qu'être rejetées.
Sur les frais liés au litige :
9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, une somme à verser au conseil de M. B..., au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B..., à Me Amandine Dounies, et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.
Copie en sera adressée au préfet de la Dordogne.
Délibéré après l'audience du 16 mars 2023, à laquelle siégeaient :
M. Barthez, président,
M. Lafon, président assesseur,
Mme Restino, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 30 mars 2023.
La rapporteure,
V. Restino
Le président,
A. Barthez
Le greffier,
F. Kinach
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N°22TL00630