Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. C... B... et Mme E... B..., agissant en leur nom propre et en qualité de représentants légaux de leur fille D... B... et de leur fils G... A... B..., M. F... B... et Mme I... B... ont demandé au tribunal administratif de Nîmes :
- d'enjoindre à l'académie d'Aix-Marseille d'affecter D... B... en classe au service de soutien à l'éducation familiale et à l'intégration scolaire de Sorgues dans un délai de dix jours à compter de la notification du jugement à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard passé ce délai ;
- de condamner l'académie d'Aix-Marseille, l'agence régionale de santé Provence-Alpes-Côte d'Azur et le département de Vaucluse à réparer les conséquences dommageables résultant du défaut de prise en charge par l'Etat de D... B... entre le 1er septembre 2013 et le 1er janvier 2018, en versant les sommes, assorties des intérêts au taux légal à compter du 8 juin 2018, de 62 500 euros à M. C... B... et Mme E... B... en qualité de représentants légaux de leur fille D..., de 37 500 euros chacun à M. et Mme B... au titre de leurs préjudices propres, et de 10 000 euros chacun à MM. Yacine et Mohamed A... B... et Mme I... B....
Par un jugement n° 1803114 du 22 janvier 2021, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté la demande des consorts B....
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés le 18 mars 2021 et le 4 octobre 2021 sous le n° 21MA01107 au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille puis sous le n° 21TL01107 au greffe de la cour administrative d'appel de Toulouse, M. et Mme B..., agissant en leur nom propre et en qualité de représentants légaux de leur fille D... B... et de leur fils G... A... B..., M. F... B... et Mme I... B..., représentés par Me Marcel, demandent à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'enjoindre au recteur de l'académie d'Aix-Marseille d'affecter D... B... en classe au service de soutien à l'éducation familiale et à l'intégration scolaire de Sorgues dans un délai de dix jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;
3°) de condamner l'Etat, l'académie d'Aix-Marseille, l'agence régionale de santé de Provence-Alpes-Côte d'Azur et le département de Vaucluse à réparer les conséquences dommageables résultant de l'absence de prise en charge adaptée de D... B... entre le 1er septembre 2013 et le 1er janvier 2018, en versant les sommes, augmentées des intérêts au taux légal à compter du 8 juin 2018, de 62 500 euros à M. C... B... et Mme E... B... en qualité de représentants légaux de leur fille D... B..., de 37 500 euros chacun à M. C... B... et Mme E... B... au titre de leurs préjudices propres, et de 10 000 euros chacun à MM. Yacine et Mohamed A... B... et à Mme I... B... ;
4°) de mettre à la charge de l'académie d'Aix-Marseille, de l'agence régionale de santé de Provence-Alpes-Côte d'Azur et du département de Vaucluse la somme de 2 500 à verser à leur conseil en application des articles 37 et 75-1 de la loi du 10 juillet 1991.
Ils soutiennent que :
- la responsabilité pour faute de l'Etat est engagée du fait de la carence dans la mise en œuvre de son obligation de scolarisation des enfants handicapés, faute de prise en charge de D... B... entre le 1er septembre 2013 et le 1er janvier 2018 dans l'établissement désigné par la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées de la maison départementale des personnes handicapées de Vaucluse ;
- du fait de ce défaut de prise en charge, D... B... a perdu une chance de voir son état de santé évoluer favorablement et de progresser en autonomie ; le préjudice en résultant s'élève à 12 500 euros par an ;
- M. C... B... et Mme E... B... ont subi, du fait de la carence dans la prise en charge de leur fille, un préjudice moral et des troubles dans leurs conditions d'existence, qui s'élèvent à 9 000 euros par an pour chacun d'eux ;
- MM. Yacine et Mohamed A... B... et Mme I... B... ont subi, du fait de la carence dans la prise en charge de leur sœur, un préjudice moral et des troubles dans leurs conditions d'existence, qui s'élèvent à 10 000 euros pour chacun d'eux.
Par un mémoire enregistré le 13 juillet 2021, le département de Vaucluse, représenté par Me Philippe, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 3 500 euros soit mise à la charge des requérants sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que les conclusions de la requête sont mal dirigées en ce qui le concerne.
Par un mémoire enregistré le 1er septembre 2021, l'agence régionale de santé Provence-Alpes-Côte d'Azur conclut au rejet de la requête.
Elle soutient que les requérants ne justifient ni d'une faute qui lui serait imputable ni, a fortiori, d'un préjudice en résultant.
Par un mémoire enregistré le 2 juin 2022, le recteur de l'académie d'Aix-Marseille conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que :
- l'Etat n'a commis aucune carence dans sa mission d'organisation générale du service public de l'éducation pour les enfants en situation de handicap ;
- les requérants ne justifient pas de la perte de chance de D... B... de voir son état de santé évoluer favorablement et de progresser en autonomie ;
- l'évaluation du préjudice moral et des troubles dans les conditions d'existence de ses parents et de ses frères et sœurs est excessive.
M. C... B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du 25 juin 2021.
Par ordonnance du 11 avril 2022, le président de la section du contentieux du Conseil d'Etat a attribué à la cour administrative d'appel de Toulouse le jugement de la requête des consorts B....
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'action sociale et des familles ;
- le code de l'éducation ;
- le code de la santé publique ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme H...,
- les conclusions de Mme Cherrier, rapporteure publique,
- et les observations de Me Chebbani, substituant Me Philippe, représentant le département de Vaucluse.
Considérant ce qui suit :
1. La jeune D... B..., née le 29 janvier 2007, est atteinte d'une surdité bilatérale profonde évolutive, de polymicrogyrie, d'hémiparésie gauche et de microcéphalie. Elle a été scolarisée en milieu ordinaire à compter de septembre 2010, avec l'aide d'un auxiliaire de vie scolaire depuis 2011. Par une décision du 14 mai 2013, la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées de la maison départementale des personnes handicapées de Vaucluse a prononcé, pour la période du 14 mai 2013 au 13 mai 2016, l'orientation de l'enfant vers un service de soutien à l'éducation familiale et à la scolarisation pour déficients auditifs de plus de trois ans. Par une décision du 28 mars 2017, cette commission a réitéré cette orientation pour la période du 28 février 2017 au 31 décembre 2018, en désignant l'établissement de Sorgues (Vaucluse), et a prononcé, en sus, une orientation en service d'éducation spéciale et de soin à domicile. L'enfant a été admise par le service de soutien à l'éducation familiale et à l'intégration scolaire de Sorgues à partir de janvier 2018. M. et Mme B..., agissant en leur nom propre et en qualité de représentants légaux de la jeune D... ainsi que de son frère mineur G... A..., son frère Yacine et sa sœur Chahineze ont saisi le tribunal administratif de Nîmes d'une demande tendant à ce que l'Etat, l'académie d'Aix-Marseille, l'agence régionale de santé Provence-Alpes-Côte d'Azur et le département de Vaucluse soient condamnés à les indemniser des conséquences dommageables résultant de l'absence de prise en charge adaptée de D... pendant la période du 1er septembre 2013 au 1er janvier 2018. Les consorts B... relèvent appel du jugement du 22 janvier 2021 par lequel le tribunal administratif de Nîmes a rejeté leur demande.
Sur le bien-fondé du jugement :
En ce qui concerne les conclusions indemnitaires :
2. D'une part, aux termes de l'article L. 111-1 du code de l'éducation : " (...) Le droit à l'éducation est garanti à chacun afin de lui permettre de développer sa personnalité, d'élever son niveau de formation initiale et continue, de s'insérer dans la vie sociale et professionnelle, d'exercer sa citoyenneté. (...) " et aux termes de l'article L. 111-2 du même code : " Tout enfant a droit à une formation scolaire qui, complétant l'action de sa famille, concourt à son éducation. (...) Pour favoriser l'égalité des chances, des dispositions appropriées rendent possible l'accès de chacun, en fonction de ses aptitudes et de ses besoins particuliers, aux différents types ou niveaux de la formation scolaire. (...) ". Aux termes de l'article L. 351-1 du même code, dans sa rédaction applicable au litige : " Les enfants et adolescents présentant un handicap ou un trouble de santé invalidant sont scolarisés dans les écoles maternelles et élémentaires (...) si nécessaire au sein de dispositifs adaptés, lorsque ce mode de scolarisation répond aux besoins des élèves. Les parents sont étroitement associés à la décision d'orientation et peuvent se faire aider par une personne de leur choix. La décision est prise par la commission mentionnée à l'article L. 146-9 du code de l'action sociale et des familles, en accord avec les parents ou le représentant légal. A défaut, les procédures de conciliation et de recours prévues aux articles L. 146-10 et L. 241-9 du même code s'appliquent (...) ". Aux termes de l'article L. 351-2 du même code, dans sa rédaction applicable au litige : " La commission mentionnée à l'article L. 146-9 du code de l'action sociale et des familles désigne les établissements ou les services ou à titre exceptionnel l'établissement ou le service correspondant aux besoins de l'enfant ou de l'adolescent en mesure de l'accueillir. / La décision de la commission s'impose aux établissements scolaires ordinaires et aux établissements ou services mentionnés au 2° et au 12° du I de l'article L.312-1 du code de l'action sociale et des familles dans la limite de la spécialité au titre de laquelle ils ont été autorisés ou agréés (...) ".
3. Il résulte de l'ensemble de ces dispositions d'une part, que, le droit à l'éducation étant garanti à chacun, quelles que soient les différences de situation et, d'autre part, que l'obligation scolaire s'appliquant à tous, les difficultés particulières que rencontrent les enfants handicapés ne sauraient avoir pour effet ni de les priver de ce droit, ni de faire obstacle au respect de cette obligation. Ainsi, il incombe à l'Etat, au titre de sa mission d'organisation générale du service public de l'éducation, et, le cas échéant, de ses responsabilités à l'égard des établissements sociaux et médico-sociaux, de prendre l'ensemble des mesures et de mettre en œuvre les moyens nécessaires pour que ce droit et cette obligation aient, pour les enfants handicapés, un caractère effectif.
4. Il s'ensuit que la carence de l'Etat dans l'accomplissement de cette mission est constitutive d'une faute de nature à engager sa responsabilité, sans que l'administration puisse utilement se prévaloir de l'insuffisance des structures d'accueil existantes ou du fait que des allocations compensatoires sont allouées aux parents d'enfants handicapés, celles-ci n'ayant pas un tel objet. La responsabilité de l'Etat doit toutefois être appréciée en tenant compte, s'il y a lieu, du comportement des responsables légaux de l'enfant, lequel est susceptible de l'exonérer, en tout ou partie, de sa responsabilité. En outre, lorsque sa responsabilité est engagée à ce titre, l'Etat dispose, le cas échéant, d'une action récursoire contre un établissement social et médico-social auquel serait imputable une faute de nature à engager sa responsabilité à raison du refus d'accueillir un enfant orienté par la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées.
5. D'autre part, aux termes de l'article L. 241-6 du code de l'action sociale et des familles dans sa rédaction applicable : " I - La commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées est compétente pour : / 1° Se prononcer sur l'orientation de la personne handicapée et les mesures propres à assurer son insertion scolaire ou professionnelle et sociale ; / 2° Désigner les établissements ou les services correspondant aux besoins de l'enfant ou de l'adolescent (...) III. (...) La décision de la commission prise au titre du 2° du I s'impose à tout établissement ou service dans la limite de la spécialité au titre de laquelle il a été autorisé ou agréé (...) ". Il résulte de ces dispositions qu'il incombe à la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées, à la demande des représentants légaux, de se prononcer sur l'orientation des personnes handicapées et de désigner les établissements ou les services correspondant aux besoins de ceux-ci et étant en mesure de les accueillir, ces structures étant tenues de se conformer à la décision de la commission.
S'agissant de la personne responsable :
6. D'une part, il résulte des dispositions et principes rappelés aux points 2 à 4 que seul l'Etat est susceptible de devoir répondre des conséquences résultant de l'absence de mise en œuvre du droit à l'éducation d'un enfant handicapé, sous réserve, le cas échéant, d'une action récursoire contre un établissement social et médico-social auquel serait imputable une faute de nature à engager sa responsabilité à raison du refus d'accueillir un enfant orienté par la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées, du fait de l'insuffisance des structures d'accueil existantes.
7. D'autre part, aux termes de l'article L. 1432-2 du code de la santé publique : " Le directeur général de l'agence régionale de santé exerce, au nom de l'Etat, les compétences mentionnées à l'article L. 1431-2 qui ne sont pas attribuées à une autre autorité (...) ". A ce titre, les agences régionales de santé sont, notamment, chargées de réguler, d'orienter et d'organiser l'offre de services de santé de manière à répondre aux besoins en matière de soins et de services médico-sociaux et elles ont compétence au nom de l'Etat, notamment pour autoriser la création et les activités des services de soutien à l'éducation familiale et à l'intégration scolaire. Il résulte que, lorsqu'il exerce la compétence prévue à l'article L. 1431-2 du code de la santé publique, le directeur de l'agence régionale de santé agit au nom de l'Etat, de sorte que seule la responsabilité de l'Etat peut être recherchée à raison des décisions prises par lui sur ce fondement.
8. Il s'ensuit que les conclusions tendant à la condamnation de l'agence régionale de santé Provence-Alpes-Côte d'Azur et du département de Vaucluse à réparer les préjudices résultant de la carence de l'Etat dans la mise en œuvre de son obligation légale de mise en œuvre du droit à l'éducation de D... B... doivent être rejetées comme étant mal dirigées.
S'agissant de la responsabilité de l'Etat :
Quant à la période du 1er septembre 2013 au 13 mai 2016 :
9. En premier lieu, il résulte de l'instruction que la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées de la maison départementale des personnes handicapées de Vaucluse a, par une décision du 14 mai 2013, prononcé l'orientation de D... B... vers un service de soutien à l'éducation familiale et à la scolarisation pour déficients auditifs de plus de trois ans, pour la période du 14 mai 2013 au 13 mai 2016. Dès lors qu'il résulte de l'instruction, sans que cela soit d'ailleurs contesté, d'une part, que ce service devait accueillir D... B... à raison de quelques heures par semaine en complément de sa scolarisation en milieu ordinaire et devait donc être situé à une distance raisonnable du domicile familial et, d'autre part, qu'il n'existait qu'un seul service de cette nature dans le département de Vaucluse, situé à Sorgues, la commission doit être regardée comme ayant désigné ce service.
10. Il résulte de l'instruction, notamment de la lettre adressée le 20 juin 2013 par le service de soutien à l'éducation familiale et à la scolarisation de Sorgues à M. et Mme B... que ce service n'était pas en mesure d'accueillir D... B... durant l'année scolaire 2013-2014, faute de place disponible. Par conséquent, la responsabilité de l'Etat est engagée du fait du défaut de mise en œuvre de l'obligation de scolarisation de D... B... durant cette période.
11. En second lieu, il résulte de l'instruction que les requérants n'établissent pas avoir effectué de vaines démarches auprès de ce même service afin que D... B... y soit accueillie pendant l'année scolaire 2014-2015 et la période du 1er septembre 2015 au 13 mai 2016. S'ils soutiennent que ce service aurait inscrit D... B... en liste d'attente et qu'ils n'auraient jamais été recontactés, ils ne l'établissent pas. Par conséquent, dès lors que le service de soutien à l'éducation familiale et à la scolarisation de Sorgues n'a pas refusé d'accueillir D... B... durant l'année scolaire 2014-2015 et la période du 1er septembre 2015 au 13 mai 2016, aucune carence ne peut être reprochée à l'Etat au titre de la période du 1er septembre 2014 au 13 mai 2016.
Quant à la période allant du 14 mai 2016 au 28 mars 2017 :
12. Les requérants n'établissent ni même n'allèguent que la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées de la maison départementale des personnes handicapées de Vaucluse se serait prononcée sur l'orientation de D... B... pendant la période du 14 mai 2016 au 27 mars 2017. Par conséquent, aucune carence ne peut être reprochée aux services de l'Etat au titre de cette période.
Quant à la période allant du 28 mars 2017 au 1er janvier 2018 :
13. En premier lieu, il résulte de l'instruction que la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées de la maison départementale des personnes handicapées de Vaucluse a, dans une décision du 28 mars 2017, prononcé l'orientation de D... B... vers un service de soutien à l'éducation familiale et à la scolarisation pour déficients auditifs de plus de trois ans pendant la période du 28 février 2017 au 31 décembre 2018, en désignant le service de Sorgues mentionné ci-dessus. Par une lettre notifiée à ce service le 22 août 2017, les requérants ont sollicité l'accueil de D... B... à compter de la rentrée scolaire 2017. D... B... y a été accueillie à compter de janvier 2018. Les requérants soutiennent, sans être contredits, que ce retard dans la prise en charge résulte d'un défaut de place disponible. Par conséquent, la responsabilité de l'Etat est engagée du fait du défaut de mise en œuvre de l'obligation de scolarisation de D... B... durant la période du 1er septembre au 31 décembre 2017.
14. En second lieu, il résulte de l'instruction que, si dans cette même décision et pour la même période, la commission a en outre prononcé l'orientation de D... B... vers un service d'éducation spéciale et de soin à domicile, elle n'a pas désigné nominativement au moins un service. Par suite et alors qu'il ne résulte pas de l'instruction qu'un seul service d'éducation spéciale et de soin à domicile aurait été en capacité d'accueillir D... B... dans le département de Vaucluse, aucune carence ne peut, en l'espèce, être reprochée aux services de l'Etat, lesquels ne tenaient d'aucun texte la compétence pour prendre une décision d'orientation vers un établissement ou service donné à la place de la commission.
15. Il résulte de ce qui précède que la responsabilité de l'Etat du fait de la carence dans la mise en œuvre de son obligation de scolarisation de D... B... est seulement engagée du fait de l'absence d'accueil par le service de soutien à l'éducation familiale et à la scolarisation pour déficients auditifs de plus de trois ans de Sorgues entre le 1er septembre 2013 et le 31 août 2014, puis entre le 1er septembre et le 31 décembre 2017.
S'agissant des préjudices :
16. Il résulte de l'instruction que l'absence de prise en charge de l'enfant D... B... pendant la période du 1er septembre 2013 au 30 juin 2014 et la période du 1er septembre au 31 décembre 2017 a causé à cet enfant une perte de chance de progresser en autonomie et en capacité d'apprentissage et a causé à ses parents ainsi qu'à sa fratrie un préjudice moral et des troubles dans leurs conditions d'existence. Il sera fait une juste appréciation du préjudice subi par D... B... en l'évaluant à la somme de 5 000 euros. M. et Mme B... et leurs trois autres enfants peuvent prétendre, au titre des mêmes périodes et pour les préjudices qu'ils ont subis, au versement, pour M. C... B... et Mme E... B..., de la somme de 2 000 euros chacun et pour leurs trois autres enfants, y compris M. G... A... B... devenu majeur en cours d'instance, de la somme de 1 000 euros chacun. Ces sommes seront assorties des intérêts au taux légal à compter du 14 juin 2018.
En ce qui concerne les conclusions à fin d'injonction :
17. Les conclusions à fin d'injonction doivent être rejetées par adoption des motifs retenus à bon droit par le tribunal administratif de Nîmes au point 22 du jugement attaqué, la situation n'ayant pas évolué depuis la date de ce jugement.
18. Il résulte de tout ce qui précède que les consorts B... sont seulement fondés à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Nîmes a rejeté leur demande tendant à obtenir réparation des préjudices résultant de la carence de l'Etat dans la mise en œuvre de l'obligation de scolarisation de D... B... pendant la période du 1er septembre 2013 au 31 août 2014 et la période du 1er septembre au 31 décembre 2017 à hauteur des montants mentionnés au point 16 ci-dessus et assortis des intérêts au taux légal.
Sur les frais liés au litige :
19. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de l'Etat une somme à verser au conseil des requérants sur le fondement des dispositions de la loi du 10 juillet 1991. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge des requérants une somme à verser au département de Vaucluse sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D E C I D E :
Article 1er : L'Etat est condamné à verser à M. C... B... et Mme E... B..., d'une part, en leur qualité de représentants légaux de D... B..., la somme de 5 000 euros et, d'autre part, en réparation de leur propre préjudice la somme de 2 000 euros chacun, et à verser à Mme I... B..., à M. F... B... et à M. G... A... B... la somme de 1 000 euros chacun. Ces sommes seront assorties des intérêts au taux légal à compter du 14 juin 2018.
Article 2 : Le jugement du 21 janvier 2021 du tribunal administratif de Nîmes est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête des consorts B... est rejeté.
Article 4 : Les conclusions du département de Vaucluse tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B..., Mme E... B..., MM. Yacine et Mohamed A... B..., Mme I... B..., au département de Vaucluse, au ministre de la santé et de la prévention et au ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse et à Me Véronique Marcel.
Copie en sera adressée à l'agence régionale de santé Provence-Alpes-Côte d'Azur et à l'Académie d'Aix-Marseille.
Délibéré après l'audience du 23 février 2023, où siégeaient :
- M. Barthez, président,
- M. Lafon, président assesseur,
- Mme Restino, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 16 mars 2023.
La rapporteure,
V. H...Le président,
A. Barthez
Le greffier,
F. Kinach
La République mande et ordonne au ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
N°21TL01107 2