Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. C... A... a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler l'arrêté du 3 août 2021 par lequel le préfet de Vaucluse a rejeté sa demande de titre de séjour et a assorti son refus d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai de soixante jours.
Par un jugement n° 2102851 du 17 décembre 2021, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 14 janvier 2022, sous le n° 22MA00166 au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille, puis sous le n° 22TL00166 au greffe de la cour administrative d'appel de Toulouse, M. A..., représenté par Me Huguenin-Virchaux, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler l'arrêté du 3 août 2021 par lequel le préfet de Vaucluse a refusé de lui accorder un titre de séjour et a assorti son refus d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai de soixante jours ;
3°) à titre principal, d'enjoindre au préfet de Vaucluse lui délivrer un titre de séjour en qualité d'étranger malade ;
4°) à titre subsidiaire, d'enjoindre au préfet de Vaucluse de réexaminer sa situation ;
5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à lui verser en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le tribunal administratif de Nîmes a omis de statuer sur le moyen relatif au défaut de motivation de l'arrêté du 3 août 2021 ;
- la motivation de cet arrêté, qui est stéréotypée, est insuffisante ;
- l'avis du collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration méconnaît les articles R. 425-11 et R. 425-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors qu'il n'est pas établi que le médecin qui a rédigé le rapport médical ne faisait pas partie de ce collège ;
- le préfet de Vaucluse n'a pas transmis les éléments permettant d'identifier les médecins ayant examiné sa situation médicale ;
- l'arrêté du préfet de Vaucluse méconnaît l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- il méconnaît l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- il méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. B... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. A..., ressortissant soudanais né le 15 juin 1988 dont la demande d'asile a été rejetée l'Office français de protection des réfugiés et apatrides le 29 janvier 2018 et ensuite par la Cour nationale du droit d'asile le 22 octobre 2019, a sollicité le 6 mai 2019 la délivrance d'un titre de séjour en qualité d'étranger malade. Par arrêté du 3 août 2021, le préfet de Vaucluse a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de soixante jours et a fixé le pays de destination. M. A... fait appel du jugement du 17 décembre 2021 par lequel le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur la régularité du jugement :
2. Le tribunal administratif de Nîmes a indiqué, au point 2 de son jugement, que les décisions contestées du préfet de Vaucluse visent les articles du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dont elles font application et comportent les considérations de fait qui en constituent le fondement et qu'elles sont ainsi suffisamment motivées. Le tribunal administratif n'a donc pas entaché son jugement d'une omission à statuer sur le moyen tiré du défaut de motivation des décisions du préfet de Vaucluse ni d'ailleurs d'une insuffisance de motivation dans sa réponse à ce moyen dès lors qu'il n'est pas tenu de répondre à tous les arguments invoqués par les parties.
Sur le bien-fondé du jugement :
3. En premier lieu, l'arrêté du préfet de Vaucluse vise les dispositions du code de l'entrée et de séjour des étrangers et du droit d'asile dont il fait application ainsi que les articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Il mentionne, d'une manière qui n'est pas stéréotypée, la situation de fait concernant M. A..., notamment la date de son entrée en France, sa nationalité, et le contenu de l'avis du collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. M. A... n'est donc pas fondé à soutenir que l'arrêté du préfet de Vaucluse, qui comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement, serait insuffisamment motivé.
4. En deuxième lieu, aux termes des dispositions de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qui, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire ne pourrait pas effectivement y bénéficier d'un traitement approprié se voit délivrer une carte de séjour portant la mention vie privée et familiale d'une durée d'un an. La condition prévue à l'article L. 412-1 n'est pas opposable. / La décision de délivrer cette carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'État (...) ". L'article R. 425-11 du même code dispose que : " Pour l'application de l'article L. 425-9, le préfet délivre la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " au vu d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. / L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin de l'office et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé (...) ". Aux termes de l'article R. 425-12 du même code : " Le rapport médical mentionné à l'article R. 425-11 est établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration à partir d'un certificat médical établi par le médecin qui suit habituellement le demandeur ou par un médecin praticien hospitalier inscrits au tableau de l'ordre, dans les conditions prévues par l'arrêté mentionné au deuxième alinéa du même article (...) ".
5. L'avis du 29 mars 2021 du collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration permet d'identifier le nom des médecins qui faisaient partie du collège. En outre, le bordereau de transmission de cet avis au préfet de Vaucluse, émis par l'Office français de l'immigration et de l'intégration, précise le nom du médecin rapporteur, qui est différent de celui des médecins ayant constitué le collège et qui ont statué sur l'état de santé de M. A.... Celui-ci n'établit pas, ni même n'allègue, que les mentions de ces pièces seraient inexactes et, ainsi, il n'est pas fondé à soutenir que le médecin rapporteur aurait participé à la délibération du collège des médecins de l'Office, en méconnaissance des dispositions des articles R. 425-11 et R. 425-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. En outre, aucune disposition ne faisait obligation au préfet de Vaucluse de communiquer à M. A..., avant de prendre sa décision sur la demande de titre de séjour dont il était saisi, l'avis du collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration et le bordereau de transmission. Ainsi, les moyens tirés de l'irrégularité de cet avis et de l'irrégularité de la procédure doivent être écartés.
6. En troisième lieu, la décision rejetant la demande de titre de séjour de M. A... a été prise au vu d'un avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration du 29 mars 2021 selon lequel, si l'état de santé de l'intéressé nécessite une prise en charge médicale, le défaut de prise en charge ne devrait pas entraîner de conséquences d'une exceptionnelle gravité et son état de santé lui permet de voyager sans risque. Afin de contester les mentions de cet avis, M. A... produit notamment des certificats médicaux qui établissent l'existence d'un syndrome psychotraumatique nécessitant un traitement psychotrope. Toutefois, il ne ressort pas des pièces du dossier, notamment de ces certificats médicaux, que le défaut de prise en charge médicale risquerait d'entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité. En outre, le lien existant étant entre la pathologie dont M. A... souffre et les événements traumatisants qu'il aurait vécus au Soudan n'est pas établi, alors d'ailleurs que le requérant n'apporte aucun élément de nature à établir la réalité de tels événements. Enfin, M. A... ne peut utilement se prévaloir de la circonstance que sa pathologie serait très mal soignée au Soudan et qu'il disposerait de ressources financières insuffisantes pour la soigner, dès lors que le défaut de prise en charge médicale ne devrait pas entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.
7. En quatrième lieu, aux termes des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
8. Il ressort des pièces du dossier que M. A..., arrivé en France en octobre 2016, est célibataire et sans enfant, et n'est pas dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine, où il a vécu jusqu'à l'âge de vingt-huit ans et où résident sa mère, ses frères et ses sœurs. De plus, il ne justifie d'aucune intégration socio-professionnelle particulière. Par suite, eu égard aux conditions de son séjour en France, le refus de délivrance d'un titre de séjour n'a pas porté une atteinte disproportionnée au droit de M. A... au respect de la vie privée et familiale par rapport aux buts en vue desquels cette décision a été prise. Ainsi, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.
9. En dernier lieu, aux termes des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ".
10. Ainsi qu'il a été indiqué au point 6, le défaut de prise en charge médicale ne devrait pas entraîner de conséquences d'une exceptionnelle gravité pour M. A.... Celui-ci n'apporte, en outre, aucun élément de nature à établir la réalité de son allégation selon laquelle une condamnation à mort le concernant aurait été prononcée par un tribunal militaire au Soudan pour trahison. Par suite, le moyen tiré de ce que la décision contestée aurait été prise en méconnaissance de ces stipulations de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.
11. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, les conclusions présentées par M. A... aux fins d'injonction et au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées.
D E C I D E :
Article 1er : La requête présentée par M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.
Copie en sera adressée au préfet de Vaucluse.
Délibéré après l'audience du 27 octobre 2022, où siégeaient :
- M. Barthez, président,
- M. Lafon, président assesseur,
- Mme Restino, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 22 novembre 2022.
Le président-rapporteur,
A. B...L'assesseur le plus ancien,
N. Lafon
Le greffier,
F. Kinach
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
N°22TL00166 2