Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
La société civile d'exploitation agricole Vignobles C... et M. et Mme C... ont demandé au tribunal administratif de Nîmes de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée assortis d'intérêts de retard et de majorations qui leur ont été réclamés au titre des années 2010 à 2012.
Par jugement n° 1801567 du 25 juin 2020, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté leur demande.
Procédure devant la cour
Par une requête enregistrée le 13 août 2020 sous le n° 20MA02891 à la cour administrative d'appel de Marseille puis sous le n° 20TL02891 à la cour administrative d'appel de Toulouse, M. et Mme B..., représentés par Me Orbillot, demandent à la cour :
1°) d'annuler ce jugement en tant seulement qu'il a rejeté leur demande tendant à être déchargés des pénalités pour manquement délibéré appliquées aux cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2010, 2011 et 2012 ;
2°) de prononcer la décharge de ces pénalités ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- la procédure est irrégulière, la motivation des pénalités ayant été insuffisante car la proposition de rectification qui leur a été notifiée ne permettait pas de comprendre le calcul de leur montant, en méconnaissance des dispositions combinées des articles L. 48 et L. 57 du livre des procédures fiscales ;
- les rectifications sont imputables à des erreurs du cabinet comptable et à des vols des employés révélés à l'occasion de la vérification de comptabilité et non à une intention de dissimulation alors d'ailleurs que le requérant était gravement malade et qu'il a déposé plainte contre le cabinet comptable et le chef de cave.
Par un mémoire enregistré le 12 novembre 2021, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête en faisant valoir qu'aucun des moyens n'est fondé.
Par ordonnance du 11 avril 2022, le président de la section du contentieux du Conseil d'Etat a attribué à la cour administrative d'appel de Toulouse le jugement de la requête de M. et Mme B....
Par ordonnance du 15 juin 2022, la clôture de l'instruction a été fixée au 30 juin 2022.
Vu le jugement attaqué.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Fabien, présidente assesseure ;
- et les conclusions de Mme Cherrier, rapporteure publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. et Mme B... font appel du jugement du tribunal administratif de Nîmes n° 1801567 en tant seulement qu'il a rejeté leur demande tendant à être déchargés des majorations de 40 % pour manquement délibéré afférentes aux cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis à la suite de la vérification de comptabilité dont a fait l'objet l'exploitation agricole à responsabilité limitée Vignobles C... devenue la société civile d'exploitation agricole Vignobles C....
2. En premier lieu, le premier alinéa de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales dispose que : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation ". Par ailleurs, aux termes de l'article L. 48 du livre des procédures fiscales : " A l'issue d'un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle au regard de l'impôt sur le revenu ou d'une vérification de comptabilité, lorsque des rectifications sont envisagées, l'administration doit indiquer, avant que le contribuable présente ses observations, ou accepte les rehaussements proposés, dans la proposition prévue au premier alinéa de l'article L. 57 (...) le montant des droits, taxes et pénalités résultant de ces rectifications (...) ".
3. Il ressort des termes de la proposition de rectification notifiée aux requérants le 12 décembre 2013 que l'administration, après avoir cité les dispositions de l'article 1729 du code général des impôts, a précisé qu'elle considérait que M. B... ne pouvait ignorer, en sa qualité de dirigeant de l'EARL Vignobles C... les omissions graves et répétées de recettes représentant 30 % du chiffre d'affaires de l'exercice 2010/2011 et 15 % de celui de l'exercice 2011/2012. Le moyen tiré de l'irrégularité de la procédure en tant que la proposition de rectification aurait été insuffisamment motivée en ce qui concerne l'application des pénalités, en méconnaissance de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales, manque donc en fait. Par ailleurs, les dispositions de l'article L. 48 du livre des procédures fiscales prévoyant l'indication des montants des pénalités et dont les requérants se prévalent, ne sont pas applicables aux rehaussements qui résultent, comme en l'espèce, d'un contrôle sur pièces et non d'un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle ou d'une vérification de comptabilité.
4. En second lieu, l'article 1729 du code général des impôts dispose que : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : / a. 40 % en cas de manquement délibéré (...) ". Aux termes de l'article L. 195 A du livre des procédures fiscales : " En cas de contestation des pénalités fiscales appliquées à un contribuable au titre des impôts directs, de la taxe sur la valeur ajoutée et des autres taxes sur le chiffre d'affaires, des droits d'enregistrement, de la taxe de publicité foncière et du droit de timbre, la preuve de la mauvaise foi et des manœuvres frauduleuses incombe à l'administration ".
5. Il ressort de la proposition de rectification que les omissions de recettes ont concerné des cessions de plantations intervenues en 2012, l'absence de refacturation de la mise à disposition, auprès de la société de commercialisation des vins de l'exploitation et pour 30 % de son temps de travail jusqu'au 31 mars 2012, de la comptable salariée ainsi que de nombreuses et très importantes ventes non comptabilisées entre juillet 2010 et juillet 2012, au profit notamment de cette même société, avec des discordances significatives entre la comptabilité et les stocks. Si M. et Mme B..., qui ne contestent pas l'importance de ces omissions de recettes, font valoir que M. B... aurait été victime d'erreurs commises par l'association chargée de sa comptabilité à laquelle il a fait appel à la suite du licenciement de sa comptable salariée, il ressort de l'assignation devant le tribunal de grande instance de Carpentras, adressée à cette association le 13 février 2019 seulement, qu'il n'a recouru aux services de cette dernière qu'à compter du 1er décembre 2012 et que la plupart des griefs évoqués à son encontre concernent des opérations se rapportant à la période postérieure à celle ayant fait l'objet de la vérification de comptabilité, aucune précision n'étant au demeurant apportée sur les suites judiciaires de cette assignation. Par ailleurs, s'il a déposé plainte en février 2014 à l'encontre du chef de chai de son exploitation, également vigneron et auquel il avait prêté ses cuves, en l'accusant de vols de vins et de cuves intervenus en 2011 qui expliqueraient les distorsions constatées, il ne ressort pas des pièces produites que cette plainte aurait été suivie d'une condamnation pénale ou même de poursuites à l'encontre de l'intéressé. Enfin, si M. B... produit des ordonnances et certificats médicaux pour la période d'avril 2013 à juin 2014, ces pièces ne permettent pas de démontrer que son état de santé l'aurait mis dans l'impossibilité, avant la vérification de comptabilité ayant débuté le 30 septembre 2013, d'appréhender l'ensemble des omissions de recettes répétées depuis 2011. Ainsi, eu égard à l'importance et au caractère répété de ces omissions sur plusieurs années qui ne pouvaient passer inaperçues pour le dirigeant de l'exploitation, l'administration établit le caractère délibéré des manquements reprochés. C'est, par suite, à bon droit que la majoration litigieuse a été appliquée aux droits supplémentaires mis à la charge des requérants.
6. Il résulte de ce qui précède que M. et Mme B... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté leur demande tendant à la décharge de la pénalité pour manquement délibéré appliquée aux cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2012 à 2014.
7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la somme que les requérants demandent sur leur fondement soit mise à la charge de l'Etat qui n'est pas partie perdante dans la présente instance.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. et Mme B... est rejetée.
Article 2 : La requête sera notifiée à M. et Mme C... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.
Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal Sud-Pyrénées.
Délibéré après l'audience du 27 octobre 2022, à laquelle siégeaient :
M. Barthez, président de chambre,
Mme Fabien, présidente assesseure,
M. Lafon, président assesseur.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 8 novembre 2022.
La rapporteure,
M. Fabien
Le président,
A. Barthez
Le greffier,
F. Kinach
La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 20TL02891