Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Les syndicats Sud-Travail et l'Union Syndicale Solidaires ont demandé au tribunal administratif de Montpellier, par deux demandes distinctes, l'annulation de la décision du 22 juillet 2019 par laquelle le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi d'Occitanie a infligé un avertissement à l'entreprise Goujon pour absence de tenue de décompte de temps de travail pour les salariés, et ne l'a pas sanctionnée à raison de l'absence de tenue de document afférent à la durée de présence des stagiaires.
Par une ordonnance n° 1905165-1905166 du 31 décembre 2019, la présidente de la 6ème chambre du tribunal administratif de Montpellier a rejeté les deux demandes.
Procédure devant la cour :
I. Par une requête n° 20TL01215 enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille le 13 mars 2020, puis réenregistrée au greffe de la cour administrative d'appel de Toulouse, et un mémoire en réplique du 28 septembre 2021, le syndicat Sud-Travail représenté par Me Maixant, demande à la cour :
1°) d'annuler cette ordonnance du 31 décembre 2019 ;
2°) d'annuler la décision du 22 juillet 2019 par laquelle le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi d'Occitanie a infligé un avertissement à l'entreprise Goujon pour absence de tenue d'un document de décompte de temps de travail des salariés et a refusé de prononcer une sanction pour absence de tenue d'un document afférent à la durée de présence des stagiaires ;
3°) de mettre à la charge de l'État la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Le syndicat Sud-Travail soutient que :
- contrairement à ce qui a été considéré par l'ordonnance dont l'annulation est demandée, le syndicat a intérêt pour agir contre la sanction prononcée sur le fondement de l'article L. 8115-1 du code du travail ; l'irrecevabilité opposée au syndicat par cette ordonnance procède d'une erreur de fait et de droit, dès lors que le syndicat a vocation à défendre les intérêts des agents de l'inspection du travail, qui sont nécessairement lésés par la décision du 22 juillet 2019 ;
- de plus, l'article 8 de la loi du 13 juillet 1983 donne intérêt pour agir aux syndicats contre les décisions individuelles portant atteinte aux intérêts collectifs des fonctionnaires et les articles L. 2131-1 et L. 2132-3 du code du travail permettent aux syndicats professionnels de se prévaloir d'un intérêt collectif ; l'article 3 des statuts donne compétence au syndicat pour agir dans l'intérêt de ses membres et des agents publics ; en l'espèce, les agents de contrôle de l'inspection du travail sont des agents publics dépendant directement du ministre du travail ; la décision de ne pas infliger une sanction à un employeur porte préjudice aux agents de l'inspection du travail ;
- la décision dont l'annulation est demandée est entachée d'un détournement de pouvoir, dès lors que les sanctions ont vocation à éviter des situations de concurrence déloyale ; les textes imposent aux employeurs d'établir un décompte des durées de présence des stagiaires ;
- cette décision est également entachée d'une incompétence de l'auteur de l'acte, d'une erreur de fait, d'une erreur de qualification juridique des faits, en estimant que l'employeur était de bonne foi, et d'une erreur de droit quant à la question des ressources et des charges de l'employeur.
Par un mémoire en défense, enregistré le 29 juillet 2020, et un mémoire complémentaire du 18 août 2020 le ministre du travail, de l'emploi et de l'insertion conclut au rejet de la requête.
Le ministre soutient qu'ainsi que l'a considéré à bon droit la présidente de la 6ème chambre du tribunal administratif de Montpellier dans son ordonnance du 31 décembre 2019, la demande des syndicats est irrecevable, faute d'intérêt pour agir.
Par une ordonnance du 27 janvier 2022, la clôture d'instruction a été fixée au 28 février 2022.
II. Par une requête n° 20TL01216, enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille le 13 mars 2020, puis réenregistrée au greffe de la cour administrative d'appel de Toulouse, et un mémoire en réplique du 28 septembre 2021, l'Union syndicale solidaires, représentée par Me Maixant, demande à la cour :
1°) d'annuler l'ordonnance du 31 décembre 2019 ;
2°) d'annuler la décision du 22 juillet 2019 par laquelle le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi d'Occitanie a infligé un avertissement à l'entreprise Goujon pour absence de tenue d'un document de décompte de temps de travail des salariés et a refusé de prononcer une sanction pour absence de tenue d'un document afférent à la durée de présence des stagiaires.
3°) de mettre à la charge de l'État la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soulève les mêmes moyens que ceux présentés par le syndicat Sud-Travail dans le cadre de l'instance n° 20TL01215.
Par un mémoire en défense, enregistré le 29 juillet 2020, et un mémoire complémentaire du 18 août 2020 le ministre du travail, de l'emploi et de l'insertion conclut au rejet de la requête.
Le ministre soutient qu'ainsi que l'a considéré à bon droit la présidente de la 6ème chambre du tribunal administratif de Montpellier dans son ordonnance du 31 décembre 2019, la demande des syndicats est irrecevable, faute d'intérêt pour agir.
Par une ordonnance du 27 janvier 2022, la clôture d'instruction a été fixée au 28 février 2022.
Vu les autres pièces de ces deux dossiers.
Vu :
-le code de l'éducation ;
- le code du travail ;
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires
- le code de justice administrative ;
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Pierre Bentolila, président-assesseur,
- et les conclusions de Mme Françoise Perrin rapporteure publique.
Considérant ce qui suit :
1. Les syndicats Sud-Travail et Union Syndicale Solidaires ont demandé au tribunal administratif de Montpellier l'annulation de la décision du 22 juillet 2019 par laquelle le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi d'Occitanie a infligé un avertissement à l'entreprise Goujon pour absence de tenue de décompte de temps de travail pour les salariés, et ne l'a pas sanctionnée à raison de l'absence de tenue de document afférent à la durée de présence d'un stagiaire.
2. Par une ordonnance n° 1905166 du 31 décembre 2019, la présidente de la 6ème chambre du tribunal administratif de Montpellier a rejeté les deux demandes. Le syndicat Sud-Travail et l'Union syndicale solidaires relèvent appel de cette ordonnance par deux requêtes distinctes
Sur la jonction :
4. Les requêtes n° 20TL01215 et n° 20TL01216 sont présentées par deux organisations syndicales contre la même ordonnance. Il y a lieu de les joindre pour statuer par un même arrêt.
Sur le bien-fondé de l'ordonnance attaquée :
5. Aux termes de l'article L. 8115-1 du code du travail, dans sa rédaction résultant de la loi du 10 août 2018 pour un État au service d'une société de confiance applicable en l'espèce: " L'autorité administrative compétente peut, sur rapport de l'agent de contrôle de l'inspection du travail mentionné à l'article L. 8112-1, et sous réserve de l'absence de poursuites pénales, soit adresser à l'employeur un avertissement, soit prononcer à l'encontre de l'employeur une amende en cas de manquement : / 1° Aux dispositions relatives aux durées maximales du travail fixées aux articles L. 3121-18 à L. 3121-25 et aux mesures réglementaires prises pour leur application (...) ". Aux termes de l'article L. 124-14 du code de l'éducation : " La présence du stagiaire dans l'organisme d'accueil suit les règles applicables aux salariés de l'organisme pour ce qui a trait : 1° Aux durées maximales quotidienne et hebdomadaire de présence ; 2° A la présence de nuit ; 3° Au repos quotidien, au repos hebdomadaire et aux jours fériés. Pour l'application du présent article, l'organisme d'accueil établit, selon tous moyens, un décompte des durées de présence du stagiaire. Il est interdit de confier au stagiaire des tâches dangereuses pour sa santé ou sa sécurité ". Aux termes de l'article L. 124-17 du code de l'éducation: " La méconnaissance des articles L. 124-8, L. 124-14 et de la première phrase du premier alinéa de l'article L. 124-9 est constatée par les agents de contrôle de l'inspection du travail mentionnés aux articles L. 8112-1 et L. 8112-5 du code du travail. Les manquements sont passibles d'une amende administrative prononcée par l'autorité administrative. Le montant de l'amende est d'au plus 2 000 € par stagiaire concerné par le manquement et d'au plus 4 000 € en cas de réitération dans un délai d'un an à compter du jour de la notification de la première amende. Le délai de prescription de l'action de l'administration pour la sanction du manquement par une amende administrative est de deux années révolues à compter du jour où le manquement a été commis. L'amende est recouvrée comme les créances de l'État étrangères à l'impôt et au domaine ". Enfin, aux termes de l'article R. 222-1 du code de justice administrative : " (...) Les présidents de formation de jugement des tribunaux (...) peuvent, par ordonnance : (...) 4° Rejeter les requêtes manifestement irrecevables, lorsque la juridiction n'est pas tenue d'inviter leur auteur à les régulariser (...) ".
6. Les sanctions infligées à une entreprise ou les refus de prendre de telles sanctions à l'encontre d'une entreprise ne portent pas atteinte aux prérogatives des agents chargés de l'inspection du travail et n'affectent pas leurs conditions de travail et, en conséquence, les syndicats requérants ne justifient pas d'un intérêt leur donnant qualité pour demander l'annulation tant de la décision du 22 juillet 2019 par laquelle le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi d'Occitanie a infligé un avertissement à l'entreprise Goujon, pour absence de tenue de décompte de temps de travail pour les salariés, que de l'absence de sanction à raison du défaut de tenue de document afférent à la durée de présence des stagiaires. C'est donc à bon droit que la présidente de la 6ème chambre du tribunal administratif de Montpellier a rejeté, par voie d'ordonnance prise sur le fondement du 4° de l'article R. 222-1 du code de justice administrative, pour défaut d'intérêt pour agir, les demandes des syndicats Sud-Travail et Union Syndicale Solidaires tendant à l'annulation des décisions précitées.
7. Il résulte de ce qui précède que les syndicats Sud-Travail et Union Syndicale Solidaires ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté leurs demandes.
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la somme demandée par les syndicats Sud-Travail et l'Union Syndicale Solidaires sur ce fondement soit mise à la charge de l'État.
DÉCIDE :
Article 1er : Les requêtes des syndicats Sud-Travail et Union Syndicale Solidaires sont rejetées.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié aux syndicats Sud-Travail et Union Syndicale Solidaires et au ministre du travail, du plein emploi et de l'insertion.
Délibéré après l'audience du 4 octobre 2022 à laquelle siégeaient :
M. Rey-Bèthbéder, président,
M. Bentolila, président-assesseur,
Mme El Gani-Laclautre, conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 18 octobre 2022.
Le rapporteur,
P. Bentolila
Le président,
É. Rey-Bèthbéder
La greffière
C. Lanoux
La République mande et ordonne au ministre du travail, du plein emploi et de l'insertion en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N°s 20TL01215 et 20TL01216
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