Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. C... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 8 juillet 2021 par lequel le préfet de l'Hérault a rejeté sa demande de titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de destination et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée de quatre mois.
Par un jugement n° 2104182 du 21 octobre 2021, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 22 novembre 2021 sous le n° 21MA04480 au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille et ensuite sous le n° 21TL04480 au greffe de la cour administrative d'appel de Toulouse, M. A..., représenté par Me Werba, avocat, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler l'arrêté du 8 juillet 2021 par lequel le préfet de l'Hérault a rejeté sa demande de titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de destination et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée de quatre mois ;
3°) d'enjoindre au préfet de l'Hérault, à titre principal, de lui délivrer sans délai une carte de séjour temporaire, ou à titre subsidiaire, dans l'attente du réexamen de sa situation, un titre de séjour provisoire, dans un délai de quinze jours suivant la notification du présent arrêt et sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la décision de refus de séjour est insuffisamment motivée ;
- elle est entachée d'erreur de droit dès lors que le préfet n'a pas instruit une demande de régularisation à titre exceptionnel, n'a pas saisi, à ce titre, la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi et lui a opposé l'irrégularité du contrat de travail conclu en qualité d'étudiant ;
- en méconnaissant la spécificité de sa demande de régularisation, le préfet a entaché sa décision d'erreur manifeste d'appréciation ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français est fondée sur une décision de refus de séjour illégale ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;
- la décision fixant le pays de destination et l'interdiction de retour sur le territoire français sont fondées sur une décision portant obligation de quitter le territoire français illégale.
Par un mémoire en défense, enregistré le 8 juillet 2022, le préfet de l'Hérault conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.
Par ordonnance du 20 juin 2022, la clôture d'instruction a été fixée au 13 juillet 2022.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention du 14 septembre 1992 entre le gouvernement de la République française et le gouvernement du Burkina Faso relative à la circulation et au séjour des personnes ;
- l'accord du 10 janvier 2009 entre le gouvernement de la République française et le gouvernement du Burkina Faso relatif à la gestion concertée des flux migratoires et au développement solidaire ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code du travail ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. B... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. A..., de nationalité burkinabé, est entré en France le 4 décembre 2011, muni d'un passeport revêtu d'un visa de long séjour " étudiant ", et a obtenu une carte de séjour temporaire portant la mention " étudiant ", qui a été renouvelée jusqu'au 9 octobre 2019. Il fait appel du jugement du 21 octobre 2021 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 8 juillet 2021 par lequel le l'Hérault a rejeté sa demande de titre de séjour en qualité de salarié, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de destination et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée de quatre mois.
2. La décision portant refus de séjour contestée, qui comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait qui la fondent, y compris au titre de l'admission exceptionnelle au séjour, est suffisamment motivée.
3. Aux termes de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir peut se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention "salarié", "travailleur temporaire" ou "vie privée et familiale", sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1 (...) ".
4. Aux termes de l'article 6 de la convention du 14 septembre 1992 entre le gouvernement de la République française et le gouvernement du Burkina Faso : " Les ressortissants de chacun des États contractants désireux d'exercer sur le territoire de l'autre État une activité professionnelle industrielle, commerciale ou artisanale doivent, outre le visa de long séjour prévu à l'article 4, avoir été autorisés à exercer leur activité par les autorités compétentes de l'État d'accueil ". L'article 10 de cette même convention stipule que : " Pour tout séjour sur le territoire français devant excéder trois mois, les ressortissants burkinabè doivent posséder un titre de séjour. (...) Ces titres de séjour sont délivrés conformément à la législation de l'État d'accueil ".
5. Aux termes de l'article 2.2 de l'accord du 10 janvier 2009 entre le gouvernement de la République française et le gouvernement du Burkina Faso : " (...) b) Sans préjudice des dispositions de la législation française visant à l'exercice de certaines professions, un titre de séjour portant la mention "salarié" est délivré aux ressortissants burkinabé appartenant à l'une des deux catégories définies à l'alinéa ci-après, titulaires d'un contrat de travail visé par l'autorité française compétente sans que soit prise en compte la situation de l'emploi en France, pour l'exercice d'une activité salariée dans l'un des métiers mentionnés sur la liste figurant à l'annexe I. Cette liste peut être modifiée tous les ans par simple échange de lettres entre les Parties. / Le ressortissant burkinabé mentionné à l'alinéa précédent est : - soit un ressortissant burkinabé résidant au Burkina Faso à la date à laquelle est visé le contrat de travail mentionné ci-dessus et titulaire d'un visa pour un séjour d'une durée supérieure à trois mois ; - soit un ressortissant burkinabé justifiant d'une résidence habituelle en France à la date du 20 novembre 2007. c) Pour permettre aux ressortissants burkinabé d'acquérir des compétences professionnelles nouvelles et pour favoriser leur accueil et leur insertion, le nombre de titres de séjour mentionnés au b) susceptibles d'être délivrés chaque année à ces ressortissants est limité à 500. Ce nombre peut être révisé chaque année d'accord Partie au sein du Comité de suivi. d) Les ressortissants des deux Parties qui ne pourraient bénéficier des dispositions prévues au a) pour la seule raison d'un dépassement de la limite chiffrée indiquée au a) peuvent toutefois bénéficier des dispositions de la législation de l'autre Partie relatives à l'immigration professionnelle. / Il en est de même pour les ressortissants burkinabé qui ne pourraient bénéficier des dispositions prévues au b) pour la seule raison du dépassement de la limite chiffrée indiquée au c). (...) ".
6. Ces stipulations de l'accord entre la France et le Burkina Faso se bornent, en ce qui concerne l'admission au séjour des ressortissants burkinabé en qualité de salarié, à fixer les conditions dans lesquelles ces ressortissants peuvent bénéficier, dans la limite d'un contingent annuel, de la délivrance d'un titre de séjour en cette qualité sans se voir opposer la situation de l'emploi en France, et à préciser les conditions d'application des dispositions de droit commun en matière d'immigration professionnelle en cas de dépassement de ce contingent. Si elles ouvrent la possibilité pour les ressortissants burkinabé qui rempliraient l'ensemble des conditions posées par le b) de l'article 2.2, en cas de dépassement du contingent annuel, de bénéficier de l'application des dispositions de la législation nationale, elles n'ont pas pour objet ni pour effet de régir entièrement la situation des ressortissants burkinabé pour l'accès au séjour en qualité de salarié.
7. Par suite, les stipulations de l'accord entre la France et le Burkina Faso du 10 janvier 2009 n'excluent pas l'application de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile relatives à l'admission exceptionnelle au séjour aux ressortissants burkinabé demandant un titre de séjour en qualité de salarié et ne remplissant pas les conditions posées par le b) de l'article 2.2 de l'accord, notamment au regard de la liste des emplois énumérés dans l'accord.
8. Saisie d'une demande de régularisation présentée sur le fondement de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, il appartient à l'autorité administrative de vérifier, dans un premier temps, si l'admission exceptionnelle au séjour par la délivrance d'une carte portant la mention " vie privée et familiale " répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard de motifs exceptionnels, et à défaut, dans un second temps, s'il est fait état de motifs exceptionnels de nature à permettre la délivrance, dans ce cadre, d'une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " ou " travailleur temporaire ". Dans cette dernière hypothèse, un demandeur qui justifierait d'une promesse d'embauche ou d'un contrat de travail, ne saurait être regardé, par principe, comme attestant, par là-même, des " motifs exceptionnels " exigés par la loi. Il appartient, en effet, à l'autorité administrative, sous le contrôle du juge, d'examiner, notamment, si la qualification, l'expérience et les diplômes de l'étranger ainsi que les caractéristiques de l'emploi auquel il postule, de même que tout élément de sa situation personnelle dont l'étranger ferait état à l'appui de sa demande, tel que par exemple, l'ancienneté de son séjour en France, peuvent constituer, en l'espèce, des motifs exceptionnels d'admission au séjour.
9. Il ressort des pièces du dossier, notamment de la motivation de l'arrêté du 8 juillet 2021, que le préfet de l'Hérault, après avoir constaté que M. A..., qui avait fait l'objet d'un refus de séjour et d'une obligation de quitter le territoire français par un arrêté du 5 octobre 2020, qu'il n'avait pas exécuté, était en situation irrégulière sur le territoire national et dépourvu de visa de long séjour, a instruit sa demande au titre de l'admission exceptionnelle au séjour, sur le fondement de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Il n'était pas tenu, à ce titre, de saisir les services du ministère chargé de l'emploi afin que ces derniers se prononcent sur l'autorisation de travail préalablement à ce qu'il soit statué sur la délivrance de la carte de séjour temporaire sollicitée. Il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de l'Hérault aurait refusé l'admission exceptionnelle au séjour de M. A..., en se fondant sur le non-respect par ce dernier des dispositions de l'article L. 422-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qui prévoient que l'activité professionnelle salariée des étrangers faisant des études en France est limitée à 60 % de la durée de travail annuelle. Il s'ensuit que le moyen tiré de l'erreur de droit doit être écarté dans toutes ses branches.
10. M. A..., qui est né le 4 décembre 1988 et qui est entré en France le 4 décembre 2011 pour y poursuivre ses études, est célibataire, sans charge de famille et ne démontre pas être dépourvu d'attaches dans son pays d'origine. Il se borne à se prévaloir de ce qu'il dispose d'un contrat de travail en qualité d'employé de pizzeria depuis le 11 janvier 2018, sans lien avec le diplôme d'aménageur d'espace intérieur dont il est titulaire. Dans ces conditions, il ne ressort pas des pièces du dossier que des considérations humanitaires ou des motifs exceptionnels justifiaient l'admission au séjour de M. A... sur le fondement de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Le moyen tiré de ce que l'arrêté attaqué serait entaché d'erreur manifeste d'appréciation sur ce point doit, par suite, être écarté.
11. Il résulte de ce qui a été dit précédemment que le moyen, dirigé contre la décision portant obligation de quitter le territoire français, tiré de l'illégalité, par voie d'exception, de la décision de refus de titre de séjour doit être écarté.
12. Aucune des circonstances évoquées précédemment n'est de nature à faire regarder la décision portant obligation de quitter le territoire français comme entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de M. A....
13. Il résulte de ce qui a été dit aux points 11 et 12 ci-dessus que le moyen, dirigé contre les décisions fixant le pays de destination et portant interdiction de retour sur le territoire français, tiré de l'illégalité, par voie d'exception, de l'obligation de quitter le territoire français doit être écarté.
14. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande. Doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte ainsi que celles tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D E C I D E :
Article 1er : La requête présentée par M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.
Copie en sera adressée au préfet de l'Hérault.
Délibéré après l'audience du 15 septembre 2022, où siégeaient :
- M. Barthez, président,
- M. Lafon, président assesseur,
- Mme Restino, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 29 septembre 2022.
Le rapporteur,
N. B...
Le président,
A. Barthez
Le greffier,
F. Kinach
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
N°21TL04480 2